Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/918/2024 du 06.12.2024 ( RECUSE ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE PS/91/2024 ACPR/918/2024 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du vendredi 6 décembre 2024 |
Entre
A______, actuellement détenu à la prison de B______ représenté par Me C______, avocat,
requérant,
et
D______, Procureure, p.a. Ministère public, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
citée.
Vu :
- la procédure pénale P/1______/2023 dans laquelle A______ est poursuivi pour diverses infractions, notamment pour avoir, le 30 octobre 2023, dans l’établissement E______, montré son sexe en érection à F______, traité celle-ci de "grosse pute", lui avoir craché dessus et l'avoir menacée de mort; et les 26 juin, 1er juillet et 20 juillet 2024, injurié et menacé la prénommée devant ledit établissement;
- sa détention provisoire ordonnée par le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après, TMC) le 29 septembre 2024, prolongée jusqu'au 26 janvier 2025;
- l'audience de confrontation fixée le 20 novembre 2024 à 9h00;
- la demande de récusation de D______ formée le jour même par le conseil du prévenu, en même temps que sa demande de mise en liberté;
- l'arrêt de la Chambre de céans du 29 novembre 2024 (ACPR/886/2024) rejetant le recours formé contre la décision de refus de mise en liberté.
Attendu que :
- selon la note de D______ figurant au procès-verbal de l'audience, la partie plaignante, F______, était arrivée à l'audience, convoquée à 9h00, à 9h35. À 9h52, alors que l'audience allait commencer, elle a été informée que Me C______ avait, deux minutes plus tôt, quitté les locaux du Ministère public. Malgré plusieurs tentatives, il n'avait pu être joint par téléphone. A______ n'étant pas représenté, seule la partie plaignante a été entendue en application de l’art. 147 CPP;
- dans un courriel envoyé après l'audience, D______ a informé Me C______ que le jour précédent, sa greffière avait tenté en vain de le joindre afin de déterminer quelles pièces il entendait recevoir en copie;
- à teneur de sa demande de récusation, A______ se plaint, par le biais de son conseil, du retard de l'audience. Il s'insurge "contre l'attente d'une heure imposée sans nouvelle aucune, en salle d'attente et respectivement dans le box cellulaire sans fenêtre, sans que le Magistrat instructeur ne daigne adresser la moindre information". Son avocat avait patienté pendant plus de trois quarts d'heure, avant de partir. Outre l'absence de respect témoigné envers celui-ci "qui n'aurait qu'à patienter une heure", A______ soutient que sa dignité était atteinte "s'agissant des conditions d'attente injustement imposées (CST-CH 7)". Pour le reste, il se plaint de son maintien en détention et du fait qu'il n'a pas obtenu, avant l'audience du 20 novembre 2024, les pièces et informations sollicitées.
Considérant, en droit, que :
- la Chambre de céans, autorité de recours au sens de l'art. 20 al. 1 CPP, est compétente pour statuer sur une requête de récusation visant un membre du ministère public (art. 59 al. 1 let. b CPP);
- prévenu à la procédure pendante contre lui (art. 104 al. 1 let. a CPP), le requérant dispose de la qualité pour agir (art. 58 al. 1 CPP);
- conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation; en l'occurrence, la requête, déposée juste après l'audience litigieuse n'est pas tardive;
- selon l'art. 56 CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs que ceux énoncés aux let. a à e, notamment lorsqu'un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention (let. f);
- la procédure de récusation a pour but d'écarter un magistrat partial, respectivement d'apparence partiale, afin d'assurer un procès équitable à chaque partie (ATF 126 I 68 consid. 3a p. 73; arrêt du Tribunal fédéral 1B_430/2021 du 22 octobre 2021 consid. 2.3.2). L'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_621/2011 du 19 décembre 2011; ATF 136 III 605 consid. 3.2.1);
- la récusation n'a pas pour finalité de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction ni de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure. En effet, il appartient aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre (ATF 143 IV 69 consid. 3.2);
- des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention. En revanche, des actes de procédure menés en violation des droits d'une partie peuvent manifester une prévention à l'égard de cette partie (arrêt du Tribunal fédéral 1B_375/2017 du 7 février 2018 consid. 5.3 et 5.4). Il n'y a prévention en raison d'erreurs de procédure que lorsqu'un examen objectif révèle des manquements particulièrement grossiers ou inhabituellement fréquents qui, appréciés dans leur ensemble, constituent une violation grave des devoirs de fonction et se répercutent unilatéralement au détriment de l'une des parties à la procédure (ATF 141 IV 178 consid. 3.3 et 3.5; 138 IV 142;
- en l’occurrence, on peine à voir, dans les deux paragraphes consacrés à la demande de récusation, pour quels motifs la citée devrait être récusée;
- l'audience de confrontation n'a pas pu commencer à l'heure fixée en raison du retard de la partie plaignante, ce dont la citée ne saurait être tenue pour responsable. Par ailleurs, quand bien même A______ aurait attendu pendant une heure, sans avoir de nouvelles, dans un box cellulaire dépourvu de fenêtre, de telles conditions – même si elles sont désagréables – restent une gêne temporaire et ne peuvent atteindre l'intensité requise permettant de retenir une atteinte à sa dignité humaine (art. 7 Cst.), l'intéressé ne l'établissant au demeurant aucunement;
- dès lors, même si l'attente ne le satisfaisait pas, elle ne peut pour autant être un motif de récusation de la Procureure. L'audience, commencée peu après l'arrivée de la partie plaignante, a dû toutefois être tenue hors la présence du prévenu, en raison du départ intempestif de son conseil, qui n'a pas répondu aux appels du Ministère public;
- le grief lié au maintien en détention du requérant n'est pas non plus un motif de récusation, la voie du recours étant ouverte pour s'en plaindre, étant rappelé que la Chambre de céans vient de statuer sur ce point (ACPR/886/2024);
- s'agissant d'une restriction d'accès au dossier, il lui appartient également d'agir au moyen des voies de droit idoines ou, à tout le moins, de répondre aux questions du Ministère public sur les pièces qu'il entend recevoir;
- la requête de récusation, dénuée de tout fondement, sera donc rejetée;
- au vu de ce qui précède, il n’y avait pas à demander à la magistrate concernée de prendre position avant de statuer (arrêts du Tribunal fédéral 7B_1/2024 du 28 février 2024 consid. 5.2. et 1B_196/2023 du 27 avril 2023 consid. 4 et les références);
- le requérant, qui n'a pas gain de cause, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 59 al. 4 et 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette la requête en récusation.
Met à la charge de A______ les frais de la procédure, arrêtés à CHF 800.-.
Notifie le présent arrêt, en copie, à A______, soit pour lui son conseil et à la Procureure D______.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Séverine CONSTANS, greffière.
La greffière : Séverine CONSTANS |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).
PS/91/2024 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur récusation (let. b) | CHF | 715.00 |
Total | CHF | 800.00 |