Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/687/2024 du 24.09.2024 sur ONMMP/3514/2024 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/9291/2024 ACPR/687/2024 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du mardi 24 septembre 2024 |
Entre
A______, domicilié ______, agissant en personne,
recourant,
contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 12 août 2024 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a. Par acte expédié le 19 août 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 12 août précédent, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 10 avril 2024.
Le recourant ne prend pas de conclusions.
b. Il a versé les sûretés en CHF 800.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
A______ a déposé plainte pénale le 10 avril 2024 "contre l'utilisateur du numéro +41_1______".
Il avait mis en vente un véhicule sur le site internet B______.ch. Le 20 décembre 2023, un dénommé C______ avait remporté les enchères pour la somme de CHF 8'100.-. Cet homme – d'après la voix sur ses messages vocaux – l'avait ensuite contacté via WhatsApp avec le numéro précité, qui différait de celui figurant sur son compte B______.ch. Il allait payer et venir récupérer le véhicule au début de l'année 2024. Toutefois, il ne lui avait plus donné de nouvelles.
Il devait poursuivre l'utilisateur du numéro +41_1______ – qui n'avait pas respecté le contrat et fourni une fausse identité – conformément aux indications figurant sur l'annonce, à savoir: "Les enchérisseurs farceurs seront poursuivis en justice et des dommages-intérêts seront versés pour non-exécution du contrat de vente réclamés à hauteur de 20% de la valeur de la vente aux enchères". L'achat de l'article constituait un contrat de vente juridiquement contraignant selon la législation suisse (art. 184 al. 1 CO).
C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que le différend dénoncé s'inscrivait dans le cadre d'un litige civil, plus précisément contractuel, et ne saurait être constitutif d'une infraction pénale.
D. a. À l'appui de son recours, A______ expose que l'inconnu en question lui avait volontairement donné de fausses adresse et identité, ce qui était pénalement répréhensible et empêchait toute poursuite civile. L'intéressé n'avait pas respecté le contrat et il entendait lui demander des dommages-intérêts.
b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. 1.1. Le recours a été interjeté selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du plaignant (art. 104 al. 1 let. b CPP).
1.2. Même en l'absence de conclusions formelles, le recours, formé par un justiciable en personne, sera ici considéré comme suffisamment motivé, au sens de l'art. 385 CPP.
Partant, le recours est recevable.
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. Le recourant reproche au Ministère public de n'être pas entré en matière sur sa plainte.
3.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.
3.2. Une non-entrée en matière s'impose par ailleurs lorsque le litige est de nature purement civile (ATF 137 IV 285 consid. 2.3).
3.3.1. Selon l'art. 146 al. 1 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit pas. Il faut encore qu'elle soit astucieuse. Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 CP, lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 147 IV 73 consid. 3.2 p. 78 ss).
3.3.2. Quant à l'art. 147 al. 1 CP, il punit celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura, en utilisant des données de manière incorrecte, incomplète ou indue ou en recourant à un procédé analogue, influé sur un processus électronique ou similaire de traitement ou de transmission de données et aura, par le biais du résultat inexact ainsi obtenu, provoqué un transfert d'actifs au préjudice d'autrui ou l'aura dissimulé aussitôt après.
L'infraction est dirigée contre le patrimoine. Elle s'applique en premier lieu au cas de celui qui utilise de manière illégale des cartes de débit ou de crédit à des distributeurs automatiques d'argent et qui, ainsi, parvient à atteindre le résultat escompté en agissant de façon punissable. L'emploi d'une carte de bancomat par une personne non autorisée est ainsi un cas d'application typique de l'art. 147 CP. Ce n'est pas l'emploi en tant que tel de données de façon indue, respectivement illégale, qui est décisif, mais plutôt le résultat de cet emploi, s'il aboutit à un traitement informatique ou à une transmission de données inexacts. Sont notamment concernés les cas où il y a usage de données de mauvaise foi, par l'intermédiaire d'employés, d'organes, etc., au préjudice de leur propre entreprise ainsi que des accès, illégalement créés, à des services téléphoniques payants. Ceci n'est possible que par la violation de codes de clearing, respectivement d'autres fichiers logés dans des serveurs de sociétés de télécommunication, ou par le recours à des codes et numéros de cartes appartenant à autrui ; cependant, tout type de comportement de ce type est désormais punissable (ATF 129 IV 315 consid. 2.2.1 = JdT 2005 IV 9).
3.3.3. Selon l'art. 179decies CP, est punissable, sur plainte, quiconque utilise l’identité d’une autre personne sans son consentement dans le dessein de lui nuire ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite.
3.4. En l'espèce, le recourant allègue qu'un homme, a priori, aurait donné une fausse identité sur le site de vente en ligne B______.ch et aurait, aux termes d'enchères, acquis pour le prix de CHF 8'100.- le véhicule qu'il mettait en vente. Ledit véhicule n'a jamais été livré ni son prix acquitté.
Quand bien même le potentiel acheteur n'est en l'occurrence pas allé au bout de sa démarche d'achat, ceci ne signifie pas encore que le recourant ait été victime d'une tromperie de sa part, ni a fortiori astucieuse, telle que requise par l'art. 146 CP. Par ailleurs, la condition d'avoir déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires n'est pas non plus réalisée. En effet, le recourant n'allègue ni n'étaye avoir subi un quelconque dommage, autre que celui qu'il estime pouvoir réclamer à titre de dommages-intérêts pour la non-exécution du contrat. Ce constat vaut également pour une infraction à l'art. 147 al. 1 CP, en l'absence de tout transfert – ni de tentative de transfert – d'actifs au préjudice du recourant.
Le recourant n'est pour le surplus pas le titulaire du bien juridique protégé par l'art. 179decies CP qui est celui dont l'identité a été usurpée et non pas, comme dans cette affaire, le tiers – le recourant – auquel cette apparente fausse identité a été opposée.
En définitive, et comme le recourant le concède lui-même, la problématique de cette transaction en ligne est exclusivement de nature civile. Le recourant ne saurait obtenir par le biais d'une plainte pénale, ou d'un recours, l'identité d'un raccordement téléphonique utilisé par la personne avec laquelle il a été en contact dans le cadre de cette transaction, alors qu'il n'existe aucun soupçon de commission d'une infraction pénale.
4. Le recours s'avère mal fondé et sera rejeté.
5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.
Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant ainsi qu'au Ministère public.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.
La greffière : Arbenita VESELI |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).
P/9291/2024 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 715.00 |
Total | CHF | 800.00 |