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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/17324/2023

ACPR/663/2024 du 11.09.2024 sur OTMC/2508/2024 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : RISQUE DE COLLUSION;RISQUE DE FUITE
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17324/2023 ACPR/663/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 11 septembre 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me Shayan FARHAD, avocate, FARLEGAL, Cours de Rive 2, case postale, 1211 Genève 3,

recourant,

 

contre l'ordonnance de refus de mise en liberté rendue le 20 août 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte déposé le 30 août 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 20 précédent, notifiée le 23 suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a refusé sa mise en liberté.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, principalement à sa mise en liberté immédiate; subsidiairement, à ce qu'elle soit assortie des mesures de substitution qu'il propose.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ a été arrêté provisoirement le 3 août 2024, après avoir été placé sous avis de recherche et d'arrestation délivré par le Ministère public puis extradé depuis la Belgique. Le 7 suivant, le TMC a ordonné sa mise en détention provisoire jusqu'au 4 octobre 2024.

L'intéressé est prévenu de meurtre, subsidiairement de mise en danger de la vie d'autrui, pour avoir, du 30 juillet au 4 août 2023, à l’occasion d'une session spirituelle de guérison qu'il animait au sein de la Paroisse D______, à Genève, convaincu C______ qu'elle était guérie du diabète par la puissance divine et pouvait cesser tout traitement et régime alimentaire particulier, mettant sans scrupules celle-ci en danger de mort imminent. C______, après avoir cessé de s'injecter de l'insuline, de suivre le régime alimentaire indiqué et arraché son capteur de glycémie, est décédée d'une décompensation diabétique dans la nuit du ______ au ______ août 2023.

b. L'intéressé conteste les faits. En aucun cas il n'aurait incité C______ à arrêter son traitement pour le diabète.

b.a. À la police, il a déclaré être ressortissant indien domicilié dans ce pays. Il était marié, avait deux filles majeures et était titulaire d'un bachelor en ______ ainsi que d'un certificat pour prêcher la parole de Dieu délivré par l'église de E______ [Inde]. Il gagnait environ EUR 1'300.- par mois comme directeur de ventes dans un magasin. Il animait des retraites spirituelles à l'étranger, gratuitement. La Fondation F______ à laquelle il appartenait lui payait ses billets d'avion.

Lors de la retraite spirituelle qui s'était tenue à Genève du 30 juillet au 4 août 2023, il avait "enseigné". Un traducteur était présent. Il ne connaissait aucun des participants. Ces derniers venaient car ils souffraient de maladies. Il avait prêché la parole du Christ. Lorsque la personne écoutait et y croyait, elle était guérie par l'Esprit Saint. Il réfutait avoir critiqué les médecins ou les médicaments. Les médicaments et l'enseignement allaient ensemble. C______ et son mari avaient participé à la totalité du séminaire et pris très attentivement des notes.

b.b. Devant le Ministère public, le 5 août 2024, le prévenu a confirmé ses précédentes déclarations. Ce n'était pas lui qui guérissait les participants, mais Dieu. Parfois, la guérison était immédiate. Il n'avait jamais dit aux gens d'arrêter leurs médicaments. Il ne leur disait pas non plus de ne plus aller chez le médecin. Confronté au message WhatsApp adressé par C______ à sa fille, G______, le 5 août 2023, dans lequel elle lui annonçait qu'elle était guérie du diabète, par la croix de Jésus et sur la parole de Dieu, et qu'elle s'était débarrassée depuis trois jours des piqûres de glycémie, qu'elle mangeait de tout et avait arrêté l'insuline, le prévenu a déclaré ne pas lui avoir dit "de faire toutes ces choses". Il lui avait dit que par la parole de Jésus elle était guérie spirituellement. Il ne se rappelait pas que, selon un participant au séminaire, H______, C______ s'était levée et avait déclaré devant tout le monde qu'elle était guérie, sur quoi il aurait demandé à son mari s'il était également guéri.

c. La police a notamment procédé à l'audition, le 18 juin 2024, de I______, alias Sœur J______. En substance, elle a déclaré que la retraite spirituelle du 30 juillet au 4 août 2023 avait été organisée par K______ et L______. La première nommée lui avait expliqué que cette retraite était de la "guérison uniquement avec la parole de Dieu". Elle n'y avait assisté que très partiellement. A______ s'y était exprimé en anglais, K______ traduisant ses propos. L'intéressé s'était présenté comme un guérisseur. Il présentait la guérison comme quelque chose d'absolu et qui allait se réaliser si on y croyait suffisamment. Ce message la dérangeait car trop catégorique. Le premier soir de la retraite, C______, qu'elle connaissait depuis plusieurs années pour fréquenter l'église, avait pris la parole à deux reprises pour déclarer qu'elle souffrait du diabète mais A______ l'avait ignorée. Elle trouvait que A______ était trop théâtral lors des scènes de guérison. À la question de savoir si concrètement il disait aux participants qu'ils étaient guéris, elle a répondu qu'il demandait aux participants, après qu'ils avaient répété la parole de Dieu, s'ils allaient mieux et, s'ils disaient oui, alors il disait qu'ils étaient guéris. Les retraites spirituelles étaient filmées et mises sur YouTube. Après le décès de C______, K______ l'avait appelée pour lui dire que L______ était "dans tous ses états" et voulait supprimer la vidéo de la retraite de Genève où apparaissait C______. Elle voulait son avis sur la question. Elle lui avait répondu que A______ n'avait qu'à assumer ses actes. C______ et son mari avaient été les seuls participants à assister à l'entièreté de la retraite spirituelle et le dernier jour, ils auraient été les seuls présents avec A______ et K______. Le 4 août 2023, C______ l'avait avisée par téléphone qu'elle était guérie. La précitée avait essayé de la joindre le dimanche 6 août 2023. Elle avait appris après le décès de C______ que le dimanche en question, cette dernière avait longuement parlé au téléphone avec K______, lui aurait dit qu'elle avait fait un malaise et qu'en réponse, K______ l'avait invitée à prier avec elle. Elle pensait que si C______ n'avait pas assisté à cette retraite spirituelle, elle ne serait pas décédée (rapport de renseignements de la police du 18 juin 2024).

d. À teneur des messages WhatsApp échangés en anglais entre K______ et une dénommée "M______" [prénom] le 9 août 2024, au sujet du décès de C______, la première nommée demandait à la seconde de ne rien dire à personne et que seule "Aunty L______", soit L______, et elle-même étaient au courant. K______ indiquait ensuite que C______ avait complètement arrêté de prendre son traitement, malgré le fait qu'"ils" lui avaient dit d'y aller doucement. K______ se confiait en disant qu'elle était perturbée ("disturbed") de ne pas avoir insisté auprès de C______ et lui dire de ne pas arrêter son traitement. Selon elle, il était impossible que C______ soit complètement "guérie de tout" (cf. rapport de renseignements de la police du 15 juillet 2023).

e. Le Ministère public a procédé à l'audition des personnes suivantes, à l'audience du 13 août 2024 :

- K______ a confirmé que L______ avait invité A______. Le dernier jour, C______ avait dit à tout le monde qu'elle était guérie. Elle avait traduit ses propos en anglais. Elle ne se souvenait plus avoir discuté avec Sœur J______ de l'idée de retirer d'internet les vidéos dans lesquelles apparaissait C______. Elle se rappelait toutefois que L______ voulait absolument enlever ces vidéos. Elle ignorait pourquoi. Après la retraite, le dimanche soir ou après-midi, il y avait eu une session en ligne avec A______ à laquelle C______ avait participé. Elles s'étaient ensuite parlé au téléphone et la précitée lui avait dit aller bien. Confrontée aux déclarations de I______ selon lesquelles, lors de cette conversation, C______ lui aurait dit avoir fait un malaise, K______ a indiqué ne pas s'en souvenir. Confrontée aux messages échangés avec "M______" et à la question de savoir comment elle avait appris que C______ ne prenait plus ses médicaments, elle a répondu ne pas se souvenir si c'était L______ ou Sœur J______ qui le lui avait dit. Elle ne se rappelait pas du message disant qu'elle se sentait perturbée de ne pas avoir insisté auprès de C______ pour qu'elle n'arrête pas son traitement. Elle a ajouté n'avoir jamais traduit des propos de A______ disant aux participants d'arrêter leurs médicaments;

- N______, une participante au séminaire, a confirmé qu'à la fin de la session, C______ avait déclaré être guérie;

- L______, qui avait admis avoir participé à la retraite et organisé celle-ci avec la famille de K______ (cf. ses déclarations à la police du 22 avril 2024), a déclaré avoir assisté, lors de l'évènement, à la guérison d'une dame qui, après avoir entendu la parole de Dieu, avait "commencé à marcher, ou peut-être pas à marcher mais elle se sentait mieux". Un matin, C______ avait parlé avec A______ et elle-même avait traduit leur conversation car l'intéressée ne parlait pas l'anglais. C______ lui avait dit avoir une "machine", soit un petit gadget avec des numéros, et A______ lui avait dit de continuer ce qu'elle faisait avec sa machine, de ne rien interrompre. Elle ne se souvenait pas si C______ avait dit qu'elle était guérie ou avait parlé d'un patch qu'elle avait enlevé. A______ avait financé son voyage à Genève et lui avait proposé de lui rembourser les frais de location de la salle, mais elle avait refusé. S'agissant de sa conversation avec K______ au sujet des vidéos, elle estimait qu'il était mieux qu'on ne voie pas les époux O______/C______, C______ étant décédée et son époux n'allant pas bien. Ce n'était pas A______ qui avait demandé la suppression des vidéos sur YouTube. Elle n'avait aucunement entendu le précité parler négativement de la médecine et des médecins ni, durant la retraite de 2023, dire aux participants de ne pas prendre leurs médicaments;

- O______ a déclaré que son épouse lui avait dit s'être confiée à A______ et que celui-ci lui avait dit qu'elle était guérie. Il avait proposé à son épouse d'appeler un médecin le jour avant son décès mais elle n'avait pas voulu, disant qu'elle était guérie. Il avait lui-même participé tous les jours à la retraite, pour faire plaisir à son épouse. À un moment donné, son épouse avait parlé seule à seul à A______. Ce dernier était, après le repas, venu vers eux et avait dit à son épouse de revenir vers lui, qu'il allait la guérir complètement.

f. Une audience est fixée au 27 septembre prochain pour entendre G______ et une autre audience au 1er octobre pour entendre la Dre P______ – diabétologue qui suivait C______ –, H______, I______ et Q______.

C. Dans son ordonnance, le TMC retient l'existence de charges suffisantes et graves ainsi que l'existence des risques de fuite, collusion et réitération, renvoyant à cet égard à son ordonnance de mise en détention provisoire motivée du 7 août 2024, contre laquelle le prévenu n'avait pas recouru. Aucun nouvel élément justifiant une reconsidération des critères justifiant la détention avant jugement du prévenu n'était intervenu depuis lors. En particulier, les déclarations de K______, N______, L______ et O______ à l'audience d'instruction du 13 août 2024 n'avaient pas annihilé les charges, notamment pas celles de K______ (qui avait menti aux sujet des guérisons lors de la première partie de son audition) et de L______, que le TMC mettait en évidence et les conséquences qu'il en tirait en termes de lien de causalité, dont l'examen appartiendrait au juge du fond. En l'état, il existait des indices sérieux contre le prévenu d'avoir amené C______, qu'il avait convaincue de sa guérison, à interrompre son traitement médical, ce qui avait conduit à son décès. L'instruction se poursuivait avec l'audition de la Dre P______, l'analyse du matériel informatique du prévenu – étant relevé l'existence d'une procédure en cours de levée des scellés – et l'analyse du téléphone de C______. Aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre le but de la détention. L'obligation qui serait faite au prévenu de déposer son passeport en mains des autorités était insuffisante à pallier le risque de fuite, dès lors qu'elle ne l'empêcherait pas de quitter le territoire suisse pour se soustraire à la suite de la procédure, quand bien même il aurait consenti à son extradition vers la Suisse une fois arrêté en Belgique. L'interdiction de s'entretenir avec les participants à la session qui n'avaient pas encore été entendus était également clairement insuffisante au vu des enjeux pour le prévenu, le respect de cette mesure ne pouvant pas être concrètement vérifié.

D. a. À l'appui de son recours, le prévenu conteste les charges. C______ avait cessé ses injections d'insuline avant sa prétendue interaction avec lui. Il ne l'avait donc pas influencée. Les auditions du 13 août 2024 établissaient qu'il lui avait explicitement conseillé de continuer son traitement. Or, le TMC n'en avait pas tenu compte. Il n'existait aucun risque de fuite sérieux et concret. Bien que ressortissant indien, il n'avait pas de visa Schengen valable ni le réseau et les ressources logistiques pour organiser sa fuite hors de Suisse. Il souhaitait coopérer avec la justice et prouver son innocence. Cela était d'autant plus vrai qu'il s'était rendu à Genève en mars 2024 alors qu'il était au courant que C______ était décédée en août 2023. Subsidiairement, la saisie de ses documents d'identité, déjà en mains de la justice, éventuellement couplée à l'obligation de communiquer son adresse exacte en Suisse aux autorités de poursuite ainsi qu'à se rendre une à deux fois par semaine dans un commissariat de police, permettraient de pallier le risque de fuite. Le risque de collusion faisait défaut. Les participants à la retraite d'août 2023 avaient été identifiés et entendus par la police, voire également par le Ministère public. Les témoins qui seraient entendus le 1er octobre prochain l'avaient déjà été par la police; quant à Q______, il n'avait jamais été en contact avec elle. Subsidiairement, une interdiction de contact avec les personnes identifiées serait suffisante. Le risque de réitération devait être écarté. Il n'avait pas d'antécédents judiciaires et les faits reprochés ne s'inscrivaient pas dans un contexte dénotant un potentiel de violence ou de dangerosité de sa part. Le cas échéant, une interdiction d'animer des séminaires et/ou des retraites en Suisse pourrait pallier ce risque.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours, sous suite de frais. Il ressortait des enregistrements vidéos des deux premiers jours de la session spirituelle que A______ guérissait des malades sous les yeux de C______, étant précisé que celui-ci expliquait avoir été diagnostiqué diabétique à 17 ou 19 ans et guéri par la parole divine à l'âge de 33 ans. G______ avait déclaré à la police, le 16 octobre 2023, que le quatrième jour du séminaire, soit le 2 août 2023, A______ avait dit à sa mère qu'elle était guérie. Dans un e-mail subséquent à la police, elle pensait que sa mère avait arrêté ses injections le 2 août 2023 puis arraché son capteur de glycémie le 4 août 2023. L'arrêt de son traitement par C______, le 2 août 2023, était compatible avec le message WhatsApp qu'elle avait adressé à sa fille le 5 août 2023, dans lequel elle écrivait que cela faisait 3 jours qu'elle avait arrêté les piqûres et les prises de glycémie. Rien ne permettait ainsi de retenir que C______ avait interrompu ses injections d'insuline avant de penser qu'elle était guérie.

Le visionnement des six heures de vidéo de la session s'étant déroulée à Genève montrait une dizaine de "guérisons". A______ faisait croire aux participants qu'ils étaient guéris. À aucun moment, il n'abordait la question de leur suivi médical. Des témoins affirmaient que le précité aurait dit à C______ d'imaginer le chiffre qu'elle voulait sur son glucomètre, ce qui signifiait qu'elle pouvait interrompre ses injections d'insuline quel que soit le taux affiché par l'appareil. D'autres témoins (H______, K______ et O______) affirmaient que C______ avait déclaré qu'elle était guérie. En l'état de l'enquête, il était ainsi très probable que A______ ait expliqué à C______ qu'elle devait croire qu'elle était guérie, et que dès l'instant où elle y croirait, elle serait guérie par la puissance divine. C______ s'étant crue guérie – A______ ayant réussi à l'en convaincre –, elle avait cessé de s'injecter de l'insuline.

Il existait un risque de fuite, rien ne retenant le prévenu en Suisse, ce d'autant qu'il y était exposé à une peine de prison d'une certaine importance. Rien ne l'empêchait au demeurant de se faire établir un nouveau passeport indien et quitter l'espace Schengen.

L'intéressé ne fournissait pas la moindre preuve d'un emploi en Inde. Les sessions de guérisons semblaient être sa seule activité, qu'il dispensait en différents points du globe. Le risque qu'il réitérât ses actes, en Suisse ou ailleurs dans le monde, était ainsi particulièrement élevé.

Les enregistrements vidéos des derniers jours de la session n'étaient pas en mains des autorités. Il convenait d'éviter que le prévenu ne cherche à les faire disparaître d'internet. L'enquête se poursuivait en outre pour identifier et auditionner l'ensemble des participants. Il fallait éviter que le prévenu ne puisse les contacter pour influer sur leurs déclarations.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance.

d. A______ réplique et persiste dans ses conclusions. C______ n'avait pas participé au séminaire pour guérir de son diabète, mais pour d'autres maux, moins graves. Si tel avait été le cas, elle en aurait parlé. Or, cela n'était aucunement visible dans les séquences vidéos. Il était également faux d'affirmer que la retraite de 2023 à Genève ne traitait que du thème de la guérison. Le Ministère public n'échafaudait que des hypothèses. À aucun moment il n'avait prétendu lors du séminaire, en relation avec son propre diabète diagnostiqué à l'époque, qu'il aurait refusé un traitement médical ou cessé la prise de médicaments. La déduction selon laquelle le terme de guérison impliquait nécessairement l'interruption de la prise de médicaments était totalement spéculative. Elle était d'ailleurs démentie par une séquence de l'enregistrement vidéo où on l'entendait dire à une participante d'aller chez son médecin. Les déclarations de O______ n'étaient pas fiables, celui-ci, octogénaire, semblant être sénile. Les éléments du dossier démontraient qu'il avait expressément conseillé à C______ de ne rien interrompre. Le lien de causalité faisait défaut.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant conteste les charges qui, selon lui, ne seraient plus suffisantes ensuite de l'audience du 13 août dernier.

2.1. Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2. En l'espèce, on ne décèle pas que les charges pesant contre le prévenu se seraient amoindries depuis sa mise en détention provisoire ordonnée par le TMC le 7 août 2024, contre laquelle il n'a pas recouru. Les déclarations de K______ – dont la mémoire semble au demeurant quelque peu défaillante lorsqu'elle est interrogée sur des points sensibles tels le retrait des vidéos d'internet, le malaise dont lui aurait fait part C______ au téléphone peu avant son décès ainsi que le message échangé avec "M______" dans lequel elle paraissait admettre une part de responsabilité dans le décès de la précitée – et L______ à l'audience du 13 août 2024 doivent être appréciées, en l'état, avec retenue, compte tenu de leur rôle d'organisatrices du séminaire auquel C______ a participé. Qu'elles prétendent n'avoir jamais entendu le prévenu dire aux participants d'arrêter leurs médicaments n'apparaît ainsi pas significatif, ce d'autant que le prévenu semble avoir parlé en tête-à-tête avec la précitée. Selon en outre O______ – dont rien ne permet d'affirmer à ce stade qu'il serait atteint de démence ou sénilité –, le prévenu avait affirmé à son épouse qu'il allait la guérir. Il existe dès lors toujours des indices suffisants que le prévenu aurait convaincu C______ qu'elle était désormais guérie et que, cette dernière le croyant, elle aurait cessé son traitement contre le diabète et ses injections d'insuline.

Il appartiendra quoiqu'il en soit au juge du fond – et non au juge de la détention – d'examiner les éléments de preuve à charge et à décharge et, partant, l'absence éventuelle d'un lien de causalité entre les faits reprochés au prévenu et le décès de la victime.

Le grief est dès lors infondé.

3. Le recourant conteste le risque de collusion.

3.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

3.2. En l'occurrence, le Ministère public cherche encore à mettre la main sur la totalité des enregistrements vidéos de la session spirituelle du 30 juillet au 4 août 2023 à Genève – seule une partie ayant été mise en ligne sur internet – et à identifier l'ensemble des participants. Certaines participantes visibles sur les vidéos disponibles (cf. rapport de police du 15 juillet 2023) ne semblent du reste toujours pas avoir été identifiées. Le prévenu pourrait ainsi, s'il était remis en liberté, compromettre la recherche de la vérité en faisant disparaître des preuves ou en contactant des participants aux fins de les inciter à déposer en sa faveur.

Si un risque de collusion avec les personnes qui seront entendues prochainement par le Ministère public apparaît improbable en ce qui concerne la Dre P______ et la fille de C______, et peut être qualifié de faible en ce qui concerne H______ – compte tenu de ses déclarations à la police –, ce risque est plus concret en ce qui concerne I______, eu égard à ses déclarations plutôt défavorables au prévenu, faites à la police. Un risque de pression n'est ainsi pas exclu. Quant à Q______, qui serait une participante au séminaire, elle n'a jamais été entendue par la police. Il convient dès lors d'éviter que le recourant ne puisse également faire pression sur elle.

Une interdiction signifiée au prévenu de contacter ces personnes n'apparaît pas suffisante au vu de l'enjeu pour lui.

4. Le recourant conteste le risque de fuite.

4.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2. En l'espèce, le prévenu est ressortissant indien domicilié en Inde, où il a toute sa famille. Comme relevé par le Ministère public, rien ne le retient en Suisse. Le risque qu'il retourne en Inde et ne se présente pas pour les futurs actes d'instruction, ainsi qu'à l'audience de jugement, est ainsi très concret. Dans ces conditions, peu importe que l'intéressé prétende n'avoir pas de visa Schengen valable. Il pourrait parfaitement quitter la Suisse par voie terrestre, le cas échéant, et faire établir un nouveau passeport. On ignore en outre quelles sont ses ressources financières, lesquelles pourraient lui permettre d'assurer sa fuite, en Inde ou dans un autre pays, étant relevé que, de par les sessions spirituelles qu'il dit dispenser à travers le monde, il est parfaitement plausible qu'il bénéficie d'un réseau de personnes pouvant le soutenir et l'aider en cas de besoin.

Aucune des mesures de substitution, au sens de l'art. 237 al. 1 CPP, qu'il propose n'est à même de pallier cet important risque de fuite, tels le dépôt de ses documents d'identité, l'obligation de fournir une adresse en Suisse et l'obligation de se présenter régulièrement à un poste de police, au vu de ce qui précède, étant relevé que dites mesures ne seraient pas aptes à empêcher sa fuite par voie terrestre, mais permettraient seulement de la constater a posteriori.

5. Les risques de collusion et de fuite étant réalisés, l'autorité de recours peut se dispenser d'examiner si le risque de réitération l'est également (arrêt du Tribunal fédéral 7B_188/2024 du 12 mars 2024 consid. 6.3.1).

6. La durée de la détention provisoire subie à ce jour respecte le principe de la proportionnalité, eu égard à la gravité des infractions reprochées au recourant et à la peine qu'il encourt concrètement si les faits devaient être retenus par l'autorité de jugement.

7. Le recours s'avère ainsi infondé et sera rejeté.

8. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/17324/2023

ÉTAT DE FRAIS

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

 

 

 

 

Total

CHF

1'005.00