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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/60/2024

ACPR/650/2024 du 02.09.2024 ( RECUSE ) , REJETE

Descripteurs : RÉCUSATION
Normes : CPP.56

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/60/2024 ACPR/650/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 2 septembre 2024

 

Entre

 

A______, domicilié c/o B______, ______, agissant en personne,

requérant,

 

et

 

C______, juge au Tribunal de police, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715,
1211 Genève 3,

cité.

 


Vu :

- la procédure pénale P/1______/2021 dans laquelle A______ a été renvoyé en jugement devant le Tribunal de police, présidé par le juge C______, pour violation d'une obligation d'entretien (art. 217 al. 1 CP) au préjudice de son épouse, D______,

- l'audience de jugement fixée au 13 août 2024,

- la demande de récusation déposée le 7 août 2024 par A______ contre C______, complétée par lettre motivée du lendemain,

- l'arrêt de la Chambre de céans du 27 août 2024 (ACPR/632/2024) déclarant ladite requête irrecevable,

- la demande de récusation formée à l'audience de jugement du 13 août 2024 par A______ contre C______, qui l'a transmise à la Chambre de céans, accompagnée du procès-verbal d'audience,

- le courrier motivé daté du 14 août 2024, reçu le surlendemain au greffe universel, dans lequel A______ expose les motifs à l'appui de sa nouvelle demande de récusation,

- le pli de l'intéressé expédié le 17 août 2024 à la Chambre de céans.

Attendu que :

- en début d'audience, C______ a rejeté les questions préjudicielles que A______ lui avait déjà soumises par courrier du 5 juillet 2024 et qu'il avait refusées dans ses courriers des 11 juillet 2024 (soit l'enregistrement de l'audience et l'audition de plusieurs témoins), renvoyant à ces écritures,

- il est encore protocolé au procès-verbal d'audience du 13 août 2024 (p. 3), que A______ considérait que C______, dont il avait déjà demandé la récusation, violait ses droits. Il désirait également dicter lui-même sa déposition. Le Tribunal l'avait alors informé que lui seul était chargé du procès-verbal de l'audience,

- il est ensuite mentionné au procès-verbal (p. 8), dans la bouche de A______ s'adressant à C______ : "Je demande formellement à nouveau votre récusation au motif que vous ne connaissez pas le droit, que votre dossier est incomplet et que vous ne me donnez pas la possibilité de me défendre",

- dans ses courriers subséquents des 14 et 17 août 2024, A______ se plaint, sur plus de vingt pages, du manque d'impartialité et d'indépendance dont aurait fait preuve le cité avant, pendant et après l'audience du 13 août 2024. Celui-ci était incompétent et de mauvaise foi. Il requérait l'annulation de cette audience "illicite", ses "droits constitutionnels aliénables" ayant été bafoués. C______ avait élaboré une "mise en scène" pour étouffer la vérité et le condamner "à tout prix". En substance, ses demandes formulées avant l'audience par plis des 22 avril et 4 juillet 2024 (report de l'audience, illégitimité de l'avocat de D______, auditions de témoins et enregistrement de l'audience) avaient été refusées "sans aucune motivation". Il n'avait pas pu dicter ses déclarations à la greffière. Le procès-verbal d'audience "ne v[alait] rien". Il avait été interrogé sur des questions "déjà abordées", principalement sa situation personnelle. C______ avait dicté des phrases qu'il n'avait pas prononcées pour essayer de le "compromettre". L'accusation dont il faisait l'objet n'était pas claire. C______ n'avait pas examiné si l'ordonnance pénale à laquelle il avait fait opposition était solide. L'avocat de la partie plaignante n'avait pas de procuration valable, ce que le magistrat cité n'avait pas examiné. C______ l'avait forcé à signer le procès-verbal d'audience sans qu'il ne puisse le lire d'abord, aux fins "sans aucun doute" d'aider le conseil de la partie plaignante.

Considérant, en droit que :

- la Chambre pénale de recours de la Cour de justice (art. 59 al. 1 let. b CPP et 128 al. 2 let. a LOJ), siégeant dans la composition de trois juges (art. 127 LOJ), est l'autorité compétente pour statuer sur une requête de récusation visant un magistrat du tribunal de première instance (art. 59 al. 1 let. b CPP),

- prévenu à la procédure pendante (art. 104 al. 1 let. a CPP), le requérant dispose de la qualité pour agir (art. 58 al. 1CPP),

- conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation,

- en l'occurrence, la requête, déposée pendant l'audience décriée, et motivée dans les jours l'ayant suivie, n'est pas tardive et est donc recevable,

- selon l'art. 56 CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs que ceux énoncés aux let. a à e, notamment lorsqu'un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention (let. f),

- la procédure de récusation a pour but d'écarter un magistrat partial, respectivement d'apparence partiale, afin d'assurer un procès équitable à chaque partie (ATF 126 I 68 consid. 3a p. 73; arrêt du Tribunal fédéral 1B_430/2021 du 22 octobre 2021 consid. 2.3.2),

- l'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_621/2011 du 19 décembre 2011; ATF 136 III 605 consid. 3.2.1, p. 609; arrêt de la CourEDH Lindon, § 76),

- des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention; seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, peuvent fonder une suspicion de partialité, pour autant que les circonstances dénotent que la personne en cause est prévenue ou justifient à tout le moins objectivement l'apparence de prévention. Il appartient en outre aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre. La procédure de récusation n'a donc pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure (ATF 143 IV 69 consid. 3.2 p. 74 s.),

- en l'espèce, le nouveau refus opposé au requérant par le cité à l'audience du 13 août 2024 d'enregistrer celle-ci et d'entendre des témoins, au demeurant motivé par un renvoi à ses précédents courriers des 11 juillet 2024, relève d'une contestation de la décision rendue et non d'une marque de prévention, comme la Chambre de céans l'a du reste constaté à titre subsidiaire dans son arrêt du 27 août 2024, auquel il peut être renvoyé,

- le refus du cité de laisser le requérant dicter lui-même le procès-verbal d'audience ne contrevient nullement au CPP et plus particulièrement à son art. 78 al. 4, la faculté éventuellement laissée à une personne entendue de dicter elle-même sa déposition étant réservée à des déclarations importantes ayant trait à des questions techniques ou scientifiques pointues ne pouvant pas être résumées (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 4 ad art. 78). Aucune prévention ne saurait ainsi être déduite de ce refus,

- les autres griefs du requérant à l'endroit du cité n'apparaissent pas fondés en tant qu'ils ne sont étayés par aucun indice objectif. La lecture du procès-verbal d'audience démontre que le requérant n'a pas été principalement interrogé sur sa situation personnelle mais également sur les faits, au demeurant circonscrits, qui lui étaient reprochés (violation d'une obligation d'entretien), lesquels lui ont été expressément rappelés (cf. p. 4 dudit procès-verbal). Il a pu librement s'exprimer et faire valoir son point de vue, de sorte qu'on peine à voir quels droits essentiels auraient été bafoués. Que le requérant réfute les accusations portées contre lui ne rend pas l'audience viciée ou "illégale" ni ne ferait apparaître C______ comme partial, comme il le soutient. Aucun élément objectif ne permet enfin de considérer que C______ aurait voulu favoriser la partie plaignante ou son avocat, ou aurait contraint le requérant à signer un procès-verbal qui ne reflétait pas ses propos véritables,

- partant, la requête sera rejetée,

- vu l'issue de la cause, point n'était besoin de solliciter des observations du cité (art. 58 al. 2 CPP),

- le requérant, qui succombe, supportera les frais de la procédure, qui seront fixés en totalité à CHF 900.- (art. 59 al. 4 CPP; art. 13 al. 1 let. b du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette la requête de récusation.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au requérant et à C______.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Monsieur Xavier VALDES TOP, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES TOP

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/56/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- demande sur récusation (let. b)

CHF

815.00

Total

CHF

900.00