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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/8960/2024

ACPR/418/2024 du 05.06.2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : SOUPÇON;PROPORTIONNALITÉ;QUALITÉ POUR RECOURIR
Normes : CPP.382.al1; CPP.197.al1.letb; CPP.263

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/8960/2024 ACPR/418/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 5 juin 2024

 

Entre

A______ et [l'étude] B______, représentés par Me Stéphane GRODECKI, avocat, MERKT & Associés, rue Général-Dufour 15, Case postale, 1211 Genève 4,

recourants,

 

contre cinq ordonnances de perquisition et de séquestre rendues le 16 avril 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 29 avril 2024, A______ et B______ recourent contre les cinq ordonnances de perquisition et de séquestre visant le domicile du premier et l'étude B______ (deux ordonnances notifiées le 17 avril 2024), ainsi qu'un garde-meubles loué à C______, dans le canton de Vaud, le domicile de D______ et celui de E______ (trois ordonnances figurant à la procédure non notifiées).

Le recourant conclut à ce qu'il soit dit et constaté que ces cinq ordonnances étaient illicites et à la condamnation du Ministère public en tous les frais et dépens.

b. Il ressort d'une note de la greffière du 17 avril 2024 que "les perquisitions de ce jour ont été effectuées au domicile de Me A______ et à l'Etude B______. Les perquisitions prévues au sein de l'entreprise F______, au domicile de D______, frère de Me A______, ainsi qu'au domicile de E______ ne seront pas exécutées. En effet, tous les dossiers et objets se trouvent à l'Etude B______ et un camion avec 100 cartons qui étaient entreposés chez la comptable doivent [sic] encore arriver à l'Etude B______ ce jour".

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Il est reproché à A______ d'avoir, entre le 2 novembre 2023 et le 2 avril 2024, dérobé les dossiers professionnels de G______, avocate indépendante, qui occupait des bureaux dans les locaux de l'étude située au no. ______ rue 1______, à Genève, dont la société B______ se considérait comme locataire, de même que divers objets personnels, dont l'original de son brevet d'avocat, une statuette de la justice, un poster, un tableau, un plateau en argent et son ordinateur contenant ses dossiers informatiques. Il lui est dans ces mêmes circonstances reproché d'avoir pénétré sans droit dans les bureaux occupés par G______, en fracturant les portes, dès lors qu'il n'en possédait pas les clés, faits constitutifs de vol (art. 139 CP), subsidiairement d'appropriation illégitime (art. 137 CP) et de violation de domicile (art. 186 CP).

b.G______ a déposé plainte pénale le 10 avril 2024 en raison de ces faits et a produit quelques photos à l'appui. Elle a requis la prise de mesures urgentes afin que ses dossiers soumis au secret professionnel d'avocat et ses affaires personnelles soient retrouvés et sécurisés.

Elle a en substance exposé qu'elle avait occupé, depuis janvier 2010, dans un contexte de collaboration et de sous-traitance, un bureau de deux pièces au 1er étage dans les locaux appartenant à H______. Ce dernier avait fondé dans le courant de l'année 2010 la société I______ SA, dont il était l'unique actionnaire et administrateur. A______ avait rejoint cette étude au début de l'année 2018, en qualité d'associé.

À partir de décembre 2018, ses relations avec A______ étaient devenues quasi inexistantes après qu'il lui avait dit "ferme bien ta gueule" devant plusieurs collaborateurs de l'étude. Dès le 2 novembre 2022, H______ ayant cessé son activité, A______ était devenu l'unique administrateur avec signature individuelle de I______ SA, devenue B______. Le 2 novembre 2023, il avait décidé de "mettre dehors" de l'étude H______, mais aussi toute personne pouvant être liée à ce dernier, dont elle-même. Leurs accès informatiques avaient été coupés. Vers 14h, A______ avait "débarqué" sans droit dans son bureau en hurlant et, menaçant de l'"assommer", l'avait contrainte à quitter les lieux, ce qu'elle avait fait, prenant le soin de fermer à clé les portes de son bureau. Elle n'y avait plus eu accès dès le mois de décembre 2023 en raison du litige opposant H______ à A______.

Ce dernier avait restitué les clés des locaux de l'étude à la régie le 28 mars 2024. Le 2 avril 2024, lors de leur ouverture en présence d'un huissier judiciaire, elle avait constaté qu'ils étaient quasiment vides et que de nombreuses dégradations y avaient été volontairement commises. Or, elle détenait dans son bureau les dossiers de ses clients, un ordinateur contenant des données professionnelles et personnelles ainsi que nombreux effets personnels. Les cylindres des serrures des portes de son bureau avaient été enlevés. Elle était choquée et pour le moins en souci de ce qu'il était advenu en particulier des dossiers et données de ses clients.

Elle suspectait le frère de A______, D______, qui officiait en qualité de "secrétaire", ainsi que la comptable, E______ d'avoir participé à ces actions.

b. Selon les procès-verbaux du 17 avril 2024, il n'a été effectué aucune perquisition au domicile de A______, ni dans les locaux de l'étude B______, à rue 2______ no. ______. En effet, A______ a d'emblée indiqué que les effets de la plaignante se trouvaient dans les locaux de l'étude dont l'emménagement était en cours avec plus de 400 cartons. Après discussion et afin de préserver le secret professionnel, un délai de 15 jours avait été donné, dès réception de la liste des dossiers et effets à dresser par G______, pour qu'ils lui soient remis. Si A______ devait s'opposer à la remise de certains dossiers au motif qu'il s'agirait de clients de son étude, lesdits dossiers seraient remis séparément sous scellés au Ministère public.

C. Dans ses cinq décisions querellées, le Ministère public a retenu qu'il y avait lieu de présumer que le garde-meubles loué par B______ et A______ à C______ (Vaud), les domiciles de son frère et de sa secrétaire E______, pouvaient abriter des traces, objets ou valeurs patrimoniales, ainsi que des informations susceptibles d'être séquestrés. Selon les photographies fournies, les serrures des deux bureaux occupés par la plaignante avaient été retirées et donc les portes forcées, des cartons avaient été emmenés lors du déménagement au sein de l'étude B______. Il se justifiait de procéder à des perquisitions en ces lieux aux fins de mise sous séquestre de tous objets, appareils électroniques, données, documents et valeurs pouvant être restitués à la lésée ou utilisés comme moyens de preuve.

D. a. À l'appui de leur recours, A______ et B______ exposent que la voie du recours de l'art. 393 CPP était ouverte lorsque la perquisition n'avait abouti, comme en l'espèce, à aucune saisie, puisque l'intéressé ne pouvait dans ce cas pas défendre ses droits au cours d'une procédure de levée de scellés. Ils avaient la qualité de lésés, dès lors qu'ils avaient été contraints de tolérer l'ingérence de l'État dans leur domicile respectif, ce qui violait leur sphère privée, protégée par l'art. 8 CEDH.

Il n'existait pas de soupçons suffisants au sens de l'art. 197 al. 1 let. b CPP et le principe de proportionnalité avait été violé.

Le 2 novembre 2023, à la suite de la résiliation du mandat de counsel de H______, B______ lui avait fait interdiction de pénétrer dans ses locaux. Ce nonobstant, il y était présent le 1er décembre 2023, de sorte qu'ils avaient dû faire intervenir la police. Le Ministère public s'était "également" saisi de l'affaire. Un accord amiable, convenu le soir-même, autorisant H______ à pénétrer dans les locaux, à certaines conditions, avait été révoqué 14 décembre 2023, vu son non-respect. Une demande avait été faite le 6 décembre 2023 au prestataire informatique de l'étude de couper immédiatement l'accès au serveur informatique à tous les profils qu'ils n'avaient pas validés.

Le 20 décembre 2023, une dénonciation pénale contre H______ avait été déposée au Ministère public [à l'attention du Procureur général] constatant, outre le fait que celui-ci s'était introduit sans droit dans les locaux de l'étude et y avait peut-être soustrait des dossiers, nombre de malversations, à savoir des frais et débours privés passés indûment à charge de l'étude, une gestion déficiente des finances de l'étude, ainsi que des activités de dissimulation d'actifs. Ainsi, le Ministère public avait connaissance, depuis décembre 2023 déjà, du litige, de nature essentiellement civile, les opposant à H______.

Aucun contrat ne rendait même vraisemblable le droit de G______ à occuper un bureau de deux pièces au premier étage du no. ______, rue 1______. Elle savait pertinemment que toute l'étude B______ avait déménagé dans de nouveaux locaux et elle n'alléguait pas avoir repris contact avec celle-ci depuis le 2 novembre 2023 pour récupérer des affaires personnelles. Selon le registre cantonal des avocats, sa seule et unique adresse professionnelle était au no. ______, route 3______. Aussi, les seuls dossiers se trouvant dans les – anciens – bureaux de la recourante devaient a priori être des dossiers de l'étude, et non en lien avec l'activité d'indépendante de la plaignante, ce d'autant plus qu'elle admettait elle-même ne plus s'être rendue dans ces locaux de longue date.

À la lecture des plaintes de B______ et de G______, il était évident que les affaires de celle-ci et ses éventuels dossiers personnels avaient été déménagés dans les nouveaux locaux. Il suffisait à la plaignante, respectivement au Ministère public – par un simple ordre de dépôt – de contacter l'étude pour en obtenir confirmation et en obtenir la mise à disposition. Le Ministère public n'avait donc aucune raison de penser que le déménagement de tout – sauf ce qui n'appartenait clairement pas à l'étude – procédait d'une intention de voler quoi que ce soit.

L'état de fait était connu du Ministère public et mettait en jeu des questions à la fois complexes et non résolues de droit du bail, de droit des sociétés et de droit de la profession d'avocat, de sorte qu'il était pour le moins douteux que les faits dénoncés par la plaignante, même s'ils étaient établis, aient pu relever d'une quelconque intention délictueuse. La perquisition, intervenue de manière chicanière au petit matin (7h30) au domicile du recourant et de sa compagne, visait le séquestre d'effets ne devant pas valoir plus de quelques centaines de francs.

b. Le Ministère public s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et, au fond, conclut à son rejet.

La plaignante avait exposé, de manière cohérente, les circonstances entourant la disparition de biens déterminés. Elle avait joint à sa plainte une déclaration écrite de H______ et des photographies de son bureau rendant plausibles ses affirmations. Une volonté de la priver de ses biens – la question de l'existence d'un enrichissement légitime pouvant demeurer ouverte à ce stade – apparaissait crédible. Ainsi, en tout début d'enquête, des soupçons suffisants existaient quant à la commission de l'infraction reprochée à A______.

Il avait renoncé à exécuter trois des cinq ordonnances, dès lors qu'il était apparu vraisemblable que les biens recherchés se trouvaient effectivement à Cours des Bastions 4, selon les indications données lors de la première perquisition, menée au domicile de A______. Les mesures de contrainte déployées s'étaient ainsi limitées au strict nécessaire.

Au vu des éléments décrits dans la plainte, en particulier du contexte conflictuel et de l'attitude de A______ envers la plaignante, des mesures telles qu'attendre de cette dernière qu'elle s'adresse à lui pour récupérer ses biens ou que le Ministère public notifie un ordre de dépôt apparaissaient inappropriées et inaptes à atteindre le but d'intérêt public visé, soit la restitution notamment des dossiers professionnels couverts par le secret professionnel de l'avocat, dénués de valeur marchande ou objectivement déterminable. À cet égard, les dispositions des art. 196 à 200 CPP ne limitaient pas d'emblée les mesures de contrainte à certaines catégories d'infractions et entraient donc en ligne de compte aussi pour les contraventions.

c. Aux termes de leur réplique, les recourants font valoir que le Ministère public avait suivi aveuglement les allégations de la plaignante. Il pouvait aisément se déduire de la plainte que les prétendues affaires personnelles de celle-ci avaient simplement été incluses dans le déménagement de l'intégralité de l'étude. La plaignante avait aussi indiqué que ses accès informatiques notamment avaient été coupés, ce qui démontrait bien son intégration à l'étude et donc qu'elle traitait des dossiers de clients de l'étude. Ils n'avaient toujours pas reçu de sa part la liste de ses dossiers personnels qui avaient été déménagés.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne cinq ordonnances de perquisition et de séquestre sujettes à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du prévenu, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP).

1.2. Seul peut toutefois recourir celui qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision concernée (art. 382 al. 1 CPP).

Le recourant, quel qu'il soit, doit être directement atteint dans ses droits et doit établir que la décision attaquée viole une règle de droit qui a pour but de protéger ses intérêts et qu'il peut, par conséquent, en déduire un droit subjectif. Le recourant doit en outre avoir un intérêt à l'élimination de cette atteinte, c'est-à-dire à l'annulation ou à la modification de la décision dont provient l'atteinte (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 2 ad art. 382 CPP).

Cet intérêt doit être actuel et pratique. L'existence d'un intérêt de pur fait ou la simple perspective d'un intérêt juridique futur ne suffit pas (ATF 133 IV 121 consid. 1.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_458/2013 du 6 mars 2014 consid. 2.1).

1.3. De jurisprudence constante, un intérêt juridiquement protégé doit ainsi être reconnu à celui qui jouit sur les valeurs saisies ou confisquées d'un droit de propriété ou d'un droit réel limité (arrêt du Tribunal fédéral 1B_94/2012 du 2 avril 2012 consid. 2.1).

1.4. En l'espèce, trois des cinq ordonnances de perquisition et de séquestre querellées ont non seulement pas été exécutées, mais de plus concernent, pour deux d'entre elles, des proches du recourant.

En tant que celui-ci a déposé son recours en son nom et celui de la société anonyme dont il est administrateur, il n'est pas recevable à contester des ordonnances visant des tiers, en l'occurrence son frère et sa secrétaire, faute de pouvoir se prévaloir d'un intérêt juridique propre.

Se pose par ailleurs la question d'un intérêt direct et actuel du recourant à recourir contre des ordonnances qui n'ont donné lieu à aucune perquisition, à son domicile et en l'étude de la société anonyme dont il est administrateur, ni n'ont même reçu la visite ou dans un dépôt, pour ce qui est d'un dépôt de meubles.

Cette question souffrira de demeurer indécise vu ce qui suit.

3. Les recourants estiment que les conditions du séquestre n'étaient pas réalisées, la mesure ne reposant pas sur des soupçons suffisants et étant disproportionnée, chicanière même.

3.1. Comme toutes les mesures de contrainte, la perquisition et le séquestre ne peuvent être ordonnés, en vertu de l'art. 197 al. 1 let. b CPP, que s'il existe des soupçons suffisants laissant présumer une infraction.

3.1.1. La perquisition se définit comme la recherche, en tout lieu clos, de moyens de preuve pouvant aider à la manifestation de la vérité (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale – Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2016, n. 2 ad art. 244 et les références). Elle vise notamment à découvrir, dans le but de les mettre en sûreté (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1218), des objets susceptibles d'être séquestrés (cf. art. 244 al. 2 let. b CPP).

3.1.2. Les cas de séquestre sont ceux de l'art. 263 CPP (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2e éd., Bâle 2014, n. 7 ad art. 246).

Le séquestre, selon cette disposition, peut porter sur des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers lorsqu’il est probable, notamment, qu’ils devront être restitués au lésé (let. c).

En raison de l'atteinte portée aux droits fondamentaux des personnes concernées, la mesure de séquestre doit être prévue par la loi; des soupçons suffisants doivent laisser présumer la commission d'une infraction; le principe de la proportionnalité doit être respecté, et il doit exister un rapport de connexité entre l'objet saisi et l'infraction (ACPR/636/2022 du 20 septembre 2022 consid. 4.1.).

Dans le cadre de l'examen d'un séquestre conservatoire, l'autorité statue sous l'angle de la vraisemblance, examinant des prétentions encore incertaines. Le séquestre pénal est en effet une mesure conservatoire provisoire destinée à préserver les objets ou valeurs qui peuvent servir de moyens de preuve, que le juge du fond pourrait être amené à confisquer ou à restituer au lésé, ou qui pourraient servir à l'exécution d'une créance compensatrice (art. 263 al. 1 let. d CPP, en vigueur depuis le 1er janvier 2024). L'autorité doit pouvoir statuer rapidement (cf. art. 263 al. 2 CPP), ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 141 IV 360 consid. 3.2 p. 364 et les références citées).

Ainsi, au début de l'enquête, un soupçon crédible ou un début de preuve de l'existence de l'infraction reprochée suffit à permettre le séquestre, ce qui laisse une grande place à l'appréciation du juge (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 17/22 ad art. 263).

3.1.3. La restitution au lésé (art. 263 al. 1 let. c CPP) vise, en première ligne, les objets provenant directement du patrimoine du lésé, qui doit être identifié, et tend au rétablissement de ses droits absolus (restitution de l'objet volé).

3.2. En l'espèce, pour déterminer si les trois ordonnances de séquestre, dont deux ont été effectivement "exécutées", étaient licites et proportionnées, il faut se placer du point-de-vue du Ministère public au moment où il les a dressées, le 16 avril 2024, respectivement a entendu les exécuter, le lendemain. Le procureur en cause était alors chargé du traitement de la plainte déposée par l'intimée dont il ressortait qu'elle avait occupé de l'année 2010 jusqu'au mois de décembre de l'année 2023 deux bureaux au premier étage de l'immeuble sis no. ______ rue 1______ à Genève. Cet élément n'est pas remis en cause par les recourants et peu importe, à ce stade, qu'ils n'auraient pas connu le contenu exact d'un accord passé avec H______ quant à cette occupation. La plaignante a expressément fait mention des liens qu'elle avait avec H______, dont l'étude d'avocats occupait également les locaux, et le litige ayant opposé ce dernier à A______, à la suite de leur association puis de la cessation d'activité du premier.

Les recourants ne remettent pas en cause le fait que la plaignante avait fermé à clé les deux bureaux en cause au moment de devoir les quitter à la fin de l'année 2023, ni qu'au moment où il lui ont été à nouveau accessibles, le 2 avril 2024, en présence d'un huissier, les cylindres des serrures avaient été enlevés et ces bureaux quasiment vidés. Toujours en se plaçant du point-de-vue de l'autorité de poursuite à réception de la plainte, il en ressortait que la plaignante détenait jusqu'alors dans son bureau les dossiers de ses clients, un ordinateur contenant des données professionnelles et personnelles ainsi que des effets personnels et qu'elle était en souci, en particulier quant aux dossiers et données de ses clients.

Au vu de ces éléments, étant rappelé que, dans le cadre de l'examen d'un séquestre conservatoire, l'autorité statue sous l'angle de la vraisemblance et doit pouvoir statuer rapidement, ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir, il existait bien le 17 avril 2024, au moment où le procureur et la police se sont présentés au domicile de A______ puis dans les nouveaux locaux de la société recourante, des soupçons suffisants de commission d'infractions de violation de domicile – la question de la titularité du bail sur les deux bureaux occupés par la plaignante n'ayant pas à être résolue à ce moment-là – ainsi que d'appropriation illégitime au vu des indications de la plaignante et des photos produites. Lesdites photos laissent, à des dates indéterminées, apparaître en particulier nombre de dossiers dont il ne peut être déterminé s'ils sont le fruit de son activité d'avocate indépendante, ou comme soutenu dans la réponse au recours, des dossiers de l'étude recourante.

Par ailleurs, dans la mesure où A______ était susceptible de détenir, à son domicile, les dossiers et objets qu'il était suspecté d'avoir soustraits, il y avait lieu de les y rechercher et le cas échéant, séquestrer. S'agissant de l'heure de l'intervention, elle n'est pas incongrue et permettait de plus de s'assurer de la présence du recourant, avant qu'il ne se rende au travail.

Dans ces circonstances, les trois ordonnances de séquestre et de perquisition étaient fondées sur des soupçons suffisants et conformes au principe de proportionnalité. Le Ministère public a de plus renoncé à perquisitionner le domicile du prévenu, les locaux de l'étude et le dépôt détenu dans le canton de Vaud via l'une de ses sociétés, une fois qu'il a été informé et a pu constater, au no. ______, rue 2______, la présence de 400 cartons environ emportés du no. ______ rue 1______, susceptibles de contenir les objets revendiqués par la plaignante. Autrement dit, les recourants n'ont subi aucun inconvénient lié au séquestre, autre qu'une présence non souhaitée de la police et du procureur dès le lever du prévenu. Cette situation est inhérente à la mesure de contrainte ordonnée.

En définitive, cette mesure apparaissait nécessaire et utile à la manifestation de la vérité, tout en étant proportionnée.

4. Justifiées, les trois ordonnances querellées seront donc confirmées.

5. Les recourants, qui succombent, supporteront conjointement et solidairement les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

6. Corrélativement, aucun dépens ne leur sera alloué pour la procédure de recours (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.

Condamne A______ et B______, conjointement et solidairement, aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______ et B______, soit pour eux leur conseil, ainsi qu'au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Valérie LAUBER et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/8960/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00