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Décisions | Tribunal pénal

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P/14120/2022

JTDP/359/2023 du 23.03.2023 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.186; CP.144; CP.139; CP.291
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

Chambre 3


23 mars 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

A______SA, partie plaignante

contre

X______, né le ______1979, actuellement en exécution anticipée de peine à la Prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me B______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité de tous les chefs d'infraction mentionnés dans son acte d'accusation, à ce que la libération conditionnelle accordée par le Tribunal d'application des peines et des mesures dès le 17 mai 2021, solde de peine de 78 jours, soit révoquée, au prononcé d'une peine privative de liberté d'ensemble de 12 mois sous déduction de la détention avant jugement. Il conclut au prononcé de l'expulsion de Suisse du prévenu pour une durée de 20 ans et à ce que le prévenu soit condamné aux frais de la procédure.

X______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement des chefs de dommages à la propriété et de vol. Il ne s'oppose pas à un verdict de culpabilité des chefs de violation de domicile et de rupture de ban, conclut principalement à une exemption de peine, subsidiairement au prononcé d'une peine complémentaire égale à zéro. Il conclut à ce qu'il soit renoncé à la révocation des libérations conditionnelles, s'oppose au prononcé d'une nouvelle expulsion, conclut à ce que les frais soient laissés à la charge de l'état et persiste dans ses conclusions en indemnisation.

 

EN FAIT

A.

a. Par acte d'accusation du 23 février 2023, il est reproché à X______ d'avoir, dans la nuit du 21 au 22 avril 2022, rue C______, à Genève, pénétré sans droit dans les locaux de l'école de coiffure appartenant à la société A______SA, en ouvrant la porte des lieux par pesées avec un objet, l'endommageant de la sorte, dans le but de commettre un vol, puis dérobé la somme de CHF 500.-, une caisse enregistreuse contenant CHF 1'200.- et une tablette numérique SAMSUNG, ceci dans le but de s'approprier ces biens et de s'enrichir illégitimement, faits qualifiés de violation de domicile (art. 186 CP), de dommages à la propriété (art. 144 CP) et de vol (art. 139 CP).

b. Il lui est également reproché d'avoir, entre le 13 avril et le 22 avril 2022, pénétré à plusieurs reprises sur le territoire suisse, en particulier à Genève, au mépris de l'expulsion judiciaire dont il fait l'objet et qu'il connait, laquelle a été prononcée à son encontre le 11 mars 2021 par le Tribunal de police de Genève, pour une durée de cinq ans, étant précisé que ce jugement est définitif et exécutoire, faits qualifiés de rupture de ban (art. 291 CP).

B. Il ressort du dossier les éléments pertinents suivants:

a. Le 5 mai 2022, D______, administrateur unique de la société A______SA, ayant pour but l'exploitation d'un salon et d'une école de coiffure, a déposé plainte pénale, au nom de cette dernière, suite au cambriolage du commerce sis rue C______, à Genève, survenu entre le 21 avril 2022 à 19h00 et le 22 avril 2022 à 7h45.

La plainte a été formée au moyen du formulaire pré-imprimé de la police, au terme duquel les rubriques "vol" et "violation de domicile" comportaient une croix, tandis que la rubrique "dommages à la propriété" n'en comportait aucune. Il ressort en page 2 du formulaire sous la rubrique "mode opératoire" qu'un individu était entré par la porte extérieure donnant sur la rue, laquelle "a été forcer pour pénétrer dans A______SA". L'inconnu avait volé une caisse enregistreuse contenant CHF 1'200.-, CHF 500.- en espèces ainsi qu'une tablette numérique d'une valeur de CHF 400.-.

b. Avisée du cambriolage en date du 22 avril 2022, la police s'est rendue à l'école de coiffure pour procéder à une enquête technique, en particulier à divers prélèvements biologiques.

b.a. Selon le rapport de renseignements du 21 juin 2022, le vol avait eu lieu par effraction de la porte par pesées, la porte du commerce ayant été endommagée.

En outre, la police avait effectué un prélèvement biologique sur un mouchoir abandonné au pied du comptoir et n'appartenant pas au personnel de l'établissement. L'analyse de ce prélèvement par le Centre universitaire Romand de Médecine légale (CURML) avait permis d'établir un profil ADN de mélange, dont la fraction majeure était masculine et la fraction mineure n'était pas interprétable, qui correspondait au profil ADN de X______. L'intéressé se trouvait en exécution de peines à la prison de Champ-Dollon.

b.b. D'après le rapport de renseignements du 17 octobre 2022, la police avait également effectué un prélèvement biologique sur une raquette de badminton retrouvée au sol devant le comptoir. Selon le rapport de comparaisons du 4 octobre 2022 du CURML, l'analyse du prélèvement biologique avait mis en évidence un ADN de mélange de plus de deux personnes compatible avec le profil ADN de X______ avec un rapport de vraisemblance de l'ordre du milliard.

c.a. Entendu par la police le 17 septembre 2022, X______ a admis avoir pénétré dans les locaux du salon de coiffure. Le soir des faits, il avait cherché un endroit pour dormir. Il avait vu la porte du salon de coiffure ouverte et était entré "pour voir à l'intérieur". Il n'avait pas fracturé la porte, celle-ci étant déjà ouverte. A l'intérieur des locaux, il n'avait emporté aucun objet, mais en avait éventuellement touché. Il avait vu "une caissette rouge en métal", ouverte et vide, ainsi qu'un ordinateur portable. Interrogé sur la présence de son profil ADN sur une raquette de badminton et un mouchoir, il a indiqué qu'il les avait "peut-être" touchés mais il ne s'en souvenait pas.

c.b. Lors de l'audience devant le Ministère public du 1er novembre 2022, X______ a confirmé ses précédentes déclarations précisant que le soir des faits, il cherchait, avec un ami prénommé "E______", un endroit pour "passer la nuit" avant de se séparer. Il était arrivé devant l'école de coiffure. Il y avait deux portes ouvertes, lesquelles n'étaient pas fracturées et étaient séparées par un "petit muret". L'une de ces portes donnait accès à un local poubelle. Pour accéder à l'autre porte, il avait enjambé des sacs poubelles déchirés. Après s'être avancé dans la pièce, il avait réalisé qu'il s'agissait d'un salon de coiffure. En pénétrant dans le local, il n'avait pas d'affaire avec lui. Cela étant, le mouchoir retrouvé sur place lui appartenait peut-être et avait pu tomber de sa poche. Il avait remarqué un ordinateur portable allumé sur la table de l'accueil ainsi qu'une raquette de badminton, qu'il avait prise pour la regarder avant de la reposer. De manière plus générale, il avait remarqué qu'une tierce personne était déjà passée et "avait fait des conneries". Il n'avait rien volé et n'avait pas eu intérêt à le faire au vue de son interdiction d'entrée en Suisse et de ses antécédents. La police l'avait informé que quatre objets avaient été retrouvés, dont une bouteille d'eau, sur laquelle son profil ADN n'avait pas été établi. Son profil ADN n'avait pas non plus été retrouvé sur la porte. Il n'aurait pas été "assez bête" pour porter des gants et les enlever une fois à l'intérieur du local. Il n'avait pas passé la nuit dans le salon de coiffure car de grandes vitres donnaient de la visibilité à l'intérieur du local. Il avait retrouvé "E______" et avait passé les jours suivants avec lui avant de se faire arrêter.

Il vivait à Annemasse et était "régulièrement" venu en Suisse entre le 13 et le 29 avril 2022. Il avait conscience qu'une décision judiciaire d'expulsion de Suisse avait été prononcée à son encontre. Il était dans une situation précaire. Il consommait de la méthadone qui était moins onéreuse à Genève et où il était également plus facile de s'en procurer.

C. A l'audience de jugement, X______ a confirmé avoir pénétré dans les locaux de l'école de coiffure. Le soir des faits, il cherchait un endroit pour dormir, car il faisait froid. Dans une petite ruelle, il avait vu deux portes qui lui semblaient ouvertes. Il n'avait pas fracturé la porte du salon de coiffure, laquelle était déjà ouverte de 40 cm. Lorsqu'il était rentré, il faisait sombre et noir. Il y avait des "poubelles éventrées". Il savait qu'il avait touché une raquette de badminton, car la police le lui avait dit. Il s'était avancé jusqu'à la deuxième pièce, laquelle était plus éclairée en raison de grandes vitres qui donnaient sur la rue. Il avait réalisé qu'il s'agissait d'un salon de coiffure. Il savait également qu'il avait fait tomber un mouchoir car son profil ADN avait été retrouvé. Il avait finalement fait demi-tour et était parti. Il avait dormi dans la rue.

X______ a expliqué que son profil ADN avait été retrouvé sur la raquette de badminton car il l'avait touchée. La raquette se trouvait déjà dans les locaux et était dans une housse. Il était en réalité d'abord entré dans le local poubelles. Il n'avait pas eu envie d'y dormir, l'odeur de poubelles étant forte. Il avait ensuite remarqué que la seconde porte était ouverte et avait pénétré à l'intérieur. Il n'y avait pas de marque de pesées sur la porte, ou du moins elles n'étaient pas voyantes, sinon il ne serait pas entré. Le comptoir se trouvait dans la seconde pièce sur lequel il y avait un ordinateur et une "petite caisse".

Il a en outre reconnu avoir pénétré à plusieurs reprises sur le territoire suisse, soit à Genève, au mépris de l'expulsion judiciaire du 11 mars 2021, dont il avait connaissance. Avant son incarcération, il vivait dans une situation précaire à Annemasse. Il était dépendant à la méthadone. De manière générale et en particulier entre le 13 et le 22 avril 2022, il était venu en Suisse pour acheter de la méthadone. A sa sortie de prison, il souhaitait retourner en France et vivre auprès de ses enfants.

D.

a. X______ est né le ______ 1979 à Bordeaux, en France, pays dont il est originaire. Il expose y avoir grandi, être parti tôt de chez ses parents et avoir été contraint de "se débrouiller" seul. Il est célibataire et a deux enfants âgés de 13 ans et 8 ans qui vivent dans le sud de la France avec leurs mères respectives. Il a suivi une formation de mécanicien mais n'a pas de diplôme. Il a travaillé dans la restauration, dans le bâtiment ainsi que dans l'agriculture. Avant son incarcération, il vivait à Annemasse, dans une situation précaire, soit dans la rue, soit chez des amis et faisait la manche pour subvenir à ses besoins. Il était dépendant à la méthadone mais au bénéfice en détention d'un traitement de substitution qu'il diminuait progressivement.

b. Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ a été condamné à six reprises entre le 10 novembre 2020 et le 29 avril 2022, soit:

-       Le 10 novembre 2020, par le Ministère public, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.- le jour, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, avec sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, pour dommages à la propriété et vols d'importance mineure, sursis révoqué par le Tribunal de police le 11 mars 2021;

-       Le 11 mars 2021, par le Tribunal de police, à une peine privative de liberté de 8 mois sous déduction de 98 jours de détention avant jugement et à une expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans, pour violation de domicile (commise à réitérées reprises), dommages à la propriété (commis à réitérées reprises) et vol simple (commis à réitérées reprises); X______ a bénéficié d'une libération conditionnelle pour le 17 mai 2021, solde de peine de 78 jours et délai d'épreuve d'un an;

-       Le 16 mars 2022, par le Ministère public, à une peine privative de liberté de 180 jours, sous déduction de deux jours de détention avant jugement, pour rupture de ban;

-       Les 24 mars 2022, 12 avril 2022 et 29 avril 2022, par le Ministère public à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 10.- le jour, sous déduction de 5 jours de détention avant jugement, pour rupture de ban; X______ a bénéficié d'une libération conditionnelle le 24 octobre 2022, solde de peine de 99 jours et délai d'épreuve d'un an.

 

 

EN DROIT

1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (RS 0.101; CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (RS 101; Cst.) et 10 al. 3 du Code de procédure pénale suisse (RS 312.0; CPP), concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345, consid. 2.2.3.1; ATF 127 I 28, consid. 2a). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38, consid. 2a).

1.2. Selon l'art. 10 al. 2 CPP, le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure. Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).

2.1.1. Se rend coupable de violation de domicile au sens de l'art. 186 CP celui qui, d'une manière illicite et contre la volonté de l'ayant droit, aura pénétré dans une maison, dans une habitation, dans un local fermé faisant partie d'une maison, dans un espace, cour ou jardin clos et attenant à une maison, ou dans un chantier, ou y sera demeuré au mépris de l'injonction de sortir. Poursuivie sur plainte, cette infraction est punie d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

2.1.2. Celui qui aura endommagé, détruit ou mis hors d'usage une chose appartenant à autrui ou frappée d'un droit d'usage ou d'usufruit au bénéfice d'autrui sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 144 al. 1 CP).

2.1.3. A teneur de l'art. 139 ch. 1 CPP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l'approprier sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

2.2. En l'espèce, le prévenu admet avoir pénétré dans les locaux de la plaignante, mais conteste avoir endommagé la porte et dérobé des objets et des valeurs.

Les faits sont établis par les constatations policières et les éléments de l'enquête technique soit les traces de l'ADN du prévenu retrouvées sur une raquette de badminton ainsi que sur un mouchoir abandonné au pied du comptoir. L'ADN du prévenu prélevé sur ces deux objets a permis d'identifier le prévenu, qui a finalement admis avoir pénétré dans les locaux de l'école de coiffure appartenant à la société A______SA, sis rue C______ à Genève car il cherchait un endroit où dormir. Le fait qu'ils s'agissent de traces ADN de mélange et que les autres contributeurs n'aient pas été identifiés n'est pas déterminant puisque l'ADN du prévenu a été retrouvé sur deux objets différents avec un fort rapport de vraisemblance.

La version du prévenu selon laquelle il serait entré dans le salon de coiffure sans être à l'origine de l'effraction et sans avoir dérobé quoique ce soit n'emporte pas la conviction du Tribunal. Le prévenu ne donne aucune explication crédible s'agissant des raisons de sa présence sur les lieux ainsi que de la présence de la raquette de badminton et du mouchoir portant des traces de son ADN qui ont été retrouvés au demeurant au pied du comptoir à l'endroit où se trouvait la caisse. La probabilité pour qu'il ait trouvé la porte déjà fracturée par d'éventuels autres cambrioleurs durant la nuit est quasi nulle. Le prévenu avait par ailleurs besoin d'argent pour s'acheter de la méthadone ce qu'il admet.

S'agissant de l'infraction de dommages à la propriété, le prévenu conteste la réalisation de la condition du dépôt de plainte. La plainte d'A______SA, formée au moyen d'un formulaire pré-imprimé et rempli à la main, ne comporte effectivement pas de croix dans la rubrique "dommages à la propriété", alors que les rubriques "vol" et "violation de domicile" en comportent une. Il ressort néanmoins de la page 2 de cette plainte que la plaignante a fait valoir une effraction de la porte dans la rubrique "mode opératoire". Dans ces circonstances, et compte tenu au surplus du fait qu'il appartient à l'autorité et non aux plaignants d'apporter une qualification juridique aux faits dénoncés, le Tribunal retient que l'absence de croix dans la rubrique "dommages à la propriété" procède d'une erreur malencontreuse et non d'une volonté de renoncer à un dépôt de plainte pour cette infraction spécifique.

La plaignante a par ailleurs clairement marqué son intention de déposer plainte pour l'ensemble des faits commis et les rapports de police le mentionne, à l'instar de la pièce B2 qui indique qu'il s'agissait d'une "effraction de la porte par pesées", puis, sous la rubrique dégâts, l'indication "porte endommagée".

Le Tribunal a ainsi acquis la conviction que le prévenu a bien fracturé la porte de l'école de coiffure et pénétré sans droit dans le but de commettre un vol puis a dérobé la caisse enregistreuse contenant CHF 1'200.-, CHF 500.- ainsi qu'une tablette numérique. Il sera donc reconnu coupable d'infraction aux articles 139 ch. 1 CP, 186 CP et 144 CP.

3.1. Celui qui aura contrevenu à une décision d'expulsion du territoire de la Confédération ou d'un canton prononcée par une autorité compétente sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 291 al. 1 CP).

Cette infraction suppose la réunion de trois conditions: une décision d'expulsion, la transgression de celle-ci et l'intention. L'infraction est consommée si l'auteur reste en Suisse après l'entrée en force de la décision, alors qu'il a le devoir de partir ou s'il y entre pendant la durée de validité de l'expulsion. Sur le plan subjectif, l'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant toutefois suffisant. Il faut non seulement que l'auteur entre ou reste en Suisse volontairement, mais encore qu'il sache qu'il est expulsé ou accepte cette éventualité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1191/2019 du 4 décembre 2019, consid. 5.1 et références citées). Cette infraction est un délit continu qui est réalisé aussi longtemps que dure le séjour illicite (ATF 135 IV 6, consid. 3.2).

3.2. En l'espèce, il est établi par le dossier, et non contesté par le prévenu, que ce dernier a pénétré en Suisse à plusieurs reprises et à tout le moins du 13 au 22 avril 2022 alors qu'il faisait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire prononcée le 11 mars 2021 par le Tribunal de police pour une durée de 5 ans, mesure définitive et exécutoire au moment des faits. Le prévenu a par ailleurs admis avoir eu connaissance de cette décision.

En conséquence, le prévenu sera reconnu coupable de rupture de ban au sens de l'art. 291 al. 1 CP pour la période pénale du 13 au 22 avril 2022.

4.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137, consid. 9.1; ATF 141 IV 61, consid. 6.1.1).

4.1.2. Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d’un seul jugement (art. 49 al. 2 CP).

4.1.3. Si, durant le délai d'épreuve, le détenu libéré conditionnellement commet un crime ou un délit, le juge qui connaît de la nouvelle infraction ordonne sa réintégration dans l'établissement (art. 89 al. 1 CP). Si, en raison de la nouvelle infraction, les conditions d'une peine privative de liberté ferme sont réunies et que celle-ci entre en concours avec le solde de la peine devenu exécutoire à la suite de la révocation, le juge prononce, en vertu de l'art. 49 CP, une peine d’ensemble (art. 89 al. 6 ab initio CP).

4.1.4. Le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende (art. 51 CP).

4.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas négligeable. Il s'en est pris au patrimoine et à la liberté d'autrui par appât du gain, soit pour des motifs égoïstes. Il a également agi par convenance personnelle et sans égard pour l'autorité publique et les lois en vigueur, s'agissant de la rupture de ban.

La collaboration du prévenu peut être considérée comme moyenne, puisqu'il a persisté à nier le vol et le dommage à la propriété. Dans ces circonstances, la prise de conscience ne paraît pas aboutie. Le prévenu n'a pas véritablement présenté d'excuses ou fait part de regret sincère pour son comportement.

Sa situation personnelle, certes peu favorable et un état de santé mauvais n'excusent pas ses agissements.

La responsabilité, présumée, est pleine et entière.

Il y a concours entre les infractions commises.

A l'époque des faits, le prévenu avait déjà été condamné à de nombreuses reprises, y compris de manière récente, pour des infractions spécifiques.

Compte tenu des éléments qui précèdent et de la situation personnelle et financière du prévenu, seule une peine privative de liberté entre en ligne de compte, pour toutes les infractions passibles de ce genre de peine.

Il n'y a pas de place pour une peine complémentaire au sens de l'art. 49 al. 2 CP, dans la mesure où il ne s'agit pas de peine du même genre.

Vu la récidive dans le délai d'épreuve un pronostic défavorable doit être posé.

Il conviendra ainsi de révoquer la libération conditionnelle octroyée par le Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) pour le 17 mai 2021, en raison de la spécificité des infractions concernées et du fait que le prévenu n'a pas su mesurer la chance qui lui était donnée et en tirer les conséquences adéquates.

La libération conditionnelle octroyée le 24 octobre 2022 ne peut quant à elle être révoquée, puisqu'elle est intervenue après les faits.

Ainsi, pour le vol, infraction abstraitement la plus grave, une peine privative de liberté de 50 jours sera prononcée, augmentée de 20 jours (peine hypothétique de 30 jours) pour la violation de domicile, de 20 jours (peine hypothétique de 30 jours) pour le dommage à la propriété et de 12 jours (peine hypothétique 20 jours) pour la rupture de ban. A cela s'ajoute le solde de peine de 78 jours suite à la révocation de la libération conditionnelle.

Par conséquent, le prévenu sera condamné à une peine privative de liberté de 6 mois, sous déduction de la détention avant jugement.

Compte tenu des antécédents du prévenu et de l'absence de changement prévisible dans sa situation personnelle, la peine prononcée sera une peine ferme.

5.1.1. Selon l'art. 66a al. 1 let. d CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné pour vol (art. 139 CP) en lien avec une violation de domicile (art. 186 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans.

Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse (art. 66a al. 2 CP).

5.1.2. Lorsqu'une personne contre qui une expulsion a été ordonnée commet une nouvelle infraction remplissant les conditions d'une expulsion au sens de l’art. 66a CP, une nouvelle expulsion est prononcée pour une durée de vingt ans (art. 66b al. 1 CP).

5.2. Le prévenu se trouve dans un cas d'expulsion obligatoire (art. 66a al. 1 let. d CP). Compte tenu de sa situation administrative et familiale en Suisse, les conditions relatives à l'application de la clause de rigueur ne sont, à l'évidence, pas réalisées.

Dans la mesure où le prévenu a déjà fait l'objet d'une mesure d'expulsion par le passé, il se justifie de prononcer une nouvelle mesure d'expulsion, dont la durée doit être, au minimum, de 20 ans en application de l'article 66b al. 1 CP.

6.1. Si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (art. 429 al. 1 let. c CPP).

6.2. Compte tenu du verdict de culpabilité, les conclusions en indemnisation du prévenu seront rejetées.

7.1. Le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès (art. 135 al. 1 CPP). Le ministère public ou le tribunal qui statue au fond fixent l'indemnité à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

7.2. L'indemnité due au défenseur d'office sera fixée.

8.1. Le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné (art. 426 al. 1 ab initio CPP).

8.2. Au vu du verdict de culpabilité, le prévenu sera condamné aux frais de la procédure.

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant contradictoirement :

Déclare X______ coupable de violation de domicile (art. 186 CP), de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 CP) et de rupture de ban (art. 291 CP).

Révoque la libération conditionnelle accordée dès le 17 mai 2021 par le Tribunal d'application des peines et des mesures de Genève (solde de peine de 78 jours) (art. 89 al. 1 CP).

Condamne X______ à une peine privative de liberté d'ensemble de 6 mois, sous déduction de 143 jours de détention avant jugement (dont 112 jours en exécution anticipée de peine) (art. 40 et 51 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de X______ pour une durée de 20 ans (art. 66a al. 1 CP let. d et art. 66b al. 1 CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).

Fixe à CHF 3'023.15 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de X______ (art. 135 CPP).

Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'495.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Secrétariat d'Etat aux migrations, Office cantonal de la population et des migrations et Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

La Greffière

Julie COTTIER

La Présidente

Judith LEVY OWCZARCZAK


 

Vu l'annonce d'appel formée par le prévenu, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP),

LE TRIBUNAL DE POLICE

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne X______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire de CHF 600.-.

 

La Greffière

Julie COTTIER

La Présidente

Judith LEVY OWCZARCZAK

 

 

Voies de recours

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

1000.00

Frais du Tribunal des mesures de contraintes

CHF

50.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

60.00

Frais postaux (convocation)

CHF

21.00

Emolument de jugement

CHF

300.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

14.00

Total

CHF

1'495.00

 

Emolument de jugement complémentaire

CHF

600.00

==========

Total des frais

CHF

2'095.00

==========

Indemnisation du défenseur d'office

Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

X______

Avocat :  

B______

Etat de frais reçu le :  

9 mars 2023

 

Indemnité :

CHF

2'201.65

Forfait 20 % :

CHF

440.35

Déplacements :

CHF

165.00

Sous-total :

CHF

2'807.00

TVA :

CHF

216.15

Débours :

CHF

0

Total :

CHF

3'023.15

Observations :

- 3h35 à CHF 200.00/h = CHF 716.65.
- 13h30 * à CHF 110.00/h = CHF 1'485.–.

- Total : CHF 2'201.65 + forfait courriers/téléphones 20 % = CHF 2'642.–

- 3 déplacements A/R à CHF 55.– = CHF 165.–

- TVA 7.7 % CHF 216.15

* ce montant tient également compte du temps de l'audience de jugement de ce jour (2h30)

 

 


 

Voie de recours si seule l'indemnisation est contestée

Le défenseur d'office peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

 

Notification à/au : X______, soit pour lui son conseil, Me B______, A______SA, Ministère public
Par voie postale