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Décisions | Tribunal pénal

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P/1440/2012

JTCR/5/2013 du 20.12.2013 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.111 CP
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CRIMINEL

 

Chambre 1


20 décembre 2013

 

MINISTÈRE PUBLIC

Madame A______, domiciliée ______, partie plaignante, assistée de Me C______

Madame D______, domiciliée ______, partie plaignante, assistée de Me C______

Madame E______, domiciliée ______, partie plaignante, assistée de Me C______

Monsieur F______, domicilié ______, partie plaignante, assisté de Me C______

Madame G______, domiciliée ______, partie plaignante, assistée de Me C______

HOSPICE GENERAL, ______, partie plaignante

Contre

Monsieur X______, né le ______ 1980, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me I______

 

 

 

CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à ce que le Tribunal déclare X______ coupable de toutes les infractions retenues dans l'acte d'accusation et, à titre subsidiaire, de l'infraction d'exposition s'agissant de J______, sans circonstance atténuante, qu'il le condamne à une peine privative de liberté de 14 ans, qu'il ordonne son maintien en détention pour des motifs de sûreté, qu'il réserve un bon accueil aux conclusions civiles et s'en réfère pour le surplus à l'annexe de l'acte d'accusation.

A______, D______, E______, G______ et F______ concluent à un verdict de culpabilité, sans circonstance atténuante, et à ce qu'il soit donné une suite favorable à leurs conclusions civiles.

X______ admet sa culpabilité pour les infractions de meurtre, d'escroquerie et de port d'arme sans autorisation, demande au Tribunal de retenir les circonstances atténuantes de la détresse profonde et de l'émotion violente et qu'il a agi en état de légitime défense excessive, en lien, cas échéant, avec une erreur sur les faits. Il conclut à son acquittement pour les infractions de mise en danger de la vie d'autrui et d'exposition et à sa condamnation à une peine de réinsertion et d'espoir.

EN FAIT

A. Par acte d'accusation du 8 juillet 2013, il est reproché à X______ :

-         de s'être rendu coupable de meurtre, au sens de l'art. 111 du Code pénal (CP), et de mise en danger de la vie d'autrui, au sens de l'art. 129 CP, le 28 janvier 2012, alors qu'il venait chercher sa fille J______, âgée de moins de trois ans pour passer la journée avec elle, dans un appartement, sis au K______ à Genève, où elle résidait avec sa mère, ses grands-parents, ses tantes et sa cousine, en tirant sur L______, le père de son ex-compagne, à quatre reprises avec un revolver dans ledit appartement qui était exigu et où se trouvaient également A______, D______, E______, J______ et M______;

-         d'avoir, le 28 janvier 2012 et dans les jours précédents, commis une infraction à l'art. 33 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les armes (LArm) en détenant sur lui un revolver chargé et en se déplaçant avec dans le canton de Genève, alors qu'il n'était pas titulaire d'un permis de port d'arme;

-         et d'avoir commis une escroquerie au préjudice de l'Hospice général, en remplissant, le 6 juin 2011, une demande d'aide financière indiquant faussement qu'il était domicilié chez ses parents et qu'il ne percevait aucun revenu, dissimulant ainsi qu'il en touchait de son activité professionnelle indépendante dans la construction, et en percevant indûment de la sorte entre le 1er juin 2011 et le 31 janvier 2012, des prestations d'assistance à hauteur de CHF 9'062.-.

 

B. Les faits suivants ressortent de la procédure :

a. Selon le rapport de police du 28 janvier 2012, cette dernière a été informée le jour-même vers 10h30, du fait que des coups de feu avaient été tirés par un individu, dans un appartement du rez-de-chaussée d'un immeuble situé au K______, à Vernier. A leur arrivée, les policiers ont vu un individu, qui s'est avéré être X______, sur le parking devant l'adresse susmentionnée, qui se faisait rouer de coups de lamelles de stores par deux jeunes femmes. Il s'agissait de E______ et D______, qui hurlaient : "il vient de tuer notre père !". Les policiers ont vu, par la porte-fenêtre ouverte et entièrement brisée de l'appartement en cause, un corps gisant à terre. X______ s'est laissé interpeller par la police, qui a saisi son arme, un revolver de marque Taurus Tracker 357 Magnum. Il était également porteur d'un couteau, d'un spray au poivre et d'un chargeur rapide pour revolver vide. Au moment de son interpellation, il avait dit aux policiers : "le gars du 5ème a un flingue et va venir me buter". Un inconnu est ensuite venu donner plusieurs coups de poing à X______, qui a déclaré à la police qu'il s'agissait de la personne qui voulait le tuer. Les inspecteurs ont alors interpellé l'inconnu, qui s'est avéré être F______, le fils de la victime. Il était en possession d'un pistolet de marque Keltec.

Il ressort du rapport de police du 29 janvier 2012 que la victime, L______, est décédée à 11h20. L'appartement où son corps a été trouvé était loué par une de ses trois filles, G______. Une petite terrasse permettait d'entrer directement dans la pièce principale de celui-ci par une porte-fenêtre. Cette pièce était composée d'un coin salon, comportant trois canapés, situé sur la gauche depuis la porte-fenêtre, et d'un coin cuisine, sur la droite, où se trouvaient une table à manger et six chaises. Trois douilles de 357 Magnum et quatre cartouches complètes, dont une percutée sans que le coup ne soit parti, ont été retrouvées sur la terrasse. Une boîte de pistolet vide de marque Keltec avec un permis d'acquisition d'arme au nom de D______ et une facture ont été trouvés dans une armoire de la chambre à coucher de cet appartement.

b. S'agissant du contexte des faits :

b.a. Il ressort en résumé des déclarations concordantes des protagonistes que les familles de L______ et X______ étaient liées par le fait que X______ a été, depuis 2007, le compagnon de D______ et son frère, N______, le compagnon de E______, la sœur de D______. Les deux familles s'entendaient bien et se voyaient régulièrement. Les deux couples ont chacun eu une fille en 2009. Les deux sœurs ont quitté leur compagnon respectif, quelques semaines avant les faits. Elles habitaient depuis lors avec leurs filles et leurs parents chez leur sœur, G______.

b.b. D______ a indiqué à la police et au Procureur que X______ était violent à son encontre pendant leur vie commune. Il possédait des armes et menaçait régulièrement de la tuer. En novembre 2011, ils avaient créé ensemble une société et elle avait pensé que cela pourrait aller mieux entre eux. Elle avait toutefois rapidement été déçue du comportement de X______, qui l'insultait pour un rien. Ce dernier était parti au Kosovo peu après Noël 2011. Avant son départ, il l'avait encore maltraitée et elle avait décidé de le quitter. Elle le lui avait annoncé à son retour, le 8 janvier 2012, en présence de leurs parents respectifs, qui étaient venus chez eux. X______ avait dit à L______, qu'il n'était pas d'accord qu'elle quitte l'appartement. La mère de X______ leur avait dit que "le sang baignerait jusqu'aux genoux et qu'ils allaient tous mourir". Elle avait vraiment eu peur et avait appelé la police. Par la suite, X______ et elle avaient continué à avoir des contacts téléphoniques réguliers. Elle lui avait toujours dit qu'il pouvait voir sa fille quand il le voulait. Le 19 janvier 2012 en fin de journée, X______ était venu chercher cette dernière à la crèche pour l'emmener manger et l'avait ramenée à 20h00, comme elle le lui avait demandé.

Il est établi par la transcription de son appel que D______ a contacté la police le 8 janvier 2012 à 15h37 pour indiquer qu'elle venait de se séparer de son copain et qu'elle sentait qu'il allait faire quelque chose de mal à elle et à sa fille (rapport de police du 13 février 2012).

D______ a écrit à X______ dans un SMS du 8 janvier 2012 à 21h45 : "X______ J______ restera toujours ta fille adorer pour toujours. Si tu As besoin de quoi que ce soit stp n'hesite pas à m'appeler. Pour La Carte, je te donnerai tout le fric il est à toi. Je ne dirai jamais les Secrets qu'on a eu jamais. (bisness et autres sois tranqui). X______ je t ai aimer très fort. Tu Auras tjrs une Place Dans mon Cœur. Prend soin de toi. D______".

b.c. O______, la mère du prévenu, a indiqué qu'elle avait supplié les parents de D______ pour que D______ ne quitte pas son fils, mais qu'elle ne se rappelait pas avoir dit que du sang allait couler. Son fils n'avait jamais été violent et était respectueux avec ses parents. Il ne lui parlait pas beaucoup et ne se confiait pas lorsqu'il était triste. Elle ne se mêlait pas de sa vie. Elle était désolée pour la famille de D______.

b.d. X______ a indiqué que sa vie de couple avec D______ avait eu des hauts et des bas et qu'ils avaient eu des disputes uniquement verbales. Il était parti le 26 ou 27 décembre 2011 au Kosovo pour quelques jours, ce qui avait déplu à D______. Le lendemain de son retour à Genève, le 8 janvier 2012, D______ était venue à leur appartement de La Croix-de-Rozon et lui avait annoncé qu'elle le quittait. Il avait eu l'impression qu'on lui enlevait sa fille. L______ l'avait insulté à cette occasion. Par la suite, il avait parlé deux ou trois fois au téléphone avec D______. Le 19 janvier 2012, il avait été cherché sa fille à la crèche et D______ avait exigé qu'il la ramène à 20h00. Le 26 ou 27 janvier 2012, il lui avait demandé s'il pouvait voir sa fille le samedi suivant. Elle lui avait répondu qu'il pouvait venir la chercher en début d'après-midi. Il avait été sous le choc lorsque D______ lui avait annoncé leur séparation froidement, après cinq ans de vie commune. Depuis lors, il ne dormait plus, avait commencé à prendre des cachets à haute dose et avait perdu beaucoup de poids. Il lui arrivait régulièrement de porter une arme, qu'il avait achetée sans autorisation à P______. Il avait appris à se servir d'une arme pendant son service militaire et avait fait du tir sportif au fusil à plomb. Il allait encore une dizaine de fois par an en moyenne au stand de tir.

b.e. Q______, la conseillère en addictions qui suivait X______ depuis le mois d'août 2011, a indiqué que lors d'un entretien qu'elle avait eu avec ce dernier, deux jours avant les faits, elle avait constaté qu'il était très en colère contre le père de sa compagne car il pensait que ce dernier l'avait incitée à le quitter. Il avait très peur de ne plus pouvoir voir sa fille. Il était aussi en colère car la crèche ne lui avait pas laissé la voir. Il était bouleversé. Il avait beaucoup maigri au cours des mois précédents en raison des médicaments, de son mal-être et de la mauvaise qualité de son sommeil. Elle lui avait prescrit des benzodiazépines.

b.f. Il ressort de l'expertise psychiatrique de X______ du 28 juin 2012 que ce dernier avait exprimé à plusieurs reprises au Dr R______ de la colère contre son beau-père, qu'il trouvait trop intrusif dans sa vie de couple. Il pensait que ce dernier était responsable de la séparation et du fait qu'il ne pouvait pas avoir régulièrement sa fille depuis lors.

b.g. Il ressort des déclarations des témoins S______, P______, T______ et U______ que X______ était sympathique, serviable, sérieux professionnellement, bon père et n'était pas violent.

c. S'agissant du déroulement des faits :

c.a. Il ressort en substance des déclarations concordantes de D______, E______ et A______, présentes dans l'appartement au moment des faits, que X______ était arrivé pour chercher sa fille, le samedi 28 janvier 2012, dans le milieu de la matinée, alors qu'il avait convenu avec D______ qu'il viendrait à 14h00. Il avait frappé à la porte-fenêtre de l'appartement et D______ lui avait dit que leur fille n'était pas prête et qu'il devait revenir plus tard. X______ avait insisté et demandé s'il y avait quelqu'un à l'intérieur, ce à quoi, D______ avait répondu par la négative. A un moment donné, X______ avait forcé le passage et était entré dans l'appartement, contre la volonté de D______. Alors qu'il s'approchait de sa fille dans le salon, L______, qui était assis sur un canapé se trouvant dans une partie de la pièce non visible de X______, s'était levé, lui avait dit de sortir et lui avait donné une gifle sur le côté droit du visage. Il s'agissait d'une gifle très forte, selon E______, et plutôt un geste involontaire, selon D______. X______ avait été ensuite repoussé à l'extérieur par L______ et D______ en tout cas, également par E______ et A______ selon les versions. Ils avaient ensuite poussé la porte-fenêtre pour l'empêcher de rentrer à nouveau. X______ avait alors sorti son arme et avait commencé à taper contre la porte-fenêtre avec sa crosse. La vitre s'était cassée. X______ avait tiré une première fois sur le torse de L______ qui se trouvait debout devant la porte-fenêtre, sans arme, et qui s'était écroulé sur place. D______ et E______ ont toutes deux indiqué à la police que X______ n'était plus rentré à l'intérieur de l'appartement et qu'il avait tiré d'autres coups de feu depuis l'extérieur, un à trois selon les versions. E______ a toutefois indiqué au Procureur que X______ avait mis un pied à l'intérieur pour tirer encore deux ou trois fois sur son père. A______ a déclaré pour sa part à la police que X______ avait tiré plusieurs fois depuis l'extérieur et qu'il était ressorti de l'appartement à travers l'ouverture, puis devant le Procureur, qu'elle ne pouvait pas dire si X______ était entré dans l'appartement après le premier coup de feu.

c.b. Lors de ses déclarations à la police et au Procureur, X______ a confirmé en substance la version concordante de A______, D______ et E______ jusqu'au moment où il avait été repoussé à l'extérieur de l'appartement. Il a précisé qu'il souhaitait passer une bonne journée avec sa fille et qu'il avait sur lui un revolver munitionné de sept cartouches, un chargeur rapide pour barillet muni de sept cartouches, un couteau Spyderco et un spray au poivre. Il avait acheté ce dernier, le jour précédent, dans l'optique de se protéger lorsqu'il irait prendre sa fille le lendemain. Après avoir indiqué à la police qu'il avait pris l'arme car il avait peur, suite aux menaces de la famille de D______, il a indiqué au Procureur, le 10 février 2012, qu'il portait une arme sur lui par habitude et qu'il était tout le temps armé quand il sortait avec sa femme et sa fille pour les protéger. Il a précisé à la fin de son audition à la police du 28 janvier 2012 qu'il n'avait pas été clairement menacé de mort, mais que c'était ce qu'il avait ressenti. Il n'avait pas eu l'intention d'utiliser son revolver s'il avait été agressé en cherchant sa fille, mais seulement le spray de défense acheté à cette fin.

X______ a indiqué qu'il ne serait jamais entré dans l'appartement s'il avait su que les autres membres de la famille de D______ étaient présents. Il avait pensé que D______ ne serait pas contente qu'il entre et qu'elle se dépêcherait de préparer la petite pour qu'il parte au plus vite. Il avait fait deux pas dans le salon et allait prendre sa fille dans ses bras lorsqu'il avait alors reçu un violent coup au niveau de l'oreille droite, donné par L______, qu'il n'avait pas vu jusque-là, de même que sa belle-mère et sa belle-sœur. D______ et ces dernières s'étaient mises entre L______ et lui. Son beau-père voulait le taper à nouveau, il était agressif et lui avait dit de "dégager", avant de partir en courant au bout de la table à manger.

Dans un second temps, le 26 avril 2012, X______ a indiqué qu'après lui avoir donné une gifle, L______ avait voulu sortir avec lui à l'extérieur pour qu'ils s'expliquent entre hommes et que ses filles et sa femme l'avaient retenu. X______ avait ensuite brisé la vitre en tapant avec son pistolet. La porte-fenêtre s'était ouverte et L______ était parti à ce moment-là vers la table du coin salle-à-manger.

X______ a indiqué le 10 février 2012 au Procureur que s'il avait cassé la porte-fenêtre, c'était parce qu'il avait vu que L______ voulait sortir et qu'il savait qu'il avait une arme. Il était sur les nerfs, son beau-père lui avait cassé le tympan, il avait été insulté et n'avait pas pu prendre sa fille. Il était rentré à nouveau dans l'appartement et avait vu L______ aller vers la table.

X______ a indiqué à la police que lorsque L______ était allé vers la table, il l'avait vu prendre quelque chose. Il avait pensé que son beau-père prenait une arme. Il lui était impossible d'expliquer son geste autrement. Il voyait tout flou et n'avait pas vu les mains de son beau-père à ce moment-là. Il a indiqué au Procureur le 10 février 2012 qu'il savait que L______ avait une arme et qu'il avait eu peur qu'il la sorte. Le 4 mai 2012, il a soutenu avoir vu une arme dans les mains de L______, puis le 7 mars 2013, que L______ s'était dirigé vers la boîte à arme et qu'il avait pensé qu'il allait prendre une arme, précisant, sur question de son conseil, qu'il avait vu l'arme.

Il avait alors paniqué, eu peur et tiré plusieurs coups, sans sommation. Il a indiqué à la police qu'il était à cheval sur le rebord de la porte-fenêtre quand il avait tiré, puis qu'il avait reculé sur la terrasse. Le 10 février 2012, il a dit être entré dans l'appartement avant de tirer et, les 26 avril et 4 mai 2012, qu'il avait tiré de l'intérieur.

Le 4 mai 2012, X______ a indiqué que quand il était rentré, il n'y avait plus personne dans son champ de vision. Il ne savait pas où étaient les autres personnes. Il a indiqué le 7 mars 2013 qu'il n'avait pas mis en danger la vie d'autrui car tout le monde était derrière lui lorsqu'il avait tiré en direction de L______.

A la question du conseil des parties plaignantes qui lui demandait où se trouvait l'arme dont il disait avoir eu peur, X______ a indiqué, le 26 avril 2012, qu'il avait lu dans le dossier que la valise de l'arme était chez L______. Quand la police était arrivée, elle avait trouvé l'arme dans la poche de F______. Cette arme appartenait à D______. F______ avait dû la prendre dans l'appartement. Il a indiqué le 4 mai 2012, confronté au fait que F______ n'avait pas pu entrer dans l'appartement, qu'il était possible que les filles lui aient donné l'arme.

Selon X______, si D______, E______ et A______ avaient une autre version des faits que la sienne, c'était parce qu'elles s'étaient liguées contre lui. Il a exprimé à de nombreuses reprises des regrets et présenté des excuses à la famille de D______.

c.c. Le 28 janvier 2012, V______, l'épouse de F______ habitant au 5ème étage du K______, a indiqué à la police qu'elle avait entendu trois coups de feu, puis vu X______ de son balcon, lequel avait alors crié : "fallait pas qu'il me pousse !". Après avoir appelé la police, elle avait réveillé son mari, puis tous les deux étaient descendus au rez-de-chaussée.

c.d. F______ a indiqué à la police et au Procureur qu'il était descendu de chez lui après avoir pris l'arme de sa sœur D______, qui se trouvait dans l'armoire de sa chambre à coucher. Il avait alors vu son père allongé dans une mare de sang. Un policier l'avait empêché de rentrer dans l'appartement.

c.e. W______ a indiqué à la police, le 28 janvier 2012, qu'elle résidait à la rue K______ et qu'aux environs de 10h00 ce même jour, elle était passée à proximité de l'appartement où se trouvait L______. Son attention avait été attirée par ses occupants. Elle avait entendu un enfant qui criait et pleurait et des adultes qui parlaient très fort. Elle avait entendu un homme dire : "sors d'ici connard" et avait vu plusieurs personnes par la porte-fenêtre, qui était entrouverte. Elle avait cru comprendre que quelqu'un essayait de sortir par cette porte-fenêtre et qu'une seconde personne tentait de l'en empêcher en repoussant systématiquement la porte. La porte-fenêtre s'était refermée à plusieurs reprises. Un peu plus tard, alors qu'elle avait continué son chemin, elle avait entendu un bruit de verre qui se brisait, puis immédiatement après, des coups de feu. Elle avait ensuite vu un homme sortir par la porte-fenêtre, un pistolet à la main, et se diriger calmement vers une voiture.

c.f. Il ressort des transcriptions des appels arrivés le 28 janvier 2012 à la Centrale police que E______, V______ et Y______ ont appelé à 10h28 et 10h29 pour signaler les coups de feu. Y______ avait notamment indiqué que la personne qui tenait le pistolet avait dit : "vous me traitez de fils de pute, donc voilà ce qui arrive ".

c.g. Il ressort du rapport d'autopsie établi le 2 mai 2012 par la Dre Z______ et des photographies illustrant la trajectoire des tirs que L______ est décédé des conséquences de lésions provoquées par deux projectiles d'arme à feu. Le premier projectile a atteint son corps au niveau du cuir chevelu, en est ressorti au niveau du cou, puis est rentré à nouveau dans son corps au niveau du thorax pour en ressortir dans la région axilliaire inférieure droite (sous le bras). Les lésions consécutives à la trajectoire de ce projectile engendraient une incapacité d'agir à très brève échéance. Un deuxième projectile est entré dans son corps au niveau abdominal, au milieu de l'avant du corps, et en est ressorti par la fesse droite. Les trajectoires des deux projectiles ont été décrites sans préjuger l'ordre des tirs. Les caractéristiques des deux orifices d'entrée permettaient de dire que les coups de feu avaient été tirés à distance ou à travers un écran.

c.h. Q______ a indiqué au Procureur le 25 avril 2013 que lorsqu'elle avait rencontré X______ en prison après les faits, il lui avait exprimé la rage qui l'avait pris au moment des faits par rapport à son beau-père qui lui interdisait de voir sa fille et qu'il s'était senti menacé par ce dernier qui avait une arme.

c.i. Selon le rapport de la Brigade de Police Technique et Scientifique du 5 juin 2012, illustré par deux croquis, les constatations suivantes ont notamment été faites dans la pièce principale de l'appartement :

-       La vitre de la porte-fenêtre était cassée et une grande partie des morceaux de verre se trouvait dans le sang de la victime.

-       Un projectile entier, un fragment de projectile ainsi qu'un impact au sol de projectile ont été découverts près du corps de la victime, ce qui permettait de reconstituer une trajectoire de tir dont le départ se trouvait dans la zone de la porte-fenêtre. Le projectile s'était fragmenté au moment de l'impact au sol et deux fragments avaient continué leur chemin jusqu'au mur se trouvant face à la porte-fenêtre.

-       Un orifice traversant une chaise située au milieu de la table dans le coin salle-à-manger, côté fenêtre, et deux impacts sur le mur de la salle à manger et le meuble de la cuisine, permettaient de reconstituer une trajectoire de tir, dont le départ se trouvait également dans la zone de la porte-fenêtre.

Il ressort des photographies annexées à ce rapport, prises le jour des faits, que le corps de L______ était allongé le long de la porte-fenêtre, la tête du côté de coin salon, où se trouvait une mare de sang. Il n'y avait pas de grande quantité de sang ailleurs et en particulier pas à proximité immédiate de la table dans le coin cuisine.

c.j. Il ressort du rapport d'expertise du 20 mars 2012 établi par la Dre Z______ que l'examen du prévenu, cinq heures après les faits, avait notamment mis en évidence une perforation tympanique à droite pouvant chronologiquement entrer en relation avec les faits et qui avait pu être causée par un coup porté directement sur la région de l'oreille droite, voire une simple gifle.

c.k. L'analyse des traces biologiques prélevées sur la crosse et la détente du pistolet Keltec, saisi sur F______, a mis en évidence que l'ADN de ce dernier et celui de X______ n'étaient pas exclus, contrairement à celui de L______, qui l'était.

d. Selon le rapport d'expertise psychiatrique de X______ du 28 juin 2012, établi par la Dre AA______, ce dernier présentait, au moment des faits, un épisode dépressif moyen dans le cadre d'un trouble dépressif récurrent, assimilable à un grave trouble mental. Il avait une personnalité émotionnellement labile type impulsif, d'intensité faible à modérée, et des traits de personnalité narcissique et dyssociale qui n'étaient pas assimilables à un grave trouble mental. Il était sous l'emprise des benzodiazépines qu'il prenait quotidiennement depuis plusieurs années. Cette dépendance, assimilable à une addiction, était d'intensité faible à modérée. Il était toutefois pleinement responsable de ses actes. Ces derniers n'étaient pas en rapport avec un état mental pathologique. Au vu de son fonctionnement psychique et de ses antécédents judiciaires, le risque de récidive était présent et non négligeable, sans qu'il soit possible de préciser la nature exacte des infractions qu'il pourrait commettre à nouveau. Un suivi psychothérapeutique pouvait être bénéfique à X______, mais il n'y avait pas d'argument clinique pour l'imposer. X______ était lui-même demandeur d'une prise en charge psychothérapeutique plus intensive que celle dont il bénéficiait Champ-Dollon.

e.a. Par courrier du 6 novembre 2012, l'Hospice général a déposé plainte pénale à l'encontre de X______ pour violation de l'art. 55 LIASI, voire escroquerie au sens de l'art. 146 CP. Ce dernier avait menti sur sa situation puisqu'il avait indiqué habiter chez ses parents à rue AB______, au Petit-Lancy, alors qu'il cohabitait avec D______ pendant toute la période de l'aide sociale et financière, soit du 1er juin 2011 au 31 janvier 2012. Dans la mesure où les concubins avaient des revenus, c'était la totalité de l'aide financière qui avait été obtenue sans droit, soit CHF 9'062.-. L'Hospice général était informé des liens de X______ avec plusieurs sociétés, mais selon ce dernier, il n'en retirait aucun avantage financier.

e.b. Il ressort de la demande de prestations d'aide financière annexée à la plainte, signée par X______ le 6 juin 2011, qu'il avait mentionné qu'il habitait à la rue AB______ avec ses parents, qu'il était séparé de D______, en incapacité de travail à 100 % et sans revenus. Il avait signé le même jour un engagement envers l'Hospice général selon lequel il devait notamment donner immédiatement et spontanément à ce dernier tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique et signaler tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant de ses prestations d'aide financière.

e.c. AC______, représentant l'Hospice général, a confirmé la plainte de ce dernier devant le Procureur le 7 mars 2013.

e.d. X______ a indiqué à la police le 28 janvier 2012 qu'il n'avait plus d'activité professionnelle depuis fin décembre 2010. Depuis juillet ou août 2011, l'Hospice général lui versait CHF 1'300.- par mois. Il a déclaré au Procureur, le 20 septembre 2012, qu'après avoir passé trois semaines à la Clinique de Belle-Idée, il n'avait pas repris d'activité professionnelle, pensant avant tout à la réussite de sa thérapie. Il n'avait repris une activité professionnelle qu'en septembre 2011. Il ressort de son audition du 7 mars 2013 que si D______ et lui-même avaient réellement besoin d'argent au début, ce n'était plus le cas les trois derniers mois.

C. Lors de l'audience de jugement :

a. X______ a indiqué qu'après sa rupture avec D______, il craignait de ne plus revoir sa fille, J______, qui était tout pour lui. Le 19 janvier 2012, il avait été convenu avec D______ qu'il irait chercher leur fille à la crèche. On ne lui avait toutefois pas laissé la prendre car D______ avait dit qu'il fallait l'attendre. Il avait voulu voir J______ à une autre reprise et proposé à D______ qu'elle la lui amène à une des entrées du Centre commercial de Balexert. D______ lui avait dit de venir à l'intérieur du magasin. Il avait refusé car il avait honte de venir prendre sa fille devant tout le monde et ne voulait pas laisser son père dans la voiture au garage. A part l'épisode de Balexert, D______ ne lui avait pas refusé clairement de voir J______, mais elle avait fait des complications. Depuis qu'il était en détention, il n'avait pas pu voir sa fille et en souffrait.

X______ a admis avoir tué L______. Lorsqu'il s'était retrouvé dehors, après avoir reçu la gifle, il aurait dû partir. Il confirmait avoir vu L______ tenir une arme. Il ne l'avait pas reconnue sur le moment, mais avait pensé que c'était l'arme que D______ avait reprise chez eux. C'était l'arme qui avait été retrouvée sur F______. Il avait vu l'une des filles, qu'il ne voulait pas nommer, passer l'arme à ce dernier. X______ a contesté catégoriquement avoir mis en danger autrui. Aucune des personnes présentes, hors L______, n'était dans son champ de tir. Il savait qu'un ricochet était possible quand on tirait avec une arme. Sur demande du conseil des parties plaignantes, X______ a indiqué sur le plan de l'appartement l'endroit où se trouvaient A______, D______, E______, J______ et M______ au moment où il avait tiré. Il a désigné une zone située entre le coin cuisine et le hall d'entrée, contre le mur qui se trouve en face de la porte-fenêtre et qui sépare le séjour de la salle de bains, la zone dessinée étant décalée sur la gauche du point de vue de la porte-fenêtre.

X______ a admis avoir commis une infraction à la loi fédérale sur les armes. S'agissant de l'escroquerie, il a indiqué avoir eu besoin de l'aide de l'Hospice général au début, mais plus à la fin. Il avait bien eu des revenus de la société AD______ entre la faillite et la création de AE______, sauf durant une petite période de deux ou trois mois jusqu'aux premiers revenus obtenus de cette dernière société. Il avait menti en donnant l'adresse de ses parents de la rue AB______ et en indiquant qu'il était séparé de D______ car cela lui permettait d'obtenir plus d'aide. Il n'avait pas parlé des sociétés susmentionnées à l'Hospice général. Il reconnaissait qu'il y avait eu un abus, dès le premier jour et était prêt à admettre l'entier de la période reprochée. Son couple avait néanmoins vraiment eu besoin d'une aide financière.

b. E______ a indiqué qu'à aucun moment son père ne s'était dirigé vers la table et qu'il était resté contre la vitre de la porte-fenêtre, où elle l'avait vu tomber au ralenti. Sa mère, sa sœur et les deux petites filles étaient juste derrière lui. X______ n'avait jamais rien assumé et n'avait aucun regret par rapport à ce qu'il avait fait. Il était difficile de l'écouter donner sa version des faits qui ne correspondait pas à la réalité et soutenir notamment que son père était armé. Elle souhaitait qu'il dise la vérité. Elle aurait pu elle-même mourir ce jour-là et les autres aussi. Il n'y avait pas de mot pour décrire les conséquences du fait d'avoir vu son père être tué devant ses yeux, mais ce dernier avait laissé sa vie pour les protéger et, pour lui, ils se devaient tous d'aller bien.

c. F______ a indiqué qu'il n'y avait jamais eu de menaces de la part d'un membre de la famille de D______ envers X______. Il savait que ce dernier était toujours armé et qu'il aimait bien les armes. Sa sœur D______ lui avait fait comprendre qu'elle était inquiète au sujet de X______, mais elle n'avait pas évoqué de menaces de mort. Il était énervé d'entendre X______ maintenir que son père était armé. Il était extrêmement difficile pour sa mère et sa sœur de passer pour des menteuses. Elles attendaient de X______ qu'il donne des explications sur ce qu'il avait fait et dise la vérité.

d. G______ n'a pas pu s'exprimer au-delà du fait qu'elle était complètement dégoutée.

e. AF______, oncle du prévenu, entendu en qualité de témoin, a déclaré qu'il connaissait bien X______, qui était respecté et travailleur. C'était quelqu'un de bien, qui aidait les autres. Il avait assisté à son mariage avec D______. Pour toute la famille, c'était très important qu'il ait trouvé une femme d'origine albanaise. Il n'avait jamais assisté à des actes violents de sa part. Il aimait beaucoup sa fille.

f. Avant les plaidoiries, le Tribunal a annoncé aux parties qu'il examinerait dans sa délibération si les faits qualifiés de mise en danger de la vie d'autrui par le Ministère public tombaient sous le coup de l'infraction d'exposition s'agissant de J______.

g. A______ a conclu à ce que X______ soit condamné à lui payer :

-         les sommes de CHF 70'000.- et CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012, à titre de réparation du tort moral, respectivement, pour la perte de son époux et pour la mise en danger de sa vie,

-         et la somme de CHF 3'400.-, avec intérêts à 5% dès le 6 février 2012, à titre de réparation du dommage matériel, constitué par les frais d'inhumation de L______.

D______ et E______ ont conclu à ce que X______ soit condamné à leur payer, à chacune, les sommes de CHF 40'000.- et CHF 20'000.-, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012, à titre de réparation du tort moral, respectivement, pour la perte de leur père et pour la mise en danger de leur vie.

F______ a conclu à ce que X______ soit condamné à lui payer la somme de CHF 40'000.-, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012, à titre de réparation du tort moral pour la perte de son père.

G______ a conclu à ce que X______ soit condamné à lui payer :

-         la somme CHF 40'000.-, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012, à titre de réparation du tort moral pour la perte de son père,

-         et la somme de CHF 10'906,95 avec intérêts à 5% dès le 30 avril 2013, à titre de réparation du dommage matériel, constitué par les trois mois de loyers qu'elle avait dû verser pour conserver le bail de l'appartement jusqu'à la reconstitution (CHF 5'510.-) et pour les dégâts de l'appartement (CHF 6'27,55), sous déduction du montant déjà versé par X______ (CHF 830,60).

h. Le prévenu a acquiescé aux conclusions civiles sur le principe, mais pas sur les montants requis. Il a indiqué en fin d'audience qu'il éprouvait du regret envers la famille de D______ ainsi que sa propre famille car il les avait démolies.

D. S'agissant de sa situation personnelle, X______ est âgé de 33 ans et ressortissant suisse. Sa famille, originaire du Kosovo, est venue en Suisse en 1973, avant sa naissance. Il a été marié selon la coutume kosovare avec D______ et a vécu avec elle de 2007 à décembre 2011. Ils ont eu ensemble une fille, J______, née le ______ 2009. X______ a obtenu un CFC de peintre en bâtiment en 1999, puis s'est rapidement mis son compte. Il a essentiellement exercé une activité dans le bâtiment et créé successivement plusieurs sociétés. Il a également exploité des salons de massage, sur des courtes périodes, en 2006 et 2010. Il a touché l'aide l'Hospice général du 1er juin 2011 au 31 janvier 2012. Il a été hospitalisé à la clinique de Belle-Idée, en février 2010, pour un sevrage alcoolique, pendant environ trois semaines. X______ travaille à Champ-Dollon depuis le 21 décembre 2012 et suit également des cours de français, de mathématiques et de comptabilité dans le but d'obtenir un bachelor. Il ressort d'un rapport de suivi établi le 16 décembre 2013 par l'Unité de psychiatrie pénitentiaire de Champ-Dollon que X______ suit de manière régulière et investie une psychothérapie depuis le 28 juin 2012.

E. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, X______ a été condamné le 20 octobre 2008, pour escroquerie et faux dans les titres, à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, à CHF 215.-, le jour-amende, avec sursis et un délai d'épreuve de 3 ans.

EN DROIT

1.1. Selon l'art. 111 CP, celui qui aura intentionnellement tué une personne sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins.

Selon l'art. 15 CP, quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances.

La légitime défense suppose une attaque, c'est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un bien juridiquement protégé, ou la menace d'une attaque, soit le risque que l'atteinte se réalise. Il doit s'agir d'une attaque actuelle ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l'atteinte soit effective ou qu'elle menace de se produire incessamment (ATF 106 IV 12 consid. 2a p. 14; 104 IV 232 consid. c p. 236 s.).

Celui qui invoque un fait justificatif susceptible d'exclure sa culpabilité ou de l'amoindrir doit en rapporter la preuve, car il devient lui-même demandeur en opposant une exception à l'action publique. Si une preuve stricte n'est pas exigée, l'accusé doit rendre vraisemblable l'existence du fait justificatif. Il convient ainsi d'examiner si la version des faits invoquée par l'accusé pour justifier la licéité de ses actes apparaît crédible et plausible eu égard à l'ensemble des circonstances (PIQUEREZ/MACALUSO, Procédure pénale suisse, n. 555, p. 189).

Lorsque l'intéressé croit à tort à une attaque imminente, on parle de légitime défense putative. L'auteur sera mis au bénéfice de l'art. 13 CP et jugé comme si la situation de légitime défense avait existé, pour autant que son erreur n'ait pas été évitable. Pour qu'il y ait légitime défense putative, il faut que l'impression dont l'auteur se prévaut se fonde sur des circonstances de fait qui expliquent son erreur. La simple impression qu'une attaque ou une menace imminente sont possibles ne suffit pas à faire admettre un état de légitime défense (ATF 93 IV 81, JdT 1967 IV 150; ROTH, MOREILLON, Commentaire romand, Code pénal I, p. 191 et 192, n. 24).

1.2. En l'espèce, le Tribunal retient pour établi qu'après le départ du domicile commun de D______ du 8 janvier 2012, X______ était triste, désorienté et confus. Il lui était difficile d'accepter cette situation et craignait qu'on le prive de ses relations personnelles avec sa fille. Il était en colère contre son beau-père, L______, qu'il tenait pour responsable de sa séparation, selon ce qui ressort des témoignages du Dr R______ et de Q______. Après la séparation du couple, D______ n'a toutefois pas empêché X______ de voir sa fille, même si elle s'est sans doute davantage affirmée qu'auparavant, en lui posant des limites, ce qui ressort des épisodes de la crèche et de Balexert évoqués par ce dernier.

Bien que certaines contradictions ressortent des différentes déclarations, il est établi avec certitude que lorsque X______ s'est approché de sa fille, le 28 janvier 2012, L______ lui a donné une gifle et l'a poussé dehors avec l'aide de D______, avant de refermer la porte-fenêtre et de la tenir pour empêcher X______ de rentrer. Le témoin W______, qui passait à proximité, a entendu avant les coups de feux les mots: "sors d'ici connard", ce qui démontre qu'il a été demandé à X______ de quitter les lieux avec une certaine véhémence, si ce n'est des insultes. Il est établi que la gifle reçue par le prévenu a été très forte, en référence à ses propres déclarations et à celles de E______. Suite à cette gifle, X______ s'est retrouvé sous le coup d'une grande colère, liée à la douleur et la contrariété de ne pouvoir partir tout de suite avec sa fille, ce qui ressort des déclarations de Q______, Y______, V______ et du prévenu lui-même.

X______, repoussé sur la terrasse à l'extérieur de l'appartement, a sorti son revolver, dont il a utilisé la crosse pour briser la vitre de la porte-fenêtre. Il a ensuite tiré, depuis la terrasse, ou le seuil de la porte-fenêtre, avec son revolver à quatre reprises sur L______, qui se trouvait à l'intérieur, devant la porte-fenêtre, selon la version concordante des faits des trois femmes présentes dans l'appartement, qui est confirmée par les éléments suivants :

-         la position du corps de la victime, qui a été retrouvé allongé devant la porte-fenêtre;

-         la trajectoire de l'un des tirs, établie par les fragments de projectiles retrouvés sur le plancher à proximité immédiate de la porte-fenêtre et dans le mur se trouvant face de cette dernière;

-         l'absence de trace de sang vers la table, soit à l'endroit où la victime aurait été atteinte par les balles selon le prévenu, étant rappelé que, selon l'autopsie, les lésions subies par L______ engendraient une incapacité d'agir à très brève échéance;

-         enfin, le témoignage de la voisine, W______, qui a déclaré avoir entendu des coups de feu immédiatement après un bruit de verre qui se brisait.

Seul X______ a soutenu que L______ ne se tenait pas face à la fenêtre quand il avait tiré, mais vers la table du coin cuisine.

Le Tribunal tient encore pour établi que L______ ne s'est pas saisi d'une arme et qu'il n'y en avait pas dans l'appartement. Les déclarations du prévenu à ce sujet n'ont cessé de varier, contiennent des contradictions et sont dépourvues de crédibilité. X______ a manifestement adapté sa version aux faits résultant de sa connaissance du dossier, en vue de justifier son comportement. Il a ainsi déclaré avoir pensé que L______ allait se saisir d'une arme, avant de soutenir avoir vu une arme. Il a expliqué le fait qu'on en avait pas trouvée, en alléguant que F______ était venu la prendre sur place, puis qu'une des femmes présentes avait dû remettre l'arme à ce dernier. Lors de l'audience de jugement, il a prétendu avoir vu une des sœurs de F______ remettre l'arme à son frère. Pour le surplus, l'épouse et les deux filles de la victime ont toutes indiqué que L______ n'était pas armé. Enfin, l'analyse des traces prélevées sur la crosse de l'arme Keltec indique que si la présence des profils ADN de F______ et de X______ n'est pas exclue, celle du profil de L______ l'est.

X______ a donc tiré avec son revolver à quatre reprises sur L______ et l'a atteint à la tête et au thorax, causant ainsi volontairement sa mort. Il s'est ainsi rendu coupable de meurtre au sens de l'art. 111 CP.

Les conditions d'application de la légitime défense ne sont pas réalisées faute d'attaque actuelle ou imminente, dès lors qu'il est retenu que L______ ne s'est pas saisi d'une arme.

Il n'y a pas lieu de retenir un état de légitime défense putative, X______ n'ayant pas pu croire que L______ allait se saisir d'une arme, puisqu'il est établi que ce n'est pas le cas et que la version des faits du prévenu quant au comportement de la victime n'est pas crédible.

1.4. Selon l'art. 48 CP, le juge atténue la peine, notamment, si l'auteur a agi dans une détresse profonde (let. a ch. 2) ou si l'auteur a agi en proie à une émotion violente que les circonstances rendaient excusable ou s'il a agi dans un état de profond désarroi (let. c ch. 2).

La détresse profonde peut être aussi bien morale que matérielle (ATF 107 IV 94, consid. 4a). Il faut dans ce contexte que l'auteur soit poussé à violer la loi pénale par une situation proche de l'état de nécessité, à savoir que, sous la pression d'une détresse particulièrement grave, il croit ne pouvoir trouver une issue que dans la commission de l'infraction (ATF 107 IV 94, consid. 4a). L'admission de la circonstance atténuante de la détresse profonde implique que l'auteur ait respecté une certaine proportionnalité entre les motifs qui le poussent à agir et l'importance des biens qu'il lèse (FAVRE/PELLET/STOUDMANN, Code pénal annoté, 3ème édition, Lausanne 2007, n. 1.5 ad art. 48, p. 172).

En l'espèce, si X______ vivait des moments difficiles des suites de sa séparation, il n'était à l'évidence pas dans un état de détresse profonde au sens de cette disposition. Son ex-compagne ne l'empêchait en particulier pas de voir sa fille. Cette circonstance atténuante ne sera ainsi pas retenue.

L'art. 48 let. c. CP suppose quant à lui que l'auteur ait agi en proie à une émotion violente que les circonstances rendaient excusables.

X______ a sans doute agi sous l'effet d'une émotion violente, soit sous l'effet d'une grande colère. Cette émotion n'était toutefois pas rendue excusable par les circonstances, dès lors qu'il était principalement responsable de la situation conflictuelle qui avait provoqué son émotion. En effet, il s'est présenté avant l'heure convenue et est entré pour prendre sa fille contre la volonté de sa mère. C'est son propre comportement incorrect qui a été la cause de la gifle que lui a donné son beau-père et du fait qu'il a été repoussé hors de l'appartement, circonstances qui ont été à l'origine de sa violente colère.

Aucune circonstance atténuante n'est ainsi réalisée.

2.1. L'art. 129 CP réprime le comportement de celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent.

Cette infraction suppose la réunion de trois éléments, à savoir la mise d'autrui dans un danger de mort imminent, la conscience de ce fait et l'absence de scrupules. La notion de danger de mort imminent selon l'art. 129 CP implique tout d'abord un danger concret, c'est-à-dire un état de fait dans lequel existe, d'après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de possibilité que le bien juridique protégé soit lésé, sans toutefois qu'un degré de probabilité supérieur à 50% soit exigé. Le danger de mort imminent représente cependant plus que cela. Il est réalisé lorsque le danger de mort apparaît si probable qu'il faut être dénué de scrupules pour négliger sciemment d'en tenir compte. Quant à la notion d'imminence, elle n'est pas aisée à définir. Elle implique en tout cas, outre la probabilité sérieuse de la réalisation du danger concret, un élément d'immédiateté qui est défini moins par l'enchaînement chronologique des circonstances que par le lien de connexité directe unissant le danger et le comportement de l'auteur (ATF 121 IV 67, consid. 2b/aa).

Sur le plan subjectif, l'auteur doit être conscient de mettre autrui en danger de mort imminent et le faire sciemment (ATF 121 IV 67, consid. 2d), car celui qui crée consciemment un tel danger le veut nécessairement. Peu importent à cet égard les mobiles de l'auteur. En revanche l'auteur doit refuser, même à titre éventuel, la réalisation de ce risque, sans quoi il s'agirait d'une tentative d'homicide (ATF 107 IV 163, consid. 3).

L'auteur doit encore créer le danger sans scrupules. Un acte est commis sans scrupules lorsque, compte tenu des moyens utilisés, des mobiles et de l'état de l'auteur ainsi que des autres circonstances, il apparaît comme contraire aux principes généralement admis des bonnes mœurs et de la morale. N'importe quelle mise en danger ne suffit pas, il faut qu'elle lèse gravement le sentiment moral (ATF 114 IV 103, consid. 2a). Il faut en quelque sorte qu'elle atteigne un degré qualifié de réprobation (cf. Peter AEBERSOLD, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, 2003, art. 129 CP n. 33). Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente. Il s'agit également de savoir si les motifs de l'acte peuvent être approuvés ou être considérés comme compréhensibles, l'ampleur du danger créé étant également déterminante pour apprécier l'absence de scrupules (ATF 107 IV 163, consid. 3 p. 165/166).

2.2. Se rend coupable d'exposition celui qui, ayant la garde d'une personne hors d'état de se protéger elle-même où le devoir de veiller sur elle, l'aura exposée à un danger de mort ou un danger grave et imminent pour la santé, ou l'aura abandonnée en un tel danger (art. 127 CP).

Pour que l'infraction soit consommée, le comportement typique doit créer un danger de mort ou un danger grave et imminent pour la santé. La jurisprudence décrit la notion de danger concret comme un état de fait dans lequel il existe d'après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de probabilité que dans le cas d'espèce, le bien juridique protégé soit lésé sans qu'un degré de probabilité supérieur à 50 % soit exigé. L'infraction n'est réalisée que s'il existe un lien de causalité entre le comportement et le résultat typique précité. L'auteur doit être une personne assumant un devoir de garde ou de veiller sur un tiers. Le devoir de garant concerne avant tout les parents à l'égard de leurs enfants (art. 272 et 301 et ss CC). Il faut ensuite que la victime soit hors d'état de se protéger elle-même, tel par exemple un petit enfant ou un enfant malade. L'infraction est intentionnelle mais le dol éventuel suffit (DUPUIS et autres, Petit commentaire, Code pénal, 2012, ad art. 127, n°. 1 et ss).

2.3. En l'espèce, X______ a tiré à quatre reprises avec un revolver depuis l'extérieur ou la porte-fenêtre de l'appartement sur L______ qui se trouvait à l'intérieur, à proximité immédiate de cinq autres personnes, ce qui est établi par les déclarations concordantes, notamment immédiatement après les faits, de A______, D______ et E______.

Le prévenu n'a pour sa part pas été constant dans ses déclarations au sujet de l'endroit où se trouvaient les femmes et les enfants de la famille de L______ au moment des tirs, indiquant dans un premier temps qu'il n'y avait personne dans son champ de vision, avant de dire que ces personnes étaient derrière lui. Lors de l'audience de jugement, il a situé, sur le plan de l'appartement, l'endroit où elles se trouvaient dans la trajectoire d'un fragment de projectile.

Il est démontré qu'avec le revolver et les projectiles utilisés, ces derniers pouvaient continuer leur trajectoire et perforer une personne, même après avoir touché un corps, puisqu'un des projectiles ayant atteint le corps de L______ en est ressorti avant d'y pénétrer à nouveau. Il est également établi que des fragments de projectiles ont touché le dossier d'une chaise, un meuble de cuisine et le mur se trouvant derrières les personnes exposées. Ainsi, les projectiles pouvaient, directement, par ricochet ou déviation, atteindre n'importe laquelle des autres personnes présentes et la tuer. Le prévenu a créé, selon le cours ordinaire des choses, une probabilité très sérieuse d'atteindre à la vie des cinq autres personnes présentes et il a ainsi créé un danger de mort imminent pour ces personnes.

Le prévenu avait une bonne connaissance des armes à feu et ne pouvait ignorer le risque de mort concret auquel il exposait les personnes présentes dans l'appartement. Il a d'ailleurs admis lors de l'audience de jugement que les projectiles pouvaient ricocher. Il a agi intentionnellement et sans scrupules, vu l'ampleur du danger créé.

X______ s'est ainsi rendu coupable de mise en danger de la vie d'autrui au sens de l'art. 129 CP.

2.4. Les conditions d'application de l'infraction d'exposition sont remplies en ce qui concerne J______, dès lors que X______ avait le devoir en tant que père de veiller sur sa fille, au sens de cette disposition. C'est cette dernière qui doit donc s'appliquer en ce qui concerne J______, en tant que lex specialis, et non l'art. 129 CP. X______ sera ainsi reconnu coupable d'exposition au sens de l'art. 127 CP.

3. L'art. 33 al. 1 let. a LArm punit d'une peine privative de liberté de 3 ans au plus ou d'une peine pécuniaire, celui qui aura, intentionnellement, sans droit, aliéné, acquis, fabriqué, modifié, porté, importé des armes, des éléments essentiels d'armes ou des composants d'armes spécialement conçus, des accessoires d'armes, des munitions ou des éléments de munitions, ou en aura fait le courtage.

Selon l'art. 4 al. 1 LArm, on entend par armes notamment, les engins qui permettent de lancer des projectiles au moyen d'une charge propulsive et peuvent être portés et utilisés par une seule personne (arme à feu).

Selon l'art. 27 al. 1 LArm, toute personne qui porte une arme dans un lieu accessible au public ou qui transporte une arme doit être titulaire d'un permis de port d'armes. Le titulaire de ce permis doit le conserver sur lui et le présenter sur demande aux organes de la police ou des douanes.

En l'espèce, il est établi que, le 28 janvier 2012 et les jours précédents, X______ a détenu sur lui un revolver chargé et qu'il s'est déplacé avec ce dernier dans le canton de Genève, alors qu'il n'était pas titulaire d'un permis de port d'arme.

Il a ainsi commis une infraction à l'art. 33 al. 1 let. a LArm, dont il sera reconnu coupable.

4.1. Aux termes de l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers et sera puni d'une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

4.2 En l'espèce, il est établi et admis que le prévenu a trompé l'Hospice général en lui donnant de fausses informations et en particulier en ne lui annonçant pas les revenus qu'il avait touchés entre le 1er juin 2011 et le 31 janvier 2012, période pendant laquelle il a été actif dans le cadre de deux sociétés. Il a ainsi astucieusement déterminé l'Hospice général à lui verser indûment des prestations d'assistance. X______ sera donc reconnu coupable d'escroquerie.

5. Conformément à l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération ses antécédents et sa situation personnelle ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). Le facteur essentiel est celui de la gravité de la faute.

La faute du prévenu est extrêmement lourde. Il s'en est pris à la vie d'autrui, soit le bien le plus précieux de notre ordre juridique, en tirant à quatre reprises avec une arme à feu sur son beau-père, sans sommation, alors qu'il se trouvait à sa proximité immédiate, le touchant à la tête et au thorax et ne lui laissant aucune chance de survie. Il a ainsi fait preuve d'une intense volonté homicide. X______ a agi devant l'épouse, les deux filles et les deux petites-filles de la victime, sans aucune considération pour ces dernières, qui ont vu leur proche mourir devant leurs yeux. Il a également mis en danger la vie de ces cinq personnes, dont sa propre fille âgée de deux ans à l'époque. Il a agi pour un mobile futile et égoïste. Il était sous le coup de la colère en raison notamment de sa frustration de ne pas pouvoir prendre sa fille immédiatement, alors qu'il savait pouvoir le faire quelques heures plus tard, et en réaction impulsive à la gifle qui lui avait été donnée par L______, sur lequel il focalisait son ressentiment suite à sa rupture. Le prévenu avait une totale liberté de choix. Il aurait pu et dû choisir de s'en aller, plutôt que de se servir de son arme, ce qu'il a admis lui-même à l'audience de jugement. S'agissant de sa collaboration, le Tribunal retient en sa faveur que X______ est resté sur les lieux après les faits et qu'il s'est laissé interpeller sans résister. Il a admis avoir tiré contre L______, le port d'armes illicite et l'escroquerie au préjudice de l'Hospice général. Cela étant, sa collaboration ne peut être qualifiée que de mauvaise dès lors qu'il a menti sur le déroulement des faits, en adaptant sa version des faits pour la faire coïncider au dossier et minimiser sa faute. De ce fait, et en dépit des nombreuses excuses qu'il a présentées aux proches de la victime et des regrets exprimés, sa prise de conscience apparaît nulle. Le fait qu'il n'ait pas hésité à salir les victimes, en accusant à tort L______ de l'avoir menacé d'une arme et ses enfants de l'avoir cachée, apparaît particulièrement odieux et en contradiction totale avec les excuses formulées. S'agissant de sa situation personnelle, le prévenu était certainement très affecté au moment des faits par le départ de son épouse et de sa fille du domicile conjugal, mais cela ne justifie en rien son geste. Son ex-compagne ne l'empêchait pas de voir sa fille, il avait une activité professionnelle et était soutenu par sa famille et des thérapeutes. X______ a commencé en prison une thérapie et est demandeur d'une prise en charge psychothérapeutique plus intensive que celle dont il bénéficie à Champ-Dollon, ce qui doit être retenu en sa faveur. Il y a concours d'infractions, ce qui est un facteur aggravant de la peine. La responsabilité de X______ est pleine et entière

6. Au vu de sa faute, X______ sera condamné à une peine privative de liberté de 14 ans, sous déduction de 693 jours de détention avant jugement.

7. Selon l'art. 46 al. 1 CP, si durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel.

Dès lors que X______ a commis une nouvelle escroquerie dans le délai d'épreuve du sursis qui lui avait été accordé par jugement du Tribunal de police de Genève du 20 octobre 2008 le condamnant pour une même infraction, il se justifie de révoquer le sursis.

8. X______ sera maintenu en détention pour des motifs de sûreté par décision motivée séparée.

9. La partie plaignante peut faire valoir ses conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure (art. 122 al. 1 CPP). Le Tribunal statue également sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (art. 126 al. 1 let. a CPP)

Chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence (art. 41 al. 1 CO). La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

A teneur de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.

Le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la gravité de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale (ATF 123 III 315). Le montant finalement alloué doit tenir compte de la souffrance effectivement ressentie par le demandeur.

En cas de décès, le juge doit prendre en compte le lien de parenté entre la victime et le défunt pour fixer le montant de base. La perte d'un conjoint est ainsi généralement considérée comme la souffrance la plus grave, suivie de la mort d'un enfant et de celle d'un père ou d'une mère. Le juge adapte ensuite le montant de base au regard de toutes les circonstances particulières du cas d'espèce. Il prend en compte avant tout l'intensité des relations que les proches entretenaient avec le défunt et le caractère étroit et harmonieux de ses dernières. Outre l'intensité des relations, la pratique retient notamment comme autres circonstances à prendre en compte l'âge du défunt et de ceux qui lui survivent, le fait que le lésé a assisté à la mort, les souffrances endurées par le défunt avant son décès, le fait que ce dernier laisse les siens dans une situation financière sûre, le comportement vil de l'auteur ou au contraire, la souffrance de celui-ci. De 2000 à 2003, le montant de base du tort moral accordé suite au décès d'un époux a oscillé entre CHF 30'000.- et CHF 50'000.-. Le montant accordé au décès d'un frère ou d'une sœur a été fixé aux environs de CHF 5000.- (Franz WERRO, La responsabilité civile, 2011, p. 386 et 387).

En l'espèce, il sera donné suite aux conclusions civiles en ce qui concerne les indemnisations en réparation du dommage matériel demandées par A______ et G______, les dommages allégués étant en lien direct avec le comportement criminel du prévenu et justifiés par pièces. Les parties plaignantes devront également être indemnisées pour leur tort moral, mais les montants demandés à ce titre paraissent excessifs au vu de la jurisprudence en la matière et de l'absence de pièces attestant des conséquences concrètes de l'atteinte pour chacune des parties plaignantes.

Ainsi, X______ sera condamné à payer, à titre de réparation du dommage matériel, la somme de CHF 3'400.-, plus intérêts à 5% dès le 6 février 2012, à A______ et la somme de CHF 10'906,95, avec intérêts à 5% dès le 30 avril 2013, à G______.

Il sera condamné à payer, à titre de tort moral, CHF 45'000.- à A______, CHF 25'000.- à D______, CHF 25'000.- à E______, CHF 15'000.- à F______ et CHF 15'000.- à G______, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012.

10. Selon l'art. 69 al. 1 et 2 CP, le juge prononce la confiscation des objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d’une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l’ordre public. Le juge peut ordonner que les objets confisqués soient mis hors d’usage ou détruits.

En l'espèce, le Tribunal ordonnera la confiscation des armes et munitions saisies sur X______, à son domicile et dans son véhicule, des pièces figurant sous ch. 13 de l'inventaire du 28 janvier 2012 et sous ch. 2 et 3 de l'inventaire du 31 janvier 2012. Les autres pièces saisies seront restituées à leurs ayants droit, sous réserve d'une décision contraire du Service des armes (SAEA).

11. Les frais de la procédure seront mis à la charge du condamné (art. 426 CPP).

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL CRIMINEL

statuant contradictoirement

Déclare X______ coupable de meurtre (art. 111 CP), de mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), d'exposition (art. 127 CP), d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP) et d'infraction à l'art. 33 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les armes.

Le condamne à une peine privative de liberté de 14 ans, sous déduction de 693 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Révoque le sursis octroyé le 20 octobre 2008 par le Tribunal de police de Genève à la peine pécuniaire de 100 jours-amende, à CHF 215.- le jour-amende, avec sursis pendant 3 ans (art. 46 CP).

Ordonne le maintien en détention pour des motifs de sûreté de X______ par décision séparée (art. 231 al. 1 CPP).

Condamne X______ à payer à A______, à titre de réparation du dommage matériel, CHF 3'400.-, plus intérêts à 5% dès le 6 février 2012 (art. 41 CO).

Condamne X______ à payer à G______, à titre de réparation du dommage matériel, CHF 10'906,95, plus intérêts à 5% dès le 30 avril 2013 (art. 41 CO).

Condamne X______ à payer, à titre de tort moral, CHF 45'000.- à A______, CHF 25'000.- à D______, CHF 25'000.- à E______, CHF 15'000.- à F______ et CHF 15'000.- à G______, avec intérêts à 5% dès le 28 janvier 2012 (art. 47 CO).

Ordonne la confiscation des pièces figurant sous ch. 1 à 4 de l'inventaire du 28 janvier 2012, en pièces 1087 et 1088, sous ch. 1 à 8 et 11 à 16 de l'inventaire du 28 janvier 2012, en pièces 1089 à 1091, sous ch. 1 à 3 de l'inventaire du 31 janvier 2012, sous ch. 1 de l'inventaire du 27 mars 2012, en pièce 1093 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à X______ des pièces figurant sous ch. 5 à 8 de l'inventaire du 28 janvier 2012, en pièce 1088 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à AG______ des pièces figurant sous ch. 1 et 2 de l'inventaire du 7 février 2012, en pièce 1095, sous réserve d'une décision contraire du Bureau des armes - SAEA (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à N______ de la pièce figurant sous ch. 1 de l'inventaire du 7 février 2012, en pièce 1094, sous réserve d'une décision contraire du SAEA (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à D______ des pièces figurant sous ch. 1 et 2 de l'inventaire du 29 janvier 2012, en pièce 1096, sous réserve d'une décision contraire du Bureau des armes - SAEA (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à E______ de la pièce figurant sous ch. 3 de l'inventaire du 29 janvier 2012, en pièce 1096, sous réserve d'une décision contraire du SAEA (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à A______ de la pièce figurant sous ch. 1 de l'inventaire du 3 février 2012, en pièce 1101 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à F______ des pièces figurant sous ch. 1 et 2 de l'inventaire du 28 janvier 2012, en pièce 1102, sous réserve d'une décision contraire du SAEA (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement au Service des contraventions, au Service du casier judiciaire et au SAEA (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 51'873.30, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.- (art. 426 al. 1 CPP).

La Greffière

Carole PRODON

La Présidente

Catherine TAPPONNIER

 

 

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, Case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci (art. 382 al. 1 CPP).

La partie plaignante ne peut pas interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée (art. 382 al. 2 CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, Case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé. Dans sa déclaration, elle indique:

  1. si elle entend attaquer le jugement dans son ensemble ou seulement certaines parties;
  2. les modifications du jugement de première instance qu'elle demande;
  3. ses réquisitions de preuves.

Quiconque attaque seulement certaines parties du jugement est tenu d'indiquer dans la déclaration d'appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l'appel, à savoir:

  1. la question de la culpabilité, le cas échéant en rapport avec chacun des actes;
  2. la quotité de la peine;
  3. les mesures qui ont été ordonnées;
  4. les prétentions civiles ou certaines d'entre elles;
  5. les conséquences accessoires du jugement;
  6. les frais, les indemnités et la réparation du tort moral;
  7. les décisions judiciaires ultérieures.

 

ETAT DE FRAIS

 

Frais du Ministère public

CHF

43'158.30

Convocations devant le Tribunal

CHF

180.00

Frais postaux (convocation)

CHF

55.00

Indemnités payées aux interprètes

CHF

420.00

Émolument de jugement

CHF

8'000.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

10.00

Total

CHF

51'873.30

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