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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1287/2012

DCSO/259/2012 du 28.06.2012 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : Minimum vital.
Normes : LP.93
Résumé : Si les époux vivent séparés, l'Office doit fixer le minimum vital comme celui d'un couple, mais en tenant compte de deux loyers et de deux entretiens personnels. Les pensions alimentaires et autres contributions versées en faveur des enfants n'ont pas à être ajoutées aux revenus du parent concerné.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1287/2012-CS DCSO/259/12

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 28 JUIN 2012

 

Plainte 17 LP (A/1287/2012-CS) formée en date du 3 mai 2012 par le SERVICE CANTONAL D'AVANCE ET DE RECOUVREMENT DES PENSIONS ALIMENTAIRES (SCARPA).

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

- ETAT DE GENEVE,
SCARPA
Rue Ardutius-de-Faucigny 2
Case postale 3429
1211 Genève 3

- M. S______

- Office des poursuites.

 


EN FAIT

A. Dans le cadre de la poursuite n° 11 xxxx63 L en validation du séquestre
n° 11 xxxx82 H diligentée par l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui le SCARPA, à l'encontre de M. S______, l'Office des poursuites (ci-après: l'Office) a expédié le 23 avril 2012 un procès-verbal de saisie, aux termes duquel une saisie de toutes sommes supérieures à 4'100 fr. par mois sur le salaire du débiteur, ainsi que toutes sommes lui revenant à titre de primes, gratifications et/ou 13ème salaire, a été exécutée le 24 février 2012 en mains de son employeur, les HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE.

Le procès-verbal précité mentionne notamment que M. S______ a été interrogé à l'Office le 7 février 2012 et qu'il vit séparé de son épouse actuelle (soit Mme S______, née J______, qu'il a épousée à Genève le 23 septembre 2010 après avoir divorcé le 11 février 2010 de Mme G______).

Le minimum vital a été fixé sur la base des charges et revenus suivants:

MINIMUM VITAL: 1'020 fr.

ENFANTS A CHARGE:

Y______ (recte: N______, né le xx 1997

du précédent mariage de Mme S______,

laquelle perçoit mensuellement 300 fr. d'allocations familiales

et 900 fr. de pension alimentaire) 0 fr.

V______ (recte: L______, né le xx 1995

du précédent mariage de M. S______ et sur lequel

il exerce un droit de visite de sept jours par mois) 119 fr.

AUTRES CHARGES:

Assurance-maladie (débiteur) 336 fr. 90

Assurance-maladie (conjoint) 316 fr. 10

Assurance-maladie (enfants; recte: N______) 84 fr.

Intérêts hypothécaires sans amortissement (débiteur) 89 fr. 35

Frais de repas (débiteur) 220 fr.

Frais de repas (conjoint) 110 fr.

Frais de transport (débiteur) 300 fr.

Frais de transport (conjoint) 70 fr.

Frais de transport (enfants) 0 fr.

Taxe foncière (débiteur) 106 fr.

Taxe d'habitation (débiteur) 142 fr. 50

EDF, eau, chauffage (débiteur) 242 fr.

Assurance véhicule + maison (débiteur) 190 fr.

Frais droit de visite sur L______ (débiteur) 119 fr.

Loyer (conjoint, N______ y participant à hauteur de 100 fr.) 831 fr. 75

Minimum vital conjoint 1200 fr.

TOTAL DES CHARGES: 5'496 fr. 60

REVENUS:

Salaire débiteur 7'092 fr. 30

Salaire conjoint 1'894 fr.

Pension alimentaire perçue (conjoint) 900 fr.

TOTAL DES REVENUS: 9'886 fr. 30

Faisant notamment application de la jurisprudence publiée à la SJ 2000 II 213 s., l'Office a arrêté le minimum vital de M. S______ à 4'100 fr. en répartissant le minimum vital commun entre les conjoints, proportionnellement à leurs revenus nets respectifs.

B. a. Par acte du 3 mai 2012, le SCARPA a formé plainte, avec demande d'effet suspensif, contre le procès-verbal de saisie précité, qu'il indique avoir reçu le
24 avril 2012.

Le SCARPA conteste le calcul du minimum vital de M. S______.

Il fait premièrement grief à l'Office de ne pas avoir retenu, au titre de l'entretien de base, le minimum vital pour un couple de 1'700 fr. réduit de 15%, soit à 1'445 fr., pour tenir compte du domicile commun en France.

Deuxièmement, le SCARPA reproche à l'Office d'avoir comptabilisé deux fois la somme de 119 fr. relative à l'exercice du droit de visite de M. S______ sur son fils L______.

Troisièmement, le SCARPA conteste que l'Office ait tenu compte de l'assurance-maladie de N______, dans la mesure où le père de ce dernier s'acquitte tous les mois de la pension alimentaire de 900 fr. mise à charge et qui couvre ce genre de frais.

Quatrièmement, le SCARPA considère que seules les charges relatives au domicile de M. S______ en France doivent être prises en considération, à l'exclusion du loyer de l'appartement genevois de son épouse.

Cinquièmement, le SCARPA sollicite que le montant retenu au titre des revenus de M. S______ soit arrêté à 9'742 fr. 30 conformément à sa fiche de salaire du mois de février 2012 qu'il produit en annexe à sa plainte.

S'agissant enfin du salaire de l'épouse de M. S______, le SCARPA s'étonne qu'en tant que traductrice indépendante, elle ne réalise pas plus que 1'894 fr. par mois, si tant est que ce montant corresponde bien à son revenu.

b. L'effet suspensif sollicité a été refusé par ordonnance du 4 mai 2012.

c. Dans son rapport du 21 mai 2012, l'Office expose que lors de son interrogatoire le 7 février 2012, M. S______ a expliqué que, bien que participant aux frais du ménage, il vivait séparé de son épouse en raison du manque de place dans l'appartement genevois de trois pièces que son épouse partage avec son fils N______. Dès lors que les époux vivaient séparés, l'Office a, conformément à la jurisprudence (SJ 2000 II 213 s., notamment), tenu compte de l'entretien de base prévu pour deux personnes vivant seules et du loyer de chacun des époux. S'agissant de l'entretien de base de M. S______, il avait été arrêté à 1'020 fr. (et non à 1'200 fr.) pour tenir compte du fait que ce dernier vivait en France voisine.

L'Office a par ailleurs admis que l'ensemble des charges de l'enfant N______ étaient intégralement couverts par la pension alimentaire versée par son père pour son entretien, de sorte que lesdites charges n'auraient pas dû être mentionnées dans le calcul du minimum vital. Cela ne portait toutefois pas à conséquence, dans la mesure où l'entretien de base de N______, son assurance-maladie et ses frais de transport n'avaient pas été pris en compte dans le calcul de la quotité saisissable. Pour ce qui était de la participation au loyer, celle-ci aurait dû être fixée à 11 fr. et non à 100 fr. par mois, dès lors que N______ réside en Suisse et non en France.

S'agissant du revenu du débiteur, l'Office indique avoir commis une erreur de calcul. Le salaire net de M. S______ devait en effet être fixé à 6'312 fr. 30 et non à 7'092 fr. 30. Il convenait en effet du salaire mensuel brut les charges usuelles de 1'681 fr. 30 et l'imposition à la source de 1'748 fr. 70.

Ces deux corrections (participation de N______ au loyer de sa mère + revenu du débiteur) entraînaient une modification de la quotité saisissable, qui s'élevait à 4'040 fr. 31, arrondis à 4'050 fr., au lieu de 4'100 fr.

d. M. S______ n'a pas procédé par écrit dans le délai qui lui avait été imparti à cet effet.

e. A l'audience du 30 mai 2012, le SCARPA a persisté dans sa plainte.

M. S______ a confirmé s'être marié en septembre 2010 avec Mme S______, mais ne pas faire ménage commun avec elle. Cela s'expliquait du fait que l'appartement genevois de son épouse était trop petit et que sa maison sise à B______ en France voisine était en chantier. M. S______ a expliqué résider la plupart du temps dans sa maison de B______, où il y avait toutes ses affaires. Son épouse y venait trois à quatre fois par mois et y passait les nuits. Quant à lui, il se rendait deux fois par semaine au domicile genevois de son épouse. Les frais du ménage étaient partagés entre eux.

M. S______ a encore exposé qu'il travaillait auprès des HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE en qualité de chef de service sans FMH à 80%. Son salaire s'était élevé à 6'600 fr. nets par mois en 2011 et s'élevait en 2012 à 7'100 fr. par mois. Il payait des intérêts hypothécaires d'environ 90 fr. pour sa maison, ajoutant qu'il avait dû contracter des prêts pour faire face aux travaux.

Mme S______ a déclaré qu'elle vivait à Genève avec son fils N______ dans un appartement de 4 pièces subventionné par la Ville de Genève. Son loyer dépendait de son revenu et s'élevait en moyenne à 880 fr. par mois. Elle a confirmé que M. S______ venait chez elle une à deux fois par semaine et qu'il y dormait la nuit du mardi au mercredi lorsque son fils n'était pas là. Elle a encore indiqué se rendre à B______ chez son mari en principe les week-ends pour faire la lessive. M. S______ et elle avaient pensé s'installer à B______, mais cela s'était avéré impraticable compte tenu du fait qu'elle ne conduit pas et qu'il n'y a pas de chambres pour les enfants.

Relativement à sa situation financière, Mme S______ a indiqué travailler sur appel pour la Croix-Rouge genevoise en qualité d'interprète et médiatrice interculturelle, pour un salaire mensuel moyen de 2'000 fr. Elle a produit sa fiche de salaire du mois de mai 2012, laquelle mentionne un salaire net de 1'914 fr. 65. Mme S______ a encore confirmé que son ex-mari lui versait une pension de 900 fr. par mois pour l'entretien de son fils N______, laquelle était complétée par une somme de 100 fr. par mois qu'il lui versait à bien plaire. Sa prime d'assurance-maladie et celle de son fils, pour lesquelles elle ne touchait plus de subsides depuis 2012, s'élevaient à 443 fr. par mois.

S'agissant du montant de 119 fr. retenu au titre des frais d'exercice du droit de visite de M. S______ sur son fils L______, l'huissier de l'Office a admis que le procès-verbal de saisie comportait une erreur et que ce montant n'aurait pas dû être mentionné deux fois. Ce nonobstant, il n'avait été retenu qu'une seule fois dans le cadre du calcul du minimum vital.

M. S______ a exposé que son fils L______ avait été entièrement à sa charge de février à juin 2011 et que tel était à nouveau le cas depuis fin mars 2012, L______ ne voulant plus voir sa mère.

D'entente entre les parties, la cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1. La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures non attaquables par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP).

La plainte contre une mesure de l'Office doit être déposée dans les dix jours suivant celui où le plaignant a eu connaissance de la décision attaquée (art. 17 al. 2 LP).

1.2. En l'espèce, il est constant qu'un procès-verbal de saisie constitue une mesure sujette à plainte que la plaignante, créancière, a qualité pour attaquer par cette voie.

Le procès-verbal litigieux ayant été expédié le, la plainte, formée le 3 mai 2012, l'a été en temps utile. Respectant pour le surplus les exigences de forme posées par la loi (art. 9 al. 1 LaLP), la présente plainte est recevable.

2. 2.1. A teneur de l'art. 93 al. 1 LP, les revenus, qui ne sont pas insaisissables en vertu de l'art. 92 LP, peuvent être saisis, déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille.

Le minimum vital d'un débiteur, qui doit être fixé en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (TF, 7B.200/2003 du 11 novembre 2003 consid. 4 (non publié aux ATF 130 III 45); ATF 115 III 103 consid. 1c,
JdT 1991 II 108), est déterminé sur la base des Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance pour le canton de Genève, en vigueur lors de l'exécution de la saisie, soit en l'occurrence les Normes d'insaisissabilité pour l'année 2012 (RS/GE E 3 60.04).

Selon lesdites Normes d'insaisissabilité, il convient d'ajouter à la base mensuelle (ch. I), réduite de 15% pour les débiteurs domiciliés en France (SJ 2000 II 214), le loyer effectif du logement du débiteur et les frais de chauffage (ch. II.1). Font également partie du minimum vital les cotisations d'assurance maladie de base (ch. II.3), les dépenses indispensables à l'exercice d'une activité professionnelle, tels que frais de transport ou de repas pris en dehors du domicile, s'ils sont justifiés et à la charge du débiteur (ch. II.4), les pensions alimentaires dues en vertu de la loi que le débiteur a payées de manière avérée à des personnes qui ne font pas ménage commun avec lui dans la période précédant la saisie et dont le paiement est dûment prouvé et qu'il devra également assumer pendant la durée de la saisie (ch. II.5), les dépenses particulières pour la formation des enfants (transports publics, fournitures scolaires, etc.; ch. II.6), ainsi notamment que, pour autant qu'elles soient raisonnables, les dépenses supplémentaires auxquelles le débiteur doit faire face de manière imminente telles que frais médicaux, médicaments, franchise, naissance et soins apportés à des membres de sa famille, déménagement, etc. (ch. II.9).

Si le débiteur est propriétaire du logement qu'il habite, il y a lieu d'ajouter au minimum d'existence le montant des charges immobilières courantes, en lieu et place du loyer. Ces charges comprennent des intérêts hypothécaires (sans amortissement), les impôts de droit public et les frais d'entretien (DAS/367/1998 du 31.08.1998, consid. 4; DAS/45/2000 du 02.02.2000, consid. 5). S'y ajoutent les frais de chauffage (Normes d'insaisissabilité, ch. II.2).

En revanche, les frais d'éclairage, de courant électrique ou de gaz de cuisson, tout comme les frais d'alimentation en eau, sont inclus dans la base mensuelle et ne doivent donc pas être pris en compte. Les charges fiscales, les frais de téléphone et d'assurances facultatives d'un débiteur ne font pas non plus partie de son minimum vital (SJ 2000 II 213; Françoise Bastons Bulletti, in SJ 2007 II 84 ss, 88 s.).

Seuls les montants effectivement payés doivent être pris en compte (Michel Ochsner, in CR-LP, ad art. 93 n° 82 s. et les arrêts cités).

Lorsque le débiteur est marié, il convient d'établir un minimum vital pour le débiteur et son conjoint, et de le répartir proportionnellement entre les conjoints en fonction de leurs revenus respectifs. Si les époux vivent séparés, l'Office des poursuites doit, indépendamment du fait de savoir si cette séparation est justifiée ou non du point de vue du droit matrimonial, tenir compte, dans les limites de l'art. 93 LP, des montants versés à l'épouse (ATF 76 III 5). Dans la procédure de poursuite, l'Office ne peut ainsi pas se régler sur des arrangements particuliers des époux, parce qu'autrement les époux auraient la possibilité de modifier le minimum vital de l'époux poursuivi au détriment de ses créanciers. L'arrangement des époux quant à l'entretien oblige ainsi la famille, mais il ne peut limiter aussi les droits des tiers (ATF 116 III 75 consid. 2b = JdT 1992 II 105). Cela revient en fait à fixer le minimum vital comme celui d'un couple, mais en tenant compte de deux loyers et de deux entretiens personnels (DAS/45/2000 du 02.02.2000, consid. 3; SJ 2000 II 213 s.).

Saisie d'une plainte, l'autorité de surveillance vérifie si la retenue fixée par l'Office est conforme aux faits déterminant la quotité saisissable des revenus du débiteur, compte tenu des circonstances existant au moment de l'exécution de cette mesure (cf., par ex., DCSO/167/2006 du 9 mars 2006 et les arrêts cités).

3. 3.1. Le plaignant conteste premièrement les montants retenus au titre de l'entretien de base du débiteur et de son épouse. Dès lors qu'il s'agit d'un couple marié, l'Office aurait, selon lui, dû tenir compte pour le couple d'un montant de 1'700 fr. (Normes d'insaisissabilité, ch. I.3), réduit de 15% à concurrence de 1'445 fr. pour tenir compte du domicile du débiteur en France voisine. Par ailleurs, s'agissant d'un couple marié, seuls les frais d'habitation du débiteur devraient être pris en considération, à l'exclusion du loyer de son épouse.

Il résulte toutefois de l'instruction de la présente plainte que les époux S______ ne font pas ménage commun, chacun ayant conservé son propre domicile. C'est donc à juste titre que l'Office a décidé de tenir compte de cette réalité lors du calcul de la quotité saisissable du salaire du débiteur. Il s'est en cela conformé à la jurisprudence susrappelée. Les montants retenus au titre de l'entretien de base du débiteur et de son épouse n'ont dès lors pas à être revus. Il en va de même du loyer de l'épouse du débiteur, qui doit être pris en compte conformément aux principes rappelés ci-dessus.

Sur ces points, la plainte s'avère mal fondée.

3.2. Le plaignant fait grief à l'Office d'avoir tenu compte deux fois du montant de 119 fr. au titre des frais liés à l'exercice du droit de visite du débiteur sur son fils.

Dans le cadre de l'exercice du droit de visite dont bénéficie le parent qui n'a pas la garde de l'enfant, il est justifié de tenir compte dans son minimum vital d'un montant au titre de l'entretien de l'enfant pendant les jours où le débiteur exerce son droit de visite. Ce montant est en principe calculé en fonction de la base mensuelle d'entretien prévue pour l'enfant et du nombre de jours pendant lesquels le droit de visite est exercé, la Chambre de céans disposant, par ailleurs, d'un large pouvoir d'appréciation en la matière (SJ 2000 II 214).

En l'espèce, le débiteur exerce son droit de visite sur son fils L______ âgé de 17 ans, à raison de 7 jours par mois. L'entretien de base est de 600 fr. par mois au-delà de dix ans (Normes d'insaisissabilité, ch. I.4). Partant, c'est à bon escient que l'Office a retenu un montant de 119 fr. à ce titre, ce qui n'est du reste pas contesté par le plaignant. Ainsi que l'a expliqué en audience l'huissier en charge du dossier, le fait que ce montant ait été mentionné deux fois sur le procès-verbal de saisie procède d'une erreur de plume, qui n'a eu aucune conséquence sur le calcul effectif du minimum vital. La plainte apparaît ainsi sans objet sur ce point.

3.3. Le plaignant considère que l'Office n'aurait pas dû prendre en compte la prime d'assurance-maladie du fils de l'épouse du débiteur, dès lors que cette charge est couverte par la pension alimentaire versée par l'ex-mari de cette dernière.

Les pensions alimentaires et autres contributions versées en faveur des enfants vivant dans le ménage du débiteur n'ont pas à être ajoutées aux revenus du parent concerné, car il s'agit de prestations qui doivent être exclusivement affectées aux besoins des enfants (art. 276 ss CC, en particulier art. 276 al. 2 et 285 CC). Les frais d'entretien des enfants doivent en revanche être écartés du minimum vital du débiteur, dans la mesure où ils sont couverts par les contributions alimentaires. Si ces contributions dépassent de loin la mesure usuelle de sorte qu'il subsiste un solde important, après déduction des frais d'entretien de l'enfant, il y a lieu de tenir compte d'une contribution équitable de l'enfant aux charges du ménage, en particulier au loyer. De telles exceptions ne changent cependant rien au principe selon lequel la pension alimentaire pour enfants ne revient qu'à eux seuls dans la mesure où elle reste dans un cadre raisonnable (art. 319 al. 1 CC; ATF 115 Ia 325 = SJ 1990 p. 604/605; ATF 104 III 77 = SJ 1979 p. 303; SJ 2000 II 218).

En l'espèce, tout en indiquant ne pas avoir tenu compte des charges de l'enfant N______ dans le calcul effectif de la quotité saisissable du débiteur, l'Office a expressément admis que ces charges n'auraient pas dû figurer sur le procès-verbal de saisie. Par ailleurs, la participation au loyer de N______ avait été calculée en fonction d'un montant de base de 510 fr. applicable à un enfant vivant en France, alors que le fils de l'épouse du débiteur réside en Suisse. En tenant compte d'un montant de base de 600 fr. conformément au chiffre I.4 des Normes d'insaisissabilité, la participation au loyer de N______ s'élevait à 11 fr. par mois.

La Chambre de céans constate que l'épouse du débiteur perçoit une pension de 900 fr. pour l'entretien de son fils N______ né en 1997. Cette contribution couvre le minimum vital de celui-ci (600 fr.), ainsi que ses primes d'assurance-maladie (84 fr.). Il reste un solde de 216 fr., qui doit être intégralement affecté à la participation au loyer (11 fr.) et, pour le surplus, à l'entretien de l'enfant. La pension de 900 fr. ne peut dès lors pas être prise en compte au titre des revenus de l'épouse du débiteur.

Il s'ensuit que la plainte est à cet égard bien fondée.

3.4. Le plaignant conteste enfin le montant des revenus du débiteur et de son épouse.

Après avoir évalué le revenu global brut, l'Office des poursuites doit évaluer le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu (ATF 7B.175/2005 du 20 décembre 2005. consid. 3.1).

Il résulte de l'instruction de la présente cause et des pièces versées à la procédure que le débiteur réalise un salaire mensuel brut de 9'625 fr. 50 plus une "compensation immédiate" de 116 fr. 80. Ses charges sociales usuelles s'élèvent à 1'681 fr. 30 et ses impôts, prélevés à la source vu son statut de frontalier, à
1'748 fr. 70. Comme indiqué par l'Office dans son rapport, le revenu mensuel net du débiteur à prendre en considération se monte à 6'312 fr. 50.

Pour ce qui est du salaire de l'épouse du débiteur – dont il faut tenir compte pour le calcul de la quotité saisissable (cf. infra, consid. 4) –, il s'avère que celui-ci est variable et dépend de la demande. Au vu de la fiche de salaire produite et des déclarations de l'épouse du débiteur, il n'apparaît pas que l'Office ait abusé de son pouvoir d'appréciation en retenant un montant de 1'894 fr. à ce titre.

La plainte s'avère mal fondée sur ce point.

4. 4.1. Pour calculer la quotité saisissable d'un débiteur marié, il convient de tenir compte du revenu propre de son conjoint. La part saisissable du salaire doit alors être déterminée en partant du minimum vital commun, qui doit être réparti entre les deux conjoints proportionnellement à leurs revenus nets; on obtient la part saisissable du revenu du conjoint poursuivi en déduisant de son revenu déterminant net sa part au minimum vital (ATF 114 III 12, consid. 3; DAS/367/1998 du 31.08.1998, consid. 9).

4.2. En l'espèce, le revenu mensuel du couple s'élève à 8'206 fr. 30 (6'312 fr. 30 + 1'894 fr.); le salaire du débiteur étant de 6'312 fr. 30, sa participation au minimum vital commun est de 76.92 %.

Le minimum vital se calcule comme suit :

Entretien personnel débiteur: 1'020 fr.

(1200 fr. - 15%: domicile en France)

Entretien personnel conjoint 1200 fr.

Frais droit de visite sur L______ 119 fr.

Assurance-maladie débiteur 336 fr. 90

Assurance-maladie conjoint 316 fr. 10

Intérêts hypothécaires débiteur 89 fr. 35

Taxe foncière débiteur 106 fr.

Taxe d'habitation débiteur 142 fr. 50

EDF, eau, chauffage débiteur 242 fr.

Assurance véhicule + maison débiteur 190 fr.

Loyer conjoint 831 fr. 75

Frais de repas débiteur 220 fr.

Frais de repas conjoint 110 fr.

Frais de transport débiteur 300 fr.

Frais de transport conjoint 70 fr.

______________________________________________

soit un total de : 5'293 fr. 60

La part du débiteur à ce minimum vital, de 76.92%, est donc de 4'071 fr. 85, arrondis à 4'070 fr.

C'est donc à tort que l'Office a arrêté la saisie de salaire à toutes sommes supérieures à 4'100 fr. La plainte doit donc être partiellement admise et la saisie fixée à toutes sommes supérieures à 4'070 fr. par mois.

5. La présente décision est rendue sans frais ni dépens (art. 20a al. 2 ch. 5 LP,
61 al. 2 let. a et 62 al. 2 OELP).

 

 

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée par l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui le SCARPA, contre le procès-verbal de saisie expédié le 23 avril 2012 dans le cadre de la poursuite n° 11 xxxx63 L dirigée contre M. S______.

Au fond :

L'admet partiellement.

Fixe la saisie sur le salaire de M. S______ à hauteur de toutes sommes supérieures à 4'070 fr. nets par mois, ainsi que toutes sommes lui revenant à titre de primes, gratifications et/ou 13ème salaire.

Siégeant :

Monsieur Grégory BOVEY, président; Monsieur Antoine HAMDAN et
Monsieur Christian CHAVAZ, juges assesseurs; Madame Véronique PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Grégory BOVEY

 

La greffière :

Véronique PISCETTA

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.