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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/3217/2022

DCSO/231/2023 du 25.05.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : lp.89; lp.92
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3217/2022-CS DCSO/231/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 25 MAI 2023

 

Plainte 17 LP (A/3217/2022-CS) formée en date du 3 octobre 2022 par A______, comparant en personne.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

______

______.

- ETAT DE GENEVE

Service du contentieux de l'Etat

Rue du Stand 26

Case postale 3937

1211 Genève 3.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Engagée le 14 septembre 2021 par l'Etat de Genève contre A______, la poursuite ordinaire par voie de saisie n° 1______ tend au recouvrement d'un montant de 4'640 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 18 juillet 2020, allégué être dû au titre de remboursement de prestations de l'assistance juridique selon une décision du 7 février 2020.

Cette poursuite participe seule à la saisie, série n° 2______, exécutée le 2 août 2022 par l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office).

b. Selon le procès-verbal de saisie établi le 14 septembre 2022, celle-ci n'a porté que sur un actif, soit les droits du poursuivi dans la société B______ SA, dont la valeur était estimée à 10'000 fr.

Lors de son interrogatoire par l'Office le 23 juin 2022 dans le cadre des opérations de saisie, A______ avait en effet indiqué être actionnaire de ladite société.

c. Le procès-verbal de saisie a été adressé le 15 septembre 2022 aux créancier et débiteur, ce dernier l'ayant reçu le 23 septembre 2022.

B. a. Par acte adressé le 3 octobre 2022 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre le procès-verbal de saisie, série n° 2______, du 14 septembre 2022, concluant à son annulation, subsidiairement à la constatation de sa nullité.

A l'appui de ces conclusions, A______ a invoqué deux arguments. D'une part, la prétention faisant l'objet de la poursuite était selon lui mal fondée. D'autre part, le droit saisi (soit une part d'un tiers d'une action de B______ SA) n'existait pas, dès lors que l'art. 7 al. 1 des statuts originaux de B______ SA n'autorisait pas la propriété commune des actions.

A titre préalable, le plaignant a sollicité l'apport des dossiers des causes C/3______/2020 et C/4______/2018 (recte : C/5______/2018) dont l'instruction était en cours devant le Tribunal de première instance.

Il a en outre demandé à être mis au bénéfice de l'assistance juridique pour la procédure de plainte.

b. Par ordonnance du 5 octobre 2022, la Chambre de surveillance a rejeté la requête d'effet suspensif formée à titre préalable par A______.

c. Par décision du vice-président du Tribunal de première instance du 27 février 2023, la requête d'assistance juridique formée par le plaignant a été rejetée.

d. Dans ses observations du 21 octobre 2022, l'Office a conclu à l'irrecevabilité de la plainte en tant qu'elle concernait le bien-fondé de la prétention invoquée en poursuite et à son rejet en tant qu'elle portait sur le caractère prétendument inexistant de l'actif saisi.

e. Par détermination du 11 octobre 2022, l'Etat de Genève, créancier poursuivant, s'en est rapporté à justice.

f. Par ordonnance du 1er février 2023, la Chambre de céans a invité l'Office à obtenir de la société B______ SA, en mains de laquelle l'actif litigieux avait été saisi, de plus amples informations sur sa nature, sa titularité et sa valeur.

Après avoir interpellé B______ SA et avoir obtenu de sa part de plus amples renseignement et des pièces supplémentaires, l'Office les a communiqués à la Chambre de céans, en même temps que des observations complémentaires, le 3 avril 2023.

g. Les observations complémentaires de l'Office et les pièces annexées ont été communiquées le 6 avril 2023 au plaignant et à l'Etat de Genève.

En l'absence de déterminations spontanées de la part de l'un ou de l'autre, la cause a été gardée à juger le 20 avril 2023.

EN DROIT

1. 1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.1.2 L'autorité de surveillance constate les faits d'office, apprécie librement les preuves et ne peut, sous réserve de l'art. 22 LP, aller au-delà des conclusions des parties (art. 20a al. 2 ch. 2 et 3 LP). Celles-ci ont néanmoins une obligation de collaborer (art. 20a al. 2 ch. 2 2ème phrase LP), qui implique en particulier qu'elles décrivent l'état de fait auquel elles se réfèrent et produisent les moyens de preuve dont elles disposent (ATF 112 III 79 consid. 2).

1.1.3 Il n'appartient ni aux offices des poursuites ni aux autorités de surveillance de décider si une prétention est exigée à bon droit ou non; en effet, l'examen du bien-fondé de la prétention faisant l'objet de la poursuite relève exclusivement de la compétence du juge ordinaire (ATF 113 III 2 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1). Le débiteur qui entend contester l'existence, l'exigibilité ou la quotité de la créance en poursuite doit ainsi former opposition au commandement de payer puis faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure de mainlevée et, le cas échéant, dans celui d'une action en reconnaissance ou en libération de dette.

1.2 La plainte est en l'espèce dirigée contre une mesure de l'Office – le procès-verbal de saisie – pouvant être contestée par cette voie, émane d'une partie potentiellement lésée dans ses intérêts légitimes et a été formée en temps utile et dans la forme écrite prescrite par la loi. Elle est, dans cette mesure, recevable.

Comme le relève l'Office, le plaignant ne saurait cela étant contester par la voie de la plainte le bien-fondé de la prétention invoquée en poursuite, cette question étant de la compétence exclusive du juge. Son premier grief est donc irrecevable.

S'agissant du second – le caractère prétendument inexistant du droit saisi – on peut se demander si le plaignant dispose d'un intérêt concret et actuel à obtenir la modification, dans le sens qu'il souhaite, de l'acte attaqué. On voit mal en effet en quoi la saisie puis la réalisation au profit de son créancier d'un droit qu'il considère inexistant pourrait lui causer préjudice. Au vu des considérants qui suivent, la question peut cela étant rester ouverte.

2. Il n'y a pas lieu, comme le souhaiterait le plaignant, d'ordonner l'apport à la présente procédure de plainte des dossiers des causes C/3______/2020 et C/5______/2018 selon lui pendantes devant le Tribunal de première instance. D'une part, il n'explique pas en quoi cette mesure serait pertinente pour juger de la question litigieuse, à savoir l'existence du droit saisi. D'autre part, à supposer que des informations utiles à la présente cause puissent résulter des actes des causes C/3______/2020 ou C/5______/2018, on ne voit pas ce qui empêchait le plaignant, lui-même partie à ces causes et bénéficiant donc de l'accès aux dossiers, de produire spontanément et d'emblée les documents qu'il aurait estimé utiles.

3. 3.1 A réception de la réquisition de continuer la poursuite, l'office est tenu de procéder sans retard à la saisie des biens du débiteur (art. 89 LP).

Sont en principe saisissables les droits ayant une valeur patrimoniale et appartenant juridiquement au débiteur (ATF 135 III 663 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_205/2016 du 7 juin 2016 consid. 7.2). Il n'appartient pas à cet égard à l'office procédant à la saisie de décider si un droit dont la titularité est contestée appartient ou non ou débiteur : un tel litige doit être réglé par la voie de la procédure de revendication prévue par les art. 106 ss. LP (Winkler, in Kommentar zum SchKG, 4ème édition, 2017, Kren Kostkiewicz/Vock [éd.], N 9 ad art. 92 LP). Ce n'est que s'il est manifeste qu'un droit ne tombe pas dans le patrimoine du débiteur que l'office pourra renoncer à le saisir (Winkler, op. cit., N 9 ad art. 92 LP).

3.2 Dans le cas d'espèce, le plaignant a lui-même indiqué à l'Office sa qualité d'actionnaire de B______ SA, ce qui a conduit à la saisie contestée. Selon les indications données par la société elle-même, confirmées par un extrait du registre des actionnaires, le plaignant est effectivement propriétaire en mains communes, avec deux autres personnes, d'une action. C'est donc à juste titre que l'Office a procédé à la saisie de cette part de propriété commune.

L'argumentation du plaignant relative à l'inexistence du droit saisi ne convainc pour sa part pas.

D'une part, la disposition statutaire qu'il invoque ne correspond pas aux statuts actuels de B______ SA, tels qu'ils peuvent être consultés auprès du Registre du commerce. C'est ainsi en particulier que l'art. 10 al. 1 des statuts actuels envisage expressément la possibilité qu'une action appartienne à plusieurs personnes et, pour ce cas, prévoit que les droits attachés à cette action doivent être exercés par un représentant commun.

D'autre part, et même dans l'hypothèse où le plaignant devrait être suivi lorsqu'il affirme que les anciens statuts seraient toujours applicables, et même à supposer que ces statuts – dont il ne produit pas de copie – aient effectivement la teneur qu'il leur attribue, on ne voit pas comment une disposition statutaire pourrait exclure toute propriété collective sur une action alors même qu'un tel cas de figure est susceptible de résulter de dispositions légales sur lesquelles les actionnaires et la société n'ont aucune prise, telles celles relatives à la dévolution successorale; on peut ainsi raisonnablement penser que la portée réelle de la disposition statutaire à laquelle se réfère le plaignant consistait – à l'instar de l'art. 10 al. 1 des statuts actuels – à contraindre d'éventuels copropriétaires ou propriétaires communs à désigner ou faire désigner, pour l'exercice de leurs droits d'actionnaires, un représentant commun.

Il résulte de ce qui précède que c'est à juste titre que l'Office a procédé à la saisie de la part de propriété indivise dont le plaignant est propriétaire sur une action de B______ SA, avec pour conséquence que la plainte sera rejetée dans la mesure de sa recevabilité.

Il incombera cela étant à l'Office de compléter le procès-verbal de saisie du 14 septembre 2022 par une indication précise de l'actif saisi, laquelle fait en l'état défaut.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 3 octobre 2022 par A______ contre le procès-verbal de saisie, série n° 2______, établi le 14 septembre 2022.

Au fond :

La rejette.

Invite l'Office cantonal des poursuites à compléter le procès-verbal de saisie, série n° 2______, par une description précise du droit saisi.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.