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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/668/2020

DCSO/247/2020 du 06.08.2020 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : LP.67.al1.ch2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/668/2020-CS DCSO/247/20

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 6 AOÛT 2020

 

Plainte 17 LP (A/668/2020-CS) formée en date du 21 février 2020 par A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du 6 août 2020
à :

- A______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 6 janvier 2020, A______ s'est rendu dans les locaux de l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) avec l'intention d'y déposer une réquisition de poursuite dirigée à l'encontre de son père, B______, afin d'interrompre la prescription d'une créance de 26'000 fr. dont il estime être titulaire à son encontre. Son père étant "officiellement" domicilié en France voisine, il souhaitait que le commandement de payer soit notifié en mains de son conseil suisse, Me C______, ce qui était possible selon ce qu'un ami lui-même avocat lui aurait affirmé.

Selon ses explications, A______ aurait cependant été confronté à des difficultés au moment de remplir le formulaire de réquisition de poursuite obtenu dans les bureaux de l'Office, celui-ci prévoyant une rubrique "débiteur" mais pas de rubrique "représentant du débiteur". Il aurait alors demandé l'aide d'un collaborateur de l'Office, qui aurait accepté de remplir avec lui le formulaire de réquisition de poursuite.

b. La réquisition de poursuite finalement déposée le 6 janvier 2020 mentionne, sous la rubrique "Débiteur", "ETUDE D'AVOCATS D______ C______ & ASSOCIES / MAÎTRE C______ / [RUE] 1______, GENEVE ______".

La rubrique "Cause de l'obligation ou titre de la créance et date" a pour
sa part le contenu suivant : "CREANCE EN CONTRIBUTION D'ENTRETIEN
DE MA MERE [...] DECEDEE LE ______ 2015 [...] DEBITEUR : B______ (______ 1942)"
.

Il est enfin indiqué sous la rubrique "Observations" que la poursuite vise à interrompre la prescription de la créance invoquée.

c. Constatant que la réquisition déposée le 6 janvier 2020 ne mentionnait pas l'adresse personnelle du débiteur (qui qu'il soit), l'Office, par courrier adressé sous pli A le 13 janvier 2020 à A______ et reçu à une date non déterminée par ce dernier, l'a invité à compléter sa réquisition dans les dix jours de la réception dudit courrier en indiquant l'adresse précise du débiteur, faute de quoi elle serait rejetée. Un collaborateur de l'Office a par ailleurs pris contact par téléphone le 16 janvier 2020 avec A______ pour lui expliquer ce qui était attendu de sa part.

d. Sans nouvelles de la part de A______, l'Office, par décision du 6 février 2020 reçue le 14 février 2020 par ce dernier, a rejeté la réquisition de poursuite déposée le 6 janvier 2020 au motif - par renvoi au contenu de sa lettre du 13 janvier 2020 - que l'adresse du débiteur n'était pas indiquée.

B. a. Par acte adressé le 21 février 2020 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre la décision du 6 février 2020, concluant implicitement à son annulation et, se déclarant disposé à indiquer l'adresse précise de son père, qui était le débiteur recherché, à ce qu'il soit ordonné à l'Office de procéder à la notification du commandement de payer en mains de l'avocate de ce dernier, et ce en exécution de la réquisition de poursuite déposée le 6 janvier 2020. Sans contester ne pas avoir respecté le délai que lui avait fixé l'Office dans sa lettre du 13 janvier 2020, il a expliqué à l'appui de sa plainte avoir eu besoin de temps pour consulter son ami avocat, lequel lui avait confirmé que la notification d'un commandement de payer en mains d'un avocat pour interrompre la prescription était tout à fait possible, même si le débiteur était domicilié à l'étranger.

b. Dans ses observations datées du 27 avril 2020, l'Office a conclu au rejet de la plainte, relevant que le contenu incomplet de la réquisition de poursuite ne lui permettait pas de vérifier sa compétence à raison du lieu, laquelle ne paraissait prima facie pas donnée dès lors que le - véritable - débiteur avait, selon les registres tenus par l'Office cantonal de la population et des migrations, déplacé son domicile de Genève en France voisine en 2017 et qu'aucun for spécial n'était invoqué.

c. La cause a été gardée à juger le 18 mai 2020.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2. 2.1 Selon l'art. 67 al. 1 ch. 2 LP, la réquisition de poursuite doit indiquer le nom et le domicile du débiteur. Ces indications sont ensuite reprises dans le commandement de payer (art. 69 al. 2 ch. 1 LP). Par domicile, il faut entendre l'adresse exacte du débiteur au lieu où il a son domicile au sens des art. 23 CC et 20 LDIP (formulaire n° 1; Gilliéron, Commentaire LP, N 40 ad art. 67 LP).

L'indication exacte du domicile du débiteur vise principalement à assurer la désignation précise et dénuée de risque de confusion de ce dernier dans le commandement de payer et les actes de poursuite subséquents (Gilliéron, op. cit., N 33 ad art. 67 LP). Lorsqu'il constate que la désignation du domicile du débiteur est absente ou insuffisamment précise, l'office des poursuites saisi doit impartir au poursuivant un délai pour rectifier ou compléter sa réquisition de poursuite (ATF 29 I 565 consid. 4; Gilliéron, op. cit., N 116 ad art. 67 LP).

L'indication par le poursuivant, dans sa réquisition de poursuite, du domicile du débiteur permet par ailleurs à l'office des poursuites saisi de vérifier sa compétence à raison du lieu pour établir puis notifier le commandement de payer (ATF 120 III 110 consid. 1a; Malacrida/Roesler, KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, Hunkeler [éd.], N 5 ad art. 69 LP). Cette compétence est en effet en principe acquise si le domicile du débiteur, qui correspond au for ordinaire de la poursuite (art. 46 LP), se trouve dans le ressort de l'office des poursuites saisi. Si ce n'est pas le cas, la compétence territoriale de l'office des poursuites saisi peut découler de l'un des fors spéciaux limitativement prévus par les art. 48 à 52 LP. Les débiteurs domiciliés à l'étranger peuvent ainsi être poursuivis en Suisse, notamment, s'ils y possèdent un établissement stable (art. 50 al. 1 LP) ou s'ils ont élu domicile en Suisse pour l'exécution de l'obligation faisant l'objet de la poursuite (art. 50 al. 2 LP). S'il lui apparaît que sa compétence territoriale ne résulte ni de l'art. 46 LP ni de l'un des fors spéciaux prévus par les art. 48 à 52 LP, l'office des poursuites saisi doit rejeter la réquisition de poursuite (Malacrida/Roesler, op. cit., N 5 ad art. 69 LP).

La question de la compétence territoriale de l'office des poursuites requis pour établir et notifier le commandement de payer ne doit pas être confondue avec celle du lieu de notification de cet acte et de la personne en mains de laquelle il peut être notifié, réglée par les art. 64 à 66 LP.

2.2 Il sera en premier lieu relevé dans le cas d'espèce que la réquisition de poursuite déposée le 6 janvier 2020 est remplie de manière inexacte puisque la personne dont l'identité est indiquée sous la rubrique "débiteur" n'est pas celle contre laquelle le plaignant souhaite diriger la poursuite, l'identité du véritable débiteur n'étant indiquée que sous la rubrique "cause de l'obligation" du formulaire. Malgré cette erreur, l'Office a toutefois correctement identifié le débiteur poursuivi, de telle sorte qu'il n'y a pas lieu d'en tirer de conséquence.

La réquisition de poursuite souffre cela étant, comme l'a constaté l'Office, d'une autre insuffisance en ce sens que le domicile du débiteur n'y est pas indiqué, en violation de l'art. 67 al. 1 ch. 2 LP. C'est donc à juste titre que l'Office a imparti au plaignant un délai pour compléter sa réquisition, ce qu'il n'a pas fait. C'est, partant, également à juste titre que l'Office, à l'expiration du délai fixé, a rejeté la réquisition.

Les arguments invoqués par le plaignant ne modifient pas cette conclusion.

Dans la mesure où le délai imparti par l'Office aurait été insuffisant - ce qui paraît surprenant puisque l'adresse du débiteur lui était connue - le plaignant, qui ne conteste pas ne pas l'avoir respecté, aurait en effet pu et dû en demander la prolongation, ce qu'il n'a pas fait. Les motifs allégués, soit le souhait de prendre conseil auprès d'un tiers et un mauvais état de santé, ne constituent pas à cet égard un empêchement de nature à justifier une restitution de délai au sens de l'art. 33 al. 4 LP.

Dès lors que la réquisition litigieuse a été rejetée en raison de son caractère incomplet, il n'y a pas lieu d'examiner si l'Office aurait ou non été compétent pour établir et notifier un commandement de payer à supposer que le domicile - semble-t-il étranger - du débiteur ait été indiqué en temps utile. Il sera néanmoins précisé que, contrairement à ce que paraît considérer le plaignant, l'Office ne saurait établir et notifier un commandement de payer sans vérifier sa compétence à raison du lieu pour le faire. L'existence - en l'état non établie - d'un éventuel lieu de notification à Genève, ou encore le fait que cette notification ait pour seul but d'interrompre la prescription de la créance, ne sont à cet égard d'aucune pertinence.

Mal fondée, la plainte doit donc être rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 21 février 2020 par A______ contre la décision de rejet de réquisition de poursuite rendue le 6 février 2020 par l'Office cantonal des poursuites.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Denis KELLER, juges assesseur(e)s; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président : La greffière :

 

Patrick CHENAUX Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.