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Décisions | Chambre de surveillance

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C/9896/2011

DAS/59/2018 du 26.02.2018 sur DTAE/4186/2017 ( PAE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : RELATIONS PERSONNELLES ; GARDE ALTERNÉE
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9896/2011-CS DAS/59/2018

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 26 FEVRIER 2018

Recours (C/9896/2011-CS) formés en date du 25 septembre 2017 par A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat, en l'Etude duquel elle élit domicile, et en date du 26 septembre 2017 par B______, domicilié ______ (Genève), comparant par Me Audrey HELFENSTEIN, avocate, en l'Etude de laquelle il élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 19 mars 2018 à :

- A______
c/o Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat
Rue Patru 2, case postale, 1211 Genève 4.

- B______
c/o Me Audrey HELFENSTEIN, avocate
Rue De-Candolle 34, case postale 6087, 1211 Genève 6.

- C______
D______

SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance DTAE/4186/2017 du 8 juin 2017 relative aux mineurs E______ et F______, nés respectivement les ______ 2011 et ______ 2012, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) a élargi le droit de visite de A______ sur ses enfants, "à raison, en alternance, de la manière suivante" : la première semaine, le lundi, le vendredi (11h00 ou 16h00) au mardi matin; la deuxième semaine, le lundi et le mardi; pendant la moitié des vacances scolaires, étant précisé que les vacances seront réparties en alternance entre le parents s'agissant de février et d'octobre, et partagées par moitié chacun pour les vacances de Noël et de Pâques (ch. 1 du dispositif), maintenu une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnes (sic) (ch. 2); rappelé à B______ la teneur de l'art. 301 al. 1bis ch. 1 et 2 CC prévoyant que le parent qui a la charge de l'enfant peut prendre seul les décisions courantes ou urgentes et d'autres décisions, si l'autre parent ne peut être atteint moyennant un effort raisonnable (ch. 3); accordé à B______ l'intégralité de la bonification pour tâches éducatives relative à ses deux enfants (ch. 6), notamment.

Ladite décision a été communiquée le 25 août 2017 aux parties pour notification.

B. Par mémoire déposé au greffe de la Cour le 26 septembre 2017, B______ a formé recours contre les chiffres 1 et 3 de ladite ordonnance. Il conclut à leur annulation, à la confirmation de l'attribution de la garde des mineurs à lui-même, moyennant réserve d'un droit de visite en faveur de la mère des enfants, selon des modalités qu'il propose.

Subsidiairement, il conclut au renvoi de la procédure au Tribunal de protection aux fins d'ordonner l'expertise du groupe familial.

Par acte reçu par le greffe de la Cour le 26 septembre 2017, A______ a également recouru contre ladite ordonnance, concluant à l'annulation des chiffres 1 et 6 de son dispositif. Elle sollicite préalablement à ce qu'il soit dit que le droit de visite, tel que prévu, puisse s'exercer jusqu'à droit jugé sur le recours. Pour le surplus, elle conclut à ce qu'une garde alternée des enfants soit prescrite et à ce qu'il ne soit pas statué sur l'attribution des bonifications pour tâches éducatives, subsidiairement à ce qu'il soit procédé au partage par moitié de celles-ci.

En substance, B______ considère que le Tribunal de protection a, à tort, élargi le droit de visite prévu en faveur de la mère des enfants, constatant les faits de manière inexacte et prenant une décision contraire à leur intérêt. Quant à A______, elle fait grief au Tribunal de protection de ne pas avoir pesé de manière adéquate les faits pertinents dans l'intérêt des enfants, en n'instaurant pas la garde alternée qu'elle souhaite et que le SPMi recommande, selon elle.

En date du 13 octobre 2017, le Tribunal de protection a informé la Cour du fait qu'il ne souhaitait pas revoir sa décision.

Par observations reçues le 20 octobre 2017 par le greffe de la Cour, le Service de protection des mineurs a conclu à la confirmation de l'ordonnance, considérant qu'il était difficile de se positionner quant à une garde alternée pour le moment, compte tenu du conflit installé entre les parties.

Par mémoires reçus respectivement les 10 et 13 novembre 2017 par le greffe de la Cour, les parties ont répondu aux recours et persisté dans leurs conclusions.

La Chambre de surveillance a requis du Service de protection des mineurs un bref rapport d'actualisation de ses précédents rapports d'évaluation. En date du 15 janvier 2018, la Cour a reçu le rapport requis. Celui-ci fait état d'un vaste conflit entre les parents concernant leurs enfants, l'éducation, la gestion de l'autorité parentale conjointe et la mise en place d'une garde alternée. Le Service revient en arrière sur sa proposition de septembre 2016 visant à tendre à une garde alternée dans la mesure où celle-ci n'apparaît plus faisable en raison de la persistance des fortes tensions entre les parents. Le rapport conclut par conséquent à la confirmation de l'ordonnance attaquée. Ce rapport a été transmis aux parties qui ont persisté dans leurs conclusions par observations des 22 et 25 janvier 2018, B______ sollicitant nouvellement l'audition de témoins par la Cour.

C. Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants :

Les mineurs E______ et F______, nés respectivement les ______ 2011 et ______ 2012 sont issus de la relation, hors mariage, de A______ et B______. Ils ont été reconnus par ce dernier les ______ 2011 et ______ 2012 respectivement.

En dates des ______ 2011 et ______ 2012, le Tribunal tutélaire, actuellement le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, a attribué l'autorité parentale conjointe aux parents sur leurs deux enfants et ratifié les conventions proposées.

Le 14 décembre 2013, A______ a quitté le domicile familial avec les deux enfants et s'est rendue dans un foyer.

Par ordonnance superprovisionnelle du 20 décembre 2013, le Tribunal de protection a attribué à B______ la garde provisoire sur les enfants, ceux-ci vivant à nouveau dans l'ancien appartement commun et réservé un droit de visite à la mère. Cette décision a été confirmée par le Tribunal de protection par ordonnance sur mesures provisionnelles du 16 janvier 2014, la Chambre de céans ayant rejeté le recours formé contre cette ordonnance par A______ (DAS/73/2014).

Par ordonnance du 15 mai 2014, le Tribunal de protection a, au fond, dans les grandes lignes, confirmé ses ordonnances provisionnelles antérieures.

Par ordonnance du 15 août 2015, le Tribunal de protection a élargi sur recommandation du Service de protection des mineurs, le droit de visite réservé à la mère des enfants, le fixant à raison d'un week-end sur deux du vendredi 11h00 ou 16h00 au mardi matin, de tous les lundis, ainsi que de la moitié des vacances scolaires pour une durée de deux semaines consécutives au maximum, les vacances de février et d'octobre étant réparties en alternance et celles de Noël et de Pâques partagées par moitié.

Par rapport du 13 septembre 2016, le Service de protection des mineurs a proposé au Tribunal de protection un nouvel élargissement du droit de visite, tout d'abord à une nuit puis, deux nuits mensuelles et enfin, à l'instauration d'une garde alternée. Cette dernière demande avait été effectuée par la mère des enfants qui avait déclaré travailler à 80%, avoir emménagé à proximité du domicile du père et souhaitait s'impliquer plus pour ses enfants. Quant au père, il estimait qu'il n'était pas nécessaire d'élargir le droit de visite dans la mesure où les visites d'ores et déjà fixées n'étaient pas toutes honorées.

Dans un rapport du 7 novembre 2016, le Service de protection des mineurs relevait que les parents étaient autonomes concernant l'organisation des visites, que la situation personnelle de A______ s'était stabilisée, habitant dorénavant proche de l'école des enfants et souhaitant obtenir une garde partagée, ce qui avait ravivé des inquiétudes chez le père des enfants.

Dans un rapport complémentaire du 10 février 2017, le Service de protection des mineurs a relevé que chacun des parents était impliqué adéquatement dans le suivi des enfants, ceux-ci ne soulevant pas d'inquiétude de leurs enseignants ou pédiatre. Toutefois la quasi absence de communication ne favorisait pas un climat de confiance entre les parents. Suite à ce rapport, le Tribunal de protection a entendu les parties et la représentante du Service de protection des mineurs le 8 juin 2017, puis rendu la décision querellée.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte et de l'enfant peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent qui, dans le canton de Genève, est la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC; 53 al. 1 LaCC; 126 al. 1 let. b LOJ).

Ont qualité pour recourir, les personnes parties à la procédure (art. 450 al. 2 ch. 1 CC). Le délai de recours est de trente jours à compter de la notification de la décision (art. 450b al. 1 CC; 53 al. 2 LaCC, applicable par renvoi de l'art. 314
al. 1 CC).

1.2 En l'espèce, les recours ont été formés par des parties à la procédure dans le délai utile de trente jours et devant l'autorité compétente. Ils sont recevables à la forme. Ils seront traités dans le même arrêt.

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

2. 2.1 Selon l'art. 53 al. 5 LaCC, en principe, il n'y a pas de débats devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice.

2.2 Le recourant B______ a conclu nouvellement à l'audition de témoins par la Cour. Or, il n'y a pas lieu de s'écarter du principe légal rappelé ci-dessus, le dossier étant en état d'être jugé.

3. 3.1 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde, ainsi que l'enfant mineur, ont réciproquement le droit d'entretenir des relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC).

Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 130 III 585 consid. 2.2.2). Le droit aux relations personnelles est conçu à la fois comme un droit et un devoir des parents, mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant. Le droit de visite doit servir en premier lieu l'intérêt de l'enfant (ATF 127 III 295 consid. 4a). Le critère déterminant pour l'octroi, le refus et la fixation des modalités du droit de visite est le bien de l'enfant (VEZ, Le droit de visite, problème récurrent, in enfance et divorce, 2006, p. 101 et ss, 105).

Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation du droit de visite (ATF 122 III 404 consid. 3d = JT 1998 I 46).

3.2 Dans le cas d'espèce, les deux parties recourent contre l'élargissement du droit de visite octroyé par le Tribunal de protection à la mère des enfants (ch. 1 du dispositif de l'ordonnance attaquée). Le recourant B______ estime qu'il n'y a pas lieu d'élargir le droit préexistant, la recourante A______ concluant au contraire à l'octroi d'une garde alternée sur les enfants.

Le Tribunal de protection, qui avait débuté son instruction sur la base d'un rapport du 13 septembre 2016 du Service de protection des mineurs, préavisant l'élargissement du droit de visite progressif dans le but d'atteindre une garde alternée au début 2017, a constaté lui-même que le droit de visite de la mère, tel qu'il s'exerçait depuis un certain temps au moment du prononcé de la décision attaquée, avait permis aux enfants de trouver une certaine stabilité quant au rythme et aux habitudes qu'ils avaient prises. Ce rythme et ces habitudes ne devaient pas être bouleversés au vu des difficultés dans lesquelles se trouvaient les enfants du fait des dissensions importantes et des difficultés communicationnelles des parents, que le Tribunal qualifie d'ailleurs de relations toxiques.

Le Tribunal a toutefois décidé, quand bien même il a relevé qu'il n'était pas envisageable pour le bien des enfants qu'une garde alternée soit prononcée en l'état, qu'une extension du droit de visite pouvait se justifier. Or, au vu de la longue période qui s'est écoulée entre le rapport de 2016 du Service de protection des mineurs et l'instant où la cause a été portée devant la Cour de céans, celle-ci a requis une actualisation de l'évaluation du Service de protection des mineurs, actualisation reçue le 12 janvier 2018. Par le rapport émis à cette date, le Service de protection des mineurs confirme le conflit important entre les parents sur tous les points relatifs à leurs enfants et le caractère tout à fait embryonnaire des mesures, psychothérapeutiques notamment, entreprises par ceux-ci pour tenter de résoudre ce conflit.

Le Service de protection des mineurs en conclut que, si pour lui, le dispositif de l'ordonnance peut être confirmé, il s'agit d'attendre les conclusions d'une thérapie familiale pour qu'il puisse se positionner sur la suite de l'évolution du droit de visite de la mère.

Au vu de ces éléments notamment, ainsi que des motivations précédemment relevées de l'ordonnance querellée, force est d'admettre que ni les parties ni les enfants ne sont prêts pour un élargissement du droit de visite de la mère ayant pour effet de modifier les modalités d'un droit de visite existant se déroulant plus ou moins à satisfaction et selon un rythme et des habitudes qui procurent aux enfants la sérénité et la stabilité auxquelles ils ont droit. Dès lors, c'est à tort que le Tribunal de protection a considéré qu'il était opportun et juridiquement justifié d'élargir le droit de visite de la mère sur les enfants, cet élargissement ne pouvant que prétériter l'intérêt de ceux-ci. Par conséquent, sur ce point, le recours de B______ sera admis et le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance annulé, les modalités des relations personnelles existantes antérieurement perdurant. Cela scelle le sort du recours de A______ contre ledit chiffre 1.

Dans cette mesure, le recours de A______ portant sur le chiffre 6 du dispositif de l'ordonnance n'a plus d'objet.

De même, n'a pas d'objet le recours de B______ contre le chiffre 3 du dispositif de l'ordonnance, celui-ci ne pouvant avoir autorité de chose jugée.

4. Les frais de la procédure arrêtés à 1'000 fr. seront mis à charge de A______ à hauteur de 600 fr. dans la mesure où elle succombe en totalité et de B______ à hauteur de 400 fr. dans la mesure où il succombe partiellement.

Ils seront compensés par les avances de frais versées par les parties qui restent acquises à l'Etat de Genève. A______ sera condamnée à verser pour le surplus une somme de 200 fr. à l'Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours expédié par A______ le 25 septembre 2017 contre l'ordonnance DTAE/4186/2017 rendue le 8 juin 2017 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/9896/2011-6.

Déclare recevable le recours déposé par B______ le 26 septembre 2017 contre la même ordonnance.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance attaquée.

Confirme ladite ordonnance pour le surplus.

Arrête les frais de la procédure à 1'000 fr., les met à la charge de A______ à hauteur de 600 fr. et dit qu'ils sont compensés partiellement par l'avance de frais effectuée et à la charge d'B______, à hauteur de 400 fr., et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance de frais effectuée par celui-ci.

Condamne A______ au paiement de la somme de 200 fr. en faveur de l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.