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Décisions | Assistance juridique

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AC/2774/2016

DAAJ/27/2022 du 17.03.2022 sur AJC/3450/2021 ( AJC ) , RENVOYE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/2774/2016 DAAJ/27/2022

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU JEUDI 17 MARS 2022

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______ (GE),

représenté par Me B______, avocate,

 

contre la décision du 21 juin 2021 de la Vice-présidente du Tribunal de première instance.

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : le recourant) et C______ sont les parents non mariés de D______ et E______, nés respectivement les ______ 2013 et ______ 2014.

b. Par décisions successives des 26 septembre 2016, 7 mai et 4 juillet 2019, le recourant a été mis au bénéfice de l'assistance juridique pour une procédure pendante devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE), cause C/1______/2014, concernant les droits parentaux sur ses enfants.

Cet octroi a été limité à un total de 24 heures d'activité d'avocat, forfait courriers, téléphones et audiences en sus, et jusqu'à droit jugé au fond, à l'exclusion des étapes ultérieures de mise en œuvre de la décision. Me B______, avocate, a été désignée pour la défense des intérêts du recourant.

c. Par requête du 2 mars 2021, le recourant a requis l'extension de l'aide étatique eu égard notamment au prononcé, le 8 février 2021, d'une décision superprovisionnelle ordonnant le placement des enfants chez leur mère au plus vite (en lieu et place de la garde alternée instaurée) et suspendant sine die les contacts des enfants avec le père, hormis par visioconférence ou par téléphone.

B.            a. Par courrier du 11 mai 2021, le greffe de l'assistance juridique a demandé au recourant de lui fournir les éléments utiles pour réexaminer sa situation financière.

b. Par pli du 31 mai 2021, le recourant a fourni les informations et documents sollicités.

C.           Par décision du 21 juin 2021, notifiée le 1er juillet 2021, la Vice-présidente du Tribunal de première instance a condamné le recourant à rembourser la somme de 8'669 fr. 85 à l'État de Genève, correspondant au montant versé à son avocate à l'issue de la procédure pour l'activité déployée en sa faveur. Il a été retenu que la situation financière du recourant s'était améliorée, de sorte que le remboursement de l'intégralité des prestations de l'État pouvait être exigé de lui sans porter atteinte à ses besoins fondamentaux. Les revenus du ménage du recourant s'élevaient en effet à 5'979 fr. (comprenant 594 fr. de rente invalidité, 2'511 fr. de prestations complémentaires pour le recourant, 2'274 fr. de prestations complémentaires pour ses enfants et 600 fr. d'allocations familiales) et ses charges totalisaient 4'570 fr. [recte : 4'810 fr.] (comprenant 1'200 fr. de minimum vital OP, 240 fr. de majoration de ce montant, 1'100 fr. de loyer, 120 fr. de charge fiscale et 2'150 fr. de saisies OP). Il bénéficiait ainsi d'un solde disponible dépassant de 1'169 fr. le minimum vital élargi.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte déposé le 12 juillet 2021 au greffe de la Cour de justice. Le recourant conclut à l'annulation de la décision entreprise.

Le recourant produit des pièces nouvelles.

b. La Vice-présidente du Tribunal de première instance a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. Les décisions de remboursement prises par la vice-présidente du Tribunal de première instance, rendues en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la présidente de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC, 11 et 19 al. 5 RAJ). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (HOHL, Procédure civile, tome II, 2e éd. 2010, n. 2513-2515).

2.             A teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles ne seront pas pris en considération.

3.             3.1.

3.1.1 Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Ainsi, l'octroi de l'assistance juridique est notamment subordonné à la condition que le requérant soit dans l'indigence (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a CPC).

Une personne est indigente lorsqu'elle ne peut assurer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille (ATF 141 III 369 consid. 4.1; 128 I 225 consid. 2.5.1).

L'indigence s'apprécie en fonction de l'ensemble des ressources du recourant, dont ses revenus, sa fortune et ses charges, tous les éléments pertinents étant pris en considération (ATF 135 I 221 consid. 5.1; 120 Ia 179 consid. 3a). La situation économique existant au moment du dépôt de la requête est déterminante (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 du 11 avril 2016 consid. 4.1).

Il incombe au requérant d'indiquer de manière complète et d'établir autant que faire se peut ses revenus, sa situation de fortune et ses charges (art. 119 al. 2 CPC et 7 al. 2 RAJ; ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2015 du 30 novembre 2015 consid. 5).

Seules les charges réellement acquittées sont susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 précité consid. 4.1).

3.1.2 D'après l'art. 123 al. 1 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ, une partie est tenue de rembourser l'assistance juridique dès qu'elle est en mesure de le faire. L'art. 19 al. 3 RAJ précise que si la situation de la personne bénéficiaire s'est améliorée ou si elle est de toute manière en mesure d'effectuer un paiement, le paiement de l'intégralité des prestations de l'État peut être exigé.

3.1.3. Selon l'art. 35 al. 1 de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20), les hommes et les femmes qui peuvent prétendre à une rente d'invalidité ont droit à une rente pour chacun des enfants qui, au décès de ces personnes, auraient droit à la rente d'orphelin de l'assurance-vieillesse et survivants.

La rente pour enfant est versée comme la rente à laquelle elle se rapporte (art. 35 al. 4 première phrase LAI), sous réserve, notamment, des dispositions spéciales édictées par le Conseil fédéral sur le versement de la rente, notamment pour les enfants de parents séparés ou divorcés (art. 35 al. 4 troisième phrase LAI).

La jurisprudence a précisé que la rente complémentaire pour enfant n'a, à la différence de la rente d'orphelin, pas pour fonction de compenser les difficultés financières liées à la disparition d'un parent, mais de faciliter l'obligation d'entretien de la personne invalide ou au bénéfice d'une rente de l'assurance-vieillesse et survivants, singulièrement de compenser les éléments du revenu perdus à la suite de la survenance du risque assuré (âge ou invalidité) et destinés à l'entretien de l'enfant. Autrement dit, elle doit permettre au parent invalide ou au bénéfice d'une rente de l'assurance-vieillesse et survivants d'honorer son obligation d'entretien. Elle n'a en revanche pas vocation à enrichir le bénéficiaire de l'entretien (ATF 142 V 226 consid. 6.2 et les références citées).

Les montants reçus pour un enfant à titre de rente complémentaire ne doivent pas être ajoutés aux revenus du débiteur puisqu'ils doivent exclusivement être affectés aux besoins des enfants. En revanche, ils doivent être déduits de l'entretien courant de ceux-ci, tel qu'il est fixé par les normes d'insaisissabilité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_236/2010 du 21 juillet 2010 consid. 4.2, traitant d'un cas de parents divorcés exerçant une garde partagée).

De manière générale, pour les gains du requérant, est normalement déterminant le revenu mensuel moyen, avec le cas échéant les allocations familiales et les gratifications ou participation aux résultats éventuels ainsi que le produit d’une activité accessoire. Des ressources d’une autre nature (revenus de la fortune, droits d’auteurs, rentes d’assurances sociales ou privées, pensions alimentaires, etc.), y compris en faveur d’enfants mineurs faisant ménage commun avec le requérant, entrent naturellement aussi en considération, pour autant qu’elles puissent réellement être touchées – étant rappelé que des ressources de l'intéressé il faut déduire ses charges, soit ses frais d'entretien (pour lui et la famille à sa charge) (Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème édition, 2019, n. 23 et n. 28 ad art. 117 CPC et les références citées).

3.2. En l'espèce, le recourant perçoit une rente invalidité mensuelle de 594 fr. ainsi que des prestations complémentaires de 2'511 fr. par mois.

Dans la mesure où il n'a aucunement rendu vraisemblable s'acquitter des frais d'entretien de ses enfants, il n'y a pas lieu de comptabiliser les charges de ceux-ci dans son budget, d'autant moins depuis que les mineurs résident chez leur mère, à savoir depuis le 8 février 2021. De la même manière, il ne se justifie pas non plus de tenir compte, dans les revenus du recourant, des prestations complémentaires perçues pour les enfants en 2'274 fr. par mois, puisque celles-ci visent à couvrir les besoins des mineurs et non à enrichir le parent qui les reçoit. La mère, qui détient l'autorité parentale sur les enfants et vit dorénavant avec eux, peut d'ailleurs demander à ce que la rente leur revenant lui soit versée, bien qu'elle ne soit pas titulaire de la rente principale (cf. art. 71ter al. 1 RAVS, par renvoi de l'art. 82 al. 1 RAI).

C'est ainsi à bon droit que la Vice-présidente du Tribunal de première instance n'a pas tenu compte de l'entretien de base des enfants dans le calcul opéré, ni du montant de 1'350 fr. pour un débiteur monoparental. Elle aurait toutefois dû retenir que le recourant ne percevait que 3'105 fr. par mois de revenus. Or, avec des charges de 4'810 fr. par mois (1'200 de minimum vital OP + 240 fr. de majoration de ce montant + 1'100 fr. de loyer + 120 fr. de charge fiscale + 2'150 fr. de saisies OP), celui-ci est en situation déficitaire. Son indigence est donc avérée.

C'est donc à tort que l'autorité précédente a considéré que le recourant pouvait être condamné au remboursement de la somme de 8'669 fr. 85 avancée par l'Etat.

Cette décision sera, par conséquent, annulée.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, l'Etat de Genève sera condamné à verser au recourant 400 fr. à titre de dépens (ATF
140 III 501 consid. 4).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 12 juillet 2021 par A______ contre la décision rendue le 21 juin 2021 par la Vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/2774/2016.

Au fond :

Annule la décision entreprise.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Condamne l'État de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à verser la somme de 400 fr. à A______ à titre de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me B______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.