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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/10724/2018

CAPH/91/2020 du 05.05.2020 sur JTPH/349/2019 ( OO ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.06.2020, rendu le 27.07.2020, IRRECEVABLE, 4A_298/2020
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/10724/2018-5 CAPH/91/2020

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 5 mai 2020

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [Australie] mais faisant élection de domicile
c/o Madame B______, ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 16 septembre 2019, comparant en personne,

et

C______ SA, sise ______ [ZH], intimée, comparant par Me Romain FELIX, avocat, Sulmoni & Félix, Rue de Saint-Léger 2, 1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           a. A______, avocat inscrit au barreau d'Australie, a travaillé auprès de
C______ SA du 13 août 2014 au 31 mars 2018, date à laquelle il a été licencié.

b. Par demande formée le 14 septembre 2018 devant le Tribunal des prud'hommes, A______ a conclu au paiement de C______ SA de la somme totale de 211'499 fr. 16, comprenant 22'612 fr. 98 avec intérêts dès le 1er janvier 2016 à titre de compensation au travail dominical temporaire effectué en 2015,
5'607 fr. 46 avec intérêts dès le 1er janvier 2017 à titre de compensation au travail dominical temporaire effectué en 2016, 5'614 fr. 44, avec intérêts dès le 1er janvier 2018 pour celui effectué en 2017, 13'806 fr. 59 avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre d'indemnité pour le travail dominical non compensé par un repos,
65'829 fr. 80 avec intérêts dès le 7 avril 2016 à titre de travail supplémentaire effectué en 2015, 11'232 fr. 13 avec intérêts dès le 8 avril 2017 à titre de travail supplémentaire effectué en 2016, 12'045 fr. 76 avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre de travail supplémentaire effectué en 2017 et 74'750 fr. avec intérêts dès le
1er avril 2018 à titre d'indemnité pour licenciement abusif.

L'acte comprend 76 pages et 245 allégués, dont 76 allégués sur le travail non rémunéré et 169 portant sur le congé abusif.

c. Le 25 janvier 2019, C______ SA a déposé un mémoire de réponse et de demande reconventionnelle de 115 pages, comportant 110 allégués propres au sujet des heures supplémentaires et travail dominical, 217 allégués propres sur les motifs du licenciement et 7 allégués propres sur les documents encore en possession de A______. Elle a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement, à la restitution ou à l'apport de la preuve de la destruction de toutes les données appartenant à la société, en possession de A______.

d. Pa ordonnance du 5 février 2019, le Tribunal a ordonné un second échange d'écritures, au vu du complexe de faits et des différentes conclusions des parties notamment reconventionnelles.

e. Le 29 avril 2019, A______ a déposé une réplique de 278 pages, comprenant 1'580 allégués relatifs à la demande principale et trois pages concernant la demande reconventionnelle. Aux termes de ces écritures, il a réduit ses conclusions d'environ 3'000 fr.

f. Lors de l'audience de débats d'instruction du 7 juin 2019, le Tribunal a imparti à A______ un délai au 15 juillet 2019 pour remettre une nouvelle version du mémoire précité, non prolixe au sens de l'art. 132 al. 2 CPC, un délai ayant également été fixé à C______ SA pour dupliquer et une audience de débats d'instruction agendée.

g. Le 15 juillet 2019, A______ a déposé un mémoire de réplique de 238 pages, comprenant 923 allégués, accompagné d'un nouveau chargé de pièces datant de 2014 à 2018 (pièces R-083b, R-149 et R-150). Il a allégué de nouveaux faits et effectué de nouveaux calculs. Il a par ailleurs modifié ses conclusions en paiement, augmentant celles-ci de manière globale à 213'227 fr. 42.

h. Par ordonnance du 15 août 2019, reçue par A______ le 21 août suivant, le Tribunal a considéré que ces écritures présentaient toujours un caractère prolixe. Il a ainsi imparti à A______ un ultime délai de 15 jours pour y remédier, étant précisé qu'à défaut, son mémoire sur réplique et réponse à la demande reconventionnelle serait déclaré irrecevable.

i.a Le 3 septembre 2019, A______ a déposé un nouveau mémoire, dans lequel il a repris ses conclusions modifiées de 213'227 fr. 42, numérotées de C3 à C13, comprenant 13'179 fr. 92 avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre de repos compensatoires non-accordés pour 23 dimanches (C3), 4'870 fr. 84 avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre de 17 demi-journées de congé non-accordées (C4), 88'155 fr. 25 avec intérêts dès le 7 avril 2016 à titre d'indemnité pour des heures supplémentaires effectuées en 2015 (C5), 16'977 fr. 94 dès le 8 avril 2017 à titre d'indemnité pour des heures supplémentaires effectuées en 2016 (C6), 12'111 fr. 33 avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre d'indemnité pour les heures supplémentaires effectuées en 2017 (C7), 513 fr. 44 avec intérêts dès le 7 avril 2016 à titre d'indemnité pour les "heures de non-travail supplémentaire" effectuées sur dimanche ou jour férié en 2015 (C8), 223 fr. 80 avec intérêt dès le
8 avril 2017 pour celles effectuées en 2016 (C9), 2'444 fr. 90 avec intérêts dès le 1er avril 2018 pour celles effectuées en 2017 (C10) et 74'750 fr. avec intérêts dès le 1er avril 2018 à titre de licenciement abusif (C13).

i.b Ces écritures condensées, de 148 pages, dont les marges ont été réduites par rapport à sa première version, se composent d'une introduction de 2 pages, de
22,5 pages de détermination sur les allégués de la réponse de C______ SA,
99 pages d'allégués propres, dont 149 allégués propres liés au travail non rémunéré et 515 liés au congé abusif, et 3,5 pages contenant 25 allégués liés à la demande reconventionnelle.

i.c Certains allégués, tels que ceux numérotés sous ch. 36, 55, 110, 115, 116, 134, 155, 156, 162, 172, 175, 176, 180, 189, 210, 219 et 261, se subdivisent en plusieurs parties, contenant plusieurs faits.

i.d D'autres passages reprennent à plusieurs reprises des éléments allégués par C______ SA. C'est notamment le cas des allégués de la réplique n. 150, 204, 234, 256, 271b, 272b, 293, 374, 388 et 422.

i.e Certains passages ne présentent pas d'allégués, mais une appréciation des faits, voire une motivation juridique, relevant de l'argumentation, en particulier les éléments numérotés sous allégués n. 163, 197, 198, 206, 234, 235, 263, 264, 294, 298, 336 à 338, 356, 374, 395, 396, 450 et 460.

i.f La réplique reprend en outre à plusieurs endroits les mêmes faits. Tel est le cas du contenu du courrier du 13 septembre 2017 mentionné notamment aux allégués n. 168, 171, 173, 174, 175a, 176, 650 et 652, ainsi que la réunion du 24 août 2017 figurant notamment aux allégués n. 151, 152, 154, 155a, 208, 210, 347, 642 et 643.

i.g Ces écritures mentionnent encore de nombreux faits négatifs comme par exemple la non-contestation des propos de A______ par son employeur (allégué n. 158), la non-invocation d'un comportement dérangeant comme motif du congé (exposée en 4 allégués, n. 231, 232, 2344 et 235), l'inexistence d'un avertissement formel de la part de son employeur (allégué n. 233), le défaut de réponse à un de ses courriels (allégué n. 248), la non-mention d'un courriel lors de plusieurs réunions, ni dans son dossier personnel, ni lors de son licenciement (allégué
n. 251), l'absence de retour sur les inquiétudes dont il avait fait part à son employeur (allégué n. 261a), l'absence d'enquête de la part de l'employeur sur certains problèmes dénoncés par des collaborateurs (allégué n. 261b), la non-mention d'un travail insatisfaisant dans plusieurs situations détaillées (allégué
n. 266, subdivisé en plusieurs faits), l'absence de précision, dans les écritures de C______ SA, sur les prestations de travail insatisfaisantes qu'il aurait exécutées en 2017 (allégué n. 276), l'absence de critiques sur les mandats confiés (exposée sur près d'une page, cf. allégués n. 268 à 274), la non-mention d'une insatisfaction dans le conduite d'un dossier lors de plusieurs discussions énumérées (allégué
n. 297), et la non-réception d'un prétendu courriel lui impartissant un délai (allégués n. 580 et 581).

i.h La réplique présente de plus de nombreux allégués, répétitifs, ne présentant qu'un seul fait.

Il en va ainsi, par exemple, de l'inquiétude de A______ sur la capacité de son employeur à entendre des propos dénonçant de prétendus dysfonctionnements au sein de l'Etude, inquiétude exposée sur deux pages de la réplique, soit
12 alléguées (allégués n. 151 à 162) relatant le contenu détaillé de réunions et de courriers où il aurait fait part à son employeur de cette inquiétude. A______ a ensuite exposé, sur trois pages, contenant 13 allégués (allégués n. 164 à 176), qu'il aurait exigé de son employeur qu'il le protège de toute incidence négative s'il divulguait les problèmes éthiques constatés au sein de l'Etude. Sa bonne foi dans la dénonciation de certains comportements de l'employeur fait également l'objet de plusieurs allégués ne contenant en substance aucun autre fait (cf. allégués
n. 199, 200 et 202). Les prestations qu'il auraient effectuées en 2017 font en outre l'objet d'un long allégué n. 180 subdivisé en plusieurs faits, étayés sur plus d'une page. Ces faits sont en partie répétés sous le long allégué n. 210.

B. a. Par jugement du 16 septembre 2019 - de 6 pages -, le Tribunal a déclaré irrecevables les conclusions C3, C4, C5 à C7, C8 à C10 du mémoire sur demande reconventionnelle et réplique des 15 juillet et 3 septembre 2019, ainsi que les pièces R-83b, R-149 et R-150 demandeur (ch. 1 du dispositif), déclaré irrecevable le mémoire sur demande reconventionnelle et réplique formé par A______ contre C______ SA le 29 avril 2019, complété les 15 juillet et 3 septembre 2019 (ch. 2), annulé la première partie du point 4 de l'ordonnance du 15 août 2019 liée à la production du mémoire de duplique par C______ SA, confirmé le délai au
18 octobre 2019 imparti à celle-ci pour remettre en double exemplaire, la traduction de ses pièces ou extraits de pièces qu'elle jugera utiles (ch. 3), confirmé la tenue de l'audience de débats d'instruction du 2 décembre 2019 (ch. 4) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 5).

Le Tribunal a retenu que le troisième mémoire revêtait toujours un caractère prolixe, rendant sa lecture peu aisée et ne permettant pas le maintien d'un cadre raisonnable au procès. Faute de faits nouveaux, les pièces nouvelles et les conclusions nouvelles étaient en outre irrecevables.

b. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 28 septembre 2019, A______ forme recours - de 33 pages - contre le jugement précité, qu'il a reçu le
18 septembre 2019, concluant à l'annulation des chiffres 1 et 2 de son dispositif, à la recevabilité de la réplique déposée le 3 septembre 2019 et, subsidiairement, à sa recevabilité, à l'exception de la conclusion C4 et de la pièce R-149.

c. Dans sa réponse - de 14 pages -, C______ SA conclut au rejet du recours et à la condamnation de A______ en tous les frais judiciaires. Elle produit une communication du Tribunal du 21 octobre 2019.

d. Le 5 décembre 2019, A______ a répliqué - en 21 pages -, persistant dans ses conclusions. Il a produit des pièces nouvelles, numérotées A-17 à A-22.

e. C______ SA a dupliqué - en 6 pages -, persistant dans ses conclusions.

EN DROIT

1. Le recours est recevable contre les décisions finales, incidentes et provisionnelles de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC) et contre les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 11 ad art. 319 CPC; Freiburghaus/Afheldt, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 11 ad art. 319 CPC).

Les "autres décisions" se rapportent aux décisions dont le prononcé marque définitivement le cours des débats et déploie - dans cette seule mesure - autorité et force de chose jugée à l'encontre des parties ou des tiers concernés. Une telle qualification échoit notamment aux décisions par lesquelles le juge statue sur l'admission de faits et moyens de preuve nouveaux (art. 229 CPC), ainsi que sur l'admission de conclusions modifiées (art. 227 et 230 CPC; Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 15 ad art. 319 CPC).

1.2 Dans le cadre de la décision querellée, le Tribunal a notamment déclaré irrecevable le mémoire sur demande reconventionnelle et réplique déposé par le recourant, déclaré irrecevables les conclusions nouvelles contenues dans l'exemplaire du 3 septembre 2019 et refusé trois offres de preuve produites avec celui-ci. Il a ainsi rendu une décision par laquelle il a statué sur le déroulement et la conduite de la procédure. Ladite décision peut faire l'objet d'un recours conformément à l'art. 319 let. b CPC.

1.3 Le recours, écrit et motivé, doit être déposé auprès de l'instance de recours dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, le recours a été introduit dans le délai imparti.

Bien qu'il présente de longs développements, parfois redondants et dont la pertinence est par endroits fortement discutable, sa recevabilité sera admise du point de vue formel (art. 130, 131 et 321 CPC).

2. Reste à déterminer si le jugement attaqué est susceptible de causer un préjudice difficilement réparable au recourant.

2.1 La notion de "préjudice difficilement réparable" est plus large que celle de "préjudice irréparable" au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 138 III 378 consid. 6.3). Constitue un "préjudice difficilement réparable" toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, qui ne peut être que difficilement réparée dans le cours ultérieur de la procédure. L'instance supérieure doit se montrer exigeante, voire restrictive avant d'admettre l'accomplissement de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu : il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (ACJC/353/2019 du
1er mars 2019 consid. 3.1.1; Jeandin, op. cit., n. 22 ad art. 319 CPC).

Une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci ne constitue pas un préjudice difficilement réparable (Spühler, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2017, n. 7 ad art. 319 CPC). De même, le seul fait que la partie ne puisse se plaindre d'une administration des preuves contraire à la loi qu'à l'occasion d'un recours sur le fond n'est pas suffisant pour retenir que la décision attaquée est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable (Colombini, Condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise relative à l'appel et au recours en matière civile, in JdT 2013 III 131 ss, 155; Spühler, op. cit., n. 8 ad art. 319 CPC). Retenir le contraire équivaudrait à permettre à un plaideur de contester immédiatement toute ordonnance d'instruction pouvant avoir un effet sur le sort de la cause, ce que le législateur a justement voulu éviter (ACJC/35/2014 du 10 janvier 2014
consid. 1.2.1; ACJC/943/2015 du 28 août 2015 consid. 2.2).

La décision refusant ou admettant des moyens de preuve offerts par les parties
ne cause en principe pas de préjudice difficilement réparable puisqu'il est normalement possible, en recourant contre la décision finale, d'obtenir l'administration de la preuve refusée à tort ou d'obtenir que la preuve administrée à tort soit écartée du dossier (Colombini, Code de procédure civile, 2018,
p. 1024; arrêts du Tribunal fédéral 4A_248/2014 du 27 juin 2014, 4A_339/2013 du 8 octobre 2013 consid. 2, 5A_315/2012 du 28 août 2012 consid. 1.2.1).

Le préjudice sera ainsi considéré comme difficilement réparable s'il ne peut pas être supprimé ou seulement partiellement, même dans l'hypothèse d'une décision finale favorable au recourant (Reich, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2010, n. 8 ad art. 319 CPC; ATF 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2), ce qui surviendra par exemple lorsque des secrets d'affaires sont révélés ou qu'il y a atteinte à des droits absolus à l'instar de la réputation, de la propriété et du droit à la sphère privée, ou encore, lorsqu'une ordonnance de preuve ordonne une expertise ADN présentant un risque pour la santé ce qui a pour corollaire une atteinte à la personnalité au sens de l'art. 28 CC (Jeandin, op. cit., ad art. 319 CPC n. 22a et les références citées). De même, le rejet d'une réquisition de preuve par le juge de première instance n'est en principe pas susceptible de générer un préjudice difficilement réparable, sauf dans des cas exceptionnels à l'instar du refus d'entendre un témoin mourant ou du risque que les pièces dont la production est requise soient finalement détruites (Jeandin, op. cit., ad art. 319 CPC n. 22b).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 134 III 426 consid. 1.2 par analogie).

Si la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, le recours est irrecevable et la partie doit attaquer la décision incidente avec la décision finale sur le fond (Brunner, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2016, n. 13 ad art. 319 CPC).

3.1.2 Les ordonnances d'instruction, qui statuent en particulier sur l'opportunité et les modalités d'administration des preuves, ne déploient pas d'autorité de force de chose jugée et peuvent en conséquence être modifiées ou complétées en tout temps (art. 154 in fine CPC; Jeandin, op. cit., n. 14 ad art. 319 CPC).

3.1.3 Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens de l'art. 29 Cst., le droit d'être entendu garantit notamment au justiciable le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, dans la mesure où il l'estime nécessaire, que celle-ci contienne ou non des éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre (ATF 139 II 489 consid. 3.3; 139 I 189 consid. 3.2; 138 I 484 consid. 2.1).

3.1.4 Selon un principe bien établi, dans un procès régi par la maxime des débats, les parties ont chacune deux chances de s'exprimer - c'est-à-dire d'introduire des allégués, des offres de preuves, des moyens d'attaque ou de défense - sans limites (ATF 140 III 312 consid. 6.3.2.3, JdT 2016 II 257; arrêt du Tribunal fédéral 4A_70/2019 du 6 août 2019 (destiné à la publication) consid. 2.4.1 et 2.4.2; Bastons Bulletti, in CPC Online, newsletter du 11 septembre 2019) : une première fois dans le cadre du premier échange d'écritures; une seconde fois soit dans le cadre d'un second échange d'écritures, soit - s'il n'en est pas ordonné - à une audience d'instruction (art. 226 al. 2 CPC) ou "à l'ouverture des débats principaux" ("zu Beginn der Hauptverhandlung"; "all'inizio del dibattimento") avant les premières plaidoiries (art. 229 al. 2 CPC) (ATF 144 III 67 consid. 2.1; Heinzmann, in CPC Online, newsletter du 7 février 2018).

3.1.5 Après la clôture de la phase d'allégation, la présentation de nova n'est plus possible qu'aux conditions restrictives de l'art. 229 al. 1 CPC (arrêt du Tribunal fédéral précité 4A_70/2019 du 6 août 2019 consid. 2.5.2).

3.2 En l'espèce, le recourant allègue que le jugement entrepris est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable, dès lors qu'il viole ses droits fondamentaux, et plus particulièrement son droit d'être entendu.

3.3.1 S'agissant du chiffre 1 du dispositif entrepris, il reproche au Tribunal d'avoir considéré les conclusions C3 et C5 à C10 comme étant nouvelles, alors qu'elles correspondaient à une réduction des conclusions de sa demande initiale. Seule la conclusion C4 constituait une amplification de la demande, étant toutefois précisé qu'elle se fondait sur des faits déjà articulés dans celle-ci. Par ailleurs, les nouvelles pièces produites avec les deux dernières versions de la réplique étaient recevables, puisqu'elles avaient été produites avant la clôture de la phase d'allégation.

3.3.2 Dès lors que, selon les dires du recourant, les conclusions déclarées irrecevables constituent pour l'essentiel une réduction de ces prétentions initiales et dans une moindre mesure une amplification de sa demande fondée sur des faits déjà allégués dans celle-ci, on ne saurait retenir que leur non-admission pourrait lui créer un dommage difficilement réparable s'il devait attendre le jugement final pour s'en plaindre. De la même manière, le recourant pourra, cas échéant, contester l'irrecevabilité des pièces écartées par la décision entreprise dans le cadre d'un appel contre le jugement final. L'instance d'appel aura alors la possibilité de se prononcer en prenant en considération les conclusions nouvellement formulées et les pièces produites ou de renvoyer la cause en première instance pour complément d'instruction.

Partant, le recours formé contre le chiffre 1 du dispositif est irrecevable, faute de préjudice difficilement réparable.

A titre superfétatoire, il sera relevé que l'art. 132 al. 2 CPC permet de réparer certains manquements typiques des plaideurs qui procèdent sans l'assistance d'un avocat et qu'il n'est pas destiné à permettre le complètement de moyens par ailleurs correctement présentés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_659/2011 du
7 décembre 2011, consid. 5). Aussi, le recourant ne pouvait pas modifier le fond de sa demande dans les deux dernières versions de sa réplique ou produire des pièces qu'il aurait déjà pu fournir avec la première version du 29 avril 2019.

3.4.1 En ce qui concerne le chiffre 2 du dispositif querellé, le recourant fait grief au premier juge d'avoir retenu que son mémoire du 3 septembre 2019 était prolixe. Il se plaint, de manière subsidiaire, de ce que ses écritures n'ont pas été prises en considération dans la mesure de leur recevabilité.

Les écritures du 3 septembre 2019 portent tant sur la réplique du recourant que sur sa réponse à la demande reconventionnelle. Partant, la question pourrait se poser de savoir si le Tribunal a à tort déclaré en bloc irrecevables ces deux aspects, sans examiner la recevabilité de chacun d'entre eux de manière séparée.

3.4.2 Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, la clôture de la phase d'allégation, en cas de double échange d'écritures, intervient après le second échange d'écritures (ATF 140 III 312 consid. 6.3.2, JdT 2016 II 257). Il s'ensuit que le recourant n'est, à ce stade de la procédure, plus en droit d'introduire librement des faits et moyens de preuve nouveaux en relation avec sa demande en paiement.

Certes, si le recourant devait succomber in fine, il lui resterait la possibilité d'attaquer l'arrêt final et, simultanément, de s'en prendre à la décision présentement examinée, ce qui lui permettrait, au cas où il le ferait avec succès, d'obtenir un nouveau jugement sur sa demande en paiement après qu'il aura pu introduire les faits et offres de preuve que le Tribunal aurait refusé à tort de prendre en considération.

Toutefois, dans la mesure où le jugement entrepris a été rendu avant les débats principaux, il apparaît disproportionné d'exiger de lui qu'il attende le prononcé du jugement final pour se plaindre d'une violation de son droit d'être entendu. Il y a en effet lieu de lui permettre, cas échéant, de faire porter l'instruction sur ses allégués nouveaux, à la condition néanmoins que ceux-ci soient pertinents et contestés (cf. art. 150 al. 1 CPC).

La condition du préjudice difficilement réparable est dès lors réalisée en ce qui concerne la recevabilité des écritures liées à la réplique du recourant, de sorte qu'il se justifie d'entrer en matière sur ce point.

Le recours contre le chiffre 2 du dispositif du jugement entrepris est donc recevable dans cette mesure.

3.4.3 Il en va en revanche différemment s'agissant de la réponse à la demande reconventionnelle. En effet, un seul échange d'écritures a été ordonné à ce sujet, de sorte que le recourant pourra faire valoir ses allégués, offres de preuve et conclusions en lien avec celle-ci lors de l'audience de débats d'instruction.

Partant, le chiffre 2 jugement entrepris, en tant qu'il écarte les écritures de réponse sur demande reconventionnelle, n'est pas susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable, ce d'autant moins qu'il s'agira d'avancer des allégués que le recourant a exposés en seulement 3,5 pages dans ses écritures du 3 septembre 2019.

Le recours est donc irrecevable sur ce point.

4. Les pièces nouvelles déposées par les parties sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

5. Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir déclaré irrecevable son mémoire de réplique du 3 septembre 2019.

5.1 L'art. 132 al. 1 et 2 CPC prévoit que le Tribunal peut impartir d'office un délai pour rectifier un acte illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe. A défaut, l'acte n'est pas pris en considération.

Il est admis qu'une écriture est prolixe lorsqu'elle présente des développements interminables et des redites sur des questions de fait ou de droit, sans que les circonstances concrètes l'imposent pour la défense des droits invoqués. Selon les circonstances, l'exposé d'un état de fait compliqué et d'une situation juridique complexe impose une discussion détaillée. Même dans de tels cas, l'on
peut cependant attendre que l'on se limite à l'essentiel. L'exigence de compréhensibilité impose aussi que le mémoire soit structuré de manière compréhensible. Il dépend des circonstances du cas concret que de déterminer si une écriture satisfait à ces exigences (arrêts du Tribunal fédéral 2C_204/2015 du 21 juillet 2015 consid. 5.4.2; 1C_162/2010 du 18 mai 2010 consid. 4.5).

5.2 En l'espèce, le mémoire déposé le 3 septembre 2019 par le recourant comprend 148 pages de texte condensé, présentant des marges réduites par rapport à sa première version. Si l'on peut admettre que ce dernier mémoire contient des allégués de fait plus courts que ceux figurant dans l'exemplaire du 29 avril 2019 (664 allégués contre 1'580), ces allégués présentent à nouveau de nombreuses formules redondantes et des répétitions (cf. partie "En Fait" points i.f et i.h). Ils mélangent encore des faits et du droit (cf. partie "En Fait" points i.d et i.e) mais aussi plusieurs faits (cf. partie "En Fait" point i.c), rendant la compréhension des écritures difficile et confuse. Ils présentent en outre des faits négatifs, exposés parfois sous plusieurs allégués, dont l'apport de la preuve n'incombe pas au recourant ou dont la pertinence est fortement douteuse (cf. partie "En Fait" point i.g). Tous ces éléments rendent prolixe la réplique dans son ensemble, empêchant l'intimée d'y dupliquer de manière précise.

La complexité du litige, qui ne porte que sur l'existence d'heures de travail non rémunérées et un congé donné prétendument en raison de la dénonciation par l'employé de comportements non éthiques de son employeur, ne justifie pas un exposé de 148 pages, étant précisé que le recourant a répliqué aux 217 allégués de sa partie adverse sur les motifs du congé par 515 allégués propres. Le Tribunal était en effet en droit de s'attendre du recourant, de surcroît au bénéfice d'une formation d'avocat - obtenue en Australie -, qu'il se limite aux faits essentiels.

Le fait que dans ces circonstances, le Tribunal ait considéré que le recourant n'avait pas satisfait à l'invitation à corriger son mémoire et déclaré celui-ci irrecevable ne prête pas le flanc à la critique. En laissant au recourant la possibilité à deux occasions de modifier sa réplique, le premier juge n'a pas violé son droit d'être entendu.

C'est par ailleurs en vain que le recourant invoque la protection contre le formalisme excessif. Cette garantie constitutionnelle ne dispense pas les plaideurs d'agir dans le respect des règles de procédure légitimement imposées dans l'intérêt d'une administration efficace de la justice et dans l'intérêt des autres parties au procès (arrêt du Tribunal fédéral 4A_659/2011 du 7 décembre 2011, consid. 6). Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le recourant, l'intimée ne commet aucun abus de droit en demandant le respect de ses droits procéduraux.

5.3 Le recours est donc rejeté dans le mesure de sa recevabilité.

6. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais judiciaires du recours, arrêtés à 1'000 fr. (art. 95, 106 al. 1 CPC ; art. 41 et 68 RTFMC), compensés par l'avance de frais du même montant versée par lui, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens de recours ni d'indemnité pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes de la Cour de justice, groupe 5 :

A la forme :

Déclare irrecevable le recours interjeté par A______ contre le chiffre 1 et le chiffre 2, en tant qu'il vise ses écritures sur demande reconventionnelle, du jugement JTPH/349/2019 rendue le 16 septembre 2019 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/10724/2018-5.

Déclare recevable le recours pour le surplus.

Au fond :

Rejette le recours dans la mesure de sa recevabilité.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Arrête les frais judiciaires de recours à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance du même montant fournie par celui-ci, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Monsieur Michael RUDERMANN, juge employeur; Monsieur Willy KNOPFEL, juge salarié, Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.