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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2094/2020

ATAS/989/2021 du 23.09.2021 ( LPP ) , ADMIS PARTIEL

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2094/2020 ATAS/

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 septembre 2021

 

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à JUVIGNY, France, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître David METZGER

 

demanderesse

 

contre

FONDATION DE PRÉVOYANCE EN FAVEUR DU PERSONNEL D'INSTITUTIONS SUBVENTIONNÉES PAR LA VILLE DE GENÈVE, sise rue de l'Hôtel de Ville 5, GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Anne TROILLET

 

 

défenderesse

EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après l'assurée ou la demanderesse), née en ______ 1957, a travaillé dès octobre 1992 en tant qu'aide-hospitalière au sein de la Résidence B______.

A ce titre, elle a été affiliée pour la prévoyance professionnelle auprès de la Fondation de prévoyance en faveur du personnel d'institutions subventionnées par la Ville de Genève (ci-après la caisse de pension ou la défenderesse).

2.        L'assurée a subi une incapacité de travail complète dès le 19 janvier 1996, qui a donné lieu au versement d'une rente entière de l'assurance-invalidité dès le 1er janvier 1997.

3.        La caisse de pension a versé une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle à l'assurée dès le 18 février 1998.

4.        Lors de sa séance du 27 mai 2004, le Conseil de fondation de la caisse de pension (ci-après le Conseil de fondation) a noté qu'il avait toujours appliqué le taux de rémunération légal à la totalité du capital-épargne, et pas uniquement à la part obligatoire du capital de prévoyance. Si une augmentation du taux de rémunération était envisagée, il faudrait examiner la modification d'autres paramètres, plus particulièrement du taux de conversion. Il a précisé qu'un intérêt de 3.25 % avait été crédité aux assurés.

5.        Selon le procès-verbal de la séance du Conseil de fondation du 27 mai 2005, un intérêt de 2.25 % avait été crédité aux assurés.

6.        Selon les annexes des comptes annuels de la caisse de pension de 2009, le Conseil de fondation a décidé de ne pas rémunérer les capitaux d’épargne pour cet exercice, au titre de mesure d'assainissement. Le taux d'intérêt de l’exercice précédent était de 2 %.

7.        Selon les annexes des comptes annuels de la caisse de pension de 2011, le Conseil de fondation a reconduit la mesure d’assainissement décidée en 2009, en ne rémunérant pas les capitaux d’épargne.

8.        Lors de sa séance du 9 février 2017, le Conseil de fondation a décidé d’appliquer le taux de rémunération légal de 1.25 % aux avoirs de prévoyance en 2016.

9.        En 2017, la rente d’invalidité de la prévoyance professionnelle de l'assurée s’est élevée à CHF 9'687.60.

10.    Lors de sa séance du 8 février 2018, le Conseil de fondation a décidé le maintien du taux de rémunération de 1.25 % appliqué en 2016.

11.    Par courrier du 22 janvier 2019, la caisse de pension a indiqué à l'assurée que sa rente d'invalidité serait remplacée par une rente de retraite dès le 1er février 2019, dont le montant provisoire était de CHF 11'933.40 par an, le taux d'intérêt pour 2018 n'ayant pas encore été décidé par le Conseil de fondation.

12.    Le 4 juillet 2019, la caisse de pension a adressé à l'assurée le tableau récapitulatif de son avoir de prévoyance depuis le début de son invalidité. Le règlement de prévoyance en vigueur au 1er janvier 1997 prévoyait un taux d'intérêt de 4 %, correspondant au taux légal alors en vigueur. Lorsqu'un cas d'invalidité se présentait, le taux d'intérêt crédité n'était pas un paramètre fixe jusqu'à la retraite. Ce taux était identique pour les assurés actifs et invalides. En revanche, conformément au règlement de prévoyance en vigueur lors du début de l'invalidité de l'assurée, l'âge ordinaire de la retraite était fixé à 62 ans, et le taux de conversion de 7.2 % était appliqué. Le capital-épargne accumulé par l'assurée au 31 janvier 2019 de CHF 165'742.50 avait ainsi été converti en une rente annuelle de CHF 11'933.40, soit CHF 994.45 par mois.

Le tableau annexé indiquait l'évolution de l'avoir de prévoyance depuis 1997 et les taux d'intérêts crédités, soit 4 % pour les années 1997 à 2002, 3.25 % en 2003, 2.25 % en 2004, 2.5 % de 2005 à 2007, 2.75 % en 2008, 0 % en 2009, 2 % en 2010, 0 % en 2011, 1.5 % en 2012 et 2013, 1.75 % en 2014 et 2015, 1.25 % en 2016 et 2017, et 1 % en 2018 et 2019.

13.    Par courrier du 13 août 2019, l'assurée a contesté les intérêts appliqués à son avoir de prévoyance, qui ne correspondaient pas au taux de 4 % prévu par le règlement.

14.    Par courrier du 9 octobre 2019, la caisse de pension a exposé à l'assurée qu'elle appliquait le taux d'intérêt minimal prévu par la loi, et non plus le taux de 4 %. Les procès-verbaux des séances du Conseil de fondation du 27 mai 2004 et du 27 mai 2005 mentionnaient clairement ces nouveaux taux.

15.    Selon l'attestation de rente de 2019, la rente de vieillesse de l'assurée s'est élevée à CHF 11'746.25.

16.    Dans une demande introduite auprès de la chambre de céans le 13 juillet 2020, l'assurée a conclu à ce que la caisse de pension soit condamnée à lui verser une rente de vieillesse de la prévoyance professionnelle de CHF 1'256.- par mois au minimum dès le 1er février 2019 ; à lui verser les arriérés de rente du 1er février 2019 au 30 juin 2020 de CHF 4'445.50, avec intérêts à 5 % dès le 15 octobre 2019, date moyenne; et au versement d'une indemnité de dépens de CHF 3'000.-.

La demanderesse a allégué qu’en tenant compte du taux d'intérêt annuel de 4 % prévu par le règlement de la défenderesse, son avoir de vieillesse devait s'élever au moins à CHF 209'333.75 en 2018, ce qui représentait une rente annuelle de CHF 15'072.03 eu égard au taux de conversion de 7.2 %, soit une rente de vieillesse de CHF 1'256.- par mois depuis le 1er février 2019.

Elle a soutenu que la défenderesse avait à juste titre procédé au calcul de sa rente de vieillesse en appliquant les dispositions réglementaires en vigueur au moment de son invalidité, retenant ainsi un âge de la retraite de 62 ans et un taux de conversion de 7.2 %. En revanche, la défenderesse n'avait pas appliqué le taux d’intérêt de 4 % prévu par ce règlement à l'avoir de prévoyance. Le règlement primait sur les procès-verbaux du Conseil de fondation, et les taux minimaux prévus par la loi n'étaient pas un fondement juridique suffisant pour contourner ce règlement, que le Conseil de fondation aurait dû modifier s'il entendait introduire un taux inférieur à 4 %.

17.    Dans sa réponse du 30 septembre 2020, la défenderesse s'en est rapportée à justice quant à la recevabilité de la demande. Elle a conclu, sous suite de dépens, principalement au rejet de la demande ; et subsidiairement à ce qu'il soit dit que la rente de vieillesse due à la demanderesse dès le 1er février 2019 s'élevait à CHF 1'008.15 par mois ; à ce qu'il soit dit que les intérêts moratoires sur les arriérés de rente versés n'étaient dus qu'à partir du 13 juillet 2020 ; et à ce qu'il lui soit donné acte qu'elle devait verser à la demanderesse une rente de vieillesse mensuelle de CHF 1'008.15 dès le 1er février 2019, sous déduction des rentes déjà versées, avec intérêts à 5 % dès le 13 juillet 2020.

Après avoir exposé la teneur de son règlement et son évolution dans le temps, la défenderesse a souligné qu'elle n'avait jamais opéré de distinction entre la partie obligatoire et la partie surobligatoire des avoirs de vieillesse des assurés en matière d'intérêts rémunératoires, sous réserve des années 2009, 2011 et 2017.

Selon le règlement de la défenderesse, l'avoir de vieillesse se composait notamment des bonifications de vieillesse et des intérêts afférents à la période d'affiliation. Durant l'incapacité de travail ou l'invalidité de l'assuré, les bonifications de vieillesse calculées sur la base du salaire assuré lors de la survenance de l'incapacité de travail continuaient à être créditées sur le compte de vieillesse. Dans le contexte de la libération du paiement des primes, il n'était en revanche pas fait mention d'intérêts rémunératoires sur l'avoir de vieillesse. Dans son règlement, la défenderesse avait repris les principes légaux concernant l'avoir de vieillesse déterminant pour le calcul de la rente de retraite. En matière de prévoyance professionnelle obligatoire, les intérêts sur l'avoir de vieillesse étaient uniquement dus aux actifs, et l'assuré invalide n'avait aucun droit à des intérêts sur les bonifications de vieillesse futures. La loi ne contenait aucune règle concernant les intérêts rémunératoires sur la part des bonifications de vieillesse relevant de la prévoyance professionnelle surobligatoire. La défenderesse a allégué que ses règlements prévoyaient que seules les bonifications de vieillesse se rapportant à la période d'affiliation, à l'exclusion des intérêts, devaient être comprises dans l'avoir de vieillesse. Les intérêts n'étaient plus crédités à l'avoir de vieillesse après la survenance d'un cas de prévoyance. De tels intérêts avaient été accordés à bien plaire par le Conseil de fondation, qui pouvait s'écarter des dispositions réglementaires applicables aux seuls assurés actifs.

Si, par impossible, la chambre de céans devait considérer que la demanderesse avait droit à un intérêt rémunératoire sur la partie surobligatoire de son avoir de vieillesse durant son invalidité, force serait de constater que le règlement et son annexe avaient été valablement modifiés, de sorte qu'un intérêt de 4 % n’était pas dû à compter du 1er janvier 2005. Les assurés étant exposés au risque de rendements de capitaux inférieurs à ceux attendus, ils participaient aux pertes de l'institution de prévoyance en ne se voyant pas attribuer d'intérêts sur les avoirs d'épargne. Selon la jurisprudence, les institutions de prévoyance pouvaient déterminer librement, dans les limites constitutionnelles, le taux d'intérêt applicable à l'avoir de prévoyance surobligatoire, qui pouvait être inférieur au taux minimal légal, voire nul. Les droits des assurés pouvaient être réduits dans la mesure nécessaire à l'exécution du rapport de prévoyance. Les intérêts rémunératoires sur les avoirs de vieillesse ne constituaient pas une prestation assurée, mais un moyen de financement des prestations assurées. Ainsi, la rémunération de l'avoir de vieillesse n'était pas un droit acquis, mais une expectative de financement. La demanderesse n'alléguait pas avoir reçu des garanties expresses de la défenderesse quant à l'immutabilité des paramètres utilisés pour le calcul de sa rente de retraite.

Le droit à une rente de vieillesse une fois atteint l'âge réglementaire de la retraite devait être examiné sur la base du règlement applicable à ce moment, en tenant compte des dispositions transitoires édictées lors des modifications du règlement. En l'espèce, les règlements de prévoyance de la défenderesse contenaient une réserve de modification. Par conséquent, celle-ci était fondée à modifier ses dispositions réglementaires concernant l'intérêt à créditer sur la partie surobligatoire des avoirs de vieillesse des actifs.

A compter du 1er janvier 2005, le règlement ne prévoyait plus l'octroi d'un intérêt de 4 % sur les avoirs de vieillesse des actifs. Dès cette date, les décisions du Conseil de fondation étaient déterminantes. Au surplus, l’absence d’intérêts alloués en 2009 et 2011 n’était pas critiquable, compte tenu de la situation financière de la défenderesse durant ces exercices. Les décisions du Conseil de fondation reposaient sur le règlement.

Le capital épargne de la demanderesse avait évolué ainsi:

Date

Avoir de prévoyance

Taux d'intérêts de la défenderesse

Taux d'intérêts légal

1er janvier 1997

CHF 34'726.20

4 %

4 %

1er janvier 1998

CHF 39'088.75

4 %

4 %

1er janvier 1999

CHF 43'667.80

4 %

4 %

1er janvier 2000

CHF 49'778.05

4 %

4 %

1er janvier 2001

CHF 55'793.25

4 %

4 %

1er janvier 2002

CHF 62'079.25

4 %

4 %

1er janvier 2003

CHF 68'337.65

4 %

3.25 %

1er janvier 2004

CHF 74'846.23

4 %

2.25 %

1er janvier 2005

CHF 81'615.22

2.50 %

2.50 %

1er janvier 2006

CHF 87'430.87

2.50 %

2.50 %

1er janvier 2007

CHF 93'398.22

2.50 %

2.50 %

1er janvier 2008

CHF 99'509.28

2.75 %

2.75 %

1er janvier 2009

CHF 106'019.29

0 %

2 %

1er janvier 2010

CHF 110'543.49

2 %

2 %

1er janvier 2011

CHF 117'290.62

0 %

2 %

1er janvier 2012

CHF 121'819.33

1.50 %

1.50 %

1er janvier 2013

CHF 128'176.77

1.50 %

1.50 %

1er janvier 2014

CHF 134'630.63

1.75 %

1.75 %

1er janvier 2015

CHF 141'516.89

1.75 %

1.75 %

1er janvier 2016

CHF 148'521.77

1.25 %

1.25 %

1er janvier 2017

CHF 154'907.27

1.25 %

1 %

1er janvier 2018

CHF 161'373.65

1 %

1 %

1er janvier 2019

CHF 167'517.53

1 %

1 %

31 janvier 2019

CHF 168'030.19

 

 

Ce capital au 1er janvier 2019 donnait droit à une rente annuelle de retraite de CHF 12'098.10 (soit CHF 163'030.19 [sic] multipliés par 7.2 %), et de CHF 1'008.15 par mois.

Enfin, en matière de rentes, les intérêts moratoires n'étaient dus qu'à partir du jour de la poursuite ou de la demande en justice, soit en l'espèce le 13 juillet 2020.

18.    Par réplique du 27 octobre 2020, la demanderesse a persisté dans ses conclusions.

Elle a allégué que dès lors que la défenderesse admettait qu’un intérêt rémunératoire avait été versé à bien plaire, le droit à un tel intérêt était sans pertinence, seul son taux était déterminant.

Le taux minimal légal pour l'intérêt ne s'appliquait pas à la part surobligatoire de la prévoyance, que la défenderesse pouvait régler. En l’espèce, la décision quant au taux d'intérêt était prise par voie réglementaire dès 1988, puis lors des séances du Conseil de fondation dès 2003. Il s’agissait de l’organe suprême de la défenderesse, dont les décisions les plus importantes devaient figurer dans un règlement. Il en allait de la confiance des assurés et de leur droit d'information. Partant, la défenderesse n'avait pas respecté le processus de prise de décision adéquat. Les taux d'intérêt à partir de 2003 n'étaient donc pas valables. L'invalidité de la demanderesse était survenue le 20 janvier 1996. Si le règlement en vigueur en 1996 avait été appliqué pour déterminer le taux de conversion et l'âge de la retraite, il ne faisait aucun sens de fixer le taux d'intérêt sur la base d'un autre règlement. Le règlement de 1988 prévoyait que la défenderesse concluait un contrat d'assurance de risque avec une société d'assurance sur la vie pour couvrir les risques décès et invalidité. Ainsi, les assurés n'étaient pas exposés au risque de rendements inférieurs à ceux attendus.

Elle a allégué que la défenderesse avait admis s'être trompée dans le calcul de la pension, laquelle passait de CHF 994.45 à CHF 1'008.15.

19.    Par duplique du 16 novembre 2020, la défenderesse a persisté dans ses conclusions. Elle a allégué que ni la législation, ni la jurisprudence ne prévoyaient d’obligation pour les institutions de prévoyance de fixer par voie réglementaire le taux d'intérêt de la partie surobligatoire des avoirs de vieillesse des assurés. Par ailleurs, si le taux de rémunération devait être arrêté chaque année par l'organe suprême, la demanderesse ne disposait, avant sa fixation, que d'une expectative de financement. L'octroi d'un intérêt rémunératoire dépendant de la situation financière de l'institution de prévoyance, son taux ne saurait être figé dans un règlement. En l'espèce, le cas de prévoyance vieillesse s'étant réalisé le 1er février 2019, la défenderesse avait appliqué le taux d'intérêt prévu par le règlement en vigueur à cette date. Si elle avait appliqué ce même règlement pour fixer l'âge de la retraite, le droit aux prestations d'invalidité de la demanderesse aurait été prolongé de deux années, en violation du principe d'équivalence. Suivre le raisonnement de la demanderesse aurait pour conséquence d'occulter entièrement la situation financière de la défenderesse, indépendamment du rendement de sa fortune, du marché des capitaux ou encore des taux d'intérêts négatifs désormais appliqués. La défenderesse a contesté s'être trompée dans le calcul des prestations de retraite dues. Elle avait simplement avancé une argumentation subsidiaire. Elle a précisé qu'elle supportait seule son risque de rendement, de sorte que les assurés participaient aux gains et aux pertes liés au placement de sa fortune.

20.    La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à la demanderesse le 18 novembre 2020.

21.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40]).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie, la compétence ratione loci n'étant par ailleurs pas contestée, la défenderesse ayant son siège à Genève.

2.        L’ouverture de l’action prévue à l’art. 73 al. 1 LPP n’est soumise, comme telle, à l’observation d’aucun délai (Raymond SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise, 1984).

La demande respecte en outre la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Partant, elle est recevable.

3.        Le litige porte sur le montant de la rente de vieillesse de la prévoyance professionnelle de la demanderesse, plus particulièrement sur le taux des intérêts crédités sur son avoir de vieillesse.

La procédure prévue à l'art. 73 LPP est régie par la maxime de disposition, en vertu de laquelle il appartient à la partie demanderesse de définir le litige qu'elle entend soumettre au tribunal. Partant, l'objet du litige est défini par la demande et, cas échéant, par les conclusions reconventionnelles. Compte tenu de la maxime de disposition, il appartient à la partie demanderesse – et en cas de demande reconventionnelle à la partie défenderesse – de définir le litige qu'elle(s) entend(ent) soumettre au juge. Le tribunal n'a ainsi pas la possibilité d'étendre le litige à des points qui ne font pas l'objet de l'action, par exemple le montant des prestations allouées (ATF 129 V 450 consid. 3.2). Dans le cadre de l'objet du litige, en dérogation à la maxime de disposition, le tribunal de première instance n'est pas lié par les conclusions des parties (ATF 135 V 23 consid. 3.1).

4.        Selon l'art. 49 LPP, dans les limites de la loi, les institutions de prévoyance peuvent adopter le régime des prestations, le mode de financement et l’organisation qui leur conviennent. Elles peuvent prévoir dans le règlement que les prestations qui dépassent les dispositions légales minimales ne soient versées que jusqu’à l’âge de la retraite (al. 1).  Lorsqu’une institution de prévoyance étend la prévoyance au-delà des prestations minimales, seules s’appliquent à la prévoyance plus étendue les dispositions régissant notamment la gestion paritaire et les tâches de l’organe suprême de l’institution de prévoyance (art. 51 et 51a) (al. 2 ch. 7).

5.        L'art. 50 LPP prévoit que les institutions de prévoyance établiront des dispositions sur les prestations (let. a) ; l’organisation (let. b) ; l’administration et le financement (let. c) ; le contrôle (let. d) ; les rapports avec les employeurs, les assurés et les ayants droit (let. e) (al. 1). Ces dispositions peuvent figurer dans l’acte constitutif, dans les statuts ou dans le règlement. S’il s’agit d’une institution de droit public, les dispositions concernant soit les prestations, soit le financement peuvent être édictées par la corporation de droit public concernée (al. 2). Les dispositions de la présente loi priment les dispositions établies par l’institution de prévoyance. Si toutefois l’institution de prévoyance pouvait admettre de bonne foi qu’une de ces dispositions réglementaires était conforme à la loi, celle-ci n’est pas applicable rétroactivement (al. 3).

6.        Les institutions de prévoyance participant à l'application du régime obligatoire de la prévoyance professionnelle (art. 48 al. 1 LPP) doivent respecter les exigences minimales que fixent les art. 7 à 47 LPP (art. 6 LPP). Elles peuvent néanmoins prévoir des prestations supérieures aux exigences évoquées (prévoyance surobligatoire ou plus étendue). Ces institutions sont dites enveloppantes. Elles peuvent définir librement le régime de prestations, le mode de financement et l'organisation leur convenant dans les limites des dispositions expressément réservées à l'art. 49 al. 2 LPP et le respect des principes d'égalité de traitement, de proportionnalité et d'interdiction de l'arbitraire. Concrètement, de telles institutions proposent de façon générale un plan unique de prestations qui inclut les prestations légales minimales et les améliore sans opérer de distinction entre prévoyance obligatoire et prévoyance plus étendue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_951/2015 du 29 septembre 2016 consid. 3.1). Afin de s'assurer que les prestations réglementaires respectent les exigences légales minimales, autrement dit que la personne assurée bénéficie au moins des prestations minimales légales selon la LPP, l'institution de prévoyance est tenue de pouvoir procéder à un calcul comparatif entre les prestations selon la LPP sur la base du compte-témoin que les institutions de prévoyance doivent tenir afin de contrôler le respect des exigences minimales de la LPP – soit le compte individuel de vieillesse prévu par l'art. 11 al. 1 de l'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2 - RS 831.441.1) – et les prestations réglementaires (ATF 138 V 176 consid. 5.4). L'institution de prévoyance est tenue de verser les prestations légales minimales si celles-ci sont supérieures aux prestations réglementaires, conformément au principe d'imputation. Dans ce cadre, il n'est pas nécessaire de faire des calculs séparés pour les domaines obligatoire et surobligatoire, mais il convient de comparer les prétentions légales à celles de même nature prévues par le règlement pour une période identique (ATF 136 V 65 consid. 3.7).

7.        Dans le cadre de la prévoyance plus étendue, les employés assurés sont liés à l'institution par un contrat innommé (sui generis) dit de prévoyance. Le règlement de prévoyance constitue le contenu préformé de ce contrat, à savoir ses conditions générales, auxquelles l'assuré se soumet expressément ou par actes concluants. Il doit ainsi être interprété selon les règles générales sur l'interprétation des contrats. Il y a lieu de rechercher, tout d'abord, la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO), ce qui en matière de prévoyance professionnelle vaut avant tout pour les conventions contractuelles particulières. Lorsque cette intention ne peut être établie, il faut tenter de découvrir la volonté présumée des parties en interprétant leurs déclarations selon le sens que le destinataire de celles-ci pouvait et devait raisonnablement leur donner selon les règles de la bonne foi (principe de la confiance). L'interprétation en application de ce principe, dite objective ou normative, consiste à établir le sens que chacune des parties pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Pour ce faire, il convient de partir du texte du contrat (ou du règlement) avant de l'examiner dans son contexte. Dans ce dernier cas, toutes les circonstances ayant précédé ou accompagné sa conclusion doivent être prises en considération. A titre subsidiaire, il peut également être tenu compte du mode d'interprétation spécifique aux conditions générales, notamment la règle de la clause ambiguë (in dubio contra stipulatorem) (ATF 134 V 223 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_832/2013 du 23 avril 2014 consid. 3.3 et les références).  

8.        Le règlement d'une fondation de prévoyance dont l'activité s'exerce dans le domaine de la prévoyance plus étendue ne peut être modifié unilatéralement par la fondation que s'il réserve expressément cette possibilité dans une disposition que l'assuré a acceptée, explicitement ou par actes concluants. L'acceptation par acte concluant peut résulter en particulier de l'acceptation sans réserve du règlement de prévoyance par l'assuré ou dans le paiement des cotisations correspondantes (ATF 117 V 221 consid. 4). Lorsque le règlement contient une telle réserve, l'organe paritaire peut modifier unilatéralement le règlement, dans les limites des droits acquis, des principes d'égalité de traitement, d'interdiction de l'arbitraire et de la bonne foi (Isabelle VETTER-SCHREIBER, Kommentar zur beruflichen Vorsorge 3ème éd. 2013, nn. 3-12 ad art. 50 LPP).

Les règlements doivent faire l'objet d'une vérification de leur conformité aux dispositions légales par l'autorité de surveillance, en vertu de l'art. 62 al. 1 let. a LPP. Le règlement ou la modification du règlement entre cependant en vigueur lors de sa promulgation ou à la date décidée par l'organe paritaire, indépendamment de l'approbation de l'autorité de surveillance (VETTER-SCHREIBER, op. cit., n. 5 ad art. 62 LPP).

9.        Selon les principes généraux du droit, on applique en cas de changement de règles de droit les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques. Ces principes valent également en cas de changement de dispositions réglementaires ou statutaires des institutions de prévoyance. Leur application ne soulève pas de difficultés en présence d'un événement unique, qui peut être facilement isolé dans le temps. S'agissant par exemple des prestations de survivants, on applique les règles en vigueur au moment du décès de l'assuré, c'est-à-dire la date à laquelle naît le droit aux prestations du bénéficiaire (ATF 126 V 163 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 72/05 du 24 octobre 2006 consid. 4.1).

En matière de prestations pour invalidité, les dispositions réglementaires applicables sont celles qui étaient en force lorsque la naissance du droit à ces prestations, et non celles qui étaient en force lors du début de l'incapacité de travail qui a conduit à l'invalidité (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 63/99 du 26 octobre 2001 consid. 5c).

Le Tribunal fédéral a admis dans le cas d'assurés percevant une rente d'invalidité et ayant atteint l'âge de la retraite, ce qui relevait d'un nouveau cas d'assurance selon les règlements de leurs institutions de prévoyance, que le règlement applicable au calcul de la surindemnisation était celui en vigueur à l'âge de la retraite (arrêts du Tribunal fédéral 9C_615/2014 du 15 juin 2015 consid. 5.2 et 9C_855/2013 du 3 juillet 2014 consid. 4.1). Dans un litige en lien avec les prestations de retraite, notre Haute Cour a considéré que le règlement applicable était celui en vigueur lorsque l'âge de la retraite avait été atteint (arrêt du Tribunal fédéral 9C_808/2009 du 4 février 2010 consid. 5.3).

10.    L’art. 91 LPP garantit les droits acquis par les assurés avant l’entrée en vigueur de la loi.

Cette disposition a été promulguée lors de l’introduction de la LPP, mais elle conserve sa portée en cas de modifications postérieures à son entrée en vigueur de ses dispositions, des ordonnances et des statuts et règlements des institutions de prévoyance. Elle est également applicable en cas de modification du taux d’intérêt minimal, du taux de conversion ou d’autres révisions législatives. Elle empêche en particulier que d’autres prestations ne soient financées par les éléments patrimoniaux qu’une institution de prévoyance a jusque-là affectés à un autre but (Thomas GÄCHTER, Änderung von Vorsorge-Reglementen und wohlerworbene Rechte, PJA 6/2003, p. 619 ch. 2.20). Une relation de prévoyance est un rapport de durée, et il peut s’avérer nécessaire de l'adapter à l'évolution des circonstances. Le droit applicable au rapport d'assurance doit pouvoir être modifié, et ce même lorsque les changements sont susceptibles de détériorer la situation d'une ou plusieurs parties. L’art. 91 LPP établit une limite à ce principe, lorsque les modifications portent atteinte à des droits acquis. Droits acquis et simples expectatives doivent donc être clairement distingués (Thomas GEISER / Christoph SENTI, Commentaire LPP et LFLP, n. 17 ad art. 91 LPP).

Les droits acquis ne bénéficient pas d’une protection absolue. Ils peuvent être restreints ou supprimés lorsqu’un intérêt public important l’exige et que la mesure est proportionnée. La jurisprudence a admis que cela peut conduire à la réduction d’une rente complémentaire lorsque les buts supérieurs, tels que l’équilibre financier de l’institution de prévoyance – dont la garantie fait partie des tâches du Conseil de fondation et doit faire l’objet de mesures prioritaires (cf. Directives du Conseil fédéral concernant des mesures destinées à résorber les découverts dans la prévoyance professionnelle du 27 octobre 2004, FF 2004 6383) – ou le principe de l’égalité de traitement, et que l’atteinte est proportionnée et déploie ses effets dans un délai raisonnable (ATF 138 V 366 consid. 6.1).

La législation en matière d'assurances sociales ne reconnaît qu'exceptionnellement l'existence de droits acquis. Selon la jurisprudence, les prétentions pécuniaires ne deviennent des droits acquis que si la loi ou le règlement fixe une fois pour toutes les situations particulières et les soustrait aux effets des modifications légales ou réglementaires, ou lorsqu'ont été données des assurances précises à l'occasion d'un engagement individuel. A cet égard, les prestations courantes sont plus facilement considérées comme droits acquis que les simples expectatives, qui ne sont que rarement protégées, précisément parce qu'il n'existe pas de titre juridique qui permette de s'opposer à leur modification en cas de changement des règles légales (ATF 137 V 105 consid. 7.2). Un droit acquis suppose ainsi que la loi fixe une fois pour toutes une situation particulière en la soustrayant aux effets des modifications légales ou des assurances précises à l'occasion d'un engagement individuel (arrêt du Tribunal fédéral 9C_674/2014 du 24 avril 2015 consid. 4.4 et les références).

11.    Selon l'art. 13 al. 1 let. b LPP tel que modifié par l’art. 62a OPP 2, depuis le 1er janvier 2005, ont droit à des prestations de vieillesse les femmes dès qu’elles ont atteint l’âge de 64 ans. L'art. 62a OPP 2 prévoit en substance que l’âge ordinaire de la retraite des femmes selon l’AVS vaut aussi comme âge ordinaire de la retraite des femmes dans la LPP et que cet âge est déterminant pour l’application du taux de conversion minimal et la let. b des dispositions transitoires de la 1ère révision LPP du 3 octobre 2003 (let. a); pour le calcul des bonifications de vieillesse à hauteur de 18 % selon l’art. 16 LPP et la let. c des dispositions transitoires de la 1ère révision LPP du 3 octobre 2003 (let. b); pour le taux de conversion applicable lors du calcul de la rente d’invalidité selon l’art. 24 al. 2 LPP.

12.    Aux termes de l'art. 15 LPP, l'avoir de vieillesse comprend notamment les bonifications de vieillesse, avec les intérêts, afférentes à la période durant laquelle l’assuré a appartenu à l’institution de prévoyance, cette période prenant toutefois fin à l’âge ordinaire de la retraite (let. a); l'avoir de vieillesse versé par les institutions précédentes et porté au crédit de l’assuré, avec les intérêts (let. b) (al. 1). Le Conseil fédéral fixe le taux d’intérêts minimal. Pour ce faire, il tiendra compte de l’évolution du rendement des placements usuels du marché, en particulier des obligations de la Confédération ainsi que, en complément, des actions, des obligations et de l’immobilier (al. 2). Le Conseil fédéral examine le taux d’intérêts minimal au moins tous les deux ans. À cet effet, il consulte la Commission fédérale de la prévoyance professionnelle et les partenaires sociaux (al. 3).

13.    Jusqu'au 31 décembre 2004, le taux de conversion était de 7.2 %. Il a été abaissé dans le cadre de la 1ère révision LPP (modification du 3 octobre 2003), laquelle prévoyait une réduction progressive de ce taux en raison de l'augmentation de l'espérance de vie des assurés (Message relatif à la révision de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, FF 2000 2498 et 2513; cf. également let. b des dispositions transitoires relatives à cette révision).

Dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2005, l'art. 14 LPP, dispose que la rente de vieillesse est calculée en pour cent de l’avoir de vieillesse acquis par l’assuré au moment où celui-ci atteint l’âge ouvrant le droit à la rente (taux de conversion) (al. 1). Le taux de conversion minimal s’élève à 6.8 % à l’âge ordinaire de la retraite de 65 ans pour les hommes et les femmes (al. 2). Le Conseil fédéral soumet un rapport pour déterminer le taux de conversion des années suivantes tous les dix ans au moins, la première fois en 2011 (al. 3).

14.    Le taux d'intérêt minimal est défini comme suit à l’art. 12 OPP 2 : 4 % pour la période jusqu’au 31 décembre 2002 ; 3.25 % pour 2003, 2.25 % pour 2004 ; 2.5 % pour la période à partir du 1er janvier 2005 jusqu’au 31 décembre 2007 ; 2.75 % pour 2008 ; 2 % pour la période à partir du 1er janvier 2009 jusqu’au 31 décembre 2011 ; 1.5 % pour la période à partir du 1er janvier 2012 jusqu’au 31 décembre 2013 ; 1.75 % pour la période à partir du 1er janvier 2014 jusqu’au 31 décembre 2015 ; 1.25 % pour 2016 et au moins 1 % pour la période à partir du 1er janvier 2017.

La loi ne régit pas la manière dont l'avoir de vieillesse surobligatoire de la prévoyance enveloppante doit porter intérêt. L'application du taux d'intérêt minimal prévu par la loi ne vaut pas dans ce domaine, de sorte que l'institution de prévoyance est libre – dans les limites constitutionnelles – de prévoir des intérêts dans ses bases règlementaires et par exemple de prévoir à cet effet un taux inférieur au taux minimal (ATF 132 V 278 consid. 4.2). Les institutions de prévoyance sont ainsi libres de prévoir un taux d'intérêt inférieur au taux minimal fixé par la LPP, voire même un taux d'intérêt nul, pour la part de l'avoir de vieillesse relevant de la prévoyance surobligatoire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_227/2009 du 25 septembre 2009 consid. 3.2.4). Si le règlement prévoit un taux d'intérêt supérieur pour l'avoir de vieillesse, ce taux est alors applicable. Si le règlement ne fixe aucun taux d'intérêt, il se justifie d'appliquer à titre subsidiaire le taux minimal selon l'art. 12 OPP 2 (ATF 129 V 251 consid. 4.1).

15.    Lorsque le taux d'intérêt minimal est plus élevé que le rendement des placements de fortune pendant une certaine période, il peut en résulter un besoin de financement supplémentaire pour les caisses de pension dans la prévoyance obligatoire, afin de garantir le principe d'équivalence. En vertu de l'obligation ancrée à l'art. 65 al. 2 1ère phrase LPP, selon laquelle les institutions de prévoyance doivent régler leur système de cotisations et leur financement de telle manière que les prestations prévues par la loi puissent être fournies dès qu’elles sont exigibles, celles-ci peuvent exiger des cotisations supplémentaires (Jürg BRÜHWILER, Beitragsbemessung in der obligatorischen beruflichen Vorsorge nach BVG, insbesondere Zusatzbeiträge für die Finanzierung des BVG-Mindestzinses und des BVG-Umwandlungssatzes, RSAS 2003 p. 330). L’intérêt est un moyen élémentaire d'atteindre le but constitutionnel de la prévoyance professionnelle. Lorsque les revenus de la fortune ne suffisent pas à couvrir le taux d'intérêt minimal, les institutions de prévoyance doivent recourir à leurs réserves à cet effet. En l'absence de réserves, il existe un risque de sous-couverture. Certains auteurs préconisent que les intérêts ne soient alloués que lorsque la situation financière de l'institution de prévoyance – dictée notamment par la situation des placements – le permet. Lorsque les marchés financiers sont favorables, les assurés peuvent profiter de rendements de capitaux plus élevés, ce qui conduit à des augmentations des prestations. A l'inverse, ils sont exposés au risque de rendements inférieurs aux résultats escomptés. Il serait contraire au principe de capitalisation et étranger au système de faire participer les assurés aux gains, mais non aux pertes de l’institution de prévoyance (ATF 140 V 169 consid. 8.4).

On ajoutera qu'en vertu de l'art. 50 al. 3 1ère phrase LPP, les dispositions légales priment les dispositions réglementaires: tel est le cas non seulement lorsqu'il s'agit de fixer les prestations minimales exigées par la loi sur la prévoyance professionnelle, mais également lorsqu'il s'agit de garantir l'équilibre financier de l'institution, autrement dit son degré de couverture. Selon la volonté du législateur, l'art. 65 al. 1 LPP, qui impose aux institutions de prévoyance professionnelle d'offrir en tout temps la garantie qu'elles peuvent remplir leurs engagements, est une disposition fondamentale et impérative qui prime les dispositions réglementaires dont l'application aurait pour effet de provoquer la survenance d'un découvert ou de l'augmenter (arrêt du Tribunal fédéral 2A.562/2005 du 28 juin 2006 consid. 4). En vertu de l'art. 65d al. 2 LPP, les mesures destinées à résorber un découvert doivent de manière générale se fonder sur une base réglementaire, un découvert limité dans le temps étant autorisé par l'art. 65c al. 1 LPP.

16.    L'art. 24 al. 3 LPP, relatif à la rente d'invalidité, prévoit que l'avoir de vieillesse déterminant pour le calcul comprend l’avoir de vieillesse acquis par l’assuré à la naissance du droit à la rente d’invalidité (let. a); la somme des bonifications de vieillesse afférentes aux années futures, jusqu’à l’âge ordinaire de la retraite, sans les intérêts (let. b).

La rente d'invalidité est ainsi égale au taux de conversion multiplié par l'avoir de vieillesse projeté sans les intérêts (Francine OBERSON, La pratique du droit, La prévoyance professionnelle, 2013, p. 44), contrairement à la rente de vieillesse qui est fonction, comme on l’a vu des bonifications de vieillesse créditées d’intérêts.

17.    Conformément à l'art. 26 al. 3 1ère phrase LPP, le droit à la rente d'invalidité s’éteint au décès du bénéficiaire ou, sous réserve de l’art. 26a, à la disparition de l’invalidité.

Lorsque l'assuré perçoit une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle jusqu'à l'âge-terme selon l'art. 13 al. 1 LPP, cette rente n'est pas remplacée par une rente de vieillesse. Dans le cadre des prestations minimales selon la loi, l'assuré a ainsi droit à une rente viagère d'invalidité (ATF 127 V 309 consid. 1). Dans le domaine de la prévoyance plus étendue, les institutions de prévoyance sont libres de limiter le droit à une rente d'invalidité seulement jusqu'à l'âge ouvrant le droit à une rente de vieillesse, respectivement d'allouer des prestations de vieillesse inférieures aux rentes d'invalidité accordées avant l'âge de la retraite (ATF 130 V 369 consid. 6.4). Ainsi, à la différence de la solution choisie par le législateur dans le cadre du régime obligatoire de la prévoyance professionnelle, la survenance de l'âge de la retraite peut être à l'origine, dans le domaine de la prévoyance plus étendue, d'un nouveau cas d'assurance pour le bénéficiaire d'une rente d'invalidité. Cette situation peut entraîner l'application de deux règlements de prévoyance différents (ATF 138 V 176 consid. 7.2). La plupart des contrats de prévoyance qui prescrivent l'octroi de rentes temporaires d'invalidité jusqu'à la survenance de l'âge de la retraite prévoient l'exonération du paiement des cotisations. Durant la période d'invalidité, soit jusqu'à l'âge de la retraite, les cotisations afférentes à la prévoyance-vieillesse continuent d'être portées en compte sur la base du salaire assuré au moment de la survenance de l'invalidité. De cette manière, la personne invalide dispose d'un avoir de vieillesse équivalant à celui d'un assuré actif percevant un même gain assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 6/04 du 23 novembre 2004 consid. 4.2).

18.    L'art. 34 al. 1 let. b LPP confère au Conseil fédéral la compétence de régler le mode de calcul des prestations lorsque l'assuré reçoit déjà une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle lors de la survenance du nouveau cas d'assurance, ou a déjà touché antérieurement des prestations d'invalidité.L'art. 14 OPP 2, édicté en vertu de cette compétence législative, prévoit que dans la perspective d'une réinsertion possible dans la vie active, l'institution de prévoyance doit continuer de tenir, jusqu'à l'âge-terme de la vieillesse, le compte de vieillesse de l'invalide auquel elle verse une rente (al. 1). L'avoir de vieillesse de l'invalide doit porter intérêts (al. 2). Le salaire coordonné durant la dernière année d’assurance (art. 18) sert de base au calcul des bonifications de vieillesse durant l’invalidité (al. 3). Lorsque le droit à la rente d’invalidité s’éteint par suite de disparition de l’invalidité, l’assuré a droit à une prestation de libre passage dont le montant correspond à son avoir de vieillesse (al. 4). Le 4ème alinéa de cette disposition donne à l'assuré, lorsque son droit à la rente d'invalidité s'éteint en raison de la disparition de l'invalidité, le droit à une prestation de libre passage à concurrence de l'avoir de vieillesse qu'il a pu maintenir. Ainsi, l'institution de prévoyance doit d'une part conserver l'avoir de vieillesse acquis avant l'invalidité, et doit, d'autre part, y créditer pendant la durée de l'invalidité les mêmes bonifications de vieillesse que si l'assuré avait joui sans interruption d'une capacité de travail entière. Cette solution permet à l'assuré invalide qui réintégrerait la vie professionnelle de percevoir des prestations normales à l'âge de la retraite. Dans le domaine de la prévoyance obligatoire, si l'assuré ne se réinsère pas dans la vie active avant d'atteindre l'âge de la retraite, l'alimentation de l'avoir de vieillesse reste fictive, eu égard au caractère viager des rentes d'invalidité. En d'autres termes, l'assuré encore invalide à l'âge de la retraite n'a pas droit au versement des bonifications de vieillesse portées à son crédit pendant les années d'invalidité (Marc HÜRZELER in Jacques-André SCHNEIDER / Thomas GEISER / Thomas GÄCHTER [édit.], Commentaire LPP et LFLP, n. 10 ad art. 34 LPP). L'avoir de vieillesse d'une personne invalide doit être alimenté et porter intérêts sur la base du salaire coordonné (Marc HÜRZELER / Carmen STEINER in Commentaire LPP et LFLP, n. 17 ad art. 26a LPP, Commentaire du projet de l'OPP 2 de l'OFAS du 2 août 1983; ATF 127 V 309 consid. 2c).

19.    Les prestations de vieillesse selon la LPP sont financées selon le système de la capitalisation: les cotisations sont fixées de telle manière que le capital accumulé découlant des cotisations et des intérêts suffise pour financer les prestations futures de la prévoyance obligatoire des assurés. Le lien entre les bonifications de vieillesse, respectivement l'avoir de vieillesse, et la prestation de vieillesse est l'expression du principe d'équivalence individuelle, selon lequel il doit exister un équilibre du point de vue de la technique d'assurance, au sein d'un rapport d'assurance particulier, entre les prestations individuelles et les cotisations pour l'affilié particulier. Cet équilibre individuel en fonction des rapports de prévoyance n'est donné qu'en relation avec une durée d'assurance totale. De cet équilibre individuel entre les cotisations et les prestations au sein d'un rapport d'assurance concret, il y a lieu de distinguer l'équilibre du point de vue de la technique d'assurance entre les cotisations et les prestations au sein de l'institution de prévoyance dans son ensemble, avec toutes les personnes affiliées. Il s'agit du principe d'équivalence collective, selon lequel l'institution de prévoyance est tenue de garantir qu'elle soit en mesure de fournir les prestations prévues dès qu'elles sont exigibles (art. 65 al. 1 et 2 LPP). Le droit à des prestations de vieillesse calculées en fonction de bonifications de vieillesse afférentes à une période d'assurance pendant laquelle des cotisations correspondantes n'ont pas été versées viole le principe de l'équivalence collective (ATF 140 V 154 consid. 7.3.2). Le fait d'étendre a posteriori de deux années le droit aux prestations d'invalidité revient à imposer à une institution de prévoyance des engagements nouveaux dont le financement n'était pas prévu au moment de l'adoption du plan de prévoyance sur lequel est fondé le droit aux prestations d'invalidité (inadéquation des primes de risque invalidité et décès versées par les assurés actifs et leur employeur; prolongation de la période de libération du paiement des primes), ce qui viole le principe d'équivalence entre primes versées et prestations assurées qui prévaut dans le domaine de la prévoyance professionnelle et qui est également applicable au financement des risques décès et invalidité (ATF 138 V 176 consid. 8.3.1). En vertu du principe d'équivalence, le Tribunal fédéral a admis que l'âge de la retraite – qui donnait droit à une pension inférieure à la rente d'invalidité perçue jusque-là par une assurée – devait être déterminé en vertu du règlement en vigueur lors de la naissance du droit à la rente d'invalidité, dans la mesure où dans le cas contraire, l'institution de prévoyance se verrait imposer une charge de prestations nouvelle sans que celle-ci ne soit couverte par des cotisations correspondantes durant les années d'assurance, et sans base contractuelle claire (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 8/04 du 28 janvier 2005 consid. 9.2).

20.    a. Selon le règlement de la défenderesse de janvier 1988, celle-ci conclut un contrat d'assurance de risque avec une société d'assurance sur la vie pour couvrir les risques décès et invalidité. Ont droit aux prestations de vieillesse, les femmes dès le premier jour du mois qui suit leur 62ème anniversaire (art. 5). La rente de vieillesse est calculée en pour cent de l'avoir de vieillesse acquis par l'assuré au moment où il atteint l'âge ouvrant le droit aux prestations de vieillesse, au taux de conversion figurant en annexe (art. 6.1). L'annexe 1 au règlement prévoit à son chiffre 6.1 un taux de conversion de 7.2 % et à son chiffre 6.2 que le taux d'intérêts est fixé par le Conseil de fondation ; il est au minimum de 4 %. Selon l'art. 6.2 du règlement, l'avoir de vieillesse comprend notamment les bonifications de vieillesse selon l'art. 6.3 afférentes à la période durant laquelle l'assuré a été affilié à la Fondation et les intérêts au taux fixé en annexe.

L'art. 9 2ème phrase du règlement limite le droit à la rente d'invalidité au plus tard lorsque l'assuré a atteint l'âge normal de la retraite selon l'art. 5. Selon l'art. 11 1ère phrase du règlement, si, suite à une incapacité de travail, le salaire ou les indemnités journalières qui le remplacent cessent d'être dus, la cotisation de l'institution affiliée ainsi que celle de l'affilié, selon les art. 34 et 35, cessent d'être dues proportionnellement au degré d'invalidité.

Selon l'art. 47 du règlement, le Conseil de fondation peut modifier le règlement en observant les dispositions légales et le but de la défenderesse selon les statuts. Toute modification du règlement est soumise à l'approbation de l'autorité de surveillance.

b. Le règlement de la défenderesse de janvier 1996 n'a apporté que des modifications formelles aux éléments précités du précédent règlement. Il reprend à l'art. 44 la possibilité du Conseil de fondation de modifier le règlement.

c. Le règlement dans sa version entrée en vigueur le 1er janvier 2005 (cf. art. 47) a connu les modifications suivantes par rapport à la version antérieure.

Il fixe désormais le droit aux prestations de vieillesse des femmes dès le premier jour du mois qui suit leur 64ème anniversaire (art. 5). L'annexe 1 au règlement prévoit à son chiffre 6.1 un taux de conversion de 7 % pour les femmes atteignant l'âge de la retraite de 64 ans en 2009 ou après, et à son chiffre 6.2 que le taux d'intérêt est fixé par le Conseil de fondation ; il est au moins égal au taux minimum légal selon l'art. 15 al. 1 LPP. Le Conseil de fondation peut appliquer un taux d'intérêt différent sur la partie correspondant au compte-témoin LPP et sur la partie surobligatoire. L'art. 44 dernier alinéa, est réservé.

L'art. 44 du règlement prévoit que le Conseil de fondation décide des mesures à rendre pour résorber le découvert. Il doit en premier lieu vérifier qu'il n'y a pas de défaut de financement structurel dans le plan de prévoyance. Si le financement est adéquat pour couvrir les prestations réglementaires, il prendra des mesures adaptées au degré de couverture et inscrites dans un concept global équilibré, de nature à résorber le découvert dans un délai approprié. Tant que dure le découvert, il peut en outre prévoir une cotisation supplémentaire des assurés et des employeurs; les cotisations des employeurs seront au moins égales à celles des assurés (let. a); prélever une contribution auprès des bénéficiaires de rentes. Cette contribution est déduite des rentes en cours. Elle ne peut être prélevée sur la partie de la rente en cours qui a résulté d'augmentations qui n'étaient pas prescrites légalement ou réglementairement. Elle ne peut pas non plus être prélevée sur les prestations minimales légales. Le montant de la rente lors de la naissance du droit à la rente reste garanti dans tous les cas (let. b). Si les mesures ci-dessus ne suffisent pas, le Conseil de fondation peut appliquer, tant que dure le découvert mais au plus pendant cinq ans, un taux d'intérêt inférieur de 0.5 % au plus au taux minimal prévu à l'art. 15 al. 2 LPP sur l'avoir de vieillesse selon le compte témoin LPP.

L'art. 48 reprend la teneur de l'art. 47 du règlement de 1995.

La disposition transitoire ancrée à l'art. 51 prévoit que les prestations d'invalidité selon les art. 8 et 11, de même que les conditions d'octroi des prestations de survivants selon l'art. 12 restent régies par les anciennes dispositions jusqu'au 31 décembre 2006 pour les assurés dont l'incapacité de travail a débuté avant le 31 décembre 2004 (al. 1). Les prestations déjà en cours au 31 décembre 2004 ne sont pas touchées par les présentes modifications règlementaires (al. 2).

d. Le règlement dans sa version entrée en vigueur le 1er janvier 2009 (cf. art. 47) a subi les modifications suivantes.

L'annexe 1 au règlement prévoit à son chiffre 6.1 que le taux de conversion pour les femmes atteignant l'âge de la retraite de 64 ans en 2015 et les années suivantes est de 6.4 %.

Selon l'art. 44 du règlement, en cas de découvert, le Conseil de fondation informe l'autorité de surveillance, les employeurs, les assurés et les bénéficiaires de rente du degré et des causes du découvert ainsi que des mesures prises. Il vérifie en premier lieu qu'il n'y a pas de défaut de financement structurel dans le plan de prévoyance. Si le financement est adéquat pour couvrir les prestations réglementaires, il prendra, tant que dure le découvert et d'entente avec l'expert de la Fondation, une ou plusieurs mesures parmi les suivantes: [ ] la réduction jusqu'à zéro pour cent du taux d'intérêt crédité sur les capitaux-épargne; la réduction du taux d'intérêt pour le calcul de la prestation de sortie minimale selon l'art. 17 LFLP, pour autant et dans la mesure où le taux d'intérêt crédité sur les capitaux-épargne est réduit (ch. 3); [ ], la réduction temporaire du taux d'intérêt minimum LPP appliqué dans le cadre du compte témoin LPP dans les limites de l'art. 65d al. 4 LPP (ch. 7).

La possibilité de modifier le règlement est désormais ancrée à son art. 48.

Le règlement reprend en substance la disposition transitoire contenue dans le précédent règlement à son art. 51.1.

e. Le règlement dans sa version en vigueur dès le 1er janvier 2019 a été modifié en ce sens qu'il dispose que le taux de conversion est de 6.4 % à 64 ans depuis 2015 selon le chiffre 6.1 de l'annexe.

21.    En l'occurrence, il convient en premier lieu de souligner que conformément aux principes applicables en matière de droit intertemporel et à la jurisprudence, le règlement de prévoyance applicable aux prétentions en lien avec la rente de vieillesse de la demanderesse n'est pas celui qui était en vigueur au moment de la survenance de l'invalidité, mais bien le règlement en force lorsque la demanderesse a atteint l'âge de la retraite.

En effet, le règlement de 1995 réservait expressément toute modification ultérieure de son contenu, ce qui suffit à rendre les changements réglementaires intervenus par la suite opposables aux assurés de la défenderesse, conformément à la jurisprudence. La demanderesse ne saurait se prévaloir d'un droit acquis s'agissant de sa rente de vieillesse, dès lors qu'elle disposait uniquement d'expectatives à cet égard lorsqu'est survenue l'invalidité. Elle ne fait pas non plus valoir que la défenderesse lui aurait donné des assurances particulières lui garantissant sans réserve les prestations de vieillesse prévues par le règlement en vigueur lors de la survenance de son invalidité. Les dispositions transitoires règlementaires ne permettent pas de parvenir à une autre conclusion, dès lors qu'elles prévoient uniquement l'applicabilité – pour une période déterminée – des anciennes dispositions aux prestations d'invalidité et de survivants, mais non aux prestations de vieillesse.

Or, selon le règlement entré en vigueur au 1er janvier 2005, le droit aux prestations réglementaires de vieillesse servies par la défenderesse naît le premier jour du mois qui suit le 64ème anniversaire pour les femmes. La demanderesse étant née en 1957, elle a célébré cet anniversaire en janvier 2021 et n'a ainsi droit à une rente de vieillesse de la prévoyance professionnelle qu'à partir de février 2021, à défaut de règlementation transitoire contraire. La défenderesse invoque le principe d'équivalence pour justifier le versement d'une pension de retraite à la demanderesse dès 62 ans, soit l'âge de la retraite selon le règlement de 1996. Une telle motivation peine cependant à convaincre. En effet, en l'absence de droits acquis, le principe d'équivalence n'empêche pas, comme cela ressort implicitement de la jurisprudence citée, une diminution des expectatives de la prévoyance professionnelle à la suite de modifications réglementaires postérieures à l'affiliation d'un assuré. Il apparaît que ce principe fait uniquement obstacle à l'octroi de prestations supérieures à celles initialement prévues, en fonction desquelles le financement et les contributions ont été fixés. En outre, appliquer l'âge de la retraite prévu par le règlement de 1996 à la demanderesse aurait pour effet de la favoriser par rapport aux assurés contemporains actifs, dont le droit à une pension de la prévoyance professionnelle ne naîtrait que deux ans plus tard et dont les rentes seraient calculées en fonction d'un taux de conversion inférieur, eu égard aux modifications légales et réglementaires intervenues depuis leur affiliation. Une telle pratique paraît ainsi consacrer une inégalité de traitement entre les assurés invalides et les assurés actifs au moment de l'âge de la retraite. Or, la mise en œuvre de la prévoyance professionnelle obligatoire et surobligatoire doit être fixée d'avance dans les statuts et dans le règlement d'après des critères schématiques et objectifs, et doit notamment respecter le principe d'égalité de traitement, de planification et d'assurance (arrêt du Tribunal fédéral 9C_951/2015 du 29 septembre 2016 consid. 3.2). Certes, les assurés actifs peuvent éventuellement tabler sur une augmentation de leur revenu, qui se répercuterait de manière favorable sur le calcul de leur rente de vieillesse. Il n'y a cependant aucune garantie d'une telle augmentation, et cet aspect ne relève au demeurant pas de la prévoyance professionnelle mais des rapports de travail. Partant, l'éventualité d'une progression salariale pour les assurés actifs ne suffit pas à compenser le désavantage subi du point de vue de la prévoyance professionnelle par rapport aux assurés invalides, qui se voient appliquer des règlements antérieurs et des paramètres plus favorables pour le calcul de leur rente de vieillesse. La différence de statut entre ces deux groupes d'assurés ne paraît pas objectivement justifier une telle inégalité de traitement.

Les considérants qui précèdent sont transposables à la détermination du taux de conversion applicable au calcul de la rente de vieillesse.

22.    En ce qui concerne les taux d'intérêt applicables dans le présent cas, la chambre de céans retient ce qui suit.

En premier lieu, il faut souligner que la rente de vieillesse de la demanderesse doit bien être calculée sur un avoir de vieillesse crédité d'intérêts, conformément aux dispositions légales et réglementaires. Le fait que le compte-témoin d'assurés invalides dans la prévoyance obligatoire ne donne pas droit au versement d'intérêts lorsque l'intéressé ne recouvre pas sa capacité de travail et continue à percevoir une rente d'invalidité lorsqu'il atteint l'âge de la retraite n'y change rien, dès lors que dans le cas d'espèce, la rente de vieillesse se substitue à la rente d'invalidité à l'âge de la retraite, qui est calculée conformément au règlement sans distinction en fonction du statut – actif ou invalide – de l'assuré avant qu’il n’atteigne l'âge de la retraite.

Or, les règlements en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004 prévoyaient un taux d'intérêts de 4 % au minimum. La formulation de la disposition réglementaire sur ce point est sans équivoque, et le règlement ne contient en particulier aucune référence à la loi ou aux ordonnances qui permettrait de considérer que ces dispositions législatives priment en l'espèce. Le règlement ne peut ainsi être interprété en ce sens que le taux de rémunération des capitaux de vieillesse par la défenderesse doit s'aligner sur le taux légal. On ne saurait pas non plus considérer que le taux d'intérêt réglementaire de 4 % s'applique au seul avoir de vieillesse obligatoire. Conformément à la jurisprudence, le seul fait que la défenderesse aurait été en droit de prévoir un taux d'intérêts différent, voire nul, pour la part excédant l'avoir de vieillesse obligatoire, ne suffit pas à retenir que cette part ne doit pas être rémunérée dans le cas d’espèce, faute de précision réglementaire dans ce sens. La défenderesse a du reste octroyé des intérêts sur l’intégralité du capital-épargne.

Force est ainsi de retenir que ce capital doit être crédité d'intérêts de 4 % jusqu'au 31 décembre 2004.

Depuis le 1er janvier 2005, date d'entrée en vigueur du règlement modifié, le taux d'intérêt ne figure plus dans les dispositions réglementaires, et il appartient au Conseil de fondation de la défenderesse de le déterminer. Contrairement à ce qu'allègue la demanderesse, il n'est pas indispensable que ce taux figure dans le règlement d'une institution de prévoyance, une telle exigence ne pouvant se déduire de l'art. 50 LPP. La pratique consistant à ne pas inscrire le taux d'intérêt dans le règlement paraît du reste répandue, comme le révèle la jurisprudence (cf. notamment arrêts du Tribunal fédéral 9C_346/2017 du 14 novembre 2017 consid. 3.2 et 9C_176/2015 du 4 mars 2016 consid. 4.1). Il est d'ailleurs usuel que les institutions de prévoyance ne déterminent la rémunération des capitaux qu'au 4ème trimestre de l'année en cours (ATF 132 V 278 consid. 4.6). L'inscription du taux d'intérêt dans le règlement n'amènerait du reste aucune garantie supplémentaire en l’espèce, dès lors que c'est également au Conseil de fondation que revient la compétence de modifier le règlement, et que cet organe serait ainsi fondé à revenir sur ce taux en tout temps. Par surabondance, il n'est pas critiquable qu'une institution de prévoyance abaisse son taux d'intérêts lorsque sa situation financière l'exige afin de pouvoir faire face à ses obligations, puisqu’il s’agit là d’un devoir légal. L’argumentation de la demanderesse quant à l’existence d’un contrat de réassurance, qui couvrirait selon elle les risques de rendement, ne lui est d’aucun secours, puisque ce contrat n’a été conclu que pour les risques d’invalidité et de décès, à l’exclusion des cas de vieillesse.

Partant, dès le 1er janvier 2005, les intérêts appliqués au capital-épargne sont ceux décidés par le Conseil de fondation et ressortant du tableau établi par la défenderesse dans sa réponse, soit 2.5 % de 2005 à 2007, 2.75 % en 2008, 0 % en 2009, 2 % en 2010, 0 % en 2011, 1.5 % en 2012 et 2013, 1.75 % en 2014 et 2015, 1.25 % en 2016 et 2017, et 1 % en 2018 et 2019. La suppression des intérêts en 2009 et 2011, alors que le taux légal était alors de 2 %, ne prête pas non plus le flanc à la critique, puisque les prestations de vieillesse allouées par la défenderesse sont supérieures à la rente d'invalidité à laquelle elles se substituent, et partant au minimum légal. S'agissant des avoirs de prévoyance, il n'y a pas de motif de s'écarter des chiffres figurant dans ce même tableau, que la demanderesse ne conteste d'ailleurs pas en tant que tels.

23.    Eu égard à ce qui précède, le droit à une rente de vieillesse ne devrait en principe être reconnu qu'à partir de février 2021, et cette rente aurait dû être calculée en fonction des bonifications de vieillesse jusqu'au 31 janvier 2021, et du taux de conversion alors applicable.

Toutefois, ni le taux de conversion ni l'âge de la retraite ne sont contestés, et la défenderesse n'a pas pris de conclusions reconventionnelles. Ces points ne font ainsi pas l'objet du litige et sont ainsi soustraits à l’examen de la chambre de céans, qui n'est pas fondée à revenir sur le versement dès le 1er février 2019 déjà de la rente de vieillesse calculée en fonction d'un taux de conversion de 7.2 %.

En revanche, dès lors que le montant de la rente fait l’objet du litige, la chambre de céans s’écartera de la conclusion subsidiaire de la défenderesse, en ce sens qu’elle ne reverra pas à la hausse ce montant avant le 1er février 2021, mois suivant le 64ème anniversaire de la demanderesse.

Dès cette date, la rente de vieillesse doit être calculée conformément au calcul subsidiaire opéré par la défenderesse, soit en fonction du capital-épargne crédité d'intérêts de 4 % jusqu'au 31 décembre 2004, puis des intérêts aux taux décidés par le Conseil de fondation. Cette rente correspond ainsi au capital de prévoyance de CHF 168'030.19 converti au taux de 7.2 %, soit CHF 12'098.17 par an et CHF 1'008.18, arrondi à CHF 1'008.20.

24.    La demanderesse a conclu à l'octroi d'intérêts moratoires sur les arriérés de rente réclamée.

En matière d’intérêts moratoires en prévoyance professionnelle, en l'absence d'une disposition réglementaire particulière s'appliquant à l'institution de prévoyance concernée, il convient d'appliquer les art. 102 et suivants du CO (arrêt du Tribunal fédéral 9C_222/2014 du 6 mai 2014 consid. 2), et l'institution de prévoyance est tenue de verser un intérêt moratoire à partir du jour de la poursuite ou du dépôt de la demande en justice sur le montant dû (ATF 137 V 373 consid. 6.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_731/2016 du 14 juillet 2017 consid. 6).

La demanderesse a ainsi droit à des intérêts moratoires de 5 % (art. 104 al. 1 CO) sur les arriérés de rente dus dès le 1er février 2021 dès leur exigibilité.

25.    La demande est partiellement admise.

Contrairement aux autres branches des assurances sociales, la législation en matière de prévoyance professionnelle ne contient aucune disposition relative à la fixation des dépens pour la procédure devant le tribunal cantonal désigné pour connaître des litiges en matière de prévoyance professionnelle (cf. art. 73 al. 2 LPP). Il appartient par conséquent au droit cantonal de procédure de déterminer si et à quelles conditions il existe un droit à une indemnité de dépens (arrêt du Tribunal fédéral 9C_590/2009 du 26 mars 2010 consid. 3.1).

Selon l’art. 89H al. 3 LPA, une indemnité est allouée au recourant qui obtient gain de cause. Les dépens sont fixés en fonction du nombre d’échanges d’écritures, de l’importance et de la pertinence des écritures, de la complexité de l’affaire et du nombre d’audiences et d’actes d’instruction (ATAS/334/2013). L’art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) prévoit que la juridiction peut allouer à une partie pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires éventuels d’un mandataire, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.-

En l’espèce, il se justifie d’allouer une indemnité de CHF 1'500.- à la demanderesse à titre de dépens, qui sera supportée par la défenderesse.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 73 al. 2 LPP).


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant
conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Dit que la demanderesse a droit à une rente de vieillesse de CHF 1'008.20 par mois dès le 1er février 2021, sous déduction des montants déjà versés, avec intérêts à 5 % sur les arriérés dus dès la date d'exigibilité de chaque prestation.

4.        Condamne la défenderesse à verser à la demanderesse une indemnité de dépens de CHF 1'500.-.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le