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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/290/2001

ATA/98/2002 du 19.02.2002 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : TPE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 19 février 2002

 

 

 

dans la cause

 

 

A. ASSOCIATION

représentée par Me Karin Grobet Thorens, avocate

 

 

 

contre

 

 

 

 

AL. PENSIONSKASSE S.

représentée par Me Jean-Marc Siegrist, avocat

 

et

 

DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT



EN FAIT

 

 

1. L'Al. Pensionkasse S. (ci-après: la propriétaire) a acquis le 25 avril 1985 l'immeuble sis ...-...-..., route de Colovrex au Grand-Saconnex. Cet immeuble, construit au bénéfice d'une aide de l'Etat, était soumis à un contrôle étatique de ses loyers durant vingt ans, soit du 31 décembre 1977 au 31 décembre 1997.

 

Le prix d'acquisition, le 25 avril 1985, était de CHF 3'800'000.-, l'indice suisse des prix à la consommation étant à cette date de 108,5 points.

 

La part des fonds propres était de CHF 1'850'000.-, le reste étant financé par une hypothèque en premier rang à concurrence de CHF 1'950'000.-.

 

2. Le 18 février 2000, la propriétaire a déposé une demande définitive en autorisation de construire auprès du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après: le département). Les travaux prévus visaient la rénovation des façades par l'ajout d'un isolant laine de verre, de la toiture, de la mise en place de cuisines neuves et le changement des vitrages et des stores.

 

Le taux de l'intérêt hypothécaire était à cette date de 4,5%.

 

Le devis des travaux se chiffrait à CHF 1'475'000.-. La propriétaire a demandé au département de pouvoir répercuter ce montant sur les loyers de l'immeuble, totalisant 20 appartements et représentant 76 pièces. Le loyer moyen annuel par pièce passerait ainsi de CHF 4'088.- avant les travaux, à CHF 4'724.- après les travaux.

 

3. Le 21 mars 2000, le département a indiqué à la requérante que le loyer avant les travaux dépassait déjà sensiblement le montant maximum du loyer répondant aux besoins prépondérants de la population. Celui-ci devait être maintenu au même niveau, à moins que la propriétaire ne démontre qu'il ne lui était économiquement pas supportable de réaliser les travaux sans augmentation des loyers.

 

A cet effet, le département l'a invitée à lui remettre un bilan d'exploitation des années 1998 et 1999 en raison du fait que jusqu'au 31 décembre 1997, les loyers étaient soumis au régime HLM, et que ce n'était qu'après cette date qu'une augmentation globale de ceux-ci avait pu avoir lieu.

 

4. Le 2 mai 2000, le conseil de la propriétaire a fourni les explications requises, notamment un calcul de rendement de l'immeuble démontrant qu'elle n'était pas en mesure de supporter l'opération de rénovation sans répercussion sur les loyers.

 

5. a. Le 20 juillet 2000, le département a délivré l'autorisation définitive de construire sollicitée, précisant que l'état locatif annuel ne devait pas excéder CHF 359'052.- après les travaux, ce qui correspondait à CHF 4'724.- par pièce au maximum. Cette limitation a été fixée pour une durée de trois ans à partir de la hausse des loyers.

 

b. Le détail de l'état locatif par appartement du 1er février au 1er mars 2000, avant et après les travaux projetés, se présentait ainsi:

 

Appartement de deux pièces:

 

loyer net augmentation nouveau loyer

CHF 671.- 106.- 777.-

 

Appartements de trois pièces:

 

loyers nets augmentation nouveaux loyers

CHF 965.- 159.- 1124.-

CHF 975.- 159.- 1134.-

CHF 957.- 159.- 1116.-

CHF 975.- 159.- 1134.-

CHF 1013.- 159.- 1172.-

CHF 995.- 159.- 1154.-

CHF 896.- 159.- 1055.-

CHF 1263.- 159.- 1422.-

 

Appartements de quatre pièces:

 

loyers nets augmentation nouveaux loyers

CHF 1297.- 212.- 1509.-

CHF 1322.- 212.- 1534.-

CHF 1146.- 212.- 1358.-

CHF 1333.- 212.- 1545.-

CHF 1310.- 212.- 1522.-

CHF 1288.- 212.- 1500.-

CHF 1369.- 212.- 1581.-

 

Appartements de cinq pièces:

 

loyers nets augmentation nouveaux loyers

CHF 1500.- 265.- 1765.-

CHF 2021.- 265.- 2286.-

 

Appartements de six pièces:

 

loyers nets augmentation nouveaux loyers

CHF 1924.- 318.- 2242.-

CHF 2673.- 318.- 2991.-

6. Le 24 août 2000, l'A. Association (ci-après: l'A. Association) a recouru devant la commission de recours en matière de constructions (ci-après: la commission de recours), laquelle a rejeté le recours le 16 février 2001, considérant que la fixation de l'état locatif annuel maximum de l'immeuble par le département à CHF 359'052.- n'était pas critiquable.

 

7. Le 27 mars 2001, l'A. Association a interjeté recours contre la décision de la commission de recours du 16 février 2001 par devant le Tribunal de céans.

 

8. Selon la recourante, l'intégralité de l'opération de rénovation devait être prise en charge par la propriétaire sans répercussion sur les loyers.

 

La recourante a notamment fait valoir que la moyenne annuelle des charges d'exploitation de l'immeuble entre 1992 et 1996 était de CHF 82'769,25 alors que celle de l'année 1998 se chiffrait à CHF 128'572,65 et celle de l'année 1999 à CHF 84'086,20. Il s'agissait ainsi de considérer les années 1992 à 1999 pour établir la moyenne des charges et non pas seulement les années 1998 et 1999 comme l'avait retenu le département.

 

Enfin, la commission de recours n'indiquait pas pour quelles raisons elle avait considéré le 70% du coût des travaux pour le calcul du rendement de ces capitaux, alors que seul le 50% de ceux-ci pouvait être utilisé à cette fin.

 

9. La propriétaire et le département se sont opposés au recours, considérant qu'une répercussion totale de CHF 48'000.- par an sur les loyers se justifiait.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2. Sont soumis à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) les bâtiments situés dans l'une des zones de construction prévues par la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LALAT - L 1 30) comportant des locaux qui, par leur aménagement et leur distribution, sont affectés à l'habitation (art. 2 al. 1 let. a et b LDTR).

 

La LDTR est applicable au cas d'espèce, dès lors que les locaux du bâtiment en question sont affectés à l'habitation et sont situés en zone 4, qui est prévue à l'article 19 alinéa 2 LALAT.

 

3. a. L'article 11 alinéa 3 LDTR dispose que "si le loyer avant transformation ou rénovation dépasse le niveau des loyers répondants aux besoins prépondérants de la population, il est maintenu par le département au même niveau lorsqu'il apparaît qu'il permet économiquement au propriétaire de supporter le coût des travaux sans majoration de loyer".

 

L'article 6 alinéa 3 LDTR précise que le montant du loyer annuel répondant aux besoins prépondérants de la population est compris entre CHF 2'400.- et CHF 3'225.- la pièce.

 

b. En l'espèce, le loyer annuel moyen de l'immeuble étant de CHF 4'088.- la pièce avant les travaux autorisés, pour atteindre CHF 4'724.- après les travaux, dépassait déjà sensiblement les montants évoqués ci-dessus. Dès lors, en application de l'article 11 alinéa 3 LDTR, la propriétaire devait démontrer qu'il ne lui était économiquement pas supportable de réaliser les travaux sans augmentation de loyer.

c. La question de savoir si une augmentation de loyer est admissible ou non doit être résolue par un calcul de rendement de l'immeuble en question.

 

4. Selon une jurisprudence constante du Tribunal administratif, le montant des loyers après travaux doit être fixé en fonction de l'appartement. Il ne saurait être question d'autoriser des loyers après travaux soumis à autorisation sur la base de moyennes qui ne permettraient plus le contrôle effectif du prix maximum de chaque bail à loyer (ATA Z. du 28 juillet 1998; SI L. du 27 janvier 1998; T. et consorts H. du 5 août 1997; N. du 29 avril 1997; SI T. du 8 avril 1997).

 

Pour pouvoir apprécier le loyer des appartements avant travaux et celui après travaux, le département doit se fonder sur un état locatif complet, clair et établi dans la période précédant immédiatement les travaux. Le département doit en effet connaître les loyers de chaque appartement avant les travaux pour pouvoir fixer le nouveau loyer soumis ensuite au contrôle de l'Etat selon l'article 12 LDTR (ATA Z. du 28 juillet 1998).

 

5. En l'espèce, le département a fixé les loyers en se référant à l'état locatif du 1er février au 1er mars 2000 considérant l'ensemble des loyers. Il est regrettable qu'il n'ait pas procédé de manière plus individuelle par appartement, mais au contraire d'une manière aussi schématique pour fixer l'état locatif admissible. Cela étant, le dossier ne sera pas renvoyé au département dès lors que l'issue du litige n'en est pas affectée comme cela ressort des considérants qui suivent.

 

6. Selon la jurisprudence, la sortie d'un immeuble du contrôle cantonal des loyers justifie l'application de la méthode absolue (ATF 123 III 171; JT 1998 I 191), selon laquelle, le juge vérifie si le loyer est en soi admissible en fonction des coûts d'exploitation, des capitaux empruntés et de l'investissement du bailleur (SJ 1991 p. 305; D. LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne, 1997, p. 350).

 

7. La doctrine définit la notion d'"état locatif" en tant que la somme annuelle de tous les loyers nets pour les appartements, garages et places de parc d'un immeuble, et pas seulement le montant des loyers effectivement encaissés (D. LACHAT, op. cit., p. 295).

 

8. a. Les charges ordinaires doivent être comptabilisées en fonction de leur montant effectif; on ne saurait considérer des montants forfaitaires (D. LACHAT, op. cit., p. 313).

 

Conformément à ce que la recourante a retenu, la moyenne annuelle des charges effectives concernant les années 1985 à 1999 se monte à CHF 82'892.-, le détail se présentant comme suit:

 

1985: CHF 42'476.-

1986: CHF 68'105.-

1987: CHF 46'379.-

1988: CHF 54'148.-

1989: CHF 125'803.-

1990: CHF 56'818.-

1991: CHF 69'639.-

1992: CHF 72'003.-

1993: CHF 74'414.-

1994: CHF 89'581.-

1995: CHF 103'367.-

1996: CHF 108'813.-

1997: CHF 119'184.-

1998: CHF 128'572.-

1999: CHF 84'086.-

 

9. En ce qui concerne les charges financières (intérêts hypothécaires), les parties s'accordent sur un montant annuel de CHF 87'500.- lequel a été repris par chacune d'elle dans leur calcul de rendement.

 

10. a. Contrairement à ce que soutient la recourante, la propriétaire peut prétendre à rentabiliser l'investissement de ses fonds propres.

 

b. L'article 269 du Code des obligations du 30 mars 1911 - CO - RS 220, dispose que "les loyers sont abusifs lorsqu'ils permettent au bailleur d'obtenir un rendement excessif de la chose louée".

 

c. Selon la jurisprudence et la doctrine, le rendement net d'un immeuble résulte du rapport existant entre les fonds propres investis par le propriétaire et le loyer, après déduction des charges d'exploitation et des intérêts débiteurs sur les capitaux empruntés. Le rendement des fonds propres est admissible lorsqu'il n'excède pas de plus d'un demi pour-cent le taux de l'intérêt hypothécaire de 1er rang (ATF 123 III 171; JT 1998 I 191; ATF 120 II 104; ATF 118 II 48; ATF 116 II 186; ATF 112 II 152; D. LACHAT, op. cit., p. 291).

 

11. a. Les articles 269 a lettre e CO et 16 de l'Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitations et de locaux commerciaux du 9 mai 1990 - OBLF - RS 221.213.11 - permettent au bailleur de prétendre à la compensation du renchérissement pour la part de son investissement considérée comme exposée aux risques.

 

Pour définir cette part, le législateur est parti du modèle théorique, selon lequel la proportion usuelle des fonds empruntés correspond à 60% du prix de revient de l'immeuble; le 40% restant étant financé par des fonds propres. C'est ce dernier montant théorique qui peut être indexé à l'évolution de l'indice suisse des prix à la consommation (D. LACHAT, op. cit., p. 326). Le rendement net de ce montant n'est pas considéré comme abusif lorsqu'il n'excède pas plus d'un demi pour-cent le taux de l'intérêt hypothécaire de premier rang pratiqué par la banque cantonale de crédit hypothécaire (ATF 123 III 171; JT 1998 I 191; ATF 122 III 257; JT 1997 I 595; ATF 120 II 100; JT 1995 I 220; ATF 118 II 45; JT 1993 I 153;).

 

b. En l'espèce, le montant à indexer est de CHF 1'520'000.- (3'800'000.- X 40%).

 

L'indice suisse des prix à la consommation était de 108,5 points en avril 1985 et de 146,9 points en février 2000, ce qui représente une augmentation de 35,4 %. La part des fonds propres réévaluée s'élève ainsi à CHF 2'058'080.- (1'520'000.- X 35,4%). De ce dernier montant, il convient encore d'ajouter la différence entre le montant à indexer et celui de la totalité des fonds propres investis, ce qui représente une somme de CHF 330'000.-. Si elle ne peut pas être indexée, il n'en demeure pas moins qu'elle peut être rentabilisée (1'850'000.- moins 1'520'000.-).

 

Le total des fonds propres sujets à être rentabilisés se chiffre ainsi à CHF 2'388'080.- (2'058'080.- + 330'000.-).

 

c. Le taux d'intérêt hypothécaire en mars 2000 étant de 4,5%, le rendement admissible des fonds propres investis est de 5%, soit un montant annuel de CHF 119'404.-.

 

12. L'article 14 alinéa 2 OBLF dispose que le bailleur peut répercuter sur le loyer l'intérêt du capital investi pour les travaux entrepris, l'amortissement de ces derniers ainsi que les nouvelles charges d'entretien qui en résultent.

13. a. En ce qui concerne l'intérêt du capital investi pour les travaux entrepris, les articles 11 alinéa 1 lettre a LDTR et 14 alinéa 1 OBLF prévoient que le pourcentage à prendre en considération se situe entre 50% et 70% de leur coût, à condition que les travaux créent des améliorations à plus-values.

 

b. Selon la doctrine, le choix de ce pourcentage dépendra notamment de l'importance des améliorations à plus-value comprises dans les travaux ainsi que du coût global de ces derniers par rapport à l'état locatif.

 

Seules les réparations importantes sont partiellement assimilées à des améliorations créant des plus-values, et tombent sous le coup de l'art. 14 al. 1 OBLF. Il doit s'agir de travaux extraordinaires, concernant plusieurs parties de l'immeuble et d'un coût élevé en regard de l'état locatif. Ceci s'explique par la difficulté de distinguer les améliorations à plus-value qui accroissent la valeur de l'immeuble et justifient une majoration de loyer, et les simples travaux d'entretien qui ne font que maintenir la valeur de l'immeuble et qui ne génèrent aucune majoration de loyer (D. LACHAT, op. cit., p. 317).

 

Tel ne sera pas le cas de la réfection des façades d'un immeuble, qui n'est pas considérée comme une amélioration à plus-value, mais comme de simples travaux d'entretien qui ne font que maintenir l'état des locaux et prévenir leur dégradation, à moins qu'elle ne s'accompagne d'une amélioration de l'isolation (D. LACHAT, op. cit., p. 316).

 

c. Le Tribunal de céans s'est déjà exprimé sur le problème de la distinction entre les travaux d'entretien et les travaux de rénovation en utilisant le critère de la nature des travaux.

 

c.a. Les travaux d'entretien sont ceux que le bailleur est tenu de réaliser au regard de son obligation d'entretien de la chose louée prescrite par l'article 256 alinéa 1 CO et qui échappent à la LDTR ne faisant dès lors pas l'objet d'une répercussion sur les loyers (ATA SI D. B. du 8 avril 1997; SI C. du 1er décembre 1992). Peuvent être considérés comme tels, les travaux qui, dépassant le strict entretien, consistent à substituer à des installations vétustes des éléments neufs servant au même usage comme par exemple la réparation d'un toit par le remplacement de parties défectueuses (ATA SI D. B. du 8 avril 1997 et les références citées). Cette qualification sera notamment retenue pour l'installation d'une nouvelle cuisine, dans la mesure où le fait que les nouveaux meubles de cuisine répondent aux critères actuels de qualité (pour ce qui est par exemple des cuisinières en vitrocéramique) et que le niveau des cuisines en sera amélioré. La jurisprudence actuelle ne permet pas d'aboutir à une autre solution, sauf à vouloir figer l'équipement d'un immeuble en l'état des techniques prévalant lors de sa construction (ATA SI T. du 8 avril 1997; RDAF vol. I 1998, p. 366). Enfin, le Tribunal de céans à déjà eu l'occasion de qualifier le remplacement des fenêtres et des stores comme relevant également, de par leur nature, des travaux d'entretien (ATA SI D. B. du 8 avril 1997).

 

c.b. Quant à la notion de travaux de rénovation telle que reprise à l'article 9 alinéa 1 lettre e LDTR qui la qualifie de transformation, elle englobe tous les travaux d'entretien, de réparation et de modernisation qui laissent intacts le volume, l'aspect extérieur et la destination de l'immeuble; ces travaux constituent une transformation s'ils provoquent des modifications allant au-delà de ce qui est usuel (ATF du 9 février 1993 en la cause L. confirmant l'ATA du 24 juin 1992 publié in SJ 1994 p. 531; RDAF 1988 p. 383). Cette qualification a été retenue pour des travaux visant le rétablissement dans son premier état d'un ouvrage ayant subi l'usure du temps (ATF 113 Ia 119; ATA P. du 27 septembre 1989). A titre d'exemple, la réfection des façades est considérée comme relevant d'une transformation (ATA SI D. du 8 avril 1997; T. du 8 avril 1997; RDAF vol. 1 1998, p. 367).

d. La nature des travaux ne saurait être le seul critère à prendre en considération pour définir si les interventions en question relèvent de l'entretien ou de la rénovation.

 

L'ampleur des travaux peut aboutir à modifier qualitativement l'immeuble (ATA SI D. B. du 8 avril 1997). Il en sera notamment ainsi lorsque ceux-ci, n'ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l'existence d'un immeuble, ou encore parce qu'ils n'ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation leur confère une ampleur propre à engendrer un changement du niveau des loyers tel que la destination de l'immeuble en est modifiée. Le Tribunal administratif à notamment jugé que des travaux, assimilables en soi à de l'entretien, relevaient d'une rénovation, dès lors qu'ils s'élevaient à la moitié du prix de l'immeuble, leur ampleur ne permettant pas de les limiter à la conservation de la chose en bon état (ATA SI D. B. du 8 avril 1997; SI M. du 14 février 1990). En revanche, tel n'est pas le cas des travaux relevant de par leur nature à de l'entretien, et dont l'ampleur se limitait à dix pourcents de la valeur d'assurance de l'immeuble (ATA SI C. du 1er décembre 1992 in SJ 1993 p. 576).

e. En l'espèce, le remplacement des fenêtres et des stores ainsi que l'installation de nouvelles cuisines équipées comptent de par leur nature, parmi les travaux d'entretien.

 

S'agissant des travaux de rénovation des façades ainsi que l'ajout d'un isolant laine de verre, conformément à la jurisprudence citée ci-dessus, il convient de les considérer comme travaux de transformation.

 

Reste à considérer l'ensemble des travaux projetés qui concernent l'immeuble dans sa globalité. Ils engendrent des modifications allant au-delà de ce qui est usuel, tant par les améliorations créant des plus-values, qu'en regard du coût élevé des travaux par rapport au prix de l'immeuble, soit 38,8 % (1'475'000.- X 100 : 3'800'000.-). Dès lors, en regard de la jurisprudence citée, le Tribunal de céans estime que l'ampleur des travaux ne se limite pas à la conservation de l'immeuble en bon état, mais relève au contraire d'une rénovation propre à engendrer un changement du niveau des loyers.

Au vu de ce qui précède, le pourcentage de 70% du coût des travaux tel que l'a retenu la commission de recours pour déterminer l'intérêt du capital investi se justifie, représentant un montant de CHF 1'032'500.- (70% de 1'475'000.-).

 

Dans l'hypothèse où seul le 50% du coût des travaux aurait été retenu (cf. ch. 13 a) ci-avant), le résultat du calcul de rendement de l'immeuble par rapport à la répercussion sur les loyers des travaux projetés n'en aurait pas été changé pour autant, comme le démontre le considérant 16 ci-après.

 

f. La répercussion sur le loyer de l'intérêt du capital investi pour les travaux correspond au coût de revient ce ceux-ci, multiplié par le taux hypothécaire du marché, plus un demi pour-cent, ce qui représente un taux de 5%.

 

Il convient toutefois de ne retenir que la moitié de ce pourcentage, compte tenu du fait que celui-ci doit également être amorti, ce qui représente un pourcentage de 2,5% (D. LACHAT, op. cit., p. 318).

 

Le montant de l'intérêt du capital investi pour les travaux se chiffre ainsi à CHF 25'812.- (2,5% de CHF 1'032'500.- représentant le 70% du coût des travaux).

 

14. a. En ce qui concerne l'amortissement des installations, celui-ci est calculé en fonction de leur durée de vie. L'article 11 alinéa 1 lettre b LDTR prévoit une période de 18 à 20 ans, ce qui représente un pourcentage annuel de 5%.

 

b. Contrairement à ce que soutient la recourante, il n'y a pas lieu de s'écarter de la durée de l'amortissement des travaux autorisés fixée à 20 ans.

 

c. En l'espèce, il s'agit d'un montant annuel de CHF 73'750.- (5% de CHF 1'475'000.-).

15. a. En ce qui concerne l'entretien des nouvelles installations, il convient de retenir un pourcent du coût total de l'investissement (D. LACHAT, op. cit., p. 318).

 

b. Dans le présent cas, le montant annuel est de CHF 14'750.- (1% de CHF 1'475'000.-).

 

16. Considérant l'ensemble des charges, à savoir:

 

CHF 82'892.- de charges annuelles moyennes;

CHF 87'500.- d'intérêts hypothécaires;

CHF 119'404.- de rendement admissible des fonds propres;

CHF 25'812.- d'intérêts du capital investi pour les travaux considérant le 70% de ces derniers;

CHF 73'750.- d'amortissement des installations;

CHF 14'750.- d'entretien des installations;

 

le total des charges s'élève à CHF 404'108.-. Ce dernier correspondrait au montant maximum des loyers admissibles en regard de l'article 11 alinéa 3 LDTR. Dès lors que le montant maximum des loyers fixé par le département ascende à CHF 359'052.-, celui-ci est en deçà des charges de l'immeuble. La décision du département doit par conséquent être confirmée.

 

La même conclusion s'impose dans l'hypothèse où seul le 50% du coût des travaux aurait été considéré. Dans ce cas, les intérêts du capital investi pour les travaux s'élèveraient à CHF 18'437.- (50% de 1'475'000.- multiplié par 2,5%) le total des charges de l'immeuble s'élevant à CHF 396'733.-.

 

17. Le recours sera ainsi rejeté.

 

18. Vu l'issue du litige, un émolument de 1'500.- sera mis à la charge de la recourante.

 

Une indemnité de procédure, en CHF 1'000.-, sera allouée à l'Al. Pensionskasse S., à la charge de l'A. Association.

 

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 27 mars 2001 par l'A. Association contre la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 16 février 2001;

 

au fond :

 

le rejette ;

 

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 1'500.-;

 

alloue une indemnité de procédure en CHF 1'000.- à l'Al. Pensionskasse S., à la charge de l'A. Association;

communique le présent arrêt à Me Karin Grobet Thorens, avocate de la recourante, au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, ainsi qu'à Me Jean-Marc Siegrist, avocat de l'intimée.

 


Siégeants : M. Thélin, président, MM. Paychère, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

le secrétaire-juriste : le président :

 

O. Bindschedler Ph. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci