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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2/2001

ATA/89/2001 du 06.02.2001 ( TPE ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 28.02.2001, rendu le 15.03.2001, REJETE, 1A.43/2001
Descripteurs : EFFET SUSPENSIF DU RECOURS; RESTITUTION DE L'EFFET SUSPENSIF; DECISION INCIDENTE; TPE
Normes : LPA.57
Résumé : Une décision sur effet suspensif est une décision incidente, car c'est une décision prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu'une étape vers la décision finale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 6 février 2001

 

 

 

dans la cause

 

Monsieur M. M.

Madame M. R.

Monsieur J. R.

 

et

 

COMITÉ DE CITOYENNES ET DE CITOYENS POUR UN CHOIX DÉMOCRATIQUE

soit pour lui Monsieur J.

 

 

contre

 

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS

 

et

 

 

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DE L'ÉQUIPEMENT ET DU LOGEMENT

 

et

 

FONDATION DU STADE DE GENÈVE

représentée par Me Nicolas Peyrot, avocat

 

et

 

JELMOLI - AU GRAND PASSAGE - INNOVATION S.A.

représentée par Me Olivier Carrard, avocat

 



EN FAIT

 

 

1. Par arrêté du 8 septembre 1999, le Conseil d'Etat a adopté le plan localisé de quartier (ci-après : PLQ de la Praille) no 28962.I-67 situé à la route des Jeunes (stade de la Praille) sur le territoire de la commune de Lancy.

 

L'adoption de ce plan avait été précédée d'une procédure d'enquête publique, d'un rapport d'impact de 1ère étape et cahier des charges du rapport d'impact 2ème étape, d'une étude de la commission interdépartementale sur les risques majeurs (CIRMA) ainsi que des préavis de tous les services concernés.

 

Dans le cadre de la procédure d'opposition au PLQ de la Praille, deux associations de protection de l'environnement (ATE et WWF), ainsi qu'une coopérative d'entreprises et diverses entreprises individuelles ont manifesté leurs oppositions, à la suite desquelles un accord a finalement été conclu avec le Conseil d'Etat et entériné par le tribunal de céans (ATA du 21 décembre 1999 dans les causes A/994/1999 et A/995 et 996/1999).

 

2. Le 16 novembre 1999, la Fédération des Associations de quartier et d'habitants (FAQH), agissant notamment sous la plume de Monsieur J., a demandé au Conseil d'Etat soit une restitution de délai pour faire opposition au PLQ de la Praille, soit l'ouverture d'une procédure en révision. Elle a mis en particulier en évidence les très graves dangers pour la population résultant des activités de la gare de la Praille, ce qu'elle avait constaté à la lecture de l'avis de la CIRMA dont elle avait eu récemment connaissance. Par courrier du 22 décembre 1999, le Conseil d'Etat a rejeté ces deux requêtes. L'avis de la CIRMA ne revêtait pas le caractère d'un élément "nouveau et important". Pour le surplus, la FAQH n'avait pas participé à la procédure d'opposition au PLQ.

 

Parallèlement, la FAQH a saisi le Tribunal administratif d'un recours contre le PLQ de la Praille, recours déclaré irrecevable par ATA du 7 décembre 1999 (cause no A/1120/1999).

 

3. Le 29 février 2000, Mesdames Messieurs J. D., D. D., M. R. et J. R. (ci-après : M. D. et consorts) ont adressé au Conseil d'Etat une demande en reconsidération portant sur le PLQ de la Praille ainsi qu'une demande de prolongation du délai pour faire opposition au PLQ précité. Ils ont repris en substance les mêmes griefs que ceux évoqués précédemment par la FAQH.

 

Dans sa réponse du 12 avril 2000, le Conseil d'Etat a relevé que le PLQ de la Praille avait pour objet le stade de Genève ainsi qu'un centre commercial, installations ne présentant aucun danger pour la population. Quant à la gare de triage de la Praille, son assainissement faisait l'objet d'un dossier distinct de celui du PLQ de la Praille. Le Conseil d'Etat relevait que les prétentions des prénommés devaient être déclarées irrecevables à plusieurs titres, à commencer par l'absence manifeste de qualité pour agir. De plus, aucun fait nouveau qui se serait produit depuis l'adoption du PLQ de la Praille n'était évoqué. Les requérants n'avaient pas participé à la procédure d'opposition au PLQ. S'agissant enfin de la restitution du délai, le Tribunal administratif, dans son arrêt du 7 décembre 1999 concernant le même PLQ, avait déjà tranché cette question.

 

MM. D. et consorts ont saisi le Tribunal administratif d'un recours contre la décision précitée, recours déclaré irrecevable par arrêt du 14 août 2000.

 

4. Suite à l'adoption du PLQ de la Praille, les autorisations suivantes ont été délivrées par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : le département) :

 


- 13 janvier 2000 :

Autorisation de démolir les bâtiments existants (M 4796). Cette autorisation n'a pas fait l'objet d'un recours.

 

- 29 juin 2000 :

Autorisation de démolir les bâtiments industriels (M 4837). Cette autorisation n'a pas fait l'objet d'un recours.

 

- 14 septembre 2000 :

Autorisation pour la construction d'un quai voyageurs, transfert et reconstruction d'équipements d'exploitation (DD 96'750). Cette autorisation n'a pas fait l'objet d'un recours.

 

- 5 octobre 2000 :

Autorisation de raccordement de la route de service et de l'esplanade du Stade de Genève sur la route des Jeunes (LER 2603). Cette autorisation n'a pas fait l'objet d'un recours.

 

- 5 octobre 2000 :

Autorisation "Stade de Genève", délivrée à la Fondation du stade de Genève (FSG), pour la construction d'un stade de football de 30'000 places, bâtiments de liaison, hôtel et accès ferroviaire (DD 96'580). Dans le cadre de l'instruction de cette demande, la FAQH a fait opposition le 16 juin 2000 sous la plume de Mesdames, Messieurs J., R. et A.. Les opposants demandaient à ce qu'une enquête publique en bonne et due forme soit refaite, requête écartée par le département (courrier du 5 octobre 2000 du chef du département à la FAQH).

L'ATE a également fait valoir des observations, remarques prises en compte dans les conclusions d'accord entérinées par le tribunal de céans dans l'arrêt mentionné ci-avant (A/994/1999).

 

- 5 octobre 2000 :

Autorisation "Stade de Genève", délivrée à Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A., centre commercial et de loisirs, garage souterrain de 950 places (DD 96'581).

Dans le cadre de l'instruction de ladite demande, la FAQH a fait opposition par acte du 16 juin 2000, opposition écartée par le département (courrier du 5 octobre 2000 du chef du département à la FAQH).

L'ATE a également présenté des observations, lesquelles, comme vu précédemment, ont été prises en compte dans l'accord conclu avec le Conseil d'Etat (A/994/1999).

 

 


Conséquences des autorisations susmentionnées, le chantier de démolition a été ouvert le 22 mars 2000 et le chantier de construction du stade proprement dit le 20 novembre 2000.

 

5. Le 23 octobre 2000, le Comité de citoyennes et de citoyens pour un choix démocratique et raisonnable de stade (ci-après : le comité), sous la plume de M. J., a interpellé le Conseil d'Etat. Le comité avait déposé au début du mois de juillet 2000 une initiative populaire "Pour un projet de stade raisonnable" appuyée par près de 12'000 signatures. Cette initiative avait pour but de modifier la loi du 26 avril 1996 portant sur le stade des Charmilles en demandant notamment la réalisation d'un stade moins important, la suppression du centre commercial et la garantie de la sécurité du site en raison des dangers résultant de l'exploitation de la gare de la Praille. Le comité demandait au Conseil d'Etat s'il entendait différer l'ouverture du chantier jusqu'à ce que l'initiative ait fait l'objet d'une votation populaire, "ce qui [nous] paraît être l'unique attitude respectueuse du droit de vote des citoyens".

 

Dans sa réponse du 1er novembre 2000, le Conseil d'Etat a exprimé l'avis que le respect des droits démocratiques ne permettait pas d'attribuer à une initiative populaire un effet suspensif. Les projets du stade et du centre commercial avaient fait l'objet de trois lois régulièrement votées par le Grand Conseil et qui n'avaient fait l'objet d'aucun référendum. La procédure démocratique d'adoption du PLQ avait été suivie scrupuleusement et deux recours avaient d'ailleurs été interjetés, qui avaient abouti à des retraits suite à des transactions. Suivaient, en réponse à une remarque du comité, des considérations sur la répartition de la subvention d'investissement.

 

6. Par acte du 10 novembre 2000, Mesdames, Messieurs A. A., E. K., M. M., H. S., R. T., J. R. et M. R., à titre personnel, et le comité, ont saisi la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission de recours) d'un recours dirigé contre les autorisations de construire DD 96'580 et DD 96'581. Les autorisations querellées ne respectaient pas le PLQ de la Praille, certaines surfaces de plancher n'ayant pas été comptabilisées. Les autorisations étaient incomplètes car elles laissaient en suspens les aménagements routiers. L'exploitation de la gare CFF de la Praille était source de danger pour la population. Enfin, les autorisations accordées n'étaient pas conformes à l'ordonnance sur la protection de l'air du 16 décembre 1985 (OPair) ainsi qu'à l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB). Les recourants ont conclu à l'annulation des autorisations accordées.

 

Dans une écriture complémentaire du 21 novembre 2000, Mesdames, Messieurs M., R., R. ainsi que le comité ont adressé à la commission de recours une demande de constatation d'effet suspensif, subsidiairement de restitution de l'effet suspensif. L'article 146 alinéa 2 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) ne s'appliquait pas aux autorisations de construire querellées, lesquelles en vertu du principe de la coordination des procédures imposé par le droit fédéral, étaient prises également en application du droit fédéral. Les graves violations du droit fédéral devaient entraîner la restitution de l'effet suspensif au recours, ce que prévoyaient aussi bien la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021) que la loi cantonale sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

 

7. Les parties intéressées, à savoir les bénéficiaires des autorisations, FSG et Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A., de même que le département se sont opposés à la restitution de l'effet suspensif.

 

8. Par décision du 21 décembre 2000, la commission de recours, "statuant préalablement", a rejeté la requête de restitution d'effet suspensif et a appointé une audience de comparution personnelle fixée au 16 janvier 2001.

 

9. Mesdames, Messieurs M., R., R. et le comité, représentés par M. J., ont saisi le Tribunal administratif d'un recours contre la décision précitée par acte du 29 décembre 2000, posté le 2 janvier 2001. L'effet suspensif devait être accordé en application du droit fédéral (art. 55 al. 1 PA). S'agissant du droit cantonal, la règle de l'article 146 alinéa 2 LCI ne s'appliquait que si le projet de construction était strictement conforme au PLQ, ce qui n'était manifestement pas le cas en l'espèce. Procédant à la pesée des intérêts, les recourants ont relevé que les constructions en cause ne répondaient pas à un intérêt public. Les intérêts personnels des recourants étaient gravement lésés par l'absence de mesures d'assainissement indispensables de la gare de la Praille (admis par le Conseil d'Etat), qui constituait un danger réel et particulièrement important pour eux, comme les risques résultant du chantier, notamment concernant la stabilité des voies de chemin de fer. Ces intérêts l'emportaient manifestement sur le désir des promoteurs de réaliser au plus vite leur projet qui ne répondait à aucune urgence réelle, dans le but évident de rendre le recours sans objet et pour éviter que le peuple ne se prononce sur l'initiative populaire "Pour un stade raisonnable", dont l'aboutissement venait d'être confirmé par la Chancellerie d'Etat. Ils ont persisté dans leurs conclusions initiales.

 

10. Les parties intimées, à savoir FSG, Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A. et le département se sont opposés à la restitution de l'effet suspensif dans leurs réponses respectives du 19 janvier 2001. Pour l'ensemble des parties intimées, l'article 55 PA ne s'appliquait pas au litige. Elles ont également contesté la qualité pour agir des recourants et relevé qu'un examen prima facie des chances de succès du recours conduisait au rejet de celui-ci.

 

11. a. Selon le procès-verbal d'audience de comparution personnelle qui s'est tenue le 16 janvier 2001 devant la commission de recours, les recourants ont admis qu'aucun membre du comité et aucun recourant en personne n'était domicilié plus près du stade de la Praille que M. M., domicilié rue du Bachet. M. J. a par ailleurs précisé que le comité avait été constitué le 16 février 2000 et qu'auparavant il n'existait pas.

 

b. Des pièces produites par les parties, il est établi que la rue du Bachet est située au dessus de la gare de triage, sur la colline de Lancy, et que le domicile de M. M. se situe dans un rayon de 300 à 500 m du futur stade. Mme R. quant à elle est domiciliée à 900 m environ du stade et M. R. à plus de 1,250 km.

 

c. Le comité a versé aux débats un exemplaire de ses statuts non signés, ni datés, accompagnés d'une liste de membres forte de 25 personnes.

 

EN DROIT

 

 

1. a. Selon l'article 57 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), seules sont susceptibles de recours les décisions finales, les décisions par lesquelles l'autorité admet ou décline sa compétence ainsi que les décisions incidentes qui, si elles étaient exécutées, causeraient un préjudice irréparable à l'une des parties.

 

b. L'article 57 LPA doit s'interpréter comme l'article 45 PA (ATA L. du 22 novembre 1989, confirmé par ATF du 15 juin 1990). Selon la jurisprudence, est finale une décision qui met un point final à la procédure, qu'il s'agisse d'une décision sur le fond ou d'une décision qui clôt l'affaire en raison d'un motif tiré des règles de la procédure; est en revanche une décision incidente celle qui est prise pendant le cours de la procédure et ne représente qu'une étape vers la décision finale; elle peut avoir pour objet une question formelle ou matérielle, jugée préalablement à la décision finale (ATF 123 I 325 consid. 3b p. 327; 122 I 39 consid. 1a/aa p. 41; 120 Ia 369 consid. 1b p. 372; 120 III 143 consid. 1a p. 144; 117 Ia 251 consid. 1a p. 253; 396 consid. 1 p. 398 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral admet par ailleurs que des jugements statuant définitivement sur une partie du litige ne modifient en rien la nature incidente de la décision de renvoi (ATF 123 I 325 consid. 3b p. 327; 116 Ia 197 consid. 1b p. 198; 116 II 80 consid. 2b p. 82; 106 Ia 226 consid. 2 pp. 228/229).

 

c. Au vu de ce qui précède, une décision sur effet suspensif n'est à l'évidence pas une décision finale. Elle ne constitue pas davantage une décision "préparatoire" comme l'a qualifiée la commission de recours, mais une décision incidente, en ce sens qu'il s'agit d'une décision prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu'une étape vers la décision finale.

 

2. a. Incidente au sens de l'article 57 lettre c LPA, la décision querellée n'est donc susceptible de recours que si, en cas d'exécution, elle causerait un préjudice irréparable à l'une des parties.

 

b. Le Tribunal fédéral a interprété la notion de préjudice irréparable de l'article 45 alinéa 1 PA de façon plus large que celle de dommage irréparable qui prévaut pour le recours de droit public (art. 87 de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 - OJF - RS 173.110). Pour qu'il y ait préjudice irréparable, il suffit que le recourant ait un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit immédiatement annulée ou modifiée (ATF 116 Ib 347; 116 Ib 238; 112 Ib 422). Un simple préjudice économique peut être, suivant les circonstances, irréparable (ATF 116 Ib 238). Il n'est en outre pas nécessaire que la décision attaquée cause effectivement un préjudice irréparable, il suffit qu'elle puisse le causer (B. Corboz, Le recours immédiat contre une décision incidente, Sem. Jud. 1991, p. 629; ATF 106 Ia 234).

 

c. En l'espèce, il est incontestable que les recourants ont un intérêt digne de protection, au sens de la jurisprudence susmentionnée, à ce qu'il soit statué sans délai sur leur cause. L'on peut en effet admettre que la poursuite des travaux pourrait être de nature à causer un préjudice irréparable au sens de la jurisprudence précitée.

 

3. Il s'ensuit qu'interjeté dans le délai de dix jours de l'article 63 alinéa 1 lettre b LPA contre une décision incidente au sens de l'article 57 lettre c, le recours est à cet égard recevable.

 

4. Se pose toutefois la question de la qualité pour agir des recourants.

 

4.1 Qualité pour recourir des recourants intervenant à titre individuel

 

a. Selon l'article 60 lettre b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

 

b. Ainsi, bien que la rédaction de l'article 60 lettre b LPA diffère légèrement de l'article 103 lettre a OJF, il est admis qu'il confère la qualité pour recourir aux mêmes conditions (ATA S. du 27 juin 2000; A. du 18 janvier 2000; L. du 29 mars 1994).

 

c. L'intérêt digne de protection doit être personnel et peut être juridique ou de fait. Cela implique que le recourant ait un intérêt plus grand que quiconque ou que la généralité des administrés à ce que la décision attaquée soit annulée ou modifiée, mais l'intérêt ne doit pas nécessairement correspondre à celui protégé par la norme invoquée (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174; ATF 113 Ib 363 consid. 3a p. 366; A. du 18 janvier 2000).

 

d. En ce qui concerne les voisins, la jurisprudence a précisé que seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis. Cette lésion directe et spéciale suppose qu'il y a une communauté de faits entre les intérêts du destinataire de la décision et ceux des tiers. Les voisins peuvent ainsi recourir contre des règles qui ne leur donnent aucun droit et qui ne sont pas directement destinées à protéger leurs intérêts (ATA S. du 27 juin 2000; B.-M. 31 mars 1998).

 

e. Selon la jurisprudence, le voisin a qualité pour agir au regard de l'article 103 lettre b OJF, lorsque son terrain jouxte celui du constructeur ou se trouve à proximité immédiate (ATF 112 Ib 170 consid. 5b p. 174). Pour qu'un voisin soit touché plus que quiconque, la réalisation du projet litigieux doit lui causer personnellement un préjudice de fait en raison, par exemple, des nuisances provoquées par l'exploitation (ATF 110 Ib 398 consid. 1b p. 400). A notamment qualité pour agir au sens de l'article 103 lettre a OJF celui qui habite à proximité d'une installation, source de nuisances sonores, troublant sa tranquillité (ATF 119 Ib 179 consid. 1c p. 183). Tel est le cas des voisins qui se trouvent à quelques dizaines ou au plus à quelques centaines de mètres de la parcelle qui supporte une construction à transformer lorsqu'ils peuvent être troublés dans leur tranquillité par le trafic automobile supplémentaire (ATA N. K. du 24 juin 1997; ATA T. du 29 mars 1993). Tel n'est par contre pas le cas de la personne domiciliée à quatre cent cinquante mètres du lieu où des nouveaux pavillons doivent être construits (ATA R. du 6 février 1991). L'intérêt du tiers à intervenir ne peut être nié lorsque, en cas d'exploitation normale une installation ne produit aucune émission, mais que celle-ci crée une source de danger et expose les habitants à un risque plus élevé. C'est le risque théorique, lié à une telle installation qui doit être pris en considération. Un tel droit trouve sa limite dans l'inadmissibilité de l'action populaire (ATF 120 Ib 379, JdT 1996 I 451).

 

f. Dans son arrêt du 14 août 2000, le Tribunal administratif a laissé indécise la question de la qualité pour agir de Mme R. et de M. R.. Les pièces figurant au dossier établissent que ces deux personnes sont domiciliées à un kilomètre environ du futur stade. Elles ne sauraient donc se réclamer de la qualité de voisin au sens de la jurisprudence susmentionnée. S'agissant de M. M., domicilié dans un rayon de 300 à 500 m du futur stade, sa qualité pour agir souffre de rester indécise, celui-là n'ayant, comme on va le voir ci-après, aucun intérêt direct à recourir.

 

En effet, les recourants reprennent leur argumentation précédemment développée par M. D. et consorts et liée à l'exploitation de la gare de la Praille et à l'absence de mesures d'assainissement indispensables à cette installation. Pour les recourants, il y va de la sécurité de la population et leur argumentation sur le fond est toute entière axée sur l'exploitation de la gare CFF et les nuisances y relatives. Outre que cet argument sort des débats dans le cadre de la contestation des autorisations délivrées, qui concerne exclusivement le stade de football et les aménagements annexes, les recourants ne font valoir aucun intérêt direct ni spécial lié aux constructions projetées de telle sorte que la qualité pour agir doit leur être déniée. A cet égard, l'on ne saurait retenir l'argument lié aux dangers qui seraient générés par le chantier, eu égard notamment à la stabilité des voies de chemin de fer, dès lors que celui-ci ne repose sur aucun élément concret.

 

Dès lors, leur recours sera déclaré irrecevable.

 

4.2 Qualité pour agir du comité

 

a. Une association peut recourir soit pour la défense de ses propres intérêts, soit pour la défense des intérêts de ses membres, si ses statuts prévoient un tel but et si un grand nombre de ses membres ont eux-mêmes la qualité pour agir (ATF 121 II 39 consid. 2d/aa p. 46; 120 Ib 59 consid. 1a p. 61; 119 Ib 374 consid. 2a/aa p. 376; ATA APV du 23 septembre 1997).

 

b. Selon l'article 145 alinéa 3 LCI, les associations d'importance cantonale ou actives depuis plus de trois ans qui, aux termes de leurs statuts, se vouent par pur idéal à l'étude de questions relatives à l'aménagement du territoire, à la protection de l'environnement ou à la protection des monuments, de la nature et des sites ont qualité pour recourir.

 

c. En l'espèce, le comité a produit devant la commission de recours un exemplaire de ses statuts, texte non signé et non daté. Il en résulte toutefois que le but du comité est de remettre en cause le projet de stade de football de la Praille et du centre commercial qui lui est lié, tel que prévu dans le PLQ du 8 septembre 1999. Les 25 membres formant ce comité, dont la liste a également été versée aux débats, habitent tant en ville de Genève que de Carouge ainsi que sur les communes avoisinantes du PLQ discuté. De l'aveu même des recourants devant la commission de recours, aucun membre du comité n'est domicilié plus près du stade que les époux M.. Or, comme vu ci-dessus, la qualité pour agir de M. M. n'est pas acquise. Il en va de même de tout le groupe familial de ce dernier (trois personnes). Quant aux 22 membres restants du comité, aucun d'eux ne peut faire valoir une lésion directe et, partant, se prévaloir de la qualité pour agir.

 

A cela s'ajoute que le porte-parole du comité a affirmé que ce dernier avait été constitué le 16 février 2000. De plus, le comité réunit 25 personnes sur les quelque 500'000 âmes que compte la population genevoise. Dès lors, on ne saurait lui reconnaître la qualité d'association d'importance cantonale au sens de la disposition légale précitée.

 

Ces motifs conduisent à admettre que le comité n'a pas la qualité pour agir et que son recours sera également déclaré irrecevable.

 

4.3 Au vu de ce qui précède, aucun des recourants n'ayant la qualité pour agir, le recours sera déclaré irrecevable.

 

Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent, pris conjointement et solidairement.

 

Les recourants, pris conjointement et solidairement, seront en outre astreints au paiement d'une indemnité de CHF 2'000.- à la Fondation du Stade de Genève d'une part, ainsi que de CHF 2'000.- à Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A. d'autre part, parties intimées qui ont pris des conclusions dans ce sens.

 

 

 


PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

 

déclare irrecevable le recours interjeté le 2 janvier 2001 par Madame M. R., Messieurs M. M. et J. R. et par le Comité de citoyennes et de citoyens pour un choix démocratique contre la décision de la commission cantonale de recours en matière de constructions du 21 décembre 2000;

 

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2000.-;

 

alloue à la Fondation du Stade de Genève une indemnité de CHF 2'000.-, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement;

 

alloue à Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A. une indemnité de CHF 2'000.-, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement;

 

communique le présent arrêt à Madame Messieurs M. R., M. M., J. R. et au Comité de citoyennes et de citoyens pour un choix démocratique, soit pour lui à Monsieur J., à la commission cantonale de recours en matière de constructions, au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, à Me Nicolas Peyrot, avocat de la Fondation du Stade de Genève ainsi qu'à Me Olivier Carrard, avocat de Jelmoli - Au Grand Passage - Innovation S.A.

 


Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, MM. Schucani, Paychère, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj.: le vice-président

 

C. Goette Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci