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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/876/2002

ATA/853/2003 du 25.11.2003 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : LOGEMENT; LOYER CONTROLE; ETAT LOCATIF; CALCUL; TAUX HYPOTHECAIRE; TRAVAUX D'ENTRETIEN; FRAIS D'ENTRETIEN; BUDGET; TPE
Normes : LGL.42 al.1
Résumé : Immeuble HLM : demande de modification de l'état locatif. Le budget pour charges d'exploitation est déterminé assez largement. Il permet de faire face aux éventuels travaux extraordinaires, d'alimenter la réserve d'entretien et même, en l'espèce, d'absorber des charges supplémentaires dues à l'augmentation du taux de l'intérêt hypothécaire. Il ne se justifie donc pas d'augmenter ni l'état locatif, ni le budget pour charges d'exploitation.
En fait
En droit

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 25 novembre 2003

 

 

 

dans la cause

 

 

S.I. T.______

représentée par Me Dominique Burger, avocate

 

 

 

contre

 

 

 

 

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT

 



EN FAIT

 

 

1. La S.I. T.________ (ci-après : la S.I.) est propriétaire de l'immeuble sis à l'adresse de sa raison sociale, soumis au régime HLM pour la période de 1981 à fin 2001.

 

2. Par arrêté du 23 juillet 1986, le Conseil d'Etat a approuvé le plan financier et l'état locatif nominatif de l'immeuble, fixant un rendement net à 6,09 % du prix de revient de l'objet, qui se montait à CH 3'417'300.--. La subvention serait versée dès le 1er juillet 1981 et jusqu'au 31 décembre 2001. La différence entre les charges annuelles budgétisées et le coût effectif net de celles-ci constituerait une réserve pour l'exécution des travaux d'entretien.

 

3. A la demande de la S.I., l'état locatif a été régulièrement augmenté, compte tenu en particulier de la baisse progressive de la subvention et de la hausse des charges d'exploitation. En juillet 1997, il a été porté à CHF 300'552.-- et il est resté inchangé depuis.

 

4. Le 1er mars 2000, la S.I. a demandé l'augmentation de l'état locatif à hauteur de CHF 327'179.--, pour tenir compte de l'augmentation du taux des intérêts hypothécaires de 3,75 % à 4,25 % au 1er janvier 2000. Le 13 juillet 2000, l'office cantonal du logement (ci-après : OCL) a refusé l'augmentation de l'état locatif, puis, sur réclamation, confirmé sa décision le 17 octobre 2000. Le 17 novembre 2000, la S.I. a recouru auprès du Tribunal administratif. Cette procédure (cause No A/1237/2000) a fait l'objet d'un arrêt en date du 28 août 2001.

 

5. Dans cet arrêt, le tribunal de céans a procédé à une analyse approfondie des directives établies en 1998 par l'intimé intitulées "Vérification des réserves pour l'entretien; acceptation, limitation ou refus de certaines charges". Il a passé en revue toutes les rubriques des frais courants dont le montant reconnu par l'OCL était contesté par la recourante. Dans ce cadre, le tribunal a établi les points suivants, pertinents pour la présente cause :

 

- L'admission limitée des impôts, dans une fourchette variant de CHF 50.-- à CHF 250.-- par pièce / année n'était pas contestable (art. 24A al. 2 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977; LGL - I 4 05);

 

- Les chiffres retenus par l'intimé pour les comptes de pertes et profits en 1998 et 1999 n'étaient pas critiquables.

 

Enfin, le tribunal a partiellement admis le recours sur la question de l'appréciation des charges comme courantes ou non courantes et de leur prise en considération dans le budget des charges d'exploitation. Ce problème portait à conséquences sur les possibilités réelles d'alimentation de la réserve pour entretien et travaux, et le tribunal a renvoyé la cause à l'intimé afin de fixer à nouveau le budget d'exploitation et l'état locatif pour l'année 2000, en fondant son évaluation des travaux extraordinaires sur des éléments d'analyse plus précis que les comptes de pertes et profits.

 

Sur demande du tribunal, l'OCL a transmis la décision prise le 14 décembre 2001 en application dudit arrêt, qui est conforme au jugement rendu et qui n'a pas été contestée, ainsi que les comptes 2001 de la S.I., qui présentent la situation financière au terme de la période de contrôle.

 

6. Parallèlement à cette procédure, la S.I. a déposé le 14 août 2000 une nouvelle demande d'augmentation de l'état locatif, fondée sur une autre hausse des taux d'intérêts hypothécaires dès le 1er août 2000. L'OCL a rejeté cette demande par décision du 4 octobre. En lieu et place, il a modifié à la baisse le budget des charges d'exploitation pour absorber l'augmentation des taux de 4,25 % à 4,75 %. Par acte du 3 novembre 2002, la S.I. a formé réclamation, et demandé la suspension de l'instruction de la réclamation en attendant droit jugé dans la cause No A/1237/2000. Le 5 juin 2002, la propriétaire a demandé à l'OCL de reprendre la procédure et de statuer par une décision sujette à recours. Le 19 août 2002, l'OCL a rendu une décision sur réclamation confirmant la précédente, contre laquelle la S.I. a interjeté le présent recours au Tribunal administratif par acte du 20 septembre 2002.

 

7. La S.I. a attaqué la décision de l'OCL sur trois points. Tout d'abord, elle a contesté l'appréciation faite par l'OCL de ce qui constitue des travaux importants au sens de l'article 3 alinéa 3 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 (RGL - I 4 05.01), et qui correspond précisément à la rubrique "travaux extraordinaires" des comptes annuels. Selon la propriétaire, ce serait la nature des travaux et non le coût global de la facture qui devait être déterminant. Or, dans la pratique, l'OCL reconnaissait comme travaux extraordinaires toute facture dépassant CHF 1'500.--, ce qui aboutissait à des résultats incohérents. De plus, la S.I. a avancé que l'OCL ne tenait aucun compte des travaux extraordinaires effectivement réalisés pour déterminer le budget des charges d'exploitation.

 

Ensuite, et en conséquence de ce qui précède, le montant de la réserve pour entretien et travaux retenu par l'intimé ne correspondait pas à la réalité. Selon les chiffres retenus par l'OCL, la réserve avait été absorbée au 31 décembre 2000, alors que pour la propriétaire, elle atteignait un résultat négatif de CHF 62'257.-- à un an de la sortie de la période de contrôle. Ainsi, les états locatifs agréés par l'OCL au cours des années n'avaient pas permis d'atteindre l'objectif fixé par ses propres directives en application de l'article 42 alinéa 1 LGL, soit de parvenir à un équilibre de la réserve à la fin du contrôle.

 

Enfin, la S.I. a contesté le refus d'augmenter l'état locatif pour compenser la hausse des taux d'intérêts hypothécaires à 4,75 %. En effet, selon l'arrêt déjà cité, "l'augmentation des intérêts hypothécaires n'est sans incidence sur l'état locatif que si l'on peut prévoir parallèlement une diminution des charges (art. 42 al. 1 LGL)", ce qui en l'espèce n'était pas envisageable selon la recourante.

 

Ces procédés conduisaient à sous-estimer systématiquement les budgets d'exploitation nécessaires et empêchaient de parvenir à un équilibre à la sortie du contrôle. Ils privaient également la propriétaire, pendant la période de contrôle, du rendement prévu par l'arrêté du Conseil d'Etat du 23 juillet 1986. La S.I. a donc conclu à l'annulation de la décision attaquée et à l'augmentation de CHF 8'996.-- de l'état locatif dès le 1er novembre 2000.

 

8. L'OCL est revenu sur la manière de prendre en considération les travaux extraordinaires, en relevant que les moyennes étaient à ce propos fondamentalement aléatoires et de ce fait difficilement appréciables pour la fixation du budget des charges d'exploitation. Il a également relevé qu'au moment de prendre la décision du 4 octobre 2000, aucun travail extraordinaire n'avait été annoncé par la propriétaire.

 

En outre, selon les chiffres retenus par l'OCL, le déficit d'exploitation avait été réduit à CHF 41'158.-- au 31 décembre 1999. Les charges d'exploitation courantes, se montant depuis plusieurs années à environ CHF 90'000.--, un budget pour charges d'exploitation diminué, dès novembre 2000, à CHF 125'710.-- devait encore permettre de réduire substantiellement le déficit de la réserve.

 

L'intimé a enfin relevé que la S.I. propriétaire avait admis toutes les hausses du budget pour les charges d'exploitation consécutives aux baisses du taux des intérêts hypothécaires, mais n'admettait pas les baisses du budget pour les charges d'exploitation consécutives aux hausses de ce taux. Or, vu la marge existant entre les charges budgétisées et la moyenne des charges effectives durant les années précédentes, une hausse des intérêts hypothécaires s'élevant à CHF 8'329.-- pouvait être compensée dans le cadre du budget alloué, sans augmenter l'état locatif.

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2. Le Tribunal administratif a, dans la cause No A/1237/2000, détaillé les raisons pour lesquelles il ne saurait substituer son appréciation à celle de l'intimé, son contrôle se limitant à l'abus ou à l'excès du pouvoir d'appréciation (ATA déjà cité du 28 août 2001).

 

3. L'article 42 alinéa 1 LGL dit que pendant toute la durée du contrôle des loyers, l'état locatif agréé de l'immeuble ne peut être modifié qu'en raison de la diminution légale des prestations de l'Etat et de l'évolution des conditions d'exploitation des immeubles, notamment des variations du taux des intérêts des dettes hypothécaires et du coût des travaux d'entretien et de réparation, sans préjudice des besoins d'alimentation des réserves pour l'entretien.

 

Le présent litige repose sur une estimation jugée insuffisante par la recourante des frais d'exploitation extraordinaires de l'immeuble pour l'an 2000, sur la possibilité concrète de réduire le déficit de la réserve d'entretien, dont le montant est contesté, dans le cadre du budget alloué pour les charges d'exploitation, et finalement sur la non-prise en compte de l'augmentation du taux des intérêts hypothécaires dès le 1er août 2000.

 

4. La propriétaire n'a annoncé aucun travail extraordinaire pour l'année 2000. La moyenne des charges courantes effectives des années précédentes s'est élevée à CHF 90'000.-- environ, selon les chiffres retenus par le tribunal de céans dans son arrêt du 28 août 2001. Lorsque l'intimé a pris sa décision du 4 octobre 2000, l'année était bien avancée et la S.I., dûment consultée, n'a pas allégué de travaux extraordinaires réalisés depuis le début de l'année. Ainsi, le budget alloué pour les charges d'exploitation, qui est fixé à CHF 125'701.--, laisse pour la fin de l'année une marge prévisible de CHF 35'000.-- pour faire face à d'éventuels travaux extraordinaires et réduire le déficit de la réserve d'entretien. Dans ces circonstances, l'intimé n'excède ni n'abuse de son pouvoir d'appréciation dans la prise en considération des travaux extraordinaires pour l'année 2000 en prenant la décision de maintenir le même budget d'exploitation.

 

Les chiffres avancés par la recourante elle-même dans son recours confirment qu'il n'y a pas eu de travaux extraordinaires dans l'immeuble en cause pendant l'année 2000. Selon les critères appliqués par l'intimé, ceux-ci s'étaient montés à CHF 3'688.--, portant les charges effectives totales (courantes et non courantes) pour l'année 2000 à CHF 91'635.--. Ce montant laisse une marge de CHF 34'066.-- par rapport au budget alloué.

 

Il convient donc de confirmer sur ce point la décision sur réclamation du 19 août 2002.

 

5. En ce qui concerne le déficit de la réserve d'entretien, il convient tout d'abord de rappeler que les chiffres retenus par le tribunal de céans dans son arrêt du 28 août 2001 établissent le montant de celle-ci à CHF 41'158.-- au 31 décembre 1999.

 

Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le budget d'exploitation fixé par la décision du 4 octobre 2000 laisse la possibilité de réduire de manière importante le déficit de la réserve d'entretien au 31 décembre 2000.

 

C'est le lieu de relever que les chiffres avancés par la recourante, dans les pièces versées au dossier, font figurer dans les charges d'exploitation la totalité des impôts payés sur l'immeuble, ainsi que différents postes écartés par l'OCL. L'arrêt du tribunal de céans était pourtant sans ambiguïté sur ces points, et il faut donc constater que les calculs de la S.I. sont faussés de ce fait, notamment en ce qui concerne le montant de la réserve d'entretien.

 

Enfin, bien que cet élément n'ait pas été connu au moment où la décision litigieuse a été prise, on peut encore relever que les comptes 2000, tels qu'admis à juste titre par l'intimé, font apparaître un montant positif de la réserve d'entretien à CHF 2'672.--.

 

La décision de l'OCL n'est donc pas attaquable pour excès ou abus du pouvoir d'application à propos de la reconstitution de la réserve pour entretien.

 

6. L'arrêt du 28 août 2001 déjà cité relève que "l'augmentation du taux des intérêts hypothécaires n'est sans incidence sur l'état locatif que si l'on peut prévoir parallèlement une diminution des charges (art. 42 al. 1 LGL)". Il faut donc, en l'espèce, évaluer si la hausse de ce taux de 4,25 % à 4,75 % au 1er août 2000 pouvait être absorbée par une diminution équivalente des charges.

 

Selon la demande présentée par la recourante à l'OCL, l'augmentation du taux d'intérêts hypothécaires relevait les charges annuelles de CHF 8'329.--. Comme les chiffres retenus le montrent clairement, le budget pour les charges d'exploitation fixé pour l'année 2000 à CHF 125'701.-- était assez large pour permettre, une fois assurées la couverture des charges effectives et la reconstitution de la réserve pour entretien, de compenser l'augmentation des charges hypothécaires au 1er août 2000 à hauteur de CHF 8'329.--. Ce faisant, l'OCL n'a donc pas excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation et sur ce point également, la décision doit être confirmée.

 

7. Le recours sera donc rejeté.

 

Un émolument de CHF 1'500.-- sera mis à la charge de la recourante.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 20 septembre 2002 par la S.I. T.______ contre la décision de l'Office cantonal du logement du 19 août 2002;

 

au fond :

 

le rejette ;

 

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 1'500.-;

communique le présent arrêt à Me Dominique Burger, avocate de la recourante, ainsi qu'à l'Office cantonal du logement.

 


Siégeants : M. Paychère, président, MM. Thélin, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni et Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la secrétaire-juriste : le vice-président :

 

E. Boillat F. Paychère

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

N. Mega