Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/586/2000

ATA/672/2000 du 07.11.2000 ( CE ) , REJETE

Descripteurs : AMENAGEMENT DU TERRITOIRE; PLAN D'AFFECTATION; CE
Normes : LAT.33 al.3 litt.b; LAT.35 al.1 litt.b; LAT.36
Résumé : Abrogation d'un plan d'aménagement datant de 1967. Les plans d'affectation adoptés avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1980, de la LAT, ont commencé leur validité puisqu'au moment de l'approbation par l'autorité compétente des plans établis selon cette loi (art.35 al.3 LAT), mais au plus tard durant huit ans, soit jusqu'au 1er janvier 1988 (35 al.1 litt.b LAT). Au-delà de cette date, ils ont perdu leur validité en ce qui concerne le territoire destiné à la construction (ATF 120 Ia 227 consid. 2c p. 233), et les périmètres qu'ils couvraient se trouvent dès lors régis par d'éventuelles "mesures introductives" (art.36 LAT; ATF 118 Ib 38 consid. 4a p.44), mais surtout par la LAT et par les plans directeurs cantonaux, qui ont force obligatoire pour les autorités (9 al.1 LAT). Changement de jurisprudence car jusqu'à présent le TA avais admis que les plans d'affectation adoptés avant l'entrée en vigueur de la LAT restaient valables si leur procédure d'adoption respectait celle mise en place par la LAT.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 7 novembre 2000

 

 

 

dans la cause

 

 

Messieurs M. et S.

représentés par Me Jean-Pierre Carera, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

CONSEIL D'ETAT

 



EN FAIT

 

 

1. Messieurs M. et S. sont propriétaires des parcelles n° 939, 940 et 941, feuille ... du cadastre de la commune de Genève, section Plainpalais. Ces parcelles s'inscrivent dans le cadre d'un plan d'aménagement n° 25874-66 adopté par le Conseil d'Etat en 1967, qui prévoyait la construction sur sept étages d'une barre d'immeubles en "L", dont la base bordait la rue de Carouge et la verticale la rue Jean-Violette sur toute sa longueur.

 

Durant les années 1970 et 1980, les trois quart du plan ont été concrétisés, mais des immeubles des anciens faubourgs de Plainpalais, construits entre 1830 et 1850, n'ont pas encore fait l'objet des démolitions prévues par le plan n° 25874-66, et subsistent sur la dernière partie de la rue Jean-Violette (n° 16 à 20), jusqu'à l'axe perpendiculaire de la rue Prévost-Martin.

 

En outre, le plan n° 25874-66 prévoyait des constructions basses au pied des nouveaux immeubles de la rue Jean-Violette, côté cour, ce qui supposait, semble-t-il par inadvertance, la destruction d'un bâtiment n° E 545, partie de la Villa Freundler actuellement dévolue à l'Institut d'études sociales et classé par arrêté du Conseil d'Etat du 30 décembre 1921. Ces constructions basses n'ont pas vu le jour.

 

2. Un projet de plan localisé de quartier n° 28576 a été mis à l'enquête publique en décembre 1993. Il s'écartait du plan n° 25874-66 par le maintien du bâtiment n° E 545. Les associations et habitants du quartier ont réuni 3'500 signatures afin de s'opposer à ce projet, lui reprochant le surdimensionnement des immeubles prévus. Il a dès lors été mis en suspens par le département des travaux publics et de l'énergie (devenu depuis lors le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, ci-après: DAEL).

 

3. Un autre projet de PLQ n° 28741-661 a vu le jour en juillet 1995, prévoyant la construction d'immeubles de quatre étages sur rez dans le prolongement des immeubles de sept étages existants, ainsi que le maintien du bâtiment n° E 545. Ce nouveau projet s'est vu opposer une pétition des habitants et associations du quartier, réunissant 3'800 signatures, et demandant la conservation de l'ensemble des anciens immeubles sis des deux côtés de la rue Jean-Violette.

 

Suite à cela, le conseil municipal de la Ville de Genève a décidé en décembre 1995 de s'opposer au projet de PLQ n° 28741-661 et de faire les démarches en vue de l'élaboration d'un plan de site.

 

4. A l'occasion d'une demande de démolition et d'autorisation de construire présentée en septembre 1997 par les propriétaires des anciens immeubles sis de l'autre côté de la rue Jean-Violette, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après: CMNS) a délivré un préavis défavorable en janvier 1998.

 

Elle a relevé notamment, sur le plan historique, que le secteur considéré était occupé au 18ème siècle par des propriétés constituées progressivement sur l'axe Genève-Carouge, dont la villa Freundler. Dès les années 1830, le développement urbain avait entraîné l'apparition d'un axe perpendiculaire (l'actuelle rue Jean-Violette) à la rue de Carouge et l'édification de plusieurs bâtiments mitoyens, terminés vers 1850. Il n'en restait aujourd'hui que les immeubles situés au bout de la rue Jean-Violette, à proximité de la rue Prévost-Martin. Leur localisation dans un quartier entièrement restructuré au début du 20ème siècle, puis durant les années 1960-1970, mettait en exergue leur ancienneté, l'intérêt du bâti d'origine ainsi que la persistance du tracé des rues anciennes. Le maintien de ces immeubles formant le "goulet" de la rue Jean-Violette pourrait figurer parmi les éléments principaux d'un éventuel plan de site.

 

Les demandes susmentionnées ont été refusées par le DAEL en septembre 1998.

 

5. De leur côté, Messieurs M. et S. ont déposé en mai 1998 une demande préalable de démolition-construction s'agissant du périmètre dont ils sont propriétaires.

 

La Ville de Genève, la CMNS et la commission d'urbanisme du DAEL ont préavisé négativement cette requête. La commission d'urbanisme a relevé notamment, en septembre 1998, que le projet impliquait une très forte densité dans un quartier déjà très fortement bâti, ne comportant que peu d'espaces libres et accessibles au public.

 

Cette requête n'a fait l'objet d'aucune décision à ce jour.

 

6. Un projet d'abrogation du plan d'aménagement n° 25874-66 a été mis à l'enquête publique en mai 1999. Messieurs M. et S. ont formulé des observations en contestant ce projet.

 

7. Dans une note du 31 août 1999 concernant la maison de maître classée par l'arrêté du 30 décembre 1921, déjà mentionné, le conservateur des monuments rattaché au DAEL relevait que les études d'aménagement concernant ce secteur visaient à le densifier au cours de l'après-guerre, en y construisant des bâtiments plus hauts, alignés sur les voies de communication existantes, et en prévoyant même la démolition de la maison de maître. Les préoccupations majeures de cette période portaient sur le développement de l'agglomération. C'est dans ce même esprit qu'avaient été édifiés le bâtiment de l'Union scoute internationale, rue du Pré-Jérome, ainsi que l'immeuble réalisé par Caritas en bordure de la rue de Carouge. Malgré les pertes de dégagements qui en étaient résultées pour la maison de maître et sa dépendance, ces deux derniers édifices conservaient entre eux un intéressant rapport d'échelle.

 

8. Le 10 novembre 1999, le Conseil administratif de la Ville de Genève a préavisé favorablement l'abrogation du plan no 25874-66.

 

9. Le 10 février 2000, Messieurs M. et S. ont fait opposition au projet d'abrogation du plan.

 

10. Dite opposition a été rejetée par le Conseil d'Etat le 19 avril 2000, principalement au motif que les conceptions urbanistiques prévalant au moment de l'adoption du plan n° 25874-66 étaient actuellement largement dépassées, ce que prouvaient les échecs subis de façon répétitive durant les années 1990 par tous les projets tendant à poursuivre un aménagement plus ou moins proche de celui visé par ledit plan. Aussi bien les habitants du quartier, que la Ville de Genève ou les différentes commissions consultatives appelées à se prononcer sur ce dossier avaient écarté de telles solutions.

 

11. Par arrêté séparé du même jour, le Conseil d'Etat a abrogé le plan d'aménagement n° 25874-66.

 

12. Messieurs M. et S. ont fait recours 25 mai 2000 contre ces arrêtés en concluant à leur annulation.

 

Il n'y avait pas eu, contrairement aux exigences légales, de modifications sensibles des circonstances permettant de revoir le plan n° 25874-66. En particulier, les échecs des projets de développement du secteur ne constituaient pas de telles modifications des circonstances. Il fallait une transformation sérieuse de la situation, et non pas de simples changements d'avis de la population ou une modification des rapports de force politiques. En outre, les recourants avaient déjà réalisé 75% des constructions prévues par le plan et n'avaient eu de cesse de proposer des solutions permettant de terminer l'aménagement du périmètre.

 

L'argumentation des recourants sera pour le surplus examinée dans la partie en droit ci-après.

 

13. Le Conseil d'Etat a répondu au recours le 29 juin 2000 en s'y opposant. Ses arguments seront examinés en tant que de besoin.

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 56A al. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 35 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - LALAT - L 1 30; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

Les propriétaires des parcelles incluses dans le plan n° 25874-66 ont en outre qualité pour recourir (ATF 111 Ib 9 consid. 3 p. 13).

 

A vu du préavis rendu le 10 novembre 1999 par le Conseil municipal de la ville de Genève, il n'apparaît pas nécessaire d'interpeller cette dernière afin de connaître son point de vue.

 

2. a. Selon l'article 33 alinéa 3 lettre b de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700), les plans d'affectation doivent pouvoir être soumis, sur recours, à une autorité jouissant d'un libre pouvoir d'appréciation. Le Tribunal administratif n'est cependant pas habilité a examiner l'opportunité des mesures d'aménagement dont il a à connaître sur recours (art. 61 al. 2 LPA et 35 LAT; Thierry TANQUEREL, Le contentieux de l'aménagement du territoire, in 3ème journée du droit de la propriété 2000, p. 10). Le tribunal de céans ne peut donc revoir un plan d'affectation que sous l'angle de la légalité, son opportunité n'étant examinée qu'au stade de l'opposition.

 

b. Un PLQ (art. 13 al. 1 let. a LALAT) est un plan d'affectation au sens de l'article 14 LAT (ATF 120 Ib 287 consid. 3 p. 292; 111 Ib consid. 3 p. 13). Bien que mesure très sectorielle d'aménagement, il connaît les mêmes effets juridiques qu'un plan plus général; il est notamment soumis à l'article 21 alinéa 2 LAT selon lequel les plans d'affectation font l'objet des adaptations nécessaires lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées (ATF 111 Ib consid. 3 p. 12). De tels changements de circonstances imposent aux autorités de planification l'obligation d'intervenir, en déployant toutefois les moyens qu'elles jugent les plus opportuns à cet égard.

 

Le tribunal de céans doit donc examiner d'une part une question de droit, à savoir si l'autorité compétente a correctement évalué l'importance des changements de circonstances, et donc son éventuelle obligation d'adapter la planification, et d'autre part, mais seulement sous l'angle de l'abus ou de l'excès du pouvoir d'appréciation, la suite que l'autorité a, cas échéant, donné à cette obligation.

 

3. a. Les plans d'affectation adoptés avant l'entrée en vigueur de la LAT, le 1er janvier 1980, ont conservé leur validité jusqu'au moment de l'approbation par l'autorité compétente des plans établis selon cette loi (art. 35 al. 3 LAT), mais au plus tard durant huit ans, soit jusqu'au 1er janvier 1988 (art. 35 al. 1 let. b LAT). Au-delà de cette date, faute d'une approbation formelle par l'autorité compétente, ils ont perdu leur validité en ce qui concerne le territoire destiné à la construction (ATF 120 Ia 227 consid. 2c p. 233; Département fédéral de justice et police, Étude relative à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 1981, p. 369; AEMISEGGER, KUTTLER, MOOR, RUCH, Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 1999 ad. art. 35 p. 4), et les périmètres qu'ils couvraient se trouvent dès lors régis par d'éventuelles "mesures introductives" (art. 36 LAT; ATF 118 Ib 38 consid. 4a p. 44), mais surtout par la LAT et par les plans directeurs cantonaux, qui ont force obligatoire pour les autorités (art. 9 al. 1 LAT).

 

b. La garantie de la propriété ne signifie pas l'intangibilité des normes de planification auxquelles sont soumis les bien-fonds. Il s'agit plutôt de mettre en balance les intérêts privés à la stabilité des plans, et l'intérêt public à adapter l'aménagement aux changements de circonstances (ATF 123 I 175 consid. 3a p. 182). Plus le plan à modifier est récent, ou plus radicale est son adaptation, plus les motifs justifiant celle-ci doivent être importants (ATF 113 Ia 444 consid. 5b p. 455), ce qui signifie a contrario que la marge de manoeuvre des autorités est plus grande lorsqu'il s'agit d'adapter aux circonstances une planification ancienne.

 

4. a. En l'espèce, il faut constater que le plan d'aménagement n° 25874-66 dont l'intimé a prononcé l'abrogation date de 1967, et qu'il n'a pas été remplacé, depuis l'entrée en vigueur de la LAT, par une autre mesure de planification, pas plus qu'il n'a été formellement approuvé par l'autorité compétente après l'entrée en vigueur de la LAT. Il n'est donc formellement plus valable et les recourants ne peuvent dans cette mesure fonder leur argumentation sur l'article 21 alinéa 1 LAT ni sur le principe de la stabilité de l'aménagement.

 

Toutefois, outre ce principe, c'est plus généralement celui de la sécurité du droit qui confère une certaine pérennité aux mesures relevant de l'aménagement du territoire (ATF 113 Ia 444 consid. 5b p. 455). A cet égard, même si le plan n° 25'874-66 n'a plus de validité formelle depuis le 1er janvier 1988, il faut constater que les autorités compétentes ont pour leur part agi, entre elles, vis-à-vis des recourants et de la population concernée, comme s'il constituait malgré tout une référence pour l'aménagement de ce périmètre, allant jusqu'à le qualifier de PLQ, y compris dans l'arrêté litigieux. C'est en partant de la prémisse de l'inadéquation du plan qu'elles ont à deux reprises tenté de le modifier, se heurtant chaque fois à l'opposition de la population. Et c'est dans la même perspective qu'elles ont enfin décidé de l'abroger. On pourrait au demeurant se demander quelle portée juridique donner à l'abrogation d'un acte qui n'est plus en vigueur. Cette question peut cependant rester indécise, vu l'issue du litige.

 

Même si l'on ne peut admettre en l'occurrence l'existence de droits acquis, dont ne se prévalent du reste pas les recourants, les autorités n'auraient pas pu, sans atteinte aux principes de la sécurité du droit et de la confiance, faire table rase des apparences qu'elles-mêmes ont contribué à établir sur le plan juridique durant onze ans. Elles ne pouvaient donc "adapter" le plan n° 25874-66 sans prendre en considération les intérêts privés en jeu et donc sans procéder, d'une manière semblable à celle imposée par l'article 21 alinéa 1 LAT, à l'examen des circonstances justifiant, cas échéant, de faire primer l'intérêt public. L'article 21 alinéa 1 LAT n'étant pas directement applicable, le Tribunal administratif se contentera en l'espèce de contrôler que l'autorité intimée n'a pas fait un usage abusif de son pouvoir d'appréciation.

 

b. Il résulte des préavis rendus en septembre 1997 et 1998 par la CMNS, respectivement par la commission cantonale d'urbanisme, ainsi que de la note rédigée le 31 août 1999 par le conservateur des monuments, que l'urbanisation de Genève à l'époque de l'adoption du plan n°25874-66 reposait sur une volonté de densifier ce secteur, de telle manière qu'il en résulte aujourd'hui, dans un quartier fortement bâti et ne comportant que peu d'espaces libres accessibles au public, une image très contrastée entre les opérations immobilières réalisées à cette époque, et le tissu persistant des faubourgs du 19ème siècle.

 

Durant les années 1990, l'échec de deux projets de PLQ, en raison notamment de l'opposition marquée de la population locale et de la Ville de Genève, a démontré la difficulté d'envisager la poursuite des constructions à la rue Jean-Violette, en particulier s'agissant de l'édification de grands immeubles.

 

Bien que, à teneur du dossier, l'aménagement futur de ce périmètre soit difficile à percevoir, la conception actuelle en matière d'urbanisation à Genève se tourne vers une densification différenciée des quartiers déjà largement urbanisés, et l'établissement dans les trois premières zones ordinaires (art. 12 al. 2 let. a et al. 3, et art. 18 et ss LALAT) de PLQ limitant les densifications et favorisant la création d'espaces libres (projet de Concept de l'aménagement cantonal, tel qu'approuvé par la commission d'aménagement du canton, déposé le 23 mai 2000 au secrétariat du Grand Conseil, point 2.12, pages 48 et ss).

 

C'est précisément sur ces considérations que s'est basé l'intimé en prenant l'arrêté litigieux. En décrivant, au titre des "modifications sensibles des circonstances", l'évolution du tissu urbain depuis la fin des années 1960 et des conceptions s'y rapportant, et en particulier l'impasse dans laquelle se trouvait toute tentative de poursuivre le développement du secteur Jean-Violette dans une logique proche de celle du plan abrogé, il pouvait sans abuser de son pouvoir d'appréciation considérer que, selon une jurisprudence citée par les recourants, l'intérêt public au maintien des dispositions du plan avait disparu (JdT 1996, p. 438), et ôter formellement à ce dernier les effets qu'il déployait encore éventuellement sous l'angle de la bonne foi.

 

c. Au demeurant, les recourants sont malvenus de soutenir que les conditions justifiant une modification du plan ne sont pas réunies, dès lors qu'ils s'attribuent par ailleurs la paternité du projet de PLQ n° 28741-661 déposé en juillet 1995. Quant au choix de l'intimé d'"adapter" le plan en l'abrogeant, il échappe aux griefs des recourants dans la mesure où ce plan n'avait plus de validité et où, de toute manière, on ne voit pas quelle mesure eût été plus appropriée dans l'immédiat.

 

Les autres griefs soulevés par les recourants doivent également être écartés. Le plan directeur cantonal établit les grandes lignes de l'aménagement et du développement du canton (art. 6 al. 1 et 3 LAT). Ce n'est pas à lui, mais aux plans d'affectation, de fixer dans le détail le mode d'utilisation du sol (art. 14 al. 1 LAT). Les recourants ne peuvent donc être suivis lorsqu'ils soutiennent que l'abrogation d'un plan sectoriel est d'une telle importance qu'elle doit être précédée d'une modification formelle du plan directeur. En réalité, une telle proposition reviendrait à inverser la perspective légale, en faisant du plan directeur une étude de détail pour tout le territoire cantonal.

 

Enfin, les recourants soutiennent la nécessité de procéder à une étude de faisabilité de la rénovation des vieux immeubles dont ils sont propriétaires sur le périmètre du plan, évoquée à plusieurs reprises par les autorités cantonales ou municipales; ils reprochent à la mesure litigieuse de faire fi des besoins de la population relatifs à la construction de logements, et considèrent que le but visé de préservation du bâtiment n° E 545 aurait pu et dû être atteint par une mesure moins incisive que l'abrogation du plan. Rien n'indique cependant quelle forme et quel contenu aura la future planification du périmètre, de sorte que les deux premiers de ces griefs sont prématurés. Le dernier tombe à faux puisque les buts visés par l'abrogation du plan sont d'un ordre beaucoup plus général que celui visant au seul maintien du bâtiment n° E 545.

 

5. a. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

 

b. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 25 mai 2000 par Messieurs M. et S. contre les arrêtés du Conseil d'Etat du 19 avril 2000 rejetant leur opposition et abrogeant le plan d'aménagement n° 25874-66;

 

au fond :

 

le rejette ;

 

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2'000.-;

 

communique le présent arrêt à Me Jean-Pierre Carera, avocat des recourants, ainsi qu'au Conseil d'Etat.

 


Siégeants : M. Schucani, président, M. Thélin, Mme Bovy, M. Paychère, juges, M. Mascotto, juge suppléant.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. : le vice-président :

 

C. Goette Ph. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci