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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/740/2016

ATA/549/2016 du 28.06.2016 ( PRISON ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉCISION ; QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR
Normes : LPA.60 ; RCurabilis.55.al6
Résumé : Le système de courrier critiqué par le recourant est une mesure d'organisation interne et n'est pas sujet à recours. De plus, l'autorité intimée avait donné suite au grief du recourant et le système était en voie d'être modifié afin que les boîtes de réception du courrier se trouvent à l'intérieur des cellules. Enfin, à l'époque déjà, le courrier de l'intéressé n'était plus mis dans une boîte extérieure à sa cellule mais lui était remis en mains propres. Recours irrecevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/740/2016-PRISON ATA/549/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 juin 2016

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Madame Chrystel Nabor, curatrice

contre

OFFICE CANTONAL DE LA DÉTENTION

et

ÉTABLISSEMENT DE CURABILIS

 



EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1978, est détenu à l’établissement de Curabilis. Il fait l’objet d’une mesure de traitement institutionnel en milieu fermé ordonnée le 26 mai 2009 par la chambre d’accusation de Genève, du fait de son irresponsabilité sur le plan pénal, et prolongée depuis lors par le Tribunal d’application des peines et mesures. Il fait par ailleurs l’objet d’une mesure de curatelle de portée générale.

2. Par courrier du 1er mars 2016, mis à la poste le 3 mars 2016, M. A______ a adressé à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) un recours contre une absence de réponse de la direction de Curabilis à la suite de la « mise en demeure » faite par celui-là le 18 février 2016 aux fins que l’établissement modifie le système de distribution du courrier.

La direction avait modifié sa façon de procéder à la distribution du courrier aux détenus. Les correspondances étaient déposées à l’extérieur des cellules dans de simples cartons pliés. Tous les détenus de l’étage avaient accès auxdits cartons. Par erreur, par méchanceté ou par l’effet des maladies mentales dont souffraient certains détenus, il était possible que des courriers soient pris par une personne à qui ils n’étaient pas adressés. Cela risquait de concerner des courriers provenant d’avocats, des tribunaux, de la direction du service médical, voire de la direction de l’office cantonal de la détention (ci-après : OCD) ou du service d’application des peines et mesures.

La direction n’ayant rien entrepris, ni même répondu à sa mise en demeure dans le délai imparti de sept jours, il était contraint d’interjeter recours.

3. Par courrier du 15 mars 2016, la curatrice a ratifié le recours, précisant ne pas s’associer au contenu. Pour le surplus, elle s’en rapportait à justice.

4. Par observations du 29 avril 2016, l’OCD a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

Le consentement de l’autorité de protection de l’adulte n’avait pas été requis pour la conduite du procès. S’agissant d’une condition matérielle de validité de l’acte de recours, celui-ci était irrecevable. M. A______ ne disposait pas de la capacité de discernement qui aurait pu lui permettre d’agir seul. De surcroît, aucune décision n’avait été rendue, l’autorité n’ayant pas l’obligation de statuer, s’agissant d’une mesure organisationnelle.

De surcroît, M. A______ n’avait plus d’intérêt actuel. La direction n’avait pas jugé utile de répondre au courrier de mise en demeure de l’intéressé, étant donné que celui-ci avait été informé oralement du fait que la pose des cartons sur les portes à l’intérieur des cellules était en cours et que, en tous les cas, ayant déchiré le carton sur la porte de sa cellule, le courrier lui était, de fait, remis en mains propres.

Au fond, le recourant alléguait une potentielle mise en danger de la confidentialité des courriers qui lui étaient adressés. Celle-ci n’était pas démontrée. Le recours devait être rejeté.

5. Par correspondance du 14 mai 2016, M. A______ a sollicité une prolongation du délai pour sa réplique, laquelle lui a été accordée.

Par courrier du même jour, il a déposé une « requête d’accès au dossier en respect de l’art. 44 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) » en vue d’obtenir une copie de la déclaration du professeur B ______ auprès de l’établissement Curabilis, faite lors d’une audience de comparution personnelle qui s’était tenue par-devant la chambre administrative le 19 avril 2016.

6. M. A______ ne s’est pas manifesté dans le délai prolongé au 17 juin 2016.

7. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. La chambre de céans examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/1059/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2 et les références citées).

2. a. À teneur de l’art. 60 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a) et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée (let. b).

b. La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/577/2014 du 29 juillet 2014 consid. 5a ; ATA/790/2012 du 20 novembre 2012 ; ATA/281/2012 du 8 mai 2012 ; ATA/5/2009 du 13 janvier 2009 et les références citées).

c. Par ailleurs, un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 138 II 42 consid. 1 ; 137 I 23 consid. 1.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_892/2011 du 17 mars 2012 consid. 1.2 ; 1B_201/2010 du 1er juillet 2010 consid. 2). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; 136 II 101 consid. 1.1).

d. Un acte matériel est défini comme un acte qui n’a pas pour objet de produire un effet juridique, même s’il peut en pratique en produire, notamment s’il met en jeu la responsabilité de l’État (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd. 2012, p. 12 s ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 52 ; cf. également MGC 2007-2008/XI 1 A – 10’926). Les mesures internes, qui organisent l’activité concrète de l’administration, sont assimilables aux actes matériels de celle-ci. Il en résulte qu’elles ne peuvent être attaquées en tant que telles par des recours, qui ne sont en principe ouverts que contre des décisions, voire contre des normes (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 666)

e. Les modalités de réception du courrier et de colis sont prévues dans une directive interne (art. 55 al. 6 du Règlement de l'établissement de Curabilis - RCurabilis - F 1 50.15).

f. En l’espèce, le système de courrier critiqué par le recourant est une mesure d’organisation interne et n’est pas sujet à recours.

De surcroît, l’intimée a indiqué le 29 avril 2016, sans être contredite, qu’il avait été donné suite audit grief et que le système était en voie d’être modifié afin que les boîtes de réception du courrier se trouvent à l’intérieur des cellules.

Enfin, à l’époque déjà, le courrier du recourant n’était plus mis dans une boîte extérieure à sa cellule mais lui était remis en mains propres.

Dans ces circonstances, il s'avère que le recourant ne peut pas se prévaloir d'un intérêt actuel ou digne de protection à recourir et ne dispose en conséquence pas de la qualité pour recourir.

3. Vu ce qui précède, le recours sera déclaré irrecevable.

La question de la capacité d’ester en justice du recourant ainsi que l’accès au document sollicité souffriront en conséquence de demeurer ouvertes.

4. Vu la nature et l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet
1986 - RFPA - E 5 10.03 ; art. 87 LPA) .

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare irrecevable le recours du 1er mars 2016, posté le 3 mars 2016, interjeté par Monsieur A______ contre l’absence de décision de la direction de l’établissement fermé de Curabilis à la suite de sa mise en demeure du 18 février 2016 relative au système de distribution du courrier ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à Madame Chrystel Nabor, curatrice, à l’office cantonal de la détention, ainsi qu'à l’établissement de Curabilis.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :