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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/890/2014

ATA/479/2015 du 19.05.2015 sur JTAPI/842/2014 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/890/2014-LCI ATA/479/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 mai 2015

1ère section

 

dans la cause

Monsieur A______
Madame A______
Monsieur B______
Madame B______
Monsieur C______
Madame D______
E______ SA
F______ SA
représentés par la Régie Zimmermann SA

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 août 2014 (JTAPI/842/2014)


EN FAIT

1) G______ SA a pour but l’étude, la promotion et la réalisation de projets, principalement dans le domaine de l’immobilier. Elle est sise, pour adresse, chez la régie Zimmermann SA (ci-après : la régie).

2) G______ SA (ci-après : la société) est copropriétaire, avec Monsieur H______, de la parcelle n° 1______ sur la commune de Genève (Petit-Saconnex), d’une superficie de 840 m2. Un immeuble de 199 m2, destiné à l’habitation pour plusieurs logements, est sis sur la parcelle, à l’adresse _______.

3) Le 21 juin 2013, lors d’un contrôle, un collaborateur du service de l’inspection des chantiers du département de l’urbanisme, devenu depuis lors l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC ou l’office), dépendant du département de l’urbanisme, devenu depuis le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : le département ou le DALE) a constaté que l’entreprise I______, sous-traitant de l’entreprise 4B Fenêtre, remplaçait les anciennes fenêtres par des fenêtres bois-métal.

4) Par courrier du 28 juin 2013, à la société, l’OAC a ordonné l’arrêt du chantier jusqu’à régularisation de la situation. La société était invitée à faire part de toute remarque.

5) Par réponse du 5 juillet 2013, la régie a précisé qu’aucune demande d’autorisation n’avait été faite au motif que les travaux entraient dans l’entretien courant du bâtiment.

6) Le 30 juillet 2013, l’OAC a confirmé que lesdits travaux n’étaient pas soumis à autorisation de construire. La société était toutefois priée de déclarer immédiatement l’ouverture du chantier, démarche obligatoire pour ce type de travaux.

7) Le 14 août 2013, M. H______ et la société, représentés par la régie, ont informé l’OAC de l’ouverture du chantier.

8) Le 25 février 2014, l’OAC a infligé une amende administrative de CHF 1'000.- à la régie. Le changement des fenêtres avait commencé sans que l’avis d’ouverture du chantier ait été au préalable transmis. Cette manière d’agir ne pouvait être tolérée et devait être sanctionnée. L’amende était payable au moyen d’un bordereau, joint en annexe.

Était jointe une facture du 25 février 2014 adressée à « D______ & A______ et B______ et C______ & F______ SA et E______ SA, pa Régie Zimmermann SA ».

9) Le 24 mars 2014, Monsieur et Madame A______, Monsieur et Madame B______, Monsieur C______, Madame D______, E______ SA et F______ SA (ci-après : les recourants), faisant tous élection de domicile dans les bureaux de la régie, représentés par la même régie, ont fait recours contre la décision du 25 février 2014. Ils ont conclu à ce que le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) dise et constate que la décision précitée était nulle et conséquemment que l’amende de CHF 1'000.- l’était aussi. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé à l’OAC.

Au fond, l’OAC avait erré et s’était adressé aux mauvais destinataires, ce qui ressortait incontestablement de l’extrait du registre foncier.

10) Par réponse du 27 mai 2014, l’OAC a conclu à l’irrecevabilité du recours. Le bulletin de versement, annexé à la décision, contenait, probablement par erreur, mais pour une raison qu’il ne pouvait expliquer, les noms des recourants. La décision du 25 février 2014, que l’office avait infligée à la régie, n’étant pas dirigée à l’encontre des recourants, ceux-ci ne pouvaient se prévaloir de la qualité pour recourir. Subsidiairement, le recours devait être rejeté.

11) Par réplique du 19 juin 2014, les recourants ont persisté dans leurs conclusions.

Au regard de la teneur de la facture et de son bulletin de versement, si l’amende était payée, ils seraient considérés comme responsables d’une infraction auprès notamment du service des débiteurs de l’État et dans les registres informatiques de ce dernier, ce qui serait inadmissible et intolérable. Aucun administré, ni aucune personne un tant soit peu raisonnable n’accepterait d’être reconnue coupable d’une infraction qu’il n’aurait pas commise. Il était patent que ladite amende leur avait été adressée de façon parfaitement infondée et qu’ils avaient donc la qualité pour recourir afin d’éviter que leur nom ne soit injustement sali et qu’ils ne soient considérés, à tort, comme responsables d’une infraction uniquement en raison des errements de l’office.

Le TAPI ne devait pas se laisser duper par « cette surprenante tentative de pirouette juridique ». L’ensemble des courriers, hormis l’amende infligée, avait été adressé uniquement à la société et même pas à M. H______, pourtant copropriétaire. Aucune correspondance n’avait jamais été adressée directement à la régie. Il était donc singulier de prétendre subitement que l’amende aurait été infligée à celle-ci.

12) Par duplique du 14 juillet 2014, l’office a persisté dans ses conclusions. La seule décision contre laquelle un recours pouvait être envisagé était celle qui avait été notifiée à la régie, en date du 25 février 2014. L’office était bien conscient que la facture et le bulletin de versement y relatif avaient été adressés par erreur aux recourants. Il n’en demeurait pas moins que la facture et le bulletin de versement n’étaient que des actes matériels accomplis en exécution de la décision. Les recourants n’avaient pas la qualité pour recourir, n’étant pas destinataires de la décision.

13) Par jugement du 5 août 2014, le TAPI a prononcé un dispositif dont le libellé est le suivant :

« PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare le recours irrecevable, dans la mesure où il n'est pas devenu sans objet ;

cela fait, et en tant que de besoin :

2.             donne acte au DALE de ce qu'il a admis que sa facture et son bulletin de versement du 25 février 2014 ont été libellés par erreur au nom des recourants ;

3.             l'invite, dans cette mesure, à annuler ces actes et à émettre une nouvelle facture et un bulletin de versement à l'adresse de la destinataire de sa décision du 25 février 2014, soit RÉGIE ZIMMERMANN SA ;

4.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 300.-, lequel est couvert par leur avance de frais de CHF 500.-, et ordonne la restitution, en leur faveur, du solde de celle-ci, soit CHF 200.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (18 rue du Mont-Blanc, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

6.             communique le présent jugement à :

a.    Mme D______, M. et Mme A______, M. et Mme B______, M. C______, F______ SA et E______ SA

b.    DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE. »

14) Par recours du 15 septembre 2014, les recourants ont saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Ils ont conclu à l’annulation du jugement du TAPI et à ce qu’il soit dit et constaté que la décision de l’office était nulle, subsidiairement devait être annulée, que conséquemment la chambre administrative dise et constate que l’amende de CHF 1'000.- était nulle, subsidiairement devait être annulée, le tout sous suite de frais et dépens de la première et deuxième instance, comprenant une équitable indemnité valant participation aux honoraires de la régie. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé au TAPI.

Une décision adressée à un mauvais destinataire impliquait la nullité de l’acte. Ils avaient un intérêt direct, concret et digne de protection à ce que leur nom ne soit pas lié à une infraction qu’ils n’avaient jamais commise, contrairement à ce qu’avait retenu de façon surprenante et à tort le TAPI. Ils étaient désignés nommément dans la facture, ce qui impliquait que l’amende leur était, par voie de conséquence, infligée. S’ils n’avaient pas recouru, il était incontestable que tout rappel leur aurait été adressé, voire ultérieurement toute poursuite, et qu’ils avaient donc également pour ce motif un intérêt digne de protection à recourir et, par voie de conséquence, la qualité de partie.

Il n’était pas pertinent que l’office ne puisse pas s’expliquer sur cette situation.

À la lecture du jugement querellé, il ressortait que le TAPI émettait certains doutes quant à son propre raisonnement, dans la mesure où il apportait une justification supplémentaire à sa décision d’irrecevabilité, se prononçant sur le fond du litige, en indiquant que « à supposer même qu’il faille leur reconnaître, comme ils le font valoir, un intérêt à l’obtention de l’annulation de la facture et du bulletin de versement précité, leur recours serait dénué d’objet, dans la mesure où, dans le cadre de la présente procédure, l’office a admis que ces actes avaient été libellés par erreur à leur nom ». Le TAPI avait oublié que si l’office avait reconnu son erreur, c’était uniquement en raison du fait qu’ils avaient déposé un recours contre sa décision injustifiée. Il avait reconnu son erreur, mais n’avait pas retiré formellement sa décision erronée, de sorte que celle-ci devait être déclarée nulle, subsidiairement annulée par le TAPI. Même s’il fallait considérer que le litige, en raison des aveux de l’autorité intimée, était devenu dénué d’objet, à savoir qu’ils n’avaient plus d’intérêt actuel, il n’en demeurait pas moins que le comportement de l’office leur avait causé un préjudice, soit des frais judiciaires et que ceux-ci devaient être mis à sa charge.

15) Par réponse du 20 octobre 2014, l’OAC a conclu au rejet du recours. La seule et unique décision que l’office considérait avoir rendue consistait dans le courrier recommandé adressé à la régie et dans lequel les voies de recours étaient mentionnées. Le bulletin de versement était un simple acte matériel. Aucune voie de recours n’était ouverte contre celui-ci. Les recourants n’avaient aucun intérêt digne de protection à recourir.

L’office se demandait si la présente procédure n’avait pas pour seul et unique but de pallier le manque de réaction de la régie, laquelle n’avait étonnamment pas recouru contre la décision qui lui avait été notifiée et qui, pour ce qui la concernait, était devenue définitive et exécutoire.

16) Par réplique du 29 octobre 2014, les recourants ont persisté dans les termes de leurs précédentes écritures.

17) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) L’art. 57 LPA définit l’objet du recours. Sont susceptibles d’un recours : les décisions finales (let. a), les décisions par lesquelles l’autorité admet ou décline sa compétence (let. b), les décisions incidentes, si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. c) et les lois constitutionnelles, les lois et les règlements du Conseil d’État (let. d).

Le recours n’est pas recevable contre, notamment, les mesures d’exécution des décisions (art. 59 let. b LPA).

3) Le recours porte sur une facture, adressée par erreur aux recourants, laquelle accompagne une décision du 25 février 2014 à l’encontre de la régie.

La décision du 25 février 2014 qui comporte l’amende administrative de CHF 1'000.- a été valablement notifiée à la régie, laquelle n’a pas recouru. Les griefs des recourants à l’égard du bulletin de versement relèvent de l’exécution de la décision. Or, à l’égard de celle-ci, le recours au TAPI était irrecevable, ce que ledit tribunal a, à juste titre, retenu (art. 59 let. b LPA ; ATA/48/2013 du 29 janvier 2013).

4) Les points 2 et 3 du dispositif sont pragmatiques, fondés et en faveur des recourants. Ils ne sont pas contestés.

5) Les recourants concluent à la condamnation du département aux frais et dépens.

La juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments. En règle générale, l’État, les communes et les institutions de droit public ne peuvent se voir imposer de frais de procédure si leurs décisions font l’objet d’un recours (art. 87 al. 1 LPA). La juridiction administrative peut, sur requête, allouer à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA).

En l’espèce, en application de l’art. 87 al. 1 LPA, CHF 500.- seront mis à la charge des recourants qui succombent devant la chambre de céans. Aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 septembre 2014 par Monsieur et Madame A______, Monsieur et Madame  B______, Monsieur C______, Madame  D______, E______ SA et F______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 août 2014 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur et Madame A______, Monsieur et Madame B______-, Monsieur C______, Madame D______, E______ SA et F______ SA, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à la régie Zimmermann SA, mandataire des recourants, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :