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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/857/1996

ATA/441/1997 du 05.08.1997 ( TPE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION; ASCENSEUR; DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS; LOGEMENT DE LUXE; BESOIN PREPONDERANT DE LA POPULATION; POPULATION; TPE
Normes : LDTR.10 al.2
Résumé : Un appartement de 8 pièces avec un loyer annuel de frs 5'000.- la pièce n'est pas un logement répondant aux besoins prépondérants de la population. Un appartement de 8 pièces dont le loyer répond au besoin prépondérant de la population (soit Frs 3'000.- la pièce par an) mais dont les pièces, réparties en enfilade, sont grandes, pourvues de boiseries, munies de cheminées doit être considéré comme un appartement de luxe au sens de l'art. 10 al. 2 LDTR. Partant, le DTPE ne pouvait fixer un loyer maximum après travaux.
En droit

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 5 août 1997

 

 

 

dans la cause

 

 

Madame Laure T.

et

Les consorts H.

représentés par Me Corinne Harari-Nerfin, avocate

 

 

contre

 

COMMISSION DE RECOURS INSTITUEE PAR LA LOI SUR LES

CONSTRUCTIONS ET LES INSTALLATIONS DIVERSES

et

DEPARTEMENT DES TRAVAUX PUBLICS ET DE L'ENERGIE

et

Monsieur Georges-Edouard U.

représenté par Me Benoît Chappuis, avocat


 


EN FAIT

 

 

1. Les consorts H. et Madame Laure T. sont propriétaires d'un immeuble sis au 4, rue Beauregard, respectivement d'un immeuble sis au 2, rue Beauregard, sur les parcelles 4'450, 4'451 et 4'452, feuille 19 de la commune de Genève-Cité.

 

Ces deux immeubles sont classés selon arrêté de classement du Conseil d'Etat du 18 décembre 1923.

 

2. La Fondation L. (qui a depuis lors vendu l'immeuble du 2, rue Beauregard à Mme T.) et les consorts H. ont chargé un architecte de la construction d'un ascenseur permettant de desservir les étages de chacun des deux immeubles.

 

3. L'architecte a sollicité l'autorisation de construire en fournissant au département des travaux publics et de l'énergie (ci-après : le département) les plans d'un ascenseur qui serait installé dans la cour intérieure commune aux deux immeubles, avec une porte ouvrant des deux côtés sur les paliers de chaque étage, au No 2 et au No 4 de la rue Beauregard. L'accès à l'ascenseur se ferait par l'entrée de l'immeuble sis au No 2, et nécessiterait une modification de l'appartement situé au rez-de-chaussée de cet immeuble, en ce sens que l'une des pièces en serait soustraite afin de devenir le hall d'accès de l'ascenseur. Le coût des travaux s'élèverait à environ Frs 250'000.-.

 

4. Cet appartement est occupé par M. et Mme U.. Son loyer annuel est de 42'000.- frs.

 

5. Le 29 novembre 1994, le service de l'habitat rattaché au département a exprimé un préavis favorable aux travaux sur la base d'une dérogation selon l'article 6 alinéa 4 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 22 juin 1989 (ci-après : aLDTR). Il a pour cela pris acte du fait que l'installation de l'ascenseur n'entraînerait d'augmentation de loyer que pour trois des locataires des deux immeubles concernés, à savoir :

 

- Pour M. et Mme Alexandre M. dont l'appartement de huit pièces passerait d'un loyer annuel de Frs 24'000.- à Frs 28'200.-, soit une majoration de 17,5 %.

 

- Pour M. et Mme Olivier V. dont l'appartement de huit pièces passerait d'un loyer annuel de Frs 29'232.- à un loyer de Frs 36'432.-, soit une augmentation de 24,6 %.

 

- Pour M. et Mme Jean-François R. dont l'appartement de huit pièces passerait d'un loyer annuel de Frs 27'000.- à un loyer de Frs 37'200.-, soit une augmentation de 37,77 %.

 

6. Le 8 septembre 1993, la commission des monuments, de la nature et des cites (la CMNS) a préavisé favorablement le projet en soulignant qu'il avait notamment pour aspect positif le fait de desservir deux immeubles par le biais d'un seul ascenseur.

 

7. Par arrêté du 23 janvier 1995, le Conseil d'Etat a délivré l'autorisation spéciale nécessaire lors de l'exécution de travaux dans des immeubles classés.

 

8. Par décision du 31 janvier 1995, publiée le 3 février 1995 dans la feuille d'avis officielle, le département a accordé l'autorisation sollicitée en exigeant notamment, par une condition n° 5,que les propriétaires s'en tiennent aux augmentations de loyer annoncées aux locataires concernés.

 

9. Le 17 février 1995, M. Georges U., locataire de l'appartement sis au rez-de-chaussée du 2, rue Beauregard, dont l'une des pièces serait supprimée, a recouru contre cette autorisation auprès de la commission de recours instituée par la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L/5/1 - ci-après: la commission de recours).

 

10. Entendu en audience le 29 mars 1996 par la commission de recours, M. U. a présenté un contre-projet dans lequel l'accès à l'ascenseur passerait par la porte de service de l'immeuble et en descendant une volée de quatorze marches jusqu'à la cave, où se trouverait la porte d'entrée de l'ascenseur. Cela permettrait d'épargner au rez-de-chaussée la pièce dont l'autre projet devait entraîner la suppression.

 

11. Par décision du 31 mai 1996, la commission de recours a annulé l'autorisation de construire litigieuse en retenant que, sans égard à la question de savoir si les travaux concernés devaient être qualifiés de démolition ou de transformation, ils ne répondaient de toute façon pas aux conditions prévues par les articles 6 alinéas 1 et 2 ou 9 alinéas 1 et 2 aLDTR. Ces travaux n'étaient pas nécessités par des exigences de sécurité ou de salubrité ni commandés par un intérêt public ou général, et avaient au contraire pour incidence la suppression d'une pièce à usage de logement ainsi que d'un cabinet de toilettes attenant.

 

12. Mme T. et les consorts H. ont recouru contre cette décision par acte du 5 juillet 1996. Il fallait considérer l'appartement qu'occupait M. U. comme un appartement de luxe, compte tenu du fait qu'il était également locataire, au 1er sous-sol, d'un appartement de plusieurs pièces et qu'il occupait donc une surface totale de 550 m2 dans l'immeuble du 2, rue Beauregard. On ne pouvait par ailleurs considérer que l'appartement de M. U. entrait dans la catégorie dans laquelle sévissait la pénurie de logement puisqu'il comptait plus de six pièces. Dans ces conditions, la décision litigieuse n'était pas conforme au but poursuivi par la LDTR.

 

13. Dans sa réponse du 9 août 1996, M. U. a soutenu que si la LDTR ne pouvait s'appliquer aux logements de luxe quant à la fixation des loyers, les conditions d'octroi d'une autorisation de transformer ou de démolir s'appliquaient sans restriction quant au type de logement considéré.

 

L'appartement concerné par l'éventuel disparition d'une pièce se situait au rez-de-chaussée et comportait, selon le bail signé par M. U., huit pièces. Néanmoins, des travaux intervenus depuis la signature du bail, soit l'agrandissement de la cuisine, avaient ramené l'appartement à un nombre total de sept pièces.

 

Ce dernier comportait trois vastes pièces donnant sur le boulevard Jacques-Dalcroze et une autre située à l'angle Jacques-Dalcroze/rue de l'Athénée. Les seules autres pièces donnant sur la rue Beauregard étaient, hormis la pièce litigieuse, la cuisine et la salle à manger. Cette dernière pièce ne pouvait pas, à la disparition de l'actuelle chambre à coucher, remplacer celle-ci. Les autres pièces d'habitation donnaient sur l'une des artères des plus bruyantes de Genève. Le but recherché par le législateur de maintenir des logements correspondant aux besoins prépondérants de la population ne pouvait être atteint si la transformation litigieuse devait faire de cet appartement un logement dont toutes les pièces d'habitation étaient soumises à une importante pollution sonore.

 

Quant à l'installation de l'ascenseur, elle impliquerait un parcours tortueux entre la porte d'entrée de l'immeuble et l'ascenseur. Il conviendrait en effet de gravir tout d'abord trois marches, de tourner à gauche, de descendre deux autres marches, de tourner à droite, en longeant un corridor, puis de monter six autres marches. On ne pouvait prétendre qu'un tel parcours apporterait une réelle amélioration pour les habitants des étages supérieurs et pour ceux qui se déplacent difficilement. Au surplus, l'article 6 alinéa 3 de la loi instituant des mesures en faveur des personnes handicapées dans le domaine de la construction (recte: article 6 alinéa 2 du règlement instituant des mesures en faveur des handicapés dans le domaine de la construction, du 7 décembre 1992 - L/4/4,5) prescrivait que la profondeur du dégagement devant les portes d'ascenseur ne devait pas être inférieure à 1m40.

 

14. Dans ses observations du 13 août 1996, le département a rappelé que la qualification donnée aux travaux projetés n'était pas sans incidence sur le plan juridique, dans la mesure où les travaux de transformation, dont il s'agissait en l'occurrence, bénéficiaient d'un régime d'autorisation avant l'entrée en vigueur de la LDTR du 25 janvier 1996, alors que les travaux de démolition restaient soumis au régime traditionnel de la dérogation.

 

15. Le 14 mai 1997, lors d'un transport sur place, le juge délégué a visité l'appartement de M. U. ainsi que les locaux situés à l'entresol. Il s'est également rendu à la cave. Les observations faites à cette occasion ont confirmé la situation décrite par les parties. Le juge délégué s'est également rendu au 4, rue Beauregard, dans l'appartement de M. M.. Il s'agit d'un logement de huit pièces pour une surface totale de 280 m2. Trois grandes pièces, donnant sur un balcon, sont en enfilade, et comptent chacune entre 35 et 40 m2. La plupart des pièces sont pourvues de grands placards datant comme l'immeuble de la fin du 18ème siècle, dont les moulures et les motifs floraux sont d'origine. La hauteur des plafonds est de 3,40 mètres. L'appartement compte quatre cheminées en marbre.

 

 

 

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 8 al. ch. 108 de la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits du 29 mai 1970 - LTA - E 5 05; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2. Les dispositions de la LDTR dans sa version du 25 janvier 1996 s'appliquent dès son entrée en vigueur aux demandes d'autorisation qui font l'objet de procédures pendantes devant le Tribunal administratif (art. 50 al. 2 LDTR).

 

3. Dans deux arrêts rendus le même jour (ATA du 8 avril 1997 en les causes SI T. et SI D.), le tribunal de céans a rappelé la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle il n'est pas possible d'étendre l'interdiction de transformer à des logements dont la conservation ne répond pas à l'intérêt public de lutte contre la pénurie de logements (ATF 105 Ia 362 consid. 5 p. 367), principe également souligné, en matière de législation sur la démolition et la transformation de locaux d'habitation, par le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, selon lequel une mesure restreignant la garantie de la propriété n'est pas conforme notamment au principe de la proportionnalité lorsqu'elle ne permet pas de lutter effectivement contre la pénurie de logements (arrêt du Tribunal administratif du 23 mai 1990 en la cause K., in Revue de jurisprudence neuchâteloise 1990 p.256).

 

Dans ces deux arrêts, le tribunal de céans a également eu l'occasion de rappeler qu'il fallait entendre, par logements répondant par leur genre ou leur loyer aux besoins prépondérants de la population, au sens de l'article 6 alinéa 2 et de l'article 9 alinéa 2 LDTR, les logements dont le loyer par pièce et par année ne dépassait pas Frs 3'225.-, voire Frs 3'500.- dans des circonstances particulières, ou ceux qui entrent dans la catégorie de logements dans laquelle règne la pénurie au sens de l'article 25 LDTR et qui ne sont pas des logements de luxe.

 

Les logements qui ne répondent pas à ces critères ne peuvent faire l'objet d'un refus d'autorisation de transformer ou de dérogation de démolir sous l'angle de la LDTR.

 

Dans un tel cas, la question de la distinction entre démolition et transformation peut souffrir de rester indécise.

 

4. a. Selon l'article 9 alinéa 1 LDTR, une autorisation est nécessaire pour toute transformation au sens de l'article 3 alinéa 1. L'autorisation doit être accordée lorsque les travaux poursuivent certains objectifs définis par la loi, par exemple lorsqu'il s'agit de remédier à un danger que l'état du bâtiment fait courir pour la sécurité et la santé de ses habitants ou des tiers (art. 9 al. 1 let. a LDTR), ou lorsque ces travaux répondent à une nécessité (art. 9 al. 1 let. d LDTR). Le département accorde l'autorisation si les logements transformés répondent quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population (art. 9 al. 2 LDTR).

 

Il se dégage de la lecture de l'article 9 alinéa 1 LDTR, mais également du passage d'un régime de dérogation au nouveau régime d'autorisation instauré par la loi, que lorsque les travaux de transformation poursuivent des buts différents de ceux recensés par cette disposition, le département n'est plus tenu de délivrer l'autorisation, mais conserve toutefois la faculté de le faire en application de la pesée des intérêts, la condition supplémentaire de l'article 9 alinéa 2 demeurant réservée.

 

b. L'installation de l'ascenseur est une transformation au sens de l'article 3 alinéa 1 lettre c LDTR. Si le département n'était pas tenu d'accorder l'autorisation sollicitée, aucun des cas de transformation visés par l'article 9 alinéa 1 lettre a) à e) LDTR n'étant réalisé, il restait en revanche habilité à délivrer cette autorisation.

 

La condition supplémentaire fixée par l'article 9 alinéa 2 LDTR sera examinée ci-après.

 

5. a. Par arrêté du 10 mars 1997, publié dans la feuille d'avis officielle du 14 mars 1997, le Conseil d'Etat a classé les appartements de deux pièces et demi à six pièces inclusivement dans la catégorie de logements où sévit la pénurie. Cet arrêté est valable une année (art. 11 al. 1 du règlement d'application de la LDTR du 29 avril 1996 - RLDTR - L/5/9,5).

 

b. S'agissant de l'appartement de l'intimé, il comporte huit pièces selon le contrat de bail (sept pièces selon l'intimé) et son loyer annuel est de Frs 42'000.-, soit plus de Frs 5'000.- par pièce et par année. Il ne correspond donc ni par son genre ni par son loyer aux besoins prépondérants de la population, de sorte que, conformément aux principes rappelés ci-avant, on ne saurait, s'agissant de transformation ou de démolition, interdire les travaux qui y sont prévus.

 

c. L'intimé soutient qu'un projet différent, soit la variante dans laquelle l'accès à l'ascenseur se ferait par la cave, aurait permis d'épargner la pièce de son appartement qui sera supprimée et aurait donc mieux respecté le principe de la proportionnalité. Cette variante ne soutient toutefois pas la comparaison avec le projet autorisé par le département, puisque le fait de prendre l'ascenseur ou de le quitter impliquerait de passer par une volée de plus d'une dizaine de marches en pente raide, ce qui annule ou réduit l'utilité d'une telle installation pour les habitants du premier et du deuxième étage dans les deux immeubles concernés. Même si le parcours prévu pour accéder à l'ascenseur dans le projet litigieux semble tortueux, il reste nettement préférable à la solution prônée par M. U.. Quant aux dispositions citées par celui-ci, s'agissant des mesures en faveur des handicapés, qui impliquent notamment que la profondeur du dégagement devant les portes d'ascenseur ne soit pas inférieure à 1m40, elles ne s'appliquent qu'aux nouveaux immeubles et aux bâtiments faisant l'objet de transformations importantes (art. 1 al. 1 et 2 du règlement concernant les mesures en faveur des personnes handicapées dans le domaine de la construction). Ces dispositions ne trouvent donc pas application en l'espèce.

 

6. a. S'agissant de la condition fixée par l'article 9 alinéa 2 LDTR, il convient d'observer qu'elle doit en principe entraîner l'interdiction de transformer lorsqu'après travaux, les logements concernés ne correspondraient plus, par leur genre, leur loyer ou leur prix aux besoins prépondérants de la population.

 

b. Cette condition ne s'applique cependant pas dans certaines situations. L'article 10 alinéa 2 lettre b LDTR prévoit en effet que le département doit renoncer à fixer les loyers après travaux notamment lorsque les logements à transformer sont de luxe. Il découle logiquement de cette règle que les loyers restent librement fixés par le propriétaire, sous réserve des dispositions de droit civil. Le fait qu'ils ne correspondent cas échéant plus après travaux, sous cet angle, aux besoins prépondérants de la population, ne saurait donc constituer un obstacle à l'autorisation malgré l'article 9 alinéa 2 LDTR (ATF 116 Ia 401 consid. 11 p. 418).

 

c. La LDTR et son règlement d'exécution ne donnent pas de définition de la notion d'appartement de luxe.

 

Cette notion telle que l'ont définie la jurisprudence et la doctrine (SJ 1979 p. 571; David LACHAT, Jacques M., Le nouveau droit du bail, Lausanne 1992, p. 56 s.) fait référence à différents critères tels que le nombre de pièces (au moins 6), la surface inhabituellement grande des pièces, et la présence d'éléments donnant une impression générale de somptuosité ou de confort extraordinaire. Un logement ancien peut être luxueux s'il a été conçu comme tel et qu'il est correctement entretenu.

d. En l'espèce, l'appartement occupé par M. et Mme M. a un loyer actuel de frs 24'000.- par année et correspond donc sous cet angle aux besoins prépondérants de la population. Son nouveau loyer annuel de frs 28'000 (soit frs 3'500.- par pièce et par année) dépasserait la limite fixée par la jurisprudence (ATA du 7 décembre 1993 en la cause SI Moïse-Duboule 19-21, SJ 1994 p. 225) et ne correspondrait plus à ces besoins.

 

Le transport sur place effectué par le juge délégué a néanmoins permis de constater que ce logement de huit pièces réparties sur 280 m2 donnait dès le premier abord le sentiment d'un logement exceptionnel. La répartition en enfilade de plusieurs pièces de dimensions importantes, pourvues de boiseries bien entretenues de la fin du 18ème siècle, la hauteur des plafonds accentuant l'impression de volume des lieux, la présence de plusieurs cheminées de marbre, confèrent à cet appartement un caractère luxueux.

 

Conformément à ce qui précède, l'article 9 alinéa 2 LDTR ne saurait trouver application dans ce cas, de sorte que le département pouvait autoriser les travaux quand bien même le loyer de cet appartement s'élèvera au-dessus de la limite prescrite par la jurisprudence.

 

e. Enfin, les appartements des deux immeubles étant tous équivalents à celui de M. M. et devant être qualifiés de logements de luxe, le département ne pouvait, même si les recourants étaient prêts à s'y soumettre, fixer un loyer maximum après travaux (art. 10 al. 2 let. b LDTR). La condition n° 5 de la décision qu'il a rendue le 31 janvier 1995 est contraire au texte de la loi et doit donc être annulée.

 

7. Le recours sera partiellement admis en ce sens que la décision de la commission de recours doit être annulée, sans toutefois qu'il soit possible de confirmer la décision du département dans son ensemble.

 

Un émolument de 2'000.- Frs sera mis à la charge de M. U..

 

Une indemnité de procédure de 2'000.- Frs sera allouée aux recourants à la charge de M. U..

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 5 juillet 1996 par Madame Laure T. et les consorts H. contre la décision de la commission de recours instituée par la loi sur les constructions et les installations diverses du 31 mai 1996;

 

au fond :

 

l'admet partiellement;

 

annule la décision rendue le 31 mai 1996 par la commission de recours instituée par la loi sur les constructions et les installations diverses et rétablit la décision du département des travaux publics et de l'énergie du 31 janvier 1995, hormis la condition n° 5 qui est annulée;

 

met à la charge de Monsieur Georges-Edouard U. un émolument de 2'000.- Frs;

alloue à Madame Laure T. et aux Consorts H. une indemnité de procédure de 2'000.- Frs à la charge de Monsieur Georges-Edouard U..

 

communique le présent arrêt à Me Corinne Harari-Nerfin, avocate des recourants, ainsi qu'à la commission de recours instituée par la loi sur les constructions et les installations diverses, au département des travaux publics et de l'énergie, et à Me Benoît Chappuis, avocat de l'intimé.

 


Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Schucani, Mme Bonnefemme-Hurni, MM. Thélin, Paychère, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : la présidente :

 

V. Montani L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le p.o. la greffière :

 

Mme J. Rossier-Ischi