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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/617/2000

ATA/408/2001 du 19.06.2001 ( CE ) , ADMIS

Descripteurs : PROTECTION CONTRE LE BRUIT; BRUIT; DEGRE DE SENSIBILITE; ATTRIBUTION; ce
Normes : OPB.19; OPB.43; OPB.43 al.1 litt.c; LPE.7 al.1
Parties : FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE QUARTIER ET D'HABITATIONS / CONSEIL D'ETAT
Résumé : Plan d'attribution des degrés de sensibilité à la VG et aux diverses communes du canton. Dès lors que le CE s'est fondé sur le niveau actuel des nuisances sonores engendrées par le trafic routier plutôt que sur la mixité ou la présence d'autres installations gênantes, on ne se trouve pas en présence de zones mixtes pouvant justifier l'attribution du degré de sensibilité III (art. 43 OPB). Le CE a ainsi abusé de son pouvoir d'appréciation. En principe, le DS II devra être attribué par le CE. Le DS I doit être attribué aux zones d'hôpitaux (Loëx, Belle-Idée), même si les nuisances qu'ils produisent dépassent les db du DS I. Le TA annule les plans d'attribution et renvoie la cause au CE pour nouvelle décision.
En fait
En droit
Par ces motifs

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 19 juin 2001

 

 

 

 

dans la cause

 

 

 

FÉDÉRATION DES ASSOCIATIONS DE QUARTIER ET D'HABITATIONS

 

ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT

 

ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT, SECTION DE GENÈVE

 

SOCIÉTÉ SUISSE POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

 

WORLD WIDE FUND FOR NATURE - WWF SUISSE

 

WWF - WORLD WIDE FUND FOR NATURE

 

 

 

contre

 

 

 

 

CONSEIL D'ÉTAT

 

 



EN FAIT

 

 

1. Du 17 août au 16 octobre 1998, le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : DAL) du canton de Genève a mis à l'enquête publique 45 plans d'attribution des degrés de sensibilité au bruit (ci-après : DS), en application de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (RS 814.41 - ci-après : OPB).

 

Ces plans concernaient chacun l'une des 45 communes du canton.

 

À la même période, le Conseil d'Etat a rendu public un "Plan des mesures d'assainissement du bruit routier selon OPB art 19".

 

Enfin, le DAEL a diffusé au mois d'août 1998 une plaquette d'information concernant le plan d'attribution OPB et le programme d'assainissement du bruit routier.

 

2. Par courrier du 15 octobre 1998, la Fédération des associations de quartier et d'habitations (ci-après : FAQH) a communiqué au DAEL ses observations.

 

Les plans devaient être revus : des DS de degré I (ci-après : DS I, etc.), ils devaient être attribués aux zones de détente et aux établissements hospitaliers, de convalescence et pour personnes âgées; dans les trois premières zones à bâtir, des DS II devaient être attribués aux écoles, des DS II au conservatoire de musique et le DS II, déclassé III aux immeubles d'habitation. Il fallait s'attaquer au trafic routier, source majeure des nuisances sonores.

 

Par courrier du 31 octobre 1998, la Coordination transports (ci-après : CT) a également communiqué au DAEL ses observations.

 

Les plans devaient être revus et les secteurs dévolus à l'habitation mieux protégés : le DS II devait être préféré au DS III, et ce également dans les zones mixtes, qui pouvaient si nécessaire être subdivisées. Les plans devaient également être plus détaillés. Une modification du DS restait toujours possible par le biais d'un plan localisé de quartier. Enfin, le plan OPB devait être coordonné avec les mesures d'assainissement du bruit routier.

 

D'autres associations (l'Union genevoise des piétons, l'Association des Riverains de l'Aéroport de Genève, le Touring Club Suisse, section de Genève, le Groupement Transports et Économie) et plusieurs particuliers ont également adressé au DAEL des observations critiques sur les attributions de DS, jugées trop peu exigeantes, respectivement trop contraignantes.

 

3. Le 18 janvier 1999, le DAEL a répondu à la FAQH et à la CT.

 

L'attribution des DS s'était faite en deux phases successives : une attribution provisoire, fondée sur des éléments objectifs, et une attribution définitive, fondée sur certains éléments d'appréciation. À Genève, la 2e zone à bâtir n'avait pas une vocation exclusivement résidentielle, mais était une zone mixte à laquelle devait être attribué le DS III. Les déclassements rendus possibles par l'article 43 alinéa 2 OPB n'avaient été utilisés qu'avec parcimonie. Les plans d'attribution avaient été conçus à l'échelle des zones d'affectation car il fallait statuer rapidement. Certains sous-périmètres avaient néanmoins été classés en DS II, et d'autres pourraient l'être lors de l'adoption de plans localisés de quartier ou de plans d'affectation spéciaux.

 

Il n'était pas possible d'aller plus loin, à peine de pénaliser les propriétaires d'installations émettant des nuisances supérieures au DS II mais inférieures au DS III; il faudrait plutôt, dans ce cas, modifier le régime des zones. En effet, l'assainissement des installations n'était exigible qu'aux conditions de l'article 13 alinéa 2 lettres a et b OPB, et des allégements pourraient probablement être accordés en application de l'article 14 alinéa 1 lettre a OPB, cette probabilité étant encore plus élevée dans le cas du DS I.

 

4. Du 2 février au 2 avril 1999, les conseils municipaux des 15 communes genevoises suivantes ont délivré un préavis favorable aux projets de plans, sans demander de modification : Anières, Avusy, Carouge, Collonge-Bellerive, Cologny, Confignon, Corsier, Ville de Genève, Hermance, Lancy, Onex, Presinge, Puplinge, Troinex et Veyrier.

 

5. Par courriers distincts du 13 juillet 1999, la CT et, respectivement, les sections genevoises du WWF Fond mondial pour la nature (ci-après : le WWF Genève), de la Société suisse pour la protection de l'environnement (ci-après : SPE Genève), de l'Association transports et environnement (ci-après : ATE Genève), se sont opposés aux plans d'attribution pour les communes de :

 


- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Ville de Genève (plan n° 20010/21-610).

 


Le DS II devait être appliqué aux parties vouées à l'habitation des zones mixtes, le DS II déclassé III aux secteurs bordant les voies de communication principales, le DS II devant néanmoins être attribué à certains sous-périmètres.

 

Par courrier du 15 juillet 1999, la FAQH s'est opposée aux plans d'attribution. Interpellée par la DAEL, la FAQH a précisé le 21 septembre 1999 qu'elle s'opposait aux plans d'attribution pour les 15 communes suivantes :

 


- Anières (plan n° 29010/02-502)

- Avusy (plan n° 29010/04-504)

- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Collonge-Bellerive (plan n° 29010/16-515)

- Cologny (plan n° 29010/17-516)

- Confignon (plan n° 29010/18-517)

- Corsier (plan n° 29010/19-518)

- Hermance (plan n° 29010/25-522)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Presinge (plan n° 29010/35-531)

- Puplinge (plan n° 29010/36-532)

- Troinex (plan n° 29010/42-538)

- Veyrier (plan n° 29010/45-542)

- Ville de Genève (plan n° 29010/21-610).

 


Le projet de plan d'attribution n'était qu'une attribution provisoire, l'attribution définitive intervenant lors de l'adoption des plans d'affectation et des plans localisés de quartier (ci-après : PLQ), et était partant illicite. De plus, les plans n'affectaient nulle part le DS I, ce qui privait les habitants de zones de détente. Or, les établissements hospitaliers, de convalescence et pour personnes âgées devaient à tout le moins bénéficier de ce classement.

 

6. Le 19 octobre 1999, le Service cantonal d'écotoxicologie, sous la plume du chef de la section d'acoustique et de physique environnementales, a communiqué au DAEL que quatre cantons avaient attribué un, voire deux DS I : à un petit biotope, une clinique au bord d'un lac, des établissements de cure et un quartier d'habitations. Aucun assainissement n'avait été prévu. Trois hôpitaux genevois avaient fait l'objet de mesures des niveaux sonores Léq jour dB(A) représentant la charge sonore moyenne : de 49 à 57 pour la maison de Loëx, de 47 à 59 pour l'hôpital psychiatrique de Belle-Idée, et de 49 à 55 pour l'hôpital gériatrique de Belle-Idée. Les bâtiments de thérapie étaient implantés dans des lieux bénéficiant d'un environnement sonore parfaitement calme. Les activités propres à chaque bâtiment (buanderies, cuisines, ventilations) étaient les sources les plus importantes des nuisances sonores, étant précisé que des corrections (de +5 à +22 dB(A)) devraient être opérées pour le calcul des nuisances produite par ces équipements.

 

Le 31 janvier 2000, il a ajouté à propos des plans qu'il ne pouvait donner son avis que sur le principe, sans examiner chaque détail, compte tenu de l'ampleur du territoire concerné. Cela étant, la méthode adoptée pour l'attribution globale des degrés de sensibilité au bruit était conforme aux exigences de l'OPB. Les degrés de sensibilité mis à l'enquête fixaient la charge de bruit admissible pour les parcelles, en respectant les conditions des plans d'affectation, mais en offrant une protection renforcée partout où cela était possible. Le préavis était favorable.

 

7. Par 15 arrêtés distincts du 3 mai 2000, publiés dans la Feuille d'Avis officielle du lundi 8 mai 2000 et portant chacun sur l'une des communes énumérées plus haut (Ch. 4), le Conseil d'État a rejeté toutes les oppositions.

 

L'article 43 OPB énumérait clairement et exhaustivement les DS devant être attribués dans les diverses zones d'affectation prévues par la législation fédérale et cantonale. L'autorité cantonale disposait d'un certain pouvoir d'appréciation pour déterminer à quelles zones cantonales ou communales s'appliquaient les divers DS. Ce pouvoir d'appréciation était toutefois limité par les exemples donnés par l'OPB, laquelle limitait par ailleurs les cas de déclassement aux portions de zones d'affectations de DS I ou II déjà exposées au bruit.

 

L'établissement des plans d'affectation constituait quant à lui un préalable à l'attribution des DS, sur lequel l'autorité devait se fonder, avant d'envisager le cas échéant des déclassements.

 

En l'espèce, le plan d'attribution assignait les DS en fonction des seules zones existantes, lesquelles ne se limitaient pas à une parcelle ou un bâtiment. Il ne pouvait dès lors régler les question de détail. Ces dernières devraient cas échéant être traitées lors de l'adoption des plans localisés de quartier, ou de plans d'affectation spéciaux reposant sur des études de détail extrêmement poussées.

 

Attribuer les DS, bâtiment par bâtiment, comme le préconisaient les recourantes, revenait à miter le territoire de manière incompatible avec la destination globale des zones.

 

Par ailleurs, l'attribution du DS III aux trois premières zones à bâtir du droit genevois était conforme à la jurisprudence fédérale, puisque ces zones n'avaient pas une vocation exclusivement résidentielle. L'attribution ponctuelle du DS II à certains îlots calmes allait quant à elle dans le sens des préoccupations des opposantes.

 

Enfin, il n'était pas prévu en effet d'attribuer de DS I sur le territoire du canton, car ce dernier était réservé aux zones où la protection contre le bruit constituait une caractéristique essentielle. Il devait s'agir d'un cas d'exception, et on ne voyait pas pourquoi les bâtiments hospitaliers devaient bénéficier d'une meilleure protection que la 5e zone résidentielle villas (DS II). À cela s'ajoutait que le DS I ne pouvait objectivement être respecté en raison des nuisances induites par les bâtiments eux-mêmes et des activités propres à la zone urbaine où ils se trouvaient.

 

8. Par 15 arrêtés distincts, également du 3 mai 2000, publiés dans la Feuille d'Avis officielle du lundi 8 mai 2000, le Conseil d'État a ensuite adopté les plans d'attribution du bruit pour chacune des communes énumérées plus haut (Ch. 4), soit les communes de :

 


- Anières (plan n° 29010/02-502)

- Avusy (plan n° 29010/04-504)

- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Collonge-Bellerive (plan n° 29010/16-515)

- Cologny (plan n° 29010/17-516)

- Confignon (plan n° 29010/18-517)

- Corsier (plan n° 29010/19-518)

- Hermance (plan n° 29010/25-522)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Presinge (plan n° 29010/35-531)

- Puplinge (plan n° 29010/36-532)

- Troinex (plan n° 29010/42-538)

- Veyrier (plan n° 29010/45-542)

- Ville de Genève (plan n° 29010/21-610).

 


9. Par actes déposés au greffe du Tribunal administratif le 5, respectivement le 7 juin 2000, la FAQH (premier recours), respectivement l'ATE Genève, la SPE Genève et le WWF Genève ¾ ainsi que, pour ces trois dernières, leurs associations faîtières suisses ¾ (deuxième recours) ont recouru contre les arrêtés rejetant leurs oppositions.

 

Selon la FAQH, contrairement à ce qu'affirmait le Conseil d'Etat, l'attribution des DS n'était pas provisoire. En renonçant à attribuer le DS I aux établissements hospitaliers peu exposés au bruit, le Conseil d'Etat avait procédé à un déclassement illicite. Les nuisances générées par les établissements eux-mêmes n'avaient pas à être prises en compte. Il fallait par principe attribuer le DS II aux écoles, et le DS II déclassé III aux logements.

 

Selon l'ATE, la SPE et le WWF, les critères appliqués par le Conseil d'État étaient contraires aux principes fixés par la législation fédérale. Le DS II correspondait aux zones où prédominait l'habitat, mais aussi, selon la doctrine, à des zones à vocation mixte comprenant des activités non gênantes. L'attribution du DS II ne ferait donc obstacle qu'aux futures activités bruyantes. Le Conseil d'État avait d'ailleurs appliqué partiellement cette suggestion en classant en DS II des quartiers entiers, à la suite des oppositions.

L'attribution exceptionnelle d'un DS III devait donc être préférée à la solution inverse, envisagée par le Conseil d'Etat, et consistant à attribuer exceptionnellement un DS II par le biais d'un plan localisé de quartier. Comme cela avait été réalisé à Berne et Bâle, seules les façades exposées aux principales voies de communication devaient se voir affecter un DS III.

 

10. Le Conseil d'Etat, pour lui le DAEL, s'est opposé aux recours.

 

Dans deux réponses, du 28 septembre 2000, il a exposé que la méthode choisie était conforme à la législation fédérale, qui prévoyait que les atteintes devaient être évaluées isolément, mais aussi collectivement et dans leur action conjointe.

 

La réponse au premier recours expose que le pouvoir d'appréciation de l'autorité était restreint par les exemples donnés par la législation fédérale, et l'attribution du DS III aux zones ordinaires à bâtir 1, 2 et 3 n'avait rien d'arbitraire. Les plans querellés avaient néanmoins pris en compte certaines observations des recourantes, et attribué le DS II à des sous-périmètres de taille relativement importante, développés, définissant en principe un secteur de logements et en situation calme, "c'est-à-dire respectant les valeurs-limites correspondant au DS II selon le cadastre du bruit routier (faute de disposer d'un cadastre du bruit pour les industries, les arts et métiers et d'autres commerces, inexistant). " (p. 6). Cette démarche allait dans le sens d'un renforcement des exigences, chaque fois que cela était possible. Il n'était pas possible d'aller plus loin dans le détail, car l'attribution des DS était fonction des plans de zone, et non des plans localisés de quartier.

Par comparaison, l'attribution de DS à des bâtiments, telle que proposée par les recourantes, était contraire à l'esprit de l'OPB. Le "mitage" proposé par les recourantes bafouait le principe d'attribution générale en fonction des zones existantes. De plus, l'attribution d'un DS II à un îlot dans une zone DS III nécessiterait l'assainissement de tout le quartier. Or, " des allégements - dus à la disproportion des coûts - interviendraient très certainement" (p. 8).

 

S'agissant du DS I, il n'était appliqué que dans des cas exceptionnels. Chaque fois qu'il avait été attribué en Suisse, c'était à des zones ne nécessitant aucun assainissement, ce qui réduisait la portée de l'attribution à une déclaration d'intention. Pour l'hôpital cantonal, situé en plein milieu urbain, le DS I ne pouvait en aucun cas être respecté. Pour les établissements de Loëx, de Thônex et de Belle-Idée, les mesures effectuées donnaient à penser que les valeurs limites étaient dépassées en raison d'activités propres à chaque établissement. L'attribution du DS II, également attribué à la zone villas, paraissait un niveau de protection contre le bruit suffisant.

 

La réponse au second recours reprend ces arguments, et ajoute que de manière générale, la méthode préconisée par les recourantes revient à protéger un seul type d'affectation (l'habitat) contre un seul type de bruit (le bruit routier), en contradiction avec l'esprit de la loi fédérale sur la protection de l'environnement : les atteintes devaient être évaluées isolément et collectivement, et avaient d'autres origines que le trafic routier, comme par exemple les cris des enfants sur une place de jeux. Par ailleurs, l'aménagement du territoire avait pour but de créer et maintenir un milieu bâti harmonieusement aménagé et favorable à l'habitat, mais aussi à l'exercice des activités économiques.

 

Les recourantes faisaient peu de cas de l'affectation des zones décidées par le législateur, qui n'avait pas entendu que le centre ville soit progressivement dépouillé de ses commerces au profit de ses seuls habitants, ainsi que des pénalités qui frappent les entreprises et activités artisanales, dont la présence au centre-ville répondait à un intérêt public non négligeable dont l'autorité devait tenir compte. Or les exigences en matière de détermination du bruit pour les entreprises étaient plus sévères qu'en matière de trafic routier et entraveraient la création d'entreprises nouvelles et imposeraient l'assainissement d'entreprises existantes.

 

L'attribution du DS III ne péjorerait pas la situation en ville, puisque chaque nouvelle construction et chaque modification entraîneraient l'application des valeurs de planification, inférieures aux valeurs limite d'immissions. Quant au respect des valeurs limite du DS III, il était de nature à résoudre une grande partie du contentieux en matière d'équipements, et en matière de trafic automobiles le respect du DS III était déjà très ambitieux compte tenu qu'aux abords de 200 km de routes dans le canton les habitations étaient exposées à plus de 65 dB(A) et sur 30 km à plus de 70 dB(A).

 

Un bordereau de pièces déposé par le DAEL le 28 septembre 2000 contient les plans pour les communes de Genève, Carouge, Lancy et Onex avec l'indication du cadastre du bruit routier, les périmètres décrits par les recourantes, les lieux d'"enseignement" et d'"activités", ainsi qu'une note technique d'où il ressort que sous cette dernière dénomination commune, la nouvelle nomenclature des bâtiments établie par le service du cadastre avait permis de mettre en évidence les entreprises moyennement gênantes, soit les habitations à plusieurs logements avec rez-de-chaussée commercial, les bâtiments industriels ou artisanaux, les bâtiments commerciaux, les entrepôts, les hôtels et restaurants, les autres bâtiments d'activités, la culture, les sports/loisirs, la sécurité, les transports routiers ou urbains, les autres transports, l'administration publique, les organisations internationales et les autres équipements collectifs.

 

11. L'ATE, la SPE et le WWF ont répliqué le 16 novembre 2000.

 

Contrairement à ce qu'affirmait le DAEL, les cantons bénéficiaient d'un large pouvoir d'appréciation dans l'application de l'article 43 alinéa 1 OPB. Le DS II était applicable aux zones mixtes comprenant, à côté des habitations, des activités en relation fonctionnelle avec l'habitat, et même des entreprises faiblement gênantes, et n'était donc pas réservé aux zones résidentielles. Il pouvait également être attribué à des sous-périmètres de zones classées en DS III. Par ailleurs, l'attribution quasi-générale du DS III à la ville était contraire au principe de prévention, car elle laissait une marge avec les niveaux de bruit existants dans des secteurs actuellement calmes et exposait ces derniers à une élévation des niveaux de bruit. Quant aux critères retenus par le DAEL pour établir des sous-périmètres d'attribution du DS II, ils ne devaient pas faire référence aux secteurs de logement, mais à tout périmètre sans activités incommodantes. Le DAEL avait d'ailleurs admis l'attribution du DS II au quartier de Vieusseux, qui comportait une imprimerie et un accordeur de pianos, mais le refusait à d'autres quartiers aux activités similaires. Il fallait donc réétudier l'attribution des DS II aux quartiers suivants : secteurs 1 à 17 de la Ville de Genève, secteurs 1 à 7 de la Ville de Carouge, secteurs 1 à 4 de la Ville de Lancy, secteurs 1 à 3 de la Ville d'Onex. Il faudrait également tenir compte des plans de modération de la circulation à l'étude pour plusieurs quartiers.

La FAQH a répliqué le 30 novembre 2000. Le DAEL critiquait le "mitage", mais sa suggestion de corriger ultérieurement les DS par des plans d'affectation aboutissait au même résultat. La FAQH pourrait se contenter d'une inscription des écoles et des autres périmètres particuliers dans les légendes des plans. Contrairement à ce qu'affirmait le Conseil d'État, il était possible d'attribuer le DS I aux maisons de retraite et aux établissements hospitaliers, car les nuisances qu'ils produisaient n'avaient pas à être prises en compte.

12. Le Conseil d'État, pour lui le DAEL, a dupliqué le 12 janvier 2001.

 

Dans un arrêt du 25 mai 1994, le Tribunal fédéral avait exposé la démarche à suivre lors de l'attribution des DS, et le Conseil d'État avait précisément distingué dans les légendes des plans les attributions de DS II déclassé III des attributions de DS II, respectivement III. Les recourants devaient démontrer en quoi la méthode choisie par le Conseil d'Etat était arbitraire, et le contrôle exercé par le Tribunal administratif était également limité sous cet angle.

 

L'autorité ne s'était pas livrée à un acte de planification, les zones adoptées par le Grand Conseil devant rester autant que possible conformes à la volonté de celui-ci. "Les plans querellés, fondés sur l'article 15 alinéa 3 LALPE, ne sauraient remettre en cause le bien-fondé des zones existantes, mais visent pour l'essentiel à répondre au délai fixé par l'OPB pour l'attribution des DS" (duplique au deuxième recours, p. 5). Il n'était pas possible de suivre les recourants quand ils proposaient d'étendre la caractéristique de "secteur de logements" - condition pour la création d'une subdivision DS II - à toutes les activités faiblement gênantes, car il n'existait pas de cadastre du bruit pour les activités suffisamment précis.

 

En tout état, il ne fallait pas craindre de reformatio in peius si l'un des secteurs venait à faire l'objet d'un plan d'affectation de détail.

 

13. L'affaire a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Compte tenu qu'elles se rapportent à une situation presque identique, les deux procédures (n° A/617/2000 et A/628/2000) seront jointes en application de l'article 70 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

 

2. Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables à la forme (art. 35 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - L 1 30 - LALAT; art. 17 de la loi d'application de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 2 octobre 1997 - K 1 70 - LALPE; art. 63 LPA). En effet, les six associations recourantes sont toutes des associations d'importance au moins cantonale et actives depuis plus de trois ans lesquelles, aux termes de leurs statuts, se vouent par pur idéal à l'étude de questions relatives à l'aménagement du territoire, à la protection de l'environnement ou à la protection des monuments, de la nature ou des sites, ainsi que l'exige l'article 17 LALPE.

 

3. En matière d'attribution par l'autorité cantonale des degrés de sensibilité au bruit, le Tribunal fédéral, statuant sur recours de droit administratif, a limité son pouvoir d'examen à l'excès ou l'abus, par l'autorité cantonale, de son pouvoir d'appréciation (ATF 115 Ib 347 JdT 1991 I 470 c. 2e; ATF non publié du 25 mai 1994 dans la cause 1A.249/1992 Société coopérative de constructions urbaines contre Conseil d'État de Genève, c. 3c/bb).

 

C'est également sous cet angle que le tribunal de céans examinera les plans contestés.

 

Sous l'angle de l'abus du pouvoir d'appréciation, il convient d'examiner s'il était soutenable au regard de l'article 43 OPB d'attribuer par principe - et moyennant quelques dérogations - le DS III plutôt que le DS II aux quatre premières zones constructibles, et de renoncer à attribuer le DS I aux hôpitaux et maisons de convalescence.

 

Le tribunal de céans n'ignore pas l'arrêt de 1994 dans lequel le Tribunal fédéral avait jugé que le Conseil d'État genevois n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation en assimilant la 2e zone à bâtir à une zone mixte selon l'article 43 alinéa 1 lettre c OPB (ATF du 25 mai 1994 Société Coopérative de Constructions urbaines, cité, c. 4, p. 19).

 

La situation a toutefois notablement évolué depuis : le tissu urbain s'est modifié, la sensibilité au bruit s'est accrue, les nuisances sonores se sont aggravées, un cadastre du bruit routier a été établi et un plan de mesures pour lutter contre ce bruit a été adopté par les autorités. Surtout, contrairement aux précédentes espèces qui ont occupé les tribunaux, et qui portaient sur des attributions au cas par cas et pour des plans déterminés ou des attributions provisoires (cf. ATF 117 Ib 285 JdT 1993 I 478 consid. 8b/aa; ATF 117 Ib 475 JdT 1993 I 485 consid. 9; ATF Société coopérative cité), les plans querellés dans la présente espèce attribuent durablement des degrés de sensibilité à l'ensemble du territoire du canton, soit non seulement à la 2e zone à bâtir, mais aux quatre premières zones à bâtir, à la 5e zone et aux zones industrielles, artisanales et ferroviaires, ainsi qu'aux zones de détente. Ce faisant, ils suivent une méthodologie et se fondent sur des prémisses dont il y a lieu d'examiner tout d'abord le bien fondé.

 

4. La loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) compte parmi ses buts la protection des hommes contre les atteintes nuisibles ou incommodantes (art. 1). Au nombre de ces atteintes figure notamment le bruit (art. 7 al. 1), qui est mesuré au sortir des installations (émissions) et au lieu de ses effets (immissions; art. 7 al. 2). La loi impose la limitation des émissions (art. 11-12) et des immissions (art. 13-15), et prévoit à cet effet l'obligation de procéder à des assainissements (art. 16 & 18), laquelle peut cependant connaître des allégements dans certains cas particuliers (art. 17).

 

La loi édicte encore en matière de bruit des règles complémentaires concernant la fixation de valeurs d'alarme et de planification, l'isolation acoustique des immeubles et les conditions posées à la délivrance d'autorisations de construire et au zonage, ainsi qu'à la construction de nouvelles sources fixes de bruit. Elle dispose que de nouvelles constructions affectées au séjour ne peuvent être édifiées que si les valeurs limite d'émission ne sont pas dépassées (art. 22 al. 1). Symétriquement, elle dispose que de nouvelles zones à bâtir destinées à la construction de logements ne peuvent être prévues qu'en des endroits où les immissions causées par le bruit ne dépassent pas les valeurs de planification (art. 24 al. 1). Elle permet malgré tout la construction lorsque des mesures complémentaires de lutte contre le bruit ont été prises (art. 22 al. 2), et le zonage lorsque des mesures de planification, d'aménagement ou de construction permettent de respecter les valeurs de planification dans la plus grande partie de ces zones (art. 24 al. 2). Enfin, les nouvelles installations fixes ne peuvent être construites que si le bruit qu'elles émettent ne dépasse pas les valeurs de planification dans le voisinage, une exception étant prévue pour les voies de communication, les installations publiques et les installations présentant un intérêt public prépondérant (art. 25).

 

5. L'ordonnance sur la protection contre le bruit et ses annexes déterminent notamment les divers degrés de sensibilité.

 

L'article 43 alinéa 1 OPB dispose l'application des quatre degrés de sensibilité (DS) suivants aux différentes zones d'affectation au sens de l'article 14 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire :

 


- DS I dans les zones qui requièrent une protection accrue contre le bruit, notamment les zones de détente;

 

- DS II dans les zones où aucune entreprise gênante n'est autorisée, notamment dans les zones d'habitation ainsi que dans celles réservées à des constructions et installations publiques;

 

- DS III dans les zones où sont admises des entreprises moyennement gênantes, notamment dans les zones d'habitations et artisanales (zones mixtes) ainsi que dans les zones agricoles;

 

- DS IV dans les zones où sont admises des entreprises fortement gênantes, notamment dans les zones industrielles.

 


La même disposition prévoit la possibilité de déclasser les parties de zones d'affectation de DS I ou II lorsqu'elles sont déjà exposées au bruit (art. 43 al. 2).

 

Les annexes à l'OPB règlent les méthodes de mesure et fixent les valeurs limites d'exposition au bruit du trafic routier (annexe 3), des chemins de fer (annexe 4), des aéroports (annexe 5), de l'industrie, des arts et métiers (annexe 6), des stands de tir (annexe 7) et des aérodromes militaires.

 

6. L'article 44 OPB impartit aux cantons de veiller à ce que les degrés de sensibilité soient attribués aux zones d'affectation dans les règlements de construction ou les plans d'affectation communaux. Les degrés de sensibilité doivent être adoptés lors de l'adoption ou de la modification des zones d'affectation, mais au plus tard dans les dix ans suivant l'entrée en vigueur de l'OPB, soit le 1er avril 1997.

 

L'office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP) a précisé qu'une large marge d'appréciation était laissée aux cantons pour l'attribution des DS I et II pour des zones d'affectation comprenant des territoires déjà exposés au bruit, puisqu'ils pouvaient attribuer à des parties de ces zones d'affectation le degré de sensibilité suivant plus haut. En pratique, cela revenait à élever les limites des valeurs limites d'immissions pour le Lr de 5 dB(A) de jour comme de nuit. C'était la raison pour laquelle la compétence accordée aux cantons par l'article 43 alinéa 2 OPB ne devait être utilisée qu'avec la plus extrême retenue (OFEFP, Commentaire relatif à l'ordonnance sur la protection contre le bruit, Berne, 1992, p. 15).

 

7. Le législateur genevois a réglé l'adaptation du droit fédéral de la protection contre le bruit à l'article 15 LALPE, consacré aux degrés de sensibilité, et qui dispose que :

 


1  Les degrés de sensibilité au sens de l'article 43 de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit sont attribués par les plans d'affectation du sol prévus par les articles 12 et 13 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, en particulier les plans de zone et les plans localisés de quartier.

 

2  Les degrés de sensibilité attribués par un plan de zone peuvent être adaptés dans le cadre d'un autre plan d'affectation du sol au sens de l'article 13 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, portant sur tout ou partie du même périmètre, en fonction des solutions constructives retenues.

 

3  Lorsque le degré de sensibilité d'une parcelle ou d'un terrain n'a pas été fixé par un plan d'affectation du sol, le Conseil d'Etat peut attribuer un degré de sensibilité par un plan d'affectation spécial visant cet objectif. L'article 5 de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités est applicable par analogie

 


8. Les quatre zones auxquelles se réfère l'article 43 OPB ne coïncident pas avec les zones du droit fédéral, et encore moins avec celles du droit genevois. Cela résulte du caractère nécessairement schématique de la réglementation en matière de protection contre le bruit (ATF 120 Ib 456 JdT 1996 I 478 c. 4c).

 

L'article 14 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700) définit en effet les plans d'affectation et prévoit la distinction des zones à bâtir, des zones agricoles et des zones à protéger.

 

Les zones du droit genevois se subdivisent quant à elles en zones ordinaires, de développement et protégées (art. 12 LALAT).

 

Parmi les zones à bâtir, les trois premières zones ordinaires sont dédiées aux grandes maisons affectées à l'habitation, au commerce et aux autres activités du secteur tertiaire. La loi précise que d'autres activités peuvent y être admises" lorsqu'elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage ou le public" (art. 19 al. 1 LALAT). Il en va de même de la 4e zone, dédiée principalement aux maisons d'habitations comprenant en principe plusieurs logements. La 5e zone est en principe résidentielle et destinées aux villas. Enfin, la loi genevoise prévoit encore les zones industrielles et artisanales, ferroviaires et aéroportuaires.

 

Outre les zones à bâtir, la loi institue les zones agricole, de bois et forêts, de verdure et de délassement.

 

Les zones de développement sont quant à elles affectées par principe à l'habitat, au commerce et aux activités du secteur tertiaire, le Conseil d'Etat pouvant autoriser des activités artisanales lorsqu'elles ne sont pas susceptibles de provoquer des inconvénients graves pour le voisinage ou le public (art. 1 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 - LGZD - RS L 1 35).

 

Enfin, les zones protégées et à protéger font l'objet d'une réglementation particulière.

 

9. La doctrine a pu dire des niveaux de sensibilité qu'ils constituaient uniquement l'élément de liaison entre l'affectation de la zone telle que définie dans la planification communale et le niveau de bruit autorisé par la LPE et l'OPB (Anne-Christine FAVRE, Restrictions en matière de construction et d'affectation résultant de la législation sur l'environnement - La protection contre le bruit, DEP 1998, 387, 398). Toutefois, la fixation des degrés de sensibilité, en tant qu'elle s'insère dans la procédure de planification, participe à la mise en oeuvre du principe de prévention garanti tant par la LPE que par la LAT (Alain CHABLAIS, Protection de l'environnement et droit cantonal des constructions, Fribourg, Éditions universitaires, 1996, p. 134). L'article 43 OPB est une aide à l'orientation, et il n'est pas défendu à un canton d'attribuer le DS II à une zone mixte avec une forte proportion de logement, ou le DS III à une zone de bâtiments et d'installations publics (Béatrice WAGNER PFEIFER, Umweltrecht I, Zurich, Schulthess, 1999, p. 87).

 

10. Le Conseil d'État soutient en substance que l'attribution des DS III à la plus grande partie des trois premières zones à bâtir et des zones de développement ¾ respectivement du DS II aux hôpitaux et aux maisons de convalescence ¾ tient compte des niveaux actuels de bruit et vise pour les 4 premières zones à préserver la mixité de ces zones. Les attributions ponctuelles de DS II représenteraient l'exception, et le DS I ne pourrait être attribué en raison principalement des nuisances produites par les bâtiments eux-mêmes auxquels il pourrait être appliqué.

 

11. Les niveaux de bruit auxquels se réfère le Conseil d'Etat sont pour l'essentiel imputables au trafic motorisé, ou plus exactement aux infrastructures de transports que sont les axes routiers (cf. Anne-Christine FAVRE, Quelques questions soulevées par l'application de l'OPB, RDAF 1992, 289, 312).

 

a. Selon le cadastre du bruit routier établi par les autorités en 1998, 29'000 personnes, aux abords d'environ 30 km de routes, sont exposées au-delà des valeurs d'alarme pour le DS III (70 dB(A) de jour et 65 dB(A) de nuit), 89'000 personnes, aux abords d'environ 200 km de routes, sont exposées au-delà des valeurs limites d'immissions pour le DS III (65 dB(A) de jour et 55 dB(A) de nuit); 65 établissements scolaires, 5 bâtiments universitaires et 15 instituts, ainsi que 2 bâtiments hospitaliers et 2 homes pour personnes âgées sont exposés à des nuisances plus élevées que les valeurs limites du DS II (Plan des mesures d'assainissement du bruit routier selon OPB art. 19, août 1998, p. 11).

À l'examen du cadastre du bruit routier, il apparaît en effet que de nombreux axes, ou parties d'axes traversant les trois premières zones à bâtir et les zones de développement contiguës de la ville de Genève enregistrent sur les façades les bordant des valeurs limites d'immissions (VLI) de 65 à 70 dB(A) (boulevard Carl-Vogt, rue des Bains, rue de Carouge, boulevard Helvétique, boulevard des Philosophes, rue Caroline, boulevard de la Cluse, rue des Eaux-Vives, route de Chêne, route de Malagnou, route de Florissant, rue des Pâquis, avenue Wendt, avenue des Charmille), de plus de 70 dB(A) (route des Acacias, avenue du Mail, boulevard du Pont d'Arve, boulevard Georges-Favon, rue des Deux-Ponts, rue du Rhône, rue de la Servette, rue de Lyon, rue de Lausanne, rues du Mont-Blanc et de Chantepoulet, rue des Alpes). En ville de Carouge, la rue Caroline, la rue Saint-Victor, la rue Ancienne, la rue de la Fontenette, le boulevard des Promenades et la route de Saint-Julien constituent d'autres exemples d'exposition à des VLI de 65 à 70 dB(A), la route de Saint-Julien dépassant même par endroits les 70 dB(A). Dans la commune de Lancy, ce sont les axes de la route de Chancy, de la route de Saint-Georges, de la route du Pont-Butin, de la route du Grand-Lancy et de la route des Communes-Réunies qui enregistrent des VLI de 65 à 70 dB(A). Dans la commune d'Onex, enfin, les VLI de 65 à 70 dB(A) sont constatés ponctuellement aux abords de la route de Chancy.

 

Toujours selon les autorités, un quart environ de la population genevoise est exposée au bruit du trafic routier au-delà des limites acceptables, et les doléances au sujet du bruit, qui représentent 25% des plaintes en matière d'environnement, sont en constante augmentation (ibid. pp. 8 s.). Les effets du bruit sur la santé sont délétères (ibid., pp. 56 s.). Le coût social des nuisances sonores dépasserait les 2,5 milliards de francs par an à l'échelle de la Suisse (ibid., pp. 8 et 89 s.).

 

La comparaison des cadastres routiers des communes de Genève, Carouge, Lancy et Onex suggère qu'une part importante de la population victime du bruit routier réside en ville de Genève.

 

b. Par comparaison, l'inventaire des "activités" rapportées (en couleur violette) sur les plans des quatre communes susmentionnées à l'appui de la mixité paraît nettement moins rigoureux. On a pu voir (supra, ch. 10 des faits) qu'il comportait aussi bien les habitations à plusieurs logements avec rez-de-chaussée commercial que les bâtiments industriels, les bâtiments commerciaux et les hôtels, la culture et l'administration publique. Sur les plans, il englobe concrètement aussi bien la piscine des Vernets et le centre sportif de la Queue d'Arve que le parc jouxtant UNI-MAIL, la gare Cornavin et le grand magasin Globus, le Palais de Justice et le café de la Clémence, le Grand-Théâtre, l'Usine, le Bâtiment des forces motrices et les Halles de l'Île.

 

L'inventaire n'indique nullement la nature précise des nuisances, et encore moins leur intensité, et le Conseil d'Etat admet d'ailleurs qu'il ne dispose pas d'un cadastre recensant les émissions de bruit des activités industrielles, artisanales et tertiaires (commerces et bureaux).

 

c. De fait, cet inventaire recense toutes les affectations qui ne sont pas du logement, et l'indication des "activités", si elle renseigne sur les surfaces non dévolues au logement, ne procure aucune information sur les nuisances effectives. En d'autres termes, si l'on peut tenir pour établie une certaine diversité au sens large dans la presque totalité de la ville de Genève et sur la plus grande partie du territoire des communes de Carouge, Lancy et Onex, on ne saurait pour autant conclure d'emblée qu'il s'agit là de la "mixité" décrite à l'article 43 alinéa 1 lettre c OPB, et que les "activités" inventoriées - mélangeant cafés, négoces, musées et garages - sont toutes des entreprises " moyennement gênantes " au sens de cette même disposition.

 

Il ressort d'ailleurs de l'argumentation des autorités que l'attribution des DS a été déterminée en premier lieu par les nuisances dues aux infrastructures de transports. L'argument de la mixité n'a été invoqué qu'en second lieu, et contrairement à ce qu'affirme le Conseil d'Etat dans ses écritures, les cris des enfants sur les places de jeux n'ont probablement pesé d'aucun poids dans ses décisions.

 

d. On pourrait certes soutenir que les bureaux, les cafés, les magasins et les théâtres n'attirent pas moins le trafic motorisé que les hôpitaux et les garages, et qu'ils doivent pour ce seul fait être tenus pour moyennement gênants (cf. ATF 120 Ib 456 c. 4d JdT 1996 I 478, 481). Ce serait toutefois perdre de vue que l'article 43 alinéa 1 OPB se base sur l'affectation d'une zone et non sur les moyens de transport choisis par ses habitants ou ses usagers. S'il faut compter avec un trafic accru à proximité d'un hôpital (transport des patients) ou d'un garage (clientèle), tel n'est assurément pas le cas aux alentours d'une école, d'un magasin ou d'un théâtre. Les efforts promis par les autorités pour favoriser la modération du trafic (Plan des mesures d'assainissement, cité, pp. 16 et 19) confirment que le trafic routier est une nuisance qui ne saurait sans autre être imputée à l'installation elle-même (cf. DEP 1999 122 c. 5c).

 

e. L'hypothèse selon laquelle le Conseil d'Etat s'est fondé sur le niveau actuel des nuisances engendrées par le trafic routier plutôt que sur la mixité ou la présence d'autres installations gênantes est vérifiée par l'examen des autres plans.

 

Ainsi, dans la commune d'Hermance, le DS II est-il attribué à toute la zone villas bordant le lac et la route principale, alors que le vieux village se voit attribuer le DS III, quand bien même il est presque exclusivement dévolu à l'habitation et ne compte d'autre "activités" que quelques galeries et deux ou trois cafés-restaurants. La même observation peut être faite pour les vieux villages et les zones villas d'Anières, de Corsier, de Collonge-Bellerive et de Cologny - avec pour Collonge-Bellerive l'exception du port de la Gabiule et pour Cologny l'exception de Genève-Plage. De même, seuls les vieux villages de Veyrier, de Troinex et de Puplinge se voient-ils attribuer le DS III alors que les zones villas sont classées en DS II.

 

Dans le cas de Puplinge, par exemple, les seules "activités" dans le vieux village consistent en deux cafés-restaurants, une boulangerie, une pharmacie, une boucherie, une banque et la poste. Aucune de ces activités ne peut être considérée comme moyennement gênante au sens de l'article 43 OPB, qualifier la zone de mixte et justifier l'attribution du DS III.

 

f. En ce qui concerne enfin l'impossibilité alléguée par le Conseil d'État d'attribuer le DS I aux Hôpitaux de Loëx et de Belle-Idée en raison des nuisances qu'ils produisent, il sera observé que l'affectation doit primer, et entraîner cas échéant une obligation d'assainir. La suggestion du Conseil d'État selon laquelle le DS I ne pourrait être attribué qu'en l'absence d'obligation d'assainir inverse les termes de la loi.

 

12. Ces observations étant faites, le tribunal de céans retiendra que le Conseil d'État, en appuyant dans la pratique sa planification sur les seules nuisances routières existantes, n'a pas procédé à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes pour l'attribution des degrés de sensibilité - et notamment la réelle mixité et l'intensité effective des nuisances produites par les activités - et a partant commis un abus de son pouvoir d'appréciation (Pierre MOOR, Droit administratif I, Berne, Stämpfli, 1994 2e éd., p. 377).

 

a. À teneur des plans querellés et des informations disponibles, les "activités" telles que recensées par le Conseil d'Etat ne permettent pas en effet, que ce soit par leur proportion dans l'affectation du sol ou par les nuisances qu'elles produisent effectivement, de qualifier sans autre les quatre premières zones constructibles de "mixtes" au sens de l'article 43 OPB et de leur attribuer par principe le DS III.

 

b. À l'appui de cette conclusion, le tribunal de céans retiendra également que le Conseil d'État a lui-même modifié les plans d'attribution à la suite des observations des recourants, et attribué le DS II à des quartiers entiers. Il a également indiqué qu'il resterait possible d'attribuer à l'avenir des DS II dans les plans localisés de quartier. Ce faisant, il a admis implicitement que les éléments à l'appui des attributions n'avaient pas été réunis de manière satisfaisante, et reconnu à la fois que l'ensemble des trois premières zones à bâtir ne pouvait sans autre être assimilé à une zone "mixte".

 

Ces mêmes motifs conduisent le Tribunal de céans à s'écarter de la solution retenue dans l'arrêt du Tribunal fédéral de 1994 (ATF du 25 mai 1994 Société coopérative, cité, consid. 4, p. 19).

 

c. C'est ainsi la méthodologie employée et les prémisses fondant l'attribution des degrés de sensibilité qui sont critiquables. Le tribunal de céans observe que le satisfecit décerné sous cet angle par le Service cantonal d'écotoxicologie n'est pas étayé, et n'est guère exploitable dans la présente procédure.

 

13. Les plans querellés seront donc annulés.

 

Il n'appartient pas au Tribunal administratif de substituer son appréciation à celle du Conseil d'Etat, aussi les procédures lui seront-elles renvoyées pour qu'il procède à une nouvelle attribution des degrés de sensibilité (cf. DEP 1998 744).

 

14. Le tribunal de céans observera toutefois que les trois premières zones ainsi d'ailleurs que les zones de développement sont en pratique, comme dans l'intention du législateur, dévolues en premier lieu au logement, et correspondent aux "zones d'habitation" décrites à l'article 43 alinéa 1 lettre b OPB.

 

La ville de Genève et les grandes cités périphériques concentrent l'habitat de l'écrasante majorité de la population du canton. Il n'est plus envisageable d'exposer cette partie de la population à des nuisances accrues en se fondant sur une "mixité" présumée ou des nuisances effectives non avérées à l'exception du bruit routier, à peine de "capituler face au bruit" (cf. RDAT 1997 I 182, 184).

 

Ces zones devraient donc se voir attribuer par principe le DS II, des exceptions pouvant être admises aux conditions (strictes) posées par la loi.

 

Une solution de ce type a notamment été retenue pour la ville de Berne, qui n'a colloqué en DS III que les bâtiments situés aux abords des routes en transit (cf. Association suisse pour l'aménagement national, Architecture et protection contre le bruit, Berne, 1997, p. 23, fig. 5).

 

Elle permettrait, appliquée au canton de Genève, de ne pas dépasser plus encore le délai fixé à l'article 44 alinéa 2 OPB.

 

15. Dans le même ordre d'idées, il n'a pas échappé au Tribunal administratif que le centre des villes doit pouvoir rester animé, et continuer d'accueillir des activités tertiaires et artisanales, comme d'ailleurs des activités de loisirs. Or, il n'est pas douteux que l'animation des villes entraîne des nuisances : places de jeux (DEP 1997 p. 122), terrasse de cafés et de tea-rooms (ATF 123 II 325 JdT 1998 I 459) peuvent elles aussi générer des émissions excessives.

 

Il conviendra cas échéant de procéder à l'assainissement des installations fixes existantes lorsqu'il est exigible, à défaut à l'isolation des bâtiments les entourant. Dans tous les cas, les mesures passives de protection acoustique ne devront être ordonnées que lorsque toutes les mesures actives de limitation des émissions sont impossibles, insuffisantes ou déraisonnablement coûteuses (Message du Conseil fédéral du 31 octobre 1797 à l'appui de la LPE, FF 1979 III 789).

 

Le Conseil d'État a aussi évoqué les allégements permis par la loi, et suggéré que le coût des assainissements serait économiquement insupportable. Ces allégements devront être examinés de cas en cas et il n'est pas admissible de présumer un coût exorbitant des externalités pour exclure d'emblée l'attribution du DS II.

 

16. Sous l'angle de la planification, il restera toujours loisible aux autorités de procéder à un déclassement ponctuel en application de l'article 43 alinéa 2 OPB (Klaus A. VALLENDER/Reto MORELL, Umweltrecht, Berne, Stämpfli, 1997, p. 255 n° 38). Cette mesure doit certes être utilisée avec retenue (DEP 1998 744; ATF non publié du 25 mai 1994 dans la cause 1P.691/1992 CFF c/ Conseil d'État genevois c. 5b) et pour autant qu'il n'est pas possible de procéder à un assainissement (DEP 1998 678). Mais le Tribunal fédéral a pu souligner que l'article 43 alinéa 2 OPB permettait de prendre en considération les conditions urbaines et notamment d'éviter que les dispositions de protection contre le bruit ne perturbent les efforts faits en vue d'empêcher que le centre des villes ne continue de se vider à la suite de la transformation des logements bruyants en bureaux (ATF 117 Ib 125 c. 4c ZBl 1996 407 JdT 1993 I 465).

 

17. Les recourants, qui plaident en personne, n'ont pas droit à une indemnité (art. 87 al. 2 LPA, art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - E 5 10.03).

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme:

 

 

déclare recevables les recours interjetés

 

- le 5 juin 2000 par la Fédération des associations de quartiers et d'habitants contre les arrêtés du Conseil d'État du 3 mai 2000 rejetant leurs oppositions et adoptant les plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 


- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Ville de Genève (plan n° 29010/21-610);

 


- le 7 juin 2000 par l'Association transports et environnement, l'Association transports et environnement section de Genève, la Société suisse pour la protection de l'environnement, le World wide fund for nature WWF Suisse et le WWF World wide fund for nature, contre les arrêtés du Conseil d'État du 3 mai 2000 rejetant leurs oppositions et adoptant les plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 


- Anières (plan n° 29010/02-502)

- Avusy (plan n° 29010/04-504)

- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Collonge-Bellerive (plan n° 29010/16-515)

- Cologny (plan n° 29010/17-516)

- Confignon (plan n° 29010/18-517)

- Corsier (plan n° 29010/19-518)

- Hermance (plan n° 29010/25-522)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Presinge (plan n° 29010/35-531)

- Puplinge (plan n° 29010/36-532)

- Troinex (plan n° 29010/42-538)

- Veyrier (plan n° 29010/45-542)

- Ville de Genève (plan n° 29010/21-610);

 


préalablement:

 

ordonne la jonction des procédures n° A/617/2000 et A/628/2000;

 

au fond:

 

admet les recours;

 

annule les arrêtés du Conseil d'Etat du 3 mai 2000 rejetant les oppositions et adoptant les plans d'attribution des degrés de sensibilité OPB pour les communes de

 


- Anières (plan n° 29010/02-502)

- Avusy (plan n° 29010/04-504)

- Carouge (plan n° 29010/08-544)

- Collonge-Bellerive (plan n° 29010/16-515)

- Cologny (plan n° 29010/17-516)

- Confignon (plan n° 29010/18-517)

- Corsier (plan n° 29010/19-518)

- Hermance (plan n° 29010/25-522)

- Lancy (plan n° 29010/28-543)

- Onex (plan n° 29010/31-527)

- Presinge (plan n° 29010/35-531)

- Puplinge (plan n° 29010/36-532)

- Troinex (plan n° 29010/42-538)

- Veyrier (plan n° 29010/45-542)

- Ville de Genève (plan n° 29010/21-610);

 


renvoie la cause au Conseil d'État pour qu'il établisse de nouveaux plans;

 

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité;

 

dit que, conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par la voie du recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il est adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être jointes à l'envoi.

 

communique le présent arrêt à la Fédération des associations de quartiers et d'habitations, l'Association transports et environnement, l'Association transports et environnement section de Genève, la Société suisse pour la protection de l'environnement, le World wide fund for nature WWF Suisse, section Genève, le WWF World wide fund for nature, ainsi qu'au Conseil d'État.

 


Siégeants : M. Paychère, président, MM. Thélin, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, juges, M. Mascotto, juge suppléant.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le vice-président

 

V. Montani F. Paychère

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci