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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/250/1999

ATA/249/2000 du 18.04.2000 ( JPT ) , REJETE

Descripteurs : EXAMEN(EN GENERAL); RESTAURANT; CERTIFICAT DE CAPACITE; CAFETIER-RESTAURATEUR; DROIT D'ETRE ENTENDU; JPT
Normes : LRDBH.21
Résumé : N'est pas arbitraire au vu des prestations des recourants la note de 2 attribuée à l'examen sur les vins. L'affirmation selon laquelle un des examinateurs se serait assoupi n'a pas pu être établie de manière probante.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 18 avril 2000

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur P. H.

représenté par Me Antoine Herren, avocat

 

 

 

contre

 

COMMISSION D'EXAMEN DU CERTIFICAT DE CAPACITE DE CAFETIER, RESTAURATEUR ET HÔTELIER

 



EN FAIT

 

 

1. Monsieur P. H., né le ... et est domicilié rue des ... à Genève, s'est présenté à trois reprises aux examens en vue de l'obtention du certificat de capacité, cafetier, restaurateur et hôtelier.

 

2. En date du 15 décembre 1997, sa première tentative s'est soldée par un échec dans toutes les épreuves.

Au terme de sa deuxième session, le 14 juin 1998, un deuxième échec lui a été signifié. Toutefois, ses moyennes étant suffisantes dans certaines domaines, il n'avait plus que certaines matières à représenter.

 

3. Le 14 décembre 1998, les connaissances professionnelles de M. H. à son troisième essai ont été jugées insuffisantes par les examinateurs et son échec lui a été signifié par la commission d'examen du certificat de capacité (ci-après : la commission).

 

En effet, l'obtention d'une moyenne de 4 est exigée dans chaque "bloc d'épreuves" et la moyenne du candidat dans le domaine des "connaissances sur les boissons" était insuffisante (3,75 sur 6), une note de 2,00 sanctionnant l'examen oral "connaissance sur les mets et boissons".

 

Au vu de l'insuffisance de cette note, doublée de la faiblesse de la moyenne générale du candidat, la commission n'était pas entrée en matière sur son éventuel repêchage.

 

Par conséquent, M. H. ne pourra pas se représenter à ces examens avant l'expiration d'un délai de 7 ans et il devra alors subir l'ensemble des épreuves prévues.

 

4. Monsieur H., arguant qu'il aurait été mal noté et mal écouté durant l'examen sur les mets et boissons, a ensuite contesté la note de 2,00 en déposant une réclamation auprès du président de la commission. Ses récriminations portaient sur la matière de l'examen et sur l'appréciation de ses connaissances.

 

Le réclamant était surpris de n'avoir été interrogé que sur les vins, et non sur les mets. De plus, sa prestation ne lui avait pas paru insuffisante au point de mériter un 2,00.

 

Le président a alors prié les experts, Messieurs X. et Y. de réexaminer la note attribuée. Se conformant à la circulaire du 14 novembre 1990 du président invitant les examinateurs à prendre quelques notes lors des examens oraux afin de pouvoir justifier les notes attribuées, Monsieur X. avait pris des notes au cours de l'épreuve incriminée et celles-ci ne laissaient place à aucune hésitation; suite à leur production et vu son pouvoir d'appréciation limité, le président n'a pu que confirmer cette évaluation, par décision du 16 février 1999, reçue le 22 février.

 

5. Par acte posté le 24 mars 1999, M. H. a interjeté recours au Tribunal administratif en concluant à l'annulation de la décision précitée du 16 février et alternativement, soit au renvoi à la commission en vue de l'attribution pour l'examen "connaissance sur les mets et boissons" d'une note de 4,00, éventuellement 3,00, soit à l'annulation du résultat de ladite épreuve et à son admission comme candidat à une nouvelle épreuve.

Dans sa réponse, le département de justice et police et des transports (ci-après : le département) a conclu au rejet du recours.

 

6. a. Lors des comparutions personnelles et des enquêtes des 2 juillet et 5 novembre 1999, Monsieur H. a affirmé avoir mérité une note supérieure, au vu du nombre de réponses auxquelles il pensait avoir répondu correctement (environ la moitié).

 

Le recourant a néanmoins expressément admis n'avoir rien su sur les vins français et ne pas posséder le fascicule sur les vins suisses et français rédigé par la Société des cafetiers et regroupant toute la matière de l'examen.

 

b. Les deux examinateurs ont quant à eux certifié qu'au moment de l'examen, ils avaient connaissance du fait que M. H. se présentait pour la troisième fois; ils avaient donc fait preuve d'une attention accrue et posé une cinquantaine de questions sur les vins. Aucune question n'avait été posée sur les mets mais le département a relevé que l'intitulé de l'examen était trompeur et que l'épreuve portait en fait principalement sur les vins et accessoirement sur leur relation avec les mets.

M. X. a produit ses notes prises au cours de l'interrogatoire et résumant la prestation ainsi: "(3ème examen) Vins genevois - très hésitant - ne connaît pas le "Perlan" - Vaud? Mélange tout- Nul sur autres cantons!! France- Méconnaissance générale tant sur les régions que les appellations!! NUL."

 

M. Y. n'a quant à lui pas gardé de notes personnelles de cet interrogatoire car M. H. n'y avait dit que très peu de choses et ses réponses ne corespondaient de toute façon pas à la demande.

Les deux experts ont donc maintenu leur évaluation des connaissances du candidat.

 

Pour M. Y. la note de 2,00 avait été attribuée au vu des quelques réponses correctes reçues, et ce à titre d'encouragement, mais il n'était pas possible de mettre plus.

 

7. Le recourant a affirmé avoir été déstabilisé par le comportement des examinateurs durant son examen, tout en admettant qu'il était très stressé et que le comportement des experts n'était pas la seule cause de son échec.

 

Messieurs X. et Y. ne prenaient pas note de ses réponses et ne remplissaient pas de formulaire ou de grille d'examen, comme le faisaient d'autres examinateurs. Ils n'avaient pas non plus fait usage d'une quelconque liste de questions.

 

M. X. a cependant produit les quelques notes précitées, de style télégraphique, et a précisé que lorsque l'examen est complètement réussi ou raté, celles-ci sont alors prises de manière très succincte.

 

Enfin, M. H. s'est prévalu du fait que peu avant la fin de l'examen, M. X. s'était éloigné un court instant pour discuter avec l'un de ses collègues, sans pour autant sortir de la salle, ce que M. X. a admis lors de l'audience du 2 juillet 1999.

 

Durant cet intervalle, M. H. a eu l'impression que M. X. alors âgé de 74 ans et qui avait baissé la tête, s'était assoupi. Cependant, M. X. a affirmé n'avoir rien constaté de tel à son retour et M. Y. a contesté cette affirmation, arguant qu'il attendait volontiers les réponses aux questions posées durant 30 secondes ou une minute.

 

L'examen a duré une demi-heure.

 

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56 A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2. Les examens permettant d'obtenir le certificat de cafetier sont énumérés aux articles 19 et 20 du règlement d'exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement du 31 août 1988 (RLRDBH - I 2 21.01). Les connaissances du candidat sont appréciées par une note de 0 à 6. Pour obtenir le certificat, le candidat doit totaliser au moins 16 points avec une moyenne de 4 points dans chaque branche (art. 21 RLRDBH).

 

3. Le Tribunal administratif n'est pas compétent pour modifier une note d'examen, soit parce qu'elle n'apparaît pas justifiée, soit en utilisant la pratique du "coup de pouce" qui permet de rehausser une note. Le Tribunal de céans ne peut, en cas d'admission d'un tel recours, qu'annuler la décision qui lui est soumise avec pour conséquence, soit le renvoi du dossier à l'autorité inférieure pour qu'elle statue à nouveau, soit l'annulation de l'examen et la possibilité pour le candidat de se soumettre à une nouvelle épreuve (ATA K. du 6 mars 1991; K. du 6 octobre 1992; C. du 9 septembre 1997).

 

4. a. Selon le Tribunal fédéral, pour qu'une décision en matière de contrôle des connaissances puisse être annulée en procédure de recours, il ne suffit pas que l'on puisse raisonnablement penser qu'elle aurait pu ou dû être différente (ATF 108 Ia cons. 4b p. 195 et les références; ATF K du 12 septembre 1984). Il faut que les limites de l'arbitraire soient franchies, à savoir que la décision soit insoutenable et injustifiable (ATF 106 Ia consid. 3c p. 2; RDAF, 1983 p. 208). Le Tribunal fédéral a précisé qu'il devait faire preuve de retenue, dès lors qu'il s'agissait en général de domaines très spécialisés et qu'au surplus, les examinateurs ont une position privilégiée pour apprécier les exigences et établir les comparaisons entre les prestations d'un candidat et celles fournies par d'autres (ATF K. du 27 mai 1997 et les références citées; ATA C. du 9 septembre 1997). L'évaluation des résultats d'examens entre donc tout particulièrement dans la sphère des décisions pour lesquelles les examinateurs disposent d'un très large pouvoir d'appréciation et ne peut donc faire l'objet que d'un contrôle judiciaire limité à l'arbitraire (ATF 121 Ia consid. 4b p. 230, 118 Ia consid. 4c p. 495, 113 Ia consid. 4a p. 289; ATF n. p. H. du 29 novembre 1996 et les arrêts cités).

 

b. A l'instar de la commission de recours de l'université (ci-après : la CRUNI), le pouvoir d'examen du Tribunal administratif est restreint à la question de l'arbitraire lorsqu'il s'agit de contrôler l'appréciation d'examens (décisions CRUNI C. du 9 septembre 1997; C. du 9 février 1993; K. du 6 octobre 1992; R. du 9 novembre 1987; B. du 24 avril 1986; S. du 24 juin 1986).

 

Le Tribunal administratif n'ayant aucune raison de s'écarter de cette jurisprudence, il peut se contenter, comme le Tribunal fédéral, de vérifier si le ou les examinateurs qui ont donné la note sont à même de justifier celle-ci de manière satisfaisante. Il ne lui appartient pas de réformer la note (décisions CRUNI précitées). En outre, l'autorité de recours s'impose une retenue plus grande encore lorsqu'il s'agit d'épreuves orales, car en pareil cas, il est plus difficile de reconstituer l'état de faits en faisant administrer des preuves (ATF 106 Ia consid. 3c p. 2; ATA C du 29 novembre 1994; ATA C. du 9 septembre 1997).

c. En revanche, dans la mesure où le recourant conteste l'interprétation et l'application de prescriptions légales ou qu'il se plaint de vices de procédure, l'autorité de recours doit examiner les griefs soulevés avec un plein pouvoir d'examen. Se rapportent à des questions de procédure tous les griefs qui concernent la façon dont l'examen et son évaluation se sont faits. Si l'autorité de recours n'examine de tels griefs qu'avec une cognition restreinte, alors que la loi lui impose de le faire librement, elle commet un déni de justice formel, qui a pour conséquence l'annulation de la décision, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'autorité eût rendu une décision différente en procédant correctement (ATA C. du 9 novembre 1997; ATA C. du 29 novembre 1994 et les références précitées).

 

d. L'article 29 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999, entrée en vigueur le 1er janvier 2000, règle les "garanties générales de procédure". L'alinéa 2 prévoit que "les parties ont le droit d'être entendues". On peut considérer que le nouveau texte fondamental n'apporte pas, sur ce point, de changement aux garanties déjà contenues implicitement dans l'article 4 aCst.

 

Le droit d'être entendu déduit directement de l'article 4 aCst. implique notamment l'obligation pour l'autorité de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Il suffit cependant, selon la jurisprudence, que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 122 IV 8 consid. 2c p. 14/15; 121 I 54 consid. 2c p. 57; 119 Ia 264 consid. 4d p. 269 et les arrêts cités). Conformément à ces principes, lorsque la décision porte sur le résultat d'un examen et que l'appréciation des experts est contestée, l'autorité satisfait aux exigences de l'article 4 aCst. si elle indique au candidat, de façon même succincte, les défauts qui entachent ses réponses et la solution qui était attendue de lui et qui eût été tenue pour correcte. Par ailleurs, si le droit cantonal n'en dispose pas autrement, la Constitution n'exige pas que la motivation soit fournie par écrit; selon les circonstances, elle peut être orale. De même, l'article 4 aCst. ne permet pas à un candidat d'exiger des corrigés-types et des barèmes (SJ 1994, consid. 1b p. 163).

 

En matière d'examen, le droit de consulter le dossier doit seulement permettre au candidat d'apprécier ses prestations pour pouvoir motiver un éventuel recours contre la décision d'examen (ATF 118 Ia consid. 2c p. 493)

 

5. a. S'agissant de la présente cause, le tribunal relève que la présence de deux experts pour les épreuves écrites aussi bien que pour les examens oraux offre aux candidats des garanties très sérieuses d'objectivité.

 

b. Le tribunal observe également que les deux examinateurs se souviennent de la faiblesse de la prestation de M. H., insuffisance surprenante s'agissant d'une troisième tentative, et que l'un d'entre eux a pris des notes, certes succinctes, mais néanmoins fort éloquentes et suffisantes, se conformant en cela à la jurisprudence précitée et à la circulaire du 14 novembre 1990 du président de la commission invitant les examinateurs à prendre quelques notes lors des examens oraux de manière à pouvoir justifier les notes attribuées. Il n'existe par ailleurs aucune législation imposant aux examinateurs de remplir des grilles d'examen.

 

c. Enfin, le recourant a expressément admis n'avoir rien su sur les vins français et ne s'être pas procuré tout le matériel nécessaire à la préparation de l'épreuve incriminée.

 

d. Quant à la matière de l'examen, le fait qu'aucune question n'ait été posée sur la relation entre les mets et les vins ne paraît pas injustifiable dans un cas où le candidat démontre déjà une extrême faiblesse dans sa seule connaissance sur les vins.

 

e. En conséquence, le Tribunal administratif ne saurait qualifier d'arbitraire la note attribuée; en raison du pouvoir très restreint qui est le sien, le tribunal ne peut ni annuler la note d'examen, ni renvoyer le dossier à l'autorité inférieure sur la base du grief d'arbitraire.

 

6. a. Quant au déroulement de l'examen, le Tribunal administratif constate qu'il a duré une demi-heure, en présence de deux examinateurs et qu'une cinquantaine de questions ont été posées.

 

b. L'affirmation selon laquelle l'un des examinateurs se serait assoupi n'a pu être établie de manière probante et ne sera donc pas retenue par le Tribunal.

 

c. Au vu de ce qui précède, le fait que peu avant la fin de l'épreuve, et alors que l'échec était déjà manifeste, l'un des examinateurs se soit éloigné un court instant est regrettable mais ne peut être considéré comme déterminant en l'espèce.

 


7. En tous points mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

 

Un émolument de CHF 750.- sera mis à la charge du recourant. Aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 24 mars 2000 par Monsieur P. H. contre la décision de la Commission d'examen du certificat de cafetier, restaurateur et hôtelier du 16 février 2000;

 

au fond :

 

le rejette ;

 

met à la charge du recourant un émolument de CHF 750.-;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité;

 

communique le présent arrêt à Me Antoine Herren, avocat du recourant, ainsi qu'à la commission d'examen du certificat de capacité de cafetier, restaurateur et hôtelier.

 


Siégeants : M. Schucani, président, M. Thélin, Mmes Bonnefemme-Hurni et Bovy, M. Paychère, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président :

 

V. Montani D. Schucani

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci