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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/556/2002

ATA/180/2003 du 01.04.2003 ( SI ) , REJETE

Descripteurs : EMPLOYE PUBLIC; ACTION PECUNIAIRE; CLASSE DE TRAITEMENT; HEURES DE TRAVAIL SUPPLEMENTAIRES; HARCELEMENT PSYCHOLOGIQUE; PRINCIPE DE LA BONNE FOI; PROPORTIONNALITE; COMPETENCE; SI
Normes : LOJ.56G; LOJ.56B al.4 litt.a
Résumé : La conclusion en paiement d'une différence de traitement due en raison d'une mauvaise classification de fonction est irrecevable car le statut prévoit un recours interne sans appel ; en outre la prétention n'est pas de nature pécuniaire puisqu'elle tend principalement à la réévaluation d'une fonction. La conclusion portant sur une différence de traitement résultant de l'augmentation liée à l'appréciation des performances est également irrecevable, le statut prévoyant des voies de recours internes non utilisées contre l'appréciation des performances et le caractère pécuniaire faisant défaut, la conclusion visant en fait à modifier l'appréciation des performances . La conclusion en paiement d'une somme pour dommages et intérêts liés à la responsabilité de la hiérarchie est irrecevable, aucune disposition statutaire sur le harcèlement psychologique n'étant applicable et une action en responsabilité ne relève pas de la compétence du tribunal administratif. Pas de droit au paiement d'heures supplémentaires car le statut prévoit uniquement la compensation par des congés ; de plus, l'employé n'ayant émis aucune prétention pendant toute la durée de son emploi et n'ayant ainsi pas averti ses supérieurs du problème qu'il rencontrait dans l'organisation de son travail, sa demande déposée plus d'un an après la fin des rapports de travail apparaît comme violant le principe de la bonne foi. Validité d'une clause d'engagement de fidélité impliquant un remboursement des frais de formation avancés par l'employeur en cas de rupture prématurée du contrat de travail par l'employé au regard du principe de proportionnalité (remboursement au pro rata de la durée de l'engagement de fidélité non écoulée) et du principe de la bonne foi, en raison de l'intérêt de l'employeur au maintien du contrat pendant toute la durée de l'engagement de fidélité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 1er avril 2003

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur P. J.

représenté par Me Pascal Verniory, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

 

SERVICES INDUSTRIELS DE GENÈVE

 



EN FAIT

 

1. Monsieur P. J. a été engagé le 1er janvier 1997 par les Services Industriels de Genève (ci-après : SIG) en qualité de ferblantier installateur sanitaire à la section "installations du service du gaz". Le statut d'employé régulier lui a été octroyé dès le 1er janvier 1998.

 

2. En septembre 1997, M. J. s'est inscrit aux cours de maîtrise fédérale sanitaire prévus sur trois ans avec l'accord de sa hiérarchie. Le 8 septembre 1997, il a signé un document intitulé "engagement de fidélité", conformément à la procédure instaurée en matière de formation par les SIG. Ce document prévoyait notamment le remboursement des frais de cours payés par les SIG et les heures de congés accordées si l'employé quittait l'entreprise avant un délai correspondant à la durée des études effectuées. Le remboursement était dû au prorata du temps restant jusqu'au délai fixé par rapport au temps écoulé entre la fin des études et le départ.

 

3. Le 11 avril 1999, M. J. a informé son chef de secteur qu'il renonçait à terminer sa formation. Dans ce courrier, il énumérait douze problèmes relatifs au déroulement des cours et mentionnait également avoir pris beaucoup de retard dans certaines branches.

 

4. Le 22 décembre 1999, M. J. a remis au directeur une liste de problèmes d'ordre général portant sur le fonctionnement de son secteur ainsi qu'une liste de propositions pour les résoudre.

 

Suite à cela, une réunion a eu lieu le 9 février 2000 entre le directeur et M. J.. Le compte-rendu dressé à cette occasion révèle que l'intéressé n'était pas satisfait de son travail; il avait même précisé qu'il recherchait un autre emploi.

M. J. a démissionné pour le 30 avril 2000.

 

5. Par courriers des 28 avril et 12 mai 2000, les SIG ont réclamé à M. J. la somme de CHF 11'567,25 au titre de remboursement des frais de cours et des congés spéciaux accordés, dès lors qu'il quittait l'entreprise avant la fin de la période couverte par l'engagement de fidélité. Un rappel avec menaces de poursuites lui a été envoyé le 30 janvier 2001.

 

6. Le 6 février 2001, M. J. a indiqué aux SIG, par l'entremise de son conseil, que le montant qui lui était réclamé était erroné en raison du taux horaire appliqué. Une compensation devait être faite avec les heures supplémentaires qu'il avait effectuées; celles-ci ne lui avaient en effet jamais été payées, le temps de travail effectué entre 11h30 et 13h00 n'étant pas pris en compte. Il réclamait également le paiement de la différence de traitement entre les classes 12 et 9; il avait été évalué en classe 9 en raison de sa participation aux cours de maîtrise. Finalement, il avait dû abandonner ses études au vu de l'absence de soutien de sa hiérarchie, alors qu'il avait dû consentir à de nombreux frais pour cette formation. Il relevait la mauvaise foi des SIG qui l'avaient poussé à démissionner et lui réclamaient ensuite des montants qu'il n'aurait pas eu à payer si les conditions de travail avaient été supportables.

 

7. Lors d'un nouvel échange de courrier, les SIG ont indiqué qu'aucune heure supplémentaire ne figurait sur les décomptes des ressources humaines établis en conformité avec les statuts. Le traitement de M. J. correspondait à celui de la catégorie dont relevait son activité.

 

8. Un commandement de payer n° 01 305421 N a été notifié le 8 mars 2002 à M. J. pour un montant de CHF 11'567,25. Les SIG ont requis la mainlevée provisoire de l'opposition et un jugement a été rendu le 14 mai 2002 par le Tribunal de première instance. La mainlevée provisoire a été prononcée pour un montant de CHF 10'780,90 avec intérêts à 5% dès le 23 février 2000. Notifié le 15 mai 2002, le jugement a été reçu le 27 mai par M. J..

 

9. Le 14 juin 2002, M. J. a déposé au Tribunal administratif une action pécuniaire dirigée contre les SIG, concluant au paiement de CHF 15'000.- avec intérêt à 5% dès le 1er janvier 1997 sous réserve d'amplification, à la libération de la dette de CHF 10'780,90 et au paiement d'une participation à ses honoraires d'avocat. Il a demandé en outre la production de la totalité des feuilles de route des membres de la section Service du Gaz entre 1997 et 2000.

 

A l'appui de ses prétentions, M. J. a excipé de compensations fondées sur cinq postes :


 

- Les heures supplémentaires effectuées, non comptabilisées sur les décomptes mais apparaissant sur les feuilles de route détenues par les SIG. Le montant dû pour ce poste était de CHF 9'416,25 correspondant à 250 heures effectuées au cours de son emploi.

 

- La différence de traitement de CHF 137,50 sur les mois de janvier à mars 2000 due au fait que malgré les cinq mentions "très bien" figurant sur l'évaluation faite fin 1999, seul "bon" et non "excellent" lui avait été accordé, le frustrant ainsi d'une partie de l'augmentation de traitement.

 

- La différence de salaire résultant de son classement en catégorie 9 au lieu de 12 conformément aux responsabilités qu'il assumait dans son activité.

 

- Le remboursement, à titre de dommage, des frais consentis pour sa formation, dans la mesure où l'attitude de ses supérieurs l'avait contraint à abandonner sa formation et à démissionner de son poste.

 

- Le tort moral subi du fait de l'attitude de sa hiérarchie.


 

Finalement, le demandeur a allégué que la mauvaise foi des SIG qui l'avait poussé à la démission ne pouvait être protégée et qu'ainsi, la dette devait être annulée.

 

10. Les SIG ont conclu au déboutement du demandeur. Les créances étaient entièrement contestées. Plus précisément, les relevés horaires du demandeur pour les années 1997 à 1999 n'indiquaient pratiquement aucune heure supplémentaire et, en avril 2000, lors de son départ, il présentait même un solde négatif. S'agissant des feuilles de route, elles n'étaient conservées qu'une année et classées par véhicule; leur production impliquerait un travail démesuré. La classification de l'activité du demandeur aurait dû donner lieu à un recours interne selon les statuts, option qui n'avait jamais été utilisée par le demandeur; cette conclusion devait être jugée irrecevable.

 

11. Entendues en comparution personnelle, les parties ont dit admettre la base du calcul fait par le Tribunal de première instance. M. J. a indiqué qu'il avait demandé à plusieurs reprises un changement de service, des stages ainsi qu'une diminution de son temps de travail afin de pouvoir continuer ses études; toutes ces demandes avaient été refusées. Les SIG lui reprochaient de se plaindre "de tout et de rien" et de ne pas exécuter son travail comme il aurait dû. Il a précisé que les heures supplémentaires qu'il avait été amené à effectuer pendant la pause de 11h30 à 13h00 lors de déplacements étaient signalées au contremaître, mais n'apparaissaient pas sur les décomptes. Le représentant des SIG a indiqué que 45 minutes étaient retranchées pour la pause de midi. Pour le surplus, il contestait les allégués du demandeur.

 

12. Dans un échange d'écritures faisant suite à l'audience, le demandeur a invoqué la jurisprudence relative aux clauses de remboursement. Ces arguments, ainsi que ceux des défendeurs, seront repris dans la partie en droit, en tant que de besoin.

 

 

EN DROIT

 

1. a) L'article 56 G de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 05) prévoit la compétence du Tribunal administratif pour connaître en instance unique d'une action relative à des prétentions de nature pécuniaire fondées sur le droit public cantonal, qui ne peuvent faire l'objet d'une décision au sens de l'article 56 A alinéa 2 LOJ et qui découlent des rapports entre les établissements de droit public et leurs agents (art. 56 G al. 1 let. a). Les dispositions sur les recours de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), s'appliquent par analogie aux actions pécuniaires (art. 56 G al. 2 LOJ).

 

b) Sont des prétentions de nature pécuniaire, c'est-à-dire appréciables en argent, celles qui tendent directement à l'octroi de sommes en espèces, notamment au paiement de traitements, d'allocations, d'indemnités ou de prestations d'assurances (ATA K. du 9 octobre 2001; D. du 29 mai 2001).

 

c) Ne sont, en revanche, pas des prétentions de nature pécuniaire celles qui ont trait à la création, à l'établissement et à la disparition des rapports de service, à l'obtention d'une promotion ou d'un avancement, aux vacances, à la reconnaissance d'un diplôme, à la réintégration dans une classe de fonction antérieure et à l'évaluation ou à la réévaluation d'une fonction, car alors la prétention a en réalité deux objets, l'une pécuniaire et l'autre de nature différente. Comme l'aspect pécuniaire n'est pas susceptible d'être jugé de manière indépendante de l'autre objet pour lequel l'autorité hiérarchique dispose d'un entier pouvoir d'appréciation, personne ne saurait alors exiger d'elle qu'elle accorde une prestation dont l'octroi est laissé à sa discrétion. Dans ces cas, peu importe en définitive que le litige débouche sur l'allocation d'une somme d'argent, celle-ci apparaissant comme secondaire (ATF n.p du 29 avril 1998, 2P.375/1997 confirmant l'ATA U du 23 septembre 1997).

d) L'article 56 B alinéa 4 lettre a LOJ indique que le recours au Tribunal administratif contre les décisions concernant le statut et les rapports de service des membres des établissement de droit public n'est recevable que dans la mesure où une disposition légale, réglementaire ou statutaire le prévoit.

e) Les SIG sont un établissement de droit public selon l'article 1 alinéa 1 de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (LSIG - L 2 35). Le conseil d'administration établit le statut du personnel (art. 16 al. 2 let. m LSIG) ainsi que les règlements d'application (art. 96 du statut).

 

Selon l'article 1 du statut du personnel des SIG (ci-après : statut), les employés réguliers sont engagés sur la base d'un contrat de droit public.

 

2. Le demandeur conclut tout d'abord au paiement d'un montant à titre de différence de traitement depuis 1999, en raison d'une mauvaise classification de sa fonction.

 

L'article 35 du statut prévoit le classement des fonctions dans une échelle de traitement, conformément aux définitions de postes établies sur la base d'analyses. L'article 94 du statut indique que les décisions en matière de classification, prises en application de l'article 35, peuvent être attaquées dans les 30 jours dès leur notification auprès de la commission de recours. Cette décision est sans appel.

 

La prétention du demandeur n'est en outre pas de nature pécuniaire - selon la définition retenue par le tribunal de céans et confirmée par le Tribunal fédéral - puisqu'elle tend à une réévaluation de la fonction qu'il occupe.

 

En conséquence, cette conclusion sera déclarée irrecevable.

 

3. La conclusion portant sur une différence de traitement résultant de l'augmentation liée à l'appréciation des performances devra également être jugée irrecevable pour les motifs développés ci-dessous.

 

D'une part, le caractère pécuniaire de la prétention doit être niée dans ce cas, l'action visant en fait à modifier les conclusions de l'appréciation des performances et subsidiairement l'effet sur le traitement que cette modification pourrait avoir.

 

D'autre part, l'article 39 du statut prévoit des augmentations annuelles en fonction du niveau d'appréciation des performances. Le formulaire intitulé "résultats de l'appréciation" pour l'année 1999, signé pour accord par le demandeur et qu'il a produit avec sa demande, indique les voies de recours existant contre l'appréciation. Sont prévus une conciliation, un recours et un arbitrage, voies que le demandeur n'a pas utilisées. Dans ce cas également, aucun recours contre cette décision n'est prévu au Tribunal administratif.

 

4. Le demandeur conclut au paiement d'une indemnité couvrant le dommage provoqué par l'abandon de ses études en raison de l'attitude de ses supérieurs et une indemnité pour tort moral, en raison de l'attitude de sa hiérarchie.

 

Le demandeur n'indique pas sur quelle base légale ou statutaire il entend fonder ces prétentions.

 

En l'absence de dispositions statutaires sur le harcèlement psychologique qui pourrait éventuellement être applicable, une telle demande ne peut reposer que sur la responsabilité des défendeurs dont le tribunal de céans ne peut être saisi par la voie de l'action pécuniaire (ATA W. du 4 mai 1999).

 

5. Les prétentions du demandeur concernant le paiement des heures supplémentaires sont de nature pécuniaire et sont fondées sur le rapport de service qui le liait aux défendeurs. Il en est de même de la prétention en libération d'une dette découlant de l'engagement de fidélité.

 

Sous réserve de la prescription ou de la péremption du droit invoqué, l'action pécuniaire n'est subordonnée à aucun délai. Par analogie avec l'article 128 chiffre 3 CO, elle se prescrit par cinq ans (ATA H. du 7 mars 1994).

 

La demande en libération de dette a été déposée dans le délai de vingt jours après la notification du jugement de mainlevée provisoire prévu par l'article 83 alinéa 2 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP - RS 281.1).

 

Fondée sur le droit public cantonal, découlant du rapport entre un établissement public et l'un de ses agents et introduite dans les délais, la demande en paiement d'heures supplémentaires et en libération de dette doit être déclarée recevable.

 

6. a) L'article 13 du statut fixe la durée du travail et la procédure concernant les horaires. Sur cette base, des dispositions statutaires concernant l'horaire de travail prévoient un système informatisé avec enregistrement des entrées et sorties. En cas d'impossibilité d'enregistrement, le collaborateur doit transmettre les heures d'entrée et de sortie à la personne responsable de son horaire. Une pause obligatoire de 45 minutes est prévue à midi, elle peut être réduite si cela se justifie. La responsabilité de cette réduction incombe au chef de section. L'article 52 quant à lui définit le travail supplémentaire qui peut être exigé en cas de besoin du service et sur instruction. Les heures supplémentaires qui pourraient ainsi être effectuées sur ordre de la hiérarchie uniquement ne sont pas payées en espèces, mais comptabilisées pour être reprises en congés. Il n'est donc prévu aucun droit au paiement d'heures supplémentaires.

 

b) De plus, si le demandeur a effectué des heures en plus de l'horaire prévu, notamment pendant la pause de midi à raison d'une heure et demie par semaine soit, en moyenne, environ dix-huit minutes par jour, comme il l'allègue, il lui revenait d'avertir ses supérieurs que l'organisation du travail ne permettait pas le respect des horaires. La réception par le demandeur, pendant toute la durée du contrat, de décomptes horaires ne présentant pas les heures supplémentaires qu'il estimait avoir accomplies et déclarées à son supérieur, sans faire valoir aucune prétention à cet égard ainsi que le dépôt d'une demande, plus d'un an après la fin des rapports de travail, apparaissent clairement violer le principe de la bonne foi découlant de l'article 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CCS - RS 210) qui est un principe général du droit applicable également en droit administratif (ATF 125 IV 79; B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle, 1991, p. 105) maintenant ancré à l'article 5 alinéa 3 Cst. (A. AUER/G. MALINVERNI, M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, Berne, 2000).

 

En effet, en ne faisant pas valoir ses prétentions au fur et à mesure de la réalisation des heures supplémentaires alléguées, le demandeur empêchait leur compensation par des congés tels que prévus par le règlement de façon claire ou en tous les cas, la prise de décisions concernant l'organisation du travail par sa hiérarchie.

c) Au vu de ce qui précède, la demande en tant qu'elle porte sur le paiement d'heures supplémentaires sera rejetée. Dès lors, la requête du demandeur en production de documents prouvant les heures supplémentaires, restés en mains des défendeurs, apparaît comme inutile pour la solution du litige.

 

7. a) S'agissant de la conclusion en libération de dette, le demandeur s'est déclaré d'accord avec les bases du calcul de la dette retenues par le Tribunal de première instance. En revanche, il a invoqué dans ses écritures, outre la compensation, les arguments suivants pour justifier la conclusion en libération de dette :

 

- La réglementation des défendeurs prévoyant un engagement égal à la durée de la formation entreprise était contraire aux principes tirés de la jurisprudence en la matière.

 

- Il devait être tenu compte de l'absence d'intérêt de son employeur à la poursuite des rapports de travail; ainsi, l'engagement de fidélité ne pouvait pas le lier.

 

- Plus généralement, l'absence de bonne foi des défendeurs qui avait voulu sa démission justifiait l'annulation de la dette.

 

b) L'article 57 du statut prévoit qu'un règlement concernant la formation est mis sur pied par le conseil d'administration. Le document "engagement de fidélité", signé par le demandeur, est une annexe d'une directive intitulée "procédure pour cours du soir et formations longue durée", extraite du manuel "la formation".

 

c) Le principe d'un engagement de fidélité d'une certaine durée, concrétisant la rentabilisation des frais de formation avancés par l'employeur et repris dans ses directives internes, est analogue à celui figurant dans de nombreux statuts cantonaux de la fonction publique (H. PLOTKE, Personalentwicklung und Weiterbildung in : Personalrecht des öffentlichen Dienstes, Berne, 1999, p. 356). En droit public, il existe une prise en compte du principe de la proportionnalité dans la réglementation fixant la durée de l'engagement de fidélité et dans celle des conséquences de la rupture de cet engagement. Dans les statuts cantonaux cités par l'auteur, la durée de l'engagement est proportionnelle aux frais ou même fixée indépendamment de ceux-ci ou de la durée de la formation. Selon l'auteur, la durée d'un tel engagement ne pourrait toutefois pas dépasser dix ans, afin de respecter, notamment, la liberté personnelle (H. PLOTKE, Die Zulässigkeit der Verpflichtung zur Berufsübung in SCZS 1975 p. 451). S'agissant de la rupture de l'engagement, la concrétisation du principe de proportionnalité existe sous la forme d'une prise en compte partielle des frais totaux, soit en fonction d'une proportion correspondant à la durée restante de l'engagement de fidélité, soit sous forme d'un taux fixe de remboursement des frais selon la durée du contrat écoulée après la formation, calculé par année, semestre ou mois (H. PLOTKE, op cit., pp. 358- 359).

 

Dans la fonction publique genevoise, par exemple, l'obligation de remboursement de frais de formation est posée en principe. Cette dette s'éteint si les rapports de service durent plus de trois ans. Les deux tiers restent exigibles après un an et le tiers après deux ans (Modalités financières de formation, annexe A, instruction 18.002.00, Office du personnel de l'Etat de Genève).

d) En l'espèce, la formation a duré 20,5 mois et la résiliation du contrat a eu lieu 11 mois après la fin de la formation, soit 9,5 mois avant que les frais aient été réputés amortis selon la directive interne. Le coût total s'est élevé à CHF 23'264,10 et le montant à rembourser par le demandeur, selon les directives, est de CHF 10'780,90. Cette réglementation, concrétisée par l'engagement signé par le demandeur qui réduit le montant des frais remboursables en tenant compte, au demi-mois près, de la durée restante de l'engagement de fidélité, respecte le principe de la proportionnalité.

 

La jurisprudence citée par le demandeur a été rendue dans le cadre d'un contrat de travail de droit privé. Elle ne peut trouver application en l'espèce, le rapport de travail du demandeur étant fondé sur le droit public. Il faut néanmoins relever que la rupture de l'engagement de fidélité par le demandeur a eu lieu avant le délai de deux ans qu'il estime être la durée maximale autorisée
pour de tels engagements, selon la lecture qu'il fait de l'arrêt de la Chambre d'appel des Prud'hommes. Aucun argument en sa faveur ne pourrait donc en être tiré.

 

e) Enfin, le demandeur invoque l'absence d'intérêt de l'employeur au maintien du contrat et l'absence de bonne foi. Il n'apporte toutefois aucun élément concret qui viendrait étayer ses allégations. Au contraire, l'évaluation des performances effectuée quelques mois auparavant était bonne et l'entretien du 9 février 2000 laisse apparaître des insatisfactions de la part du demandeur principalement. En outre, les défendeurs ont contesté avoir des reproches à faire au demandeur. De même, selon les pièces produites, la décision de M. J. d'arrêter sa formation apparaît comme motivée par des problèmes liés au déroulement des cours et non aux rapports de travail liant les parties. A teneur des éléments mis en évidence par l'instruction, l'intérêt des défendeurs au maintien du contrat jusqu'à l'échéance de l'engagement de fidélité et sa bonne foi ne peuvent être mis en doute.

 

f) En conséquence, la créance de CHF 10'780,90 avec intérêts à 5% dès le 23 février 2000 doit être confirmée et la demande en libération de dette rejetée.

 

8. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

rejette la demande déposée le 14 juin 2002 par Monsieur P. J. contre les Services Industriels de Genève dans la mesure où elle est recevable; :

 

dit que la poursuite n° 01 305421 N ira sa voie;

 

met à la charge du demandeur un émolument de CHF 1'000.-;

 

communique le présent arrêt à Me Pascal Verniory, avocat du demandeur, ainsi qu'aux Services Industriels de Genève.

 


Siégeants : M. Paychère, président, MM. Thélin, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj.: le vice-président :

 

M. Tonossi F. Paychère

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme N. Mega