Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1146/2002

ATA/166/2003 du 25.03.2003 ( CM ) , ADMIS

Descripteurs : DOSSIER; INFORMATION(EN GENERAL); ACCES(EN GENERAL); COPIE; EMOLUMENT; CM
Normes : LIPAD.28; LIPAD.37 al.2
Résumé : Demande de consultation des procès-verbaux relatifs aux séances du Conseil municipal par un particulier. Envoi des documents par la mairie à l'administré sans qu'il le demande. C'est à tort que la mairie a facturé le coût des photocopies qu'elle a pris l'initiative d'envoyer au recourant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 25 mars 2003

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur P. J.

 

 

 

 

contre

 

 

 

 

COMMUNE DE C.

représentée par Me Patrick Blaser, avocat



EN FAIT

 

 

1. Monsieur P. J. est domicilié sur la commune de C./Genève.

 

2. Par courrier du 12 juin 2002, M. J. s'est adressé à la mairie de C. (ci-après : la mairie). Il entendait bénéficier de la nouvelle loi sur l'information du public et l'accès aux documents du 5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08) et, en sa qualité de citoyen, prendre connaissance des procès-verbaux relatifs aux séances du Conseil municipal, ceci pour les deux dernières années.

 

Le 14 juin 2002, la secrétaire de mairie a répondu à M. J. qu'elle était d'accord de le recevoir à la mairie pour lui permettre de consulter les procès-verbaux susmentionnés. Toutefois, la mairie désirait auparavant recevoir les comptes du restaurant scolaire qui ne lui étaient toujours pas parvenus malgré plusieurs demandes.

 

3. Par courrier du 18 juin 2002, la mairie a adressé à M. J. treize procès-verbaux de séances du Conseil municipal du 5 septembre 2000 au 30 avril 2002, totalisant 96 pages.

 

4. Le 2 juillet 2002, M. J. a remercié la mairie pour son envoi et lui a demandé de le compléter, deux procès-verbaux faisant défaut, en particulier ceux des 9 et 30 mai 2000.

 

5. Le 20 août 2000, la mairie a adressé à M. J. une facture de CHF 260.- correspondant aux frais de photocopie des procès-verbaux précités. Dès réception du montant de cette facture, les deux procès-verbaux des 9 et 30 mai 2000 lui seraient acheminés, accompagnés d'une facture.

 

6. M. J. s'est élevé contre ce mode de procéder par courrier du 26 août 2000. A aucun moment, il n'avait requis la remise de copies de procès-verbaux, mais bien au contraire il avait toujours demandé à se rendre dans les locaux de la mairie afin de les consulter. Le tarif appliqué conformément à l'article 15 du règlement du Conseil municipal s'avérait prohibitif, consacrant une violation patente du principe de la légalité. Il s'est également insurgé contre le fait que la mairie lui réclamait les comptes d'une association qu'elle ne subventionnait plus. En conclusion, il a demandé l'annulation de la facture du 20 août 2002.

 

7. Le 15 août 2002, M. J. a rappelé à Madame le Maire de la commune de C. qu'il n'avait toujours pas été invité à consulter les procès-verbaux manquants.

 

8. Vu l'échange de correspondance qui s'instaurait entre M. J. et la mairie, celle-ci a saisi la médiatrice de la LIPAD, laquelle a décliné sa compétence le 30 octobre 2002.

 

9. Par courrier du 31 octobre 2002, la mairie a confirmé à M. J. qu'elle était en droit de maintenir la facturation des documents qui lui avaient été transmis. Toutefois et dans un esprit d'apaisement, elle était prête à réduire ce montant et à le porter à CHF 130.- pour autant que la facture soit réglée dans les dix jours.

 

10. Par courrier du 12 novembre 2002, la mairie a informé M. J. que faute de paiement intervenu dans le délai, il était prié de verser le montant de CHF 260.- dans un délai de dix jours.

 

11. M. J. a réagi le 22 novembre 2002. Il n'avait pas reçu le courrier daté du 31 octobre 2002. Peut être cela était dû au fait que trois P. J. habitaient sur la commune ? En tout état, sa position n'avait pas changé concernant la facture du 28 août 2002 qui lui paraissait parfaitement illégale.

 

12. Le 25 novembre 2002, M. J. a confirmé à la mairie qu'il refusait de payer la facture qui lui était réclamée.

 

13. Par acte du 5 décembre 2002, M. J. a saisi le Tribunal administratif. La mairie n'ayant pas notifié une décision définitive et conforme aux prescriptions légales, son silence devait être assimilé à une décision. En tout état, la décision du 31 octobre 2002 violait l'esprit et le but de la LIPAD. La facture querellée devait être considérée comme un émolument de chancellerie et son montant constituait une violation du principe de l'égalité de traitement. Pour le surplus, M. J. rappelait qu'il n'avait pas demandé à recevoir des copies des procès-verbaux mais bien à venir les consulter auprès du secrétariat de la mairie. Il a conclu à l'annulation de la décision attaquée avec suite de frais et dépens à charge de la commune de C..

 

14. Dans sa réponse du 30 janvier 2003, la commune de C. s'est opposée au recours.

 

15. Les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle le 12 mars 2003.

 

M. J. a confirmé qu'il avait accepté les procès-verbaux qui lui avaient été envoyés le 18 juin 2002. Concernant les procès-verbaux manquants des 9 et 30 mai 2000, il les avait consultés à la mairie. Il les avait annotés, raison pour laquelle il n'avait pas pu les restituer séance tenante à la mairie.

 

Mme X., maire de la commune présente à l'audience, a confirmé qu'à ce jour lesdits procès-verbaux n'avaient pas été restitués à la mairie qui ne les avait pas facturés à M. J..

 

M. J. a encore déclaré qu'il était prêt à payer les photocopies à CHF 0,10 la pièce, soit le tarif pratiqué par M-office.

 

La commune a décliné cette offre.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Le 1er mars 2002, la LIPAD est entrée en vigueur. Selon l'article 1er alinéa 2 LIPAD, ce nouveau texte légal a principalement pour but de favoriser la formation de l'opinion et la participation à la vie publique.

 

2. L'article 28 LIPAD règle la procédure d'accès aux documents. La consultation sur place d'un document est gratuite. La remise d'une copie intervient contre paiement d'un émolument. Dans les limites fixées par le Conseil d'Etat, la remise d'une copie d'un document se prêtant à une commercialisation peut intervenir au prix du marché (al. 7).

 

3. Le chapitre 5, article 30 et suivants, traite de la procédure de médiation. L'article 31 LIPAD fixe les compétences du médiateur et l'article 32 la procédure de médiation ou de préavis en tant que telle.

 

4. Le chapitre 7 LIPAD traite des voies de droit. Selon l'article 37 alinéa 2 en matière d'accès aux documents seule est sujette à recours la décision que l'institution concernée prend à la suite de la recommandation formulée par le médiateur en cas d'échec de la médiation.

 

5. En l'espèce, la commune a mis en place la procédure de médiation prévue par la LIPAD, mais celle-ci n'a pas eu lieu, le médiateur s'étant déclaré incompétent ratione materiae pour connaître du litige qui lui était soumis.

 

6. La décision du 31 octobre 2002 de la mairie doit être considérée comme ayant été prise en application de l'article 37 alinéa 2 LIPAD. Le recourant prétend qu'il n'a pas reçu ce courrier qui lui a finalement été réexpédié par fax le 25 novembre 2002. Dès lors, en agissant le 5 décembre 2002, le recourant a agi dans le délai de trente jours de l'article 63 alinéa 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). A cet égard, le recours sera déclaré recevable à la forme.

 

7. Il résulte du dossier soumis au tribunal de céans que M. J. a demandé à consulter les procès-verbaux des séances du Conseil municipal pour les deux dernières années. Après avoir été informé qu'il pouvait consulter sur place lesdits procès-verbaux il a reçu photocopie d'une partie de ces documents. Cet envoi n'était pas accompagné d'une facture et ne précisait pas davantage qu'une facture serait établie par la suite. Le recourant a aussitôt réagi en constatant qu'il manquait les procès-verbaux de deux séances, lesquels devaient lui être transmis dans les plus brefs délais.

 

En lieu et place, la commune a adressé au recourant une facture de CHF 260.-, et cela près de deux mois après l'envoi initial, subordonnant la remise des procès-verbaux manquants au règlement de ladite facture. Le recourant a immédiatement protesté et a exprimé son désaccord. Il rappelait à la commune qu'il ne lui avait jamais demandé la remise d'une copie des procès-verbaux mais bien à se rendre dans les locaux de la mairie afin de les consulter sur place.

 

Dans ces conditions, il faut admettre que la commune a pris l'initiative de transmettre au recourant des documents dont celui-ci ne demandait que la consultation. C'est donc à tort que la commune a facturé le coût des photocopies qu'elle-même a pris l'initiative d'envoyer au recourant.

 

La situation est évidemment tout autre pour les deux procès-verbaux manquants que le recourant a expressément demandé à recevoir. En l'état, la facture ne porte que sur les documents remis au recourant le 18 juin 2002. Il s'ensuit que le recours sera admis.

 

8. Vu la nature de la cause, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 37 al. 5 LIPAD). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant, bien que celui-ci en ait fait la demande, car il ne justifie pas des frais particuliers qu'il aurait exposés pour sa défense.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 5 décembre 2002 par Monsieur P. J. contre la décision du 31 octobre 2002 de la commune de C.;

 

au fond :

 

l'admet;

 

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité;

 

communique le présent arrêt à Monsieur P. J. ainsi qu'à Me Patrick Blaser, avocat de la commune de C..

 


Siégeants : M. Thélin, président, MM. Paychère, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président:

 

C. Del Gaudio-Siegrist Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci