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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/936/1996

ATA/160/1997 du 04.03.1997 ( CM ) , REJETE

Recours TF déposé le 22.04.1997, rendu le 17.03.1998, REJETE, 2P.123/97
Descripteurs : FONCTIONNAIRE ET EMPLOYE; COMMUNE; RESILIATION; REVOCATION(EN GENERAL); DEVOIR DE FONCTION; PLAINTE PENALE; CM
Normes : LAC.85
Résumé : Violent les devoirs de la fonction, deux hauts fonctionnaires de la police communale qui pénètrent sans droit dans la messagerie d'un conseiller administratif, manquent de franchise envers leurs supérieurs et ne collaborent pas à l'enquête administrative. La révocation des intéressés a été confirmée.

 

 

 

 

 

 

 

 

du 4 mars 1997

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur X______

 

et

 

Monsieur Y______

représentés par Me Jean-Michel Buhler, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

 

COMMUNE DE VERNIER

représentée par Me David Lachat, avocat



EN FAIT

 

1. Entré au service de la commune de Vernier (ci-après: la commune) en qualité d'agent de la police municipale en 1970, M. X______ a été promu au grade de sous-brigadier en 1975, puis de brigadier en 1977. Il occupe la fonction de chef du service de la police municipale depuis le 1er janvier 1991.

 

Monsieur Y______ a été engagé par la même commune en qualité d'agent de police municipale en 1974 et promu au grade de sous-brigadier en 1982.

 

2. Au début du mois de février 1996, MM. X______ et Y______ ont pris connaissance d'un message informatique adressé par le conseiller administratif I______ à ses homologues, B______ et F______ et, en copie à M. L______, secrétaire général de la commune. La teneur de ce message était la suivante:

 

"Objet: Réunions personnel

 

On sent de mieux en mieux qu'une certaine résistance s'organise face à nous (B______, 2xR______, Y______/X______, QQ. PERS.CVV...+ QQ. ANCIENS POLITICIENS / ANC. FONCTIONNAIRES / ENTREPRENEURS "déçus"...

 

Afin de couper court à la désinformation et aux autres ragots, je propose d'officialiser les contacts directs réguliers du CA avec le personnel, sous forme d'une "séance semestrielle d'info. générale et de questions".

 

Qu'en pensez-vous?"

 

Pour lire ce message, MM. X______ et Y______ s'étaient identifiés dans la messagerie informatique avec les initiales de M. B______. La boîte aux lettres informatique n'était pas protégée par un autre mot de passe.

 

3. Se considérant en danger de perdre son emploi, M. Y______ a consulté un avocat en la personne de
Me Jean-Michel Buhler.

MM. X______ et Y______ ont décidé de prendre contact avec l'auteur du message : une rencontre fut fixée pour le 5 mars, à l'extérieur de la commune.

 

A cette occasion, les deux hommes ont révélé à M. I______ qu'ils savaient avoir été cités dans une affaire d'intrigue et de résistance au Conseil administratif. Ils n'ont pas mentionné le fait qu'ils avaient eu accès au message informatique du 17 janvier 1996.

Monsieur I______ leur a assuré qu'ils n'avaient aucune crainte à avoir et qu'il était prêt à affronter en justice ceux qui répandaient de tels bruits.

4. Le 3 avril 1996, le conseil de MM. X______ et Y______ s'est adressé au Conseil administratif. Il avait eu connaissance du message du 17 janvier 1996, dont le contenu constituait à n'en pas douter une atteinte à l'honneur. Il exigeait la réhabilitation officielle de ses mandants "dans la dignité et le respect professionnels qui leur sont dus", la destruction du document en question, ainsi que le rétablissement d'"un dialogue réel et constructif". Un délai de dix jours était fixé au Conseil administratif pour qu'il se détermine.

 

5. Par pli du 17 avril 1996, le Conseil administratif a demandé de plus amples explications quant au contenu et à la source du document incriminé.

 

6. MM. X______ et Y______ ont déposé plainte pénale pour atteinte à l'honneur le 29 avril 1996.

 

Cette plainte a été classée par le Procureur général le 6 mai 1996, au motif "qu'une lecture objective de ce message ne permet d'aucune manière de retenir que son auteur attribuerait aux plaignants un comportement déshonorant au sens des articles 173 ss CP" et que le contenu de message n'excédait "nullement, dans son ensemble, les limites de ce que les protagonistes a un conflit de nature politique sont en droit de considérer comme admissible et que leurs adversaires doivent tolérer."

 

Les auteurs de la plainte n'ont pas interjeté recours contre cette ordonnance de classement.

 

7. Le 14 mai 1996, le conseil des plaignants a rencontré le Conseil administratif. A cette occasion, Me Buhler a révélé les moyens par lesquels ses mandants avaient eu connaissance du message informatique incriminé.

 

8. Le 23 mai 1996, le Conseil administratif a décidé d'ouvrir une enquête administrative à l'encontre de MM. X______ et Y______.

 

Confiée à M. L______, secrétaire général de la commune, cette enquête a abouti, le 25 juin 1996, au dépôt d'un rapport de conclusions, dont il résultait que MM. X______ et Y______ avaient intentionnellement pénétré dans la boîte aux lettres informatique de M. B______. L'insuffisance de la sécurité et de la confidentialité du système informatique étaient soulignées.

 

Le grief principal retenu à l'encontre de MM. X______ et Y______ était d'avoir violé la sphère privée du Conseil administratif, rompant ainsi les rapports de confiance mutuelle. Leur fonction de cadres de la police municipale et leur manque de collaboration au cours de l'enquête constituaient des circonstances aggravantes.

9. Par deux décisions identiques du 26 juin 1996, fondées sur les conclusions du rapport de M. L______, le Conseil administratif a prononcé la révocation avec effet immédiat de MM. X______ et Y______, sur la base de l'article 34 lettre c du statut du personnel de l'administration municipale (ci-après : le statut).

Pour tenir compte de leurs nombreuses années de service au sein de l'administration municipale, le Conseil administratif a décidé, par analogie avec l'article 94 du statut, de les faire bénéficier d'une indemnité de départ correspondant à trois mois de salaire.

L'exécution immédiate de ces décisions, nonobstant recours, était ordonnée, eu égard au fait que le rapport de confiance était définitivement rompu et qu'il serait dommageable pour l'ensemble de l'administration que MM. X______ et Y______ continuent à faire partie du personnel communal.

10. MM. X______ et Y______ ont recouru auprès du Tribunal administratif le 26 juillet 1996. Ils ont conclu principalement à l'annulation des décisions prises à leur encontre en tant qu'elles prononçaient leur révocation avec effet immédiat, à leur réintégration dans le personnel de la commune et à la condamnation de cette dernière aux dépens. Subsidiairement, il ont conclu à être acheminés à prouver par toutes voies de droit les faits invoqués dans leurs écritures.

 

Les recourants ont mis en évidence, dans l'exposé "en fait" de leur recours, leur activité syndicale, en particulier auprès de l'union du personnel de la commune de Vernier, dont M. Y______ était président depuis 1976, de l'association des agents municipaux des communes genevoises, dont M. X______ était co-fondateur et dont il avait été vice-président de 1974 à 1985, puis dès 1993, de la commission du personnel instituée par le statut du personnel, dont M. Y______ était président. Dans le cadre de ces mandats, MM. X______ et Y______ avaient été amenés à prendre des positions contraires aux avis du Conseil administratif.

 

Selon les recourants, un climat de méfiance se serait installé depuis le changement de majorité au Conseil administratif et le départ, en juin 1995, de l'ancien conseiller administratif en charge de la police. Ce climat de méfiance serait dû à un contrôle exagéré de l'activité des collaborateurs et, plus généralement, à un manque de communication.

 

Ils ont contesté avoir violé la sphère privée des conseillers administratifs, dans la mesure où les boîtes aux lettres étaient librement accessibles à tous. Ils n'avaient pas utilisé les initiales de M. B______ lors de la découverte du message, mais seulement lorsqu'ils avaient désiré l'imprimer, peu de temps après. Le dépôt de plainte ne constituait pas une violation d'un devoir de fonction. La décision litigieuse ne respectait pas, par sa gravité, le principe de la proportionnalité.

 

11. L'indemnité de départ prévue dans la décision du 26 juin 1996 a été versée aux recourants le 26 août 1996. Ces derniers se sont inscrits à la Caisse cantonale de chômage (ci-après : la caisse de chômage); ils ont touché des indemnités dès le 1er octobre 1996.

 

12. Dans sa réponse du 2 septembre 1996, la commune a relevé que les recourants avaient pénétré, sciemment et sans droit, en utilisant un code qui n'était pas le leur, dans la messagerie d'un conseiller administratif. Le Conseil administratif - qui n'avait appris cet acte que par le courrier de l'avocat des recourants - n'avait jamais envisagé de se séparer de MM. X______ et Y______. Ces derniers n'avaient pas mentionné leur connaissance du message à M. I______, le 5 mars 1996, ni pris contact avec leur supérieur, M. B______, pour débattre du problème.

 

Les décisions litigieuses n'avaient aucun lien avec les projets du Conseil administratif relatifs au personnel, ni avec les activités de MM. X______ et Y______ au sein de diverses associations. Elles n'étaient motivées que par le piratage auquel les recourants avaient procédé, et par le dépôt intempestif et infondé d'une plainte pénale.

 

Le Conseil administratif a indiqué que les rapports de confiance indispensables entre une municipalité et sa police étaient complètement rompus, et qu'une reprise forcée de la collaboration n'était pas concevable. Il s'opposait par conséquent aux recours.

 

13. Le 18 septembre 1996, les parties ont été entendues en comparution personnelle.

 

A cette occasion, les recourants ont confirmé être entrés dans la messagerie - non protégée - de M. B______ par jeu, en composant ses initiales informatiques. Quelques heures plus tard, ils y avaient pénétré délibérément, afin d'imprimer le message litigieux.

 

M. Y______ avait été averti par M. N______, conseiller municipal, que M. X______ risquait d'être licencié dès octobre 1995. Il avait transmis l'information à l'intéressé. D'autre part, M. Q______, brigadier à la police municipale de Carouge, l'avait averti de ce risque par téléphone, en février 1996. Il était aussi passé lui en parler, le 5 mars 1996.

 

M. B______ a indiqué qu'à part les faits ayant amené à la révocation, il n'avait pas eu de problèmes avec M. X______, sous réserve de légères réticences concernant un changement de bureau dans la mairie. Il avait dû réclamer à plusieurs reprises des rapports hebdomadaires à M. Y______, sans toujours les obtenir.

 

14. Le 24 septembre 1996, le Tribunal administratif a ordonné la jonction des deux causes et refusé la demande de restitution de l'effet suspensif.

 

15. Une audience d'enquêtes a eu lieu le 28 octobre 1996.

 

A cette occasion, M. N______, conseiller municipal de la commune de Vernier depuis dix-sept ans, a expliqué que lorsqu'il avait présenté aux nouveaux conseillers municipaux les chefs de service du personnel communal, en juin 1995, M. X______ avait résumé sa fonction. Ses propos étaient pleins d'amertume. Il avait alors dit à M. Y______ qu'en Ville de Genève, où il travaillait, de tels propos auraient été très mal ressentis par les conseillers municipaux. Il n'avait en revanche pas dit que M. X______ allait être licencié.

 

M. Z______, ancien conseiller administratif, avait toujours eu de bonnes relations avec MM. X______ et Y______.

 

M. G______, concierge auprès d'une école de la commune et ancien vice-président de l'association du personnel, a indiqué n'avoir entendu que des rumeurs. M. Y______ se battait pour défendre les intérêts du personnel, ce qui avait entraîné des tensions avec le Conseil administratif. L'ambiance était même devenue détestable.

 

M. Q______ avait su, de la bouche de M. X______, que ce dernier allait déposer plainte contre l'un des conseillers administratifs, sans plus de détails, si ce n'était qu'il s'agissait d'une affaire d'honneur. Il a recommandé à l'intéressé de faire attention. Il s'agissait d'un conseil amical et général.

 

M. I______ a confirmé qu'avant le dépôt de la plainte pénale et l'affaire du piratage informatique, il n'avait jamais été question de licencier MM. X______ et Y______. Lors de l'entretien qu'il avait eu avec ces derniers, qui avait duré environ trois quarts d'heure, ils lui avaient indiqué avoir entendu parler d'un éventuel licenciement, sans préciser qu'ils avaient eu ce renseignement par l'intermédiaire de l'informatique.

 

Il avait été choqué lorsqu'il avait appris que l'on avait fouillé dans son ordinateur; il ne faisait pas la différence entre une fouille d'affaires physiques ou de documents informatiques. Les séances d'information du personnel, proposées dans le message litigieux, avaient effectivement été mises sur pied.

 

Mme F______, conseillère administrative, a elle aussi confirmé que la commune n'avait jamais envisagé de licencier les recourants avant l'affaire litigieuse.

 

16. Le 12 novembre 1996, la caisse cantonale genevoise de chômage a demandé à être appelée en cause, dans la procédure concernant M. X______, conformément à l'article 29 de la loi fédérale sur l'assurance chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0).

 

Par décision sur incident du 26 novembre 1996, cette requête a été rejetée.

 

La caisse a alors formé un recours de droit administratif au Tribunal fédéral à Lausanne, de même qu'un recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral des assurances à Lucerne.

 

Ces deux causes sont pendantes devant ces instances.

 

17. Par courrier du 6 janvier 1997, M. Y______ a informé le Tribunal administratif du fait qu'il avait repris un commerce. Il a renoncé aux conclusions principales de son recours, tout en persistant dans ses conclusions subsidiaires.

 

EN DROIT

 

1. Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables (art. 8 al. 1 ch. 10 de la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits du 29 mai 1970 - LTA - E/3,5/1; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E/3,5/3; art. 85 de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B/6/1; art. 39 ch. 2 let. C et 94 al. 5 du statut du personnel de la commune de Vernier (ci-après : le statut).

 

2. Selon l'article 111 de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (OJ - RS 173.110) les recours de droit administratif formés au Tribunal fédéral à Lausanne - de même que ceux formés au Tribunal fédéral des assurances à Lucerne, par renvoi prévu à l'article 132 OJ - n'ont pas d'effet suspensif, sauf si la décision contestée porte condamnation à une prestation en argent ou si le président de la Cour le décide.

 

En l'espèce, aucune décision d'effet suspensif n'a été notifiée au Tribunal administratif; un tel effet n'a pas été requis par la caisse. Dès lors, rien ne s'oppose à ce que le Tribunal administratif tranche le litige au fond. Au surplus, les arrêts des juridictions fédérales n'auront aucune influence sur l'issue du litige.

 

 

3. a. Au nombre des devoirs et obligations des fonctionnaires communaux figure le respect des intérêts de la commune et l'abstention de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 12 du statut).

 

Le fonctionnaire a le devoir d'entretenir des relations dignes et correctes avec ses supérieurs, collègues et subordonnés, et celui de faciliter la collaboration entre ces personnes. (art. 13 al. 1 let. a du statut).

 

Il se doit de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (art. 13 al. 1 let. c du statut) et de s'abstenir d'attaquer ou de contester la gestion de l'administration municipale (art. 13 al. 2 du statut).

 

Enfin, il s'engage à remplir tous les devoirs qu'implique sa fonction consciencieusement et avec diligence, tout en se conformant aux instructions de ses supérieurs (art. 14 al. 1 du statut).

 

b. Dans la présente cause, le conseil administratif reproche aux recourants de s'être volontairement introduits à deux reprises dans la messagerie informatique de leur supérieur, le conseiller administratif B______ : la première fois afin de prendre connaissance du message litigieux; la seconde, quelques heures plus tard, dans le but d'imprimer le message incriminé. Lors de l'audience de comparution personnelle, les recourants ont admis les faits, en précisant que, dans le premier cas, il s'agissait d'un jeu.

 

Il leur est d'autre part reproché d'avoir déposé une plainte pénale contre un conseiller administratif alors que, comme l'a relevé le Procureur général dans l'ordonnance de classement de ladite plainte, le contenu du message litigieux n'était absolument pas de nature à déconsidérer les recourants.

 

Il leur est en dernier lieu reproché de ne pas avoir collaboré à l'enquête administrative.

 

c. Les griefs ci-dessus sont absolument fondés. Si, au vu de l'absence de protection, il est douteux que la manipulation informatique à laquelle les recourants ont procédé puisse être pénalement relevante, elle n'en reste pas moins moralement inadmissible. Ce reproche est aggravé par l'utilisation que MM. X______ et Y______ ont faite des informations obtenues. Leur absence de dialogue franc, l'interprétation qu'ils ont faite du message informatique selon laquelle leur honneur était atteint, leur manque de franchise tant lors du rendez-vous avec le conseiller administratif I______ - auquel ils ont parlé de rumeurs de licenciement, sans faire état de leur connaissance du message dont il était l'auteur - leur absence de collaboration au cours de l'enquête administrative où ils ont refusé de donner certaines informations sur la manière dont ils avaient eu connaissance du message, la façon dont ils ont interprété les conversations qu'ils avaient eues avec M. N______ et avec le brigadier Q______, violent manifestement le devoir qu'ont les fonctionnaires d'entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, soit un des devoirs de leur fonction.

 

4. a. L'article 33 alinéa 1 du statut prévoit que le fonctionnaire qui enfreint ses devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, est passible d'une sanction disciplinaire

 

Ces dernières sont, par ordre de gravité :


 

- l'avertissement

- le blâme

- la mise à pied jusqu'à deux jours avec suppression de traitement

- la suppression de l'augmentation annuelle de traitement pour l'année à venir

- la mise à pied jusqu'à un mois avec suppression de traitement

- la réduction du traitement, temporaire ou définitif, dans les limites de la catégorie

- la rétrogradation temporaire ou définitive dans une classe inférieure, avec réduction de traitement dans les limites de la nouvelle catégorie

- la mise au temporaire, l'intéressé perdant sa qualité de fonctionnaire, mais restant engagé sur la base d'un contrat de droit privé

- la révocation

 


Le cumul de sanctions est possible (art. 34 ch. 1 et 2 du statut).

b. Lorsque l'autorité est amenée à choisir la sanction appropriée, elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation, subordonné toutefois au respect du principe de la proportionnalité qui joue un rôle déterminant en matière disciplinaire (GYGI, Verwaltungsrecht, Berne 1986, p. 335; ATA du 29 avril 1992 en la cause D.).

 

c. Il appartenait donc au Conseil administratif, pour choisir la sanction, de mettre en balance des intérêts contradictoires opposés avant de se déterminer.

 

Dans le cas présent, le fait que MM. X______ et Y______ aient pénétré la première fois dans la boîte aux lettres informatique de M. B______, leur supérieur hiérarchique, bien qu'en soi critiquable, résulte dans une certaine mesure des carences de sécurité de la messagerie de la commune. Le deuxième accès à la boîte aux lettres, qui visait à imprimer le message litigieux, apparaît extrêmement grave, car il est exclu qu'ils aient agi par jeu. Leur attitude ultérieure paraît, quant à elle, d'une gravité lourde, dans la mesure où un Conseil administratif doit pouvoir attendre des plus hauts fonctionnaires de sa police qu'ils admettent clairement et franchement leurs erreurs. Bien au contraire, MM. X______ et Y______ n'ont pas assumé leurs torts, mais ont interprété le texte du message et les avertissements qu'une connaissance leur avait donnés comme les signes d'un complot ourdi par le Conseil administratif, plutôt que comme une indication pour rapidement et clairement assainir la situation et ils ont caché leurs agissements jusque dans les écritures de recours au Tribunal administratif.

 

Ainsi, la gravité du comportement des recourants et la rupture de confiance qu'il entraînait, ne permettait plus à l'autorité de leur confier des postes dans l'administration communale.

 

Le choix de la sanction apparaît dès lors judicieux, et la révocation sera confirmée.

 

d. Cette solution est encore renforcée par le fait que le Conseil administratif a accordé aux recourants trois mois de salaire. Ils se trouvent dès lors dans une situation semblable à celle d'une personne licenciée, l'éventuelle violation du droit d'être entendu ayant en tout état pu être réparée au cours de la procédure de recours, le Tribunal administratif ayant un plein pouvoir d'examen (ATF 118 Ib 296, consid. 3a; ATF non publié Th. P. du 3 septembre 1996). En employant deux personnes en qui il avait perdu confiance à juste titre, le Conseil administratif ne pouvait plus continuer à effectuer sa tâche; par conséquence, un licenciement aurait été justifié.

 

5. Au vu de ce qui précède, les recours seront rejetés.

 

La commune de Vernier ayant agi par le ministère d'un avocat, une indemnité de procédure en 1'500.- Frs lui sera allouée, à la charge des recourants, conjointement et solidairement.

 

Un émolument de procédure de 1'500.- Frs sera mis à la charge des recourants, conjointement et solidairement.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable les recours interjetés les 29 juillet 1996 par Monsieur X______ et Monsieur Y______ contre les décisions du 26 juin 1996 du conseil administratif de la commune de Vernier;

 

 

au fond :

 

rejette les recours;

 

alloue une indemnité de procédure de 1'500.- Frs à la commune de Vernier, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement;

 

met un émolument de 1'500.- Frs à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement;

 

dit que conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature des recourants ou de leur mandataire; il est adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14; le présent arrêt et les pièces en possession des recourants, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

communique le présent arrêt, en copie, à Me Jean-Michel Buhler, avocat des recourants et à Me David Lachat, avocat de la commune intimée.

Siégeants : M. Schucani, président, Mme Bonnefemme-Hurni, MM. Thélin, Paychère, juges, M. de Boccard, juge suppléant.


 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste : le président :

 

V. Montani D. Schucani

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le p.o. la greffière :

 

Mme J. Rossier-Ischi