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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1258/2022

ATA/1060/2023 du 26.09.2023 sur JTAPI/311/2023 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1258/2022-LCI ATA/1060/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 septembre 2023

3ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Didier BOTTGE, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC intimés

et

B______,

représenté par Me Philippe JUVET, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 mars 2023 (JTAPI/311/2023)


EN FAIT

A. a. A______ est propriétaire de la parcelle no 2'829 (ci-après : la parcelle) de la commune d'Avully (ci-après : la commune), sise ______ route du Moulin-Roget. Elle est issue de la division de l’ancienne parcelle n° 1'093 en trois nouvelles parcelles nos 2'829, 2'830 et 2'831, ces deux dernières parcelles appartenant à des tiers.

Deux bâtiments nos 1______ et 2______, qu'elle occupe avec son époux et leur fils, sont érigés sur la parcelle.

b. B______ est propriétaire de la parcelle no 883 de la commune, sise ______ route du Moulin-Roget, laquelle supporte deux bâtiments, nos 3______ et 4______.

Il possède par ailleurs le bâtiment n° 5______, sis sur la parcelle n° 416 de la commune, collé au bâtiment n° 3______. Ce bâtiment n° 5______ dispose d'une cour avec accès sur la voie publique (route du Moulin-Rouget) permettant à son propriétaire d’y stationner plusieurs véhicules, tandis que le bâtiment n° 3______ dispose d'une voie d'accès directe sur la route précitée.

c. Les parcelles sont sises en zone 4B protégée. Au sud se trouvent des champs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


d. Les bâtiments nos 1______ et 3______ sont séparés par une ruelle implantée à parts presque égales sur les parcelles nos 2'829 et 883, dont la limite de propriété est tracée dans la longueur du passage, de sorte que les parties en sont chacune propriétaires par moitié.

Ce passage, d'une largeur variant entre 3.15 et 3.25 m, qui se prolonge jusqu'à la route du Moulin-Roget, sépare également à parts presque égales le bâtiment no 6______, sur la parcelle no 2'830, du bâtiment no 3______, de sorte que les tiers propriétaires de la parcelle no 2'830 possèdent également la moitié d’un tronçon de la ruelle, partie sur laquelle la parcelle n° 2'829 bénéficie d’une servitude de passage. La ruelle est le seul accès possible à la route du Moulin-Roget pour la parcelle n° 2'829.

e. Par décision du 25 mai 2021 (APA/7______/1), le DT a délivré à B______ l’autorisation d’installer un bac à fleurs en acier d’un diamètre de 80 cm dans la partie de la ruelle lui appartenant.

En l’absence de recours, cette décision est entrée en force.

f. Par décision du 24 mars 2022 (APA/8______/1), le DT a autorisé A______ à installer un nouveau portail, à un emplacement identique au portail existant, sur sa parcelle n° 2'829. Elle a expliqué que son portail empiétait légèrement sur la parcelle de B______.

B. a. Le 4 février 2022, B______ a déposé une demande d’autorisation de construire en procédure accélérée (ci-après : APA) en vue de déplacer le portail d’accès à son jardin sur sa parcelle n° 883. Elle a été enregistrée sous les références enregistrée sous le n° APA/9______/1.

b. Dans le cadre de l’instruction de cette demande, les préavis suivants ont été émis :

-          favorable sans observations par la direction des autorisations de construire (ci‑après : DAC), le 9 février 2022 ;

-          favorable sans observation par la police du feu, le 9 février 2022 ;

-          favorable sous conditions par l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN), soit la prise en compte d’un espace au sol d’au minimum 15 à 20 cm afin de permettre le passage de la petite faune sous l’ouvrage autorisé, le 10 février 2022.

Le défaut de réponse du service des monuments et des sites a été considéré comme une approbation sans réserve, conformément à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et la commune a indiqué, le 9 février 2022, ne pas être concernée.

C. a. Le 24 février 2022, suite à l’échec de la tentative de conciliation devant le Tribunal de première instance (ci-après : TPI), A______ a saisi cette instance civile en vue de l'inscription d'une servitude de passage C/______/2021.

b. La cause C/______/2021 est toujours pendante.

D. a. Par décision du 11 mars 2022, le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a délivré l’autorisation APA/9______/1.

Les droits des tiers demeuraient réservés, tout comme l’examen, par les autorités compétentes, de toute demande d’autorisation qu’impliquait, notamment à teneur des législations fédérales et cantonales, l’utilisation, conformément à leur destination, des constructions autorisées. Toutes les dispositions de la LCI devaient être respectées et les conditions figurant dans le préavis de l’OCAN devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de la décision.

b. Par acte du 21 avril 2022, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation ; subsidiairement, à la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans la procédure en inscription d'une servitude. Préalablement, l'audition des parties ainsi qu'un transport sur place étaient requis.

c. Après l’échange de nombreuses écritures, le TAPI a rejeté le recours.

Il n’y avait pas lieu d’attendre que le TPI se détermine sur la demande de A______ d’inscription d’une servitude de passage. Cette procédure n'avait pas d'influence directe sur la cause. La demande de suspension de la procédure administrative était écartée.

La question de savoir si l’intéressée pouvait se prévaloir d’un intérêt digne de protection à s’opposer à la réalisation des constructions autorisées souffrait de demeurer ouverte vu l’issue du litige.

La construction était prévue hors de l’assiette concernée par la servitude de jour dont se prévalait A______. L’accord de droit privé qu’elle invoquait n’entrait pas dans le pouvoir de cognition du TAPI, mais relevait du droit privé.

A______ ne pouvait se prévaloir en l’état d’un quelconque droit à passer sur la partie de la ruelle appartenant à B______. Partant, il n’apparaissait pas qu’elle serait impactée par la réalisation de l’ouvrage autorisé, qui n’empiétait pas sur son propre terrain et ne modifiait aucunement sa situation sur le plan juridique. Le passage sur sa partie de cette ruelle puis, dans le prolongement de cette partie, sur la partie de la ruelle appartenant à la parcelle n° 2'830, sur laquelle elle bénéficiait d’un droit de passage, était garanti. Elle ne pouvait en l’état se prévaloir d’un droit à y accéder en voiture, de sorte que l’impossibilité alléguée, du fait de l’installation de l’ouvrage autorisé, d’accéder en voiture à l’extrémité de la ruelle ne pourrait péjorer sa situation. Cette situation était due à la division de la parcelle originelle n° 1'093 en trois parcelles, dont celle de A______, effectuée par ses parents. L’utilisation de la parcelle lui appartenant n’était nullement entravée par la construction litigieuse. S’agissant en particulier des pompiers, la police du feu avait préavisé favorablement le projet sans observations le 9 février 2022. S’agissant des inconvénients rencontrés lors de l’intervention de divers prestataires sur sa parcelle, notamment C______, en terme d’accès avec des véhicules, l’absence d’accès direct à sa parcelle au moyen de véhicules dépassant la largeur de la partie de la ruelle lui appartenant ou sur laquelle elle possédait un droit de passage était dû à la situation de son bien et non à la réalisation de l’ouvrage autorisé.

Enfin, l’ouvrage autorisé ne constituait pas une construction de peu d’importance ni une construction de très peu d’importance. Partant, la prétendue violation de l’art. 244 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01) tombait à faux.

E. a. Par acte du 2 mai 2023, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Elle a conclu à son annulation et à celle de l’APA/9______-1. Préalablement, la procédure devait être suspendue jusqu’à droit connu dans la procédure en inscription d’une servitude, un transport sur place et une audience de comparution personnelle des parties ordonnés.

L’art. 14 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) avait été violé. La demande d’inscription de la servitude de passage avait une influence directe sur la cause puisque dans l’hypothèse où l’existence d’une servitude serait admise, la construction du portail litigieux empêcherait l’exercice de celle-ci.

Son droit d’être entendue avait été violé. Les actes d’instruction sollicités, soit le transport sur place et la comparution personnelle des parties, étaient indispensables pour un établissement complet des faits.

Les art. 14 LCI, 19 al. 1 et 22 al. 2 let. b de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700) avaient été violés et l’autorité intimée avait abusé de son pouvoir d’appréciation.

b. Par courrier spontané du 11 mai 2023, la recourante a porté à la connaissance de la chambre administrative des « faits nouveaux ». Le 5 mai 2023, la société C______ était intervenue pour effectuer des travaux sur la parcelle de l’intimé. Le camion n’avait pas été en mesure de stationner dans la ruelle en raison de l’obstruction faite par l’intimé. Il s’était stationné sur la parcelle de ce dernier. Toutefois, eu égard à la taille du camion, il dépassait largement sur la voie publique. Son stationnement empêchait tout croisement et représentait un réel danger pour les deux-roues et les piétons en raison du manque de visibilité et du risque de déportements sur la voie d’en face. L’obstruction de la ruelle, que ce soit par l’installation d’un pot de fleurs de plusieurs centaines de kilos ou par la construction d’un portail, portait atteinte à la sécurité routière alors qu’elle aurait pu être évitée par le stationnement du camion dans la ruelle litigieuse.

c. Le département a conclu au rejet du recours ainsi que des requêtes en suspension de la procédure et en mesures d’instruction.

d. L’intimé a conclu au constat que la recourante n’avait pas la qualité pour agir et au rejet de ses conclusions préalables. Elle n’avait aucun droit d’emprunter le passage avec un véhicule et n’était pas touchée par le déplacement du portail. Elle commettait un abus de droit en recourant contre cette APA alors qu’elle n’avait pas contesté celle relative au pot de fleurs, dont le résultat était identique.

e. Dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses conclusions. Elle louait des places de parking à plus de 200 m de chez elle, ce qui entraînait de véritables inconvénients au quotidien ainsi qu’un danger pour la circulation. Jusqu’au mois d’octobre 2021, l’intimé ne s’était pas opposé à ce que la ruelle soit empruntée, dans la totalité de la largeur, par des véhicules. Ce passage n’engendrait que peu de nuisances qui, en tous les cas, n’excédait pas ce qui pouvait être demandé à l’intimé de tolérer. La route du Moulin-Roguet faisait l’objet d’un trafic important de voitures, soit environ 3'600 passages quotidiens moyens.

En 2008, dans le cas d’une demande en autorisation d’une installation de salle de bains et d’une cuisine dans le studio du bâtiment n° 2______ de la recourante, la police du feu avait rendu un préavis favorable, sous réserve notamment que les voies d’accès des engins des services d’incendie et de secours soient conformes à la directive n° 7 du règlement d’application sur la loi sur la prévention des sinistres, l’organisation et l’intervention des sapeurs-pompiers (F4 05. 01).

f. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile et devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

La question de la qualité pour recourir souffrira de rester indécise, le recours devant en tous les cas être rejeté, conformément aux considérants qui suivent.

2.             La recourante sollicite la suspension de la procédure dans l’attente de l’issue de sa demande d’inscription d’une servitude de passage, pendante devant le TPI.

2.1 Selon l’art. 14 al. 1 LPA lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions. Cette disposition est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/444/2023 du 26 avril 2023 consid. 3.1).

2.2 En l’espèce, le sort de la présente procédure ne dépend pas de celle pendante devant le TPI, les problématiques étant différentes. Le présent litige se limite à la conformité au droit des constructions de la requête déposée par l’intimé. Cette question est indépendante de l’éventuelle inscription ultérieure d’une servitude de passage. Tout au plus, l’intimé pourrait se voir contraint d’enlever l’installation s’il devait l’avoir déposée avant l’issue de la procédure civile. À ce titre, la recourante ne peut être suivie lorsqu’elle évoque, à propos d’un portail et d’une clôture, une installation « pérenne et définitive qui ne peut être enlevée sans autre ». Il ne sera en conséquence pas donné suite à la demande de suspension de la procédure, étant rappelé la formulation potestative de l’art. 14 LPA.

3.             La recourante sollicite son audition et un transport sur place.

3.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285
consid. 6.3.1). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 ; 141 III 28 consid. 3.2.4).

Il n’existe par ailleurs pas de droit à une audition personnelle de l’intéressée, celle‑ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause, ce que la recourante a eu l’occasion de faire tant devant le TAPI que devant la chambre de céans (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 3.1.1).

3.2 En l’espèce, la recourante sollicite ces mesures d’instruction au motif que le TAPI aurait mal établi les faits. Toutefois, contrairement à ce qu’elle soutient, les premiers juges ont dûment retenu qu’elle pouvait accéder à sa parcelle depuis la voie publique à pied et que l’installation litigeuse empêcherait un passage en voiture, à l’instar du bac à fleurs, dûment autorisé et non contesté. Le plan communiqué à l’OAC permet par ailleurs de comprendre que la clôture et le nouveau portail seront installés à l’intérieur du passage ce qui revient à condamner l’accès en voiture à sa propriété. Les plans, schémas et photographies versées au dossier sont suffisants pour comprendre l’impact de la réalisation du projet litigieux dans la ruelle, ces informations pouvant encore être complétées par les données disponibles par le système d’information du territoire à Genève (ci-après : SITG). Le transport sur place n’est pas nécessaire.

La recourante a eu l’occasion de s’exprimer par écrit dans le cadre de son acte de recours, puis dans une écriture spontanée et dans sa réplique ainsi que de produire toutes les pièces qu’elle jugeait nécessaires. Elle n’indique pas ce qu’elle n’aurait pas été en mesure d’expliquer par écrit ou qui ne figurerait pas déjà au dossier. La chambre de céans dispose ainsi d'un dossier complet.

Il ne sera en conséquence pas donné suite aux demandes d’audition et de transport sur place.

4.             Le recourante se plaint d’une constatation inexacte des faits en lien avec la gêne occasionnée sur la voie publique, et notamment pour les Transports publics genevois (ci-après : TPG), lors des interventions d’C______. Elle prétend que tout véhicule stationnant sur la voie publique ne pourra être garé correctement et entravera la circulation routière, créant un danger pour ses usagers.

En l’espèce, ce fait n’est pas pertinent. Le chemin Moulin-Roguet fait environ 4 m de largeur devant les parcelles concernées. Il ressort des photos produites par la recourante que le camion de l’entreprise concernée a pu se parquer dans une cour et que seul l’arrière du véhicule dépassait sur la chaussée. Il s’agit en l’occurrence d’un véhicule d’une taille certaine, ce qui relève du choix de l’entreprise. Pour autant que l’intervention de ce camion doive être considérée comme problématique, ce qui apparaît douteux, d’autres solutions existent au niveau de l’entreprise, notamment l’éventuel choix d’un véhicule plus petit et d’un stationnement dans l’alignement de la rue. En tant qu’il porte sur les modalités d’intervention d’une entreprise privée, sans nécessaires incidences sur le domaine public, ce fait n’est pas pertinent.

Le grief est infondé.

5.             La recourante se plaint d’une violation des art. 14 LCI, 19 al. 1 et 22 al. 2 let. b LAT, ainsi que d’un abus du pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée.

5.1 L'art. 22 LAT prévoit qu'aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (al. 1). L'autorisation est notamment délivrée si le terrain est équipé (al. 2 let. b). Selon l'art. 19 al. 1 LAT, un terrain est réputé équipé lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès.

5.2 Le département peut refuser des autorisations de construire lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public ; ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu'exige son exploitation ou son utilisation ; ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l'égard des voisins ou du public ; offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection ; peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (art. 14 al. 1 let. a à e LCI).

Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. Elle n'a toutefois pas pour but d'empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins. La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y a pas d'abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/372/2020 du 16 avril 2020 consid. 4a et l'arrêt cité).

La notion d'inconvénients graves est une notion juridique indéterminée qui laisse à l'autorité une liberté d'appréciation et n'est limitée que par l'excès ou l'abus de pouvoir. La chambre de céans peut revoir librement l'interprétation des notions juridiques indéterminées, mais contrôle sous le seul angle des limites précitées, l'exercice de la liberté d'appréciation de l'administration, en mettant l'accent sur le principe de la proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable, et sur le respect de l'intérêt public en cas d'octroi d'une autorisation. Les autorités de recours se limitent ainsi à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/69/2021 du 19 janvier 2021 consid. 5a).

5.3 S’agissant de l’accessibilité au réseau routier, le droit fédéral n’exige aucunement qu’une route carrossable mène directement jusqu’au terrain ou au bâtiment projeté pour que celui-ci soit considéré comme équipé. Il suffit qu’il existe une route à proximité, à partir de laquelle il est possible d’accéder à la construction par un chemin piéton. C’est ainsi que l’on peut considérer qu’un terrain est suffisamment équipé, même si les véhicules des services publics ne peuvent l’approcher à moins de 80 m, pour autant bien sûr qu’une intervention efficace reste possible en cas de problème, compte tenu de la dimension du bâtiment projeté, de son affectation et de son accessibilité générale (Eloi JEANNERAT in: Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN, Commentaire pratique LAT : Planifier l'affectation, 2016, n° 24 ad art. 19 LAT et les références citées).

5.4 En l’espèce, l’autorisation querellée ne concerne que la parcelle n° 883 dont l’accès et l’équipement ne sont pas problématiques.

La recourante invoque une violation de la LAT en lien avec sa propre parcelle. Or, comme le relèvent la jurisprudence et la doctrine, l’équipement de sa parcelle n’implique pas de droit à une voie de circulation pour un véhicule jusqu’à sa maison. Elle bénéficie, à pied, d’un accès garanti à son bien immobilier, sur lequel la construction litigieuse n’aura aucune incidence.

La maison de la recourante est située à moins de 40 m de la route et le service du feu a préavisé favorablement et sans observations la construction du portail et de la clôture litigieux. La recourante se prévaut d’un préavis de la police du feu de 2008 en lien avec son bâtiment n° 2______. Force est toutefois de constater que le même service a préavisé, ultérieurement, favorablement, l’autorisation querellée. Si la directive évoque une voie d’accès d’une largeur minimale de 3 m, le service spécialisé a, en l’espèce, considéré que les accès étaient conformes et suffisants.

Les conséquences de l’accord de droit privé du 16 juin 2002 qui garantirait, selon la recourante, un droit de passage dans la ruelle et, subsidiairement, l’accord tacite dont elle aurait bénéficié pendant treize ans ne relèvent pas du droit public.

Dans ces conditions, c’est sans abus de son pouvoir d’appréciation que le département a autorisé l’installation querellée suivant en cela les préavis délivrés, tous positifs, étant encore rappelé que la pose d’un bac à fleurs dans le passage, sur la parcelle de l’intimé, n’avait pas fait l’objet d’un recours.

Pour le surplus, il peut être renvoyé en tant que de besoin, à la motivation détaillée du TAPI.

En tous points infondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de CHF 1'000.- sera allouée à B______ à la charge de la recourante (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette en tant qu’il est recevable le recours interjeté le 2 mai 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 mars 2023 ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______;

alloue une indemnité de CHF 1'000.- à B______ à la charge de A______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Didier BOTTGE, avocat de la recourante, à Me Philippe JUVET, avocat de l’intimé, au département du territoire – OAC ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance

Siégeant : Valérie LAUBER présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

 

la greffière :