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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/664/2021

ATA/925/2021 du 07.09.2021 ( TAXE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/664/2021-TAXE ATA/925/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 septembre 2021

2ème section

dans la cause

 

Monsieur D______

contre

SERVICE DE LA TAXE D'EXEMPTION DE L'OBLIGATION DE SERVIR

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS



EN FAIT

1) Monsieur D______, né le ______ 1990, a été déclaré inapte aux services militaire et civil et à la protection civile le 8 septembre 2010.

2) Il s’est acquitté de la taxe d’exemption de l’obligation de servir (ci-après : TEO) pour les années 2010 à 2017.

3) Le 1er novembre 2018, M. D______ a requis auprès du service de la taxe d’exemption de l’obligation de servir (ci-après : STEO) d’être exempté du paiement de la TEO pour les années à venir.

4) Par courrier du 11 novembre 2018, il a refusé de transmettre au STEO les attestations médicales demandées par ce service. Ce dernier lui a alors indiqué l’adresse du service des affaires militaires sanitaires à Berne auprès duquel il devait entreprendre les démarches visant son exonération. Ce service l’a renvoyé à agir auprès du STEO. M. D______ a alors indiqué au STEO qu’il ne communiquerait aucune information médicale sans savoir quelle autorité était compétente pour répondre à ses questions.

5) Répondant le 19 août 2019 à un courrier de relance de l’administré de janvier 2019, le STEO a rappelé qu’il souhaitait recevoir les attestations médicales réclamées précédemment. Dans le délai imparti, M. D______ a produit lesdites attestations le 29 septembre 2020. Selon celles-ci, il présentait une tension artérielle de 150/90 et de « très fréquentes extrasystoles ventriculaires [ ] monomorphes, isolées, bi- et trigéminées ainsi qu’en doublets avec 16 triplets ». Il n’était toutefois « pas symptomatique de cette arythmie et n’avait apporté aucune plainte sur la feuille d’activité ». M. D______ a relevé que « étant [lui]-même dans la santé et soumis au secret médical », il serait « strict » concernant l’utilisation de ses données et toute violation serait poursuivie.

6) Le 10 décembre 2020, le service médico-militaire a retenu que l’atteinte à l’intégrité de M. D______ était de moins de 40 %.

7) Par décision du 15 janvier 2021, la STEO a rejeté la demande de non assujettissement pour l’année 2018. L’atteinte à l’intégrité de l’intéressé étant inférieure à 40 %, celui-ci ne présentait pas un handicap majeur justifiant l’exonération de la TEO.

Le même jour, le STEO a rendu deux décisions de taxation définitives, respectivement pour 2018 et 2019.

8) La réclamation formée contre ces décisions a été rejetée le 4 février 2021. Aucun élément nouveau ne permettait de revenir sur la décision du 15 janvier 2021 refusant l’exonération.

9) Par acte du 14 février 2021, M. D______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice contre la décision sur réclamation, dont il a demandé l’annulation.

Son état de santé était demeuré inchangé depuis 2010. La procédure d’exonération avait traîné, et il avait été découragé par un employé du STEO à contester les décisions rendues. Il contestait devoir la TEO depuis l’année 2018 et non uniquement celle de 2018. Il s’étonnait de ce qu’il était considéré ne pas être en état d’effectuer un quelconque service, mais apte à payer 100 % de sa taxe militaire. Il demandait un nouvel examen de son dossier et que lui soient indiqués les éléments à la base de la décision. Enfin, il attirait l’attention de la chambre administrative sur l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CEDH) le 12 janvier 2021 dans la cause Ryser c. Suisse.

10) Le STEO a précisé qu’il entendait également rejeter les demandes d’exonération pour les années ultérieures à 2018, pour les motifs développés dans ses décisions. Compte tenu du fait que l’arrêt Ryser de la CEDH, rendu par une chambre, n’était pas définitif, il proposait la suspension de la procédure dans l’attente de l’échéance du délai pour demander le renvoi à la Grande Chambre de la CEDH.

11) Avec l’accord de M. D______, la cause a été suspendue dans l’attente de l’arrêt définitif de la CEDH.

12) À la suite de l’échéance non utilisée du délai pour porter l’arrêt précité devant la Grande Chambre de la CEDH, la présente procédure a été reprise et le STEO invité à répondre au recours.

13) Celui-ci a conclu au rejet du recours.

La présente espèce différait des causes Ryser et Glor traitées par la CEDH, en ce sens que la loi examinée dans ces causes avait été modifiée. Le recourant aurait ainsi pu demander une intégration spéciale, possibilité qui n’existait pas encore pour MM. Glor et Ryser.

14) À la suite de la demande de l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) de pouvoir se prononcer sur le recours, le délai de réplique imparti à M. D______ a été annulé et l’AFC-CH invitée à se déterminer.

Celle-ci a conclu au rejet du recours. Selon la loi, seule la personne souffrant d’un handicap majeur pouvait être exonérée de la TEO. Pour retenir un tel handicap, l’atteinte à l’intégrité résultant de l’état de santé en cause devait atteindre en tout cas 40%, ce qui n’était pas le cas de M. D______. En outre, les arrêts de la CEDH concernaient une situation juridique, qui n’était plus actuelle, la Suisse ayant adapté sa législation en vue de se conformer aux exigences de la CEDH.

15) Dans sa réplique, le recourant a relevé que, son état de santé n’ayant pas changé, il n’avait aucune raison de demander une nouvelle évaluation de son aptitude aux services militaire et civil. Il avait, le jour de son recrutement, demandé qu’une affectation possible lui soit trouvée. Il ne pouvait donc lui être reproché de ne pas avoir cherché à accomplir un service militaire ou de protection civile. Inversement, aucun membre du personnel de recrutement ne lui avait proposé d’effectuer un quelconque service avec adaptation médicale. La durée de la procédure ne lui était pas imputable. Ses questions relatives au secret médical avaient été légitimes.

16) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 31 al. 1 de la loi fédérale sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir du 12 juin 1959 - LTEO - RS 661 ; art. 34 al. 1 et 37 al. 1 de l'ordonnance sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir du 30 août 1995 - OTEO - RS 661.1 ; art. 2 de la loi d'application des dispositions fédérales sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir du 14 janvier 1961 - LaTE - G 1 05).

2) Le litige porte sur la décision rejetant la réclamation du recourant contre le refus de sa demande d'exonération de la TEO formée en 2018. Le montant des taxations 2018 et 2019 n’est pas contesté.

a. Tout homme de nationalité suisse est astreint au service militaire (art. 59 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; art. 2 al. 1 de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire du 3 février 1995 - LAAM - RS 510.10). L'obligation générale du service militaire pour les hommes concrétise le principe de l'armée de milice. Elle trouve son fondement dans la considération politique selon laquelle le fardeau du service militaire doit être réparti si possible d'égale façon, de manière à ce que l'intérêt général pour la chose militaire soit ancré dans le sentiment populaire. Elle n'est pas absolue et sans restriction, mais relative. Il appartient à la législation et à la jurisprudence de définir plus précisément la notion d'obligation de servir. La loi peut en outre prévoir des exceptions, qui doivent toutefois respecter le principe de l'égalité devant la loi (Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, FF 1997 I 1ss, p. 242-243).

Celui qui n'accomplit pas le service militaire ou un service de remplacement doit s'acquitter d'une taxe (art. 59 al. 3 Cst.). Ce principe est rappelé à l'art. 1 LTEO, selon lequel les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou n'accomplissent qu'en partie leurs obligations de servir sous forme de service personnel (service militaire ou service civil) doivent fournir une compensation pécuniaire. L'art. 59 al. 3 Cst. exige une taxe d'exemption en remplacement du service militaire non accompli. Celle-ci est le corollaire du non-accomplissement de l'obligation de servir personnelle. Elle présuppose une obligation de servir. C'est le service militaire ou civil non accompli qui provoque l'obligation de verser la taxe d'exemption. Les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou qui n'accomplissent que partiellement leur service personnel doivent acquitter une taxe d'exemption, réserve faite des exceptions admises par la loi (Message précité, FF 1997 I 1ss, p. 242-243).

L'objectif poursuivi par la taxe n'est pas de sanctionner un comportement, mais d'astreindre celui qui n'accomplit pas ses obligations militaires à une contribution publique de remplacement (ATF 121 II 166 consid. 4). La taxe a pour but d'éviter, parmi les personnes soumises aux obligations militaires, les inégalités criantes entre celles qui effectuent un service et celles qui n'en font pas. Elle constitue à ce titre une contribution de remplacement. Le militaire qui est dispensé d'un service en tire normalement un avantage par rapport aux autres astreints de sa classe d'âge. La perception d'une taxe doit compenser cet avantage, sous la forme d'une prestation financière (ATA/766/2005 du 15 novembre 2005).

b. Sont assujettis à la taxe les hommes astreints au service qui sont domiciliés en Suisse ou à l'étranger et qui, au cours d'une année civile (année d'assujettissement), n'effectuent pas le service militaire ou le service civil qui leur incombe en tant qu'hommes astreints au service (art. 2 al. 1 let. c LTEO). L'assujettissement à la taxe commence au plus tôt au début de l'année au cours de laquelle l'homme astreint atteint l'âge de 19 ans. Il se termine au plus tard à la fin de l'année au cours de laquelle il atteint l'âge de 37 ans (art. 3 al. 1 LTEO).

Le service militaire comprend les services prévus par la législation militaire (art. 7 al. 1 LTEO). En font partie les services d'instruction, qui comprennent notamment l'école de recrues (art. 12 let. a, 41 al. 1 et 49 LAAM). Le service civil comprend les jours de service pris en compte conformément à la législation sur le service civil (art. 7 al. 1bis LTEO). Le service militaire est réputé non effectué lorsque l'homme astreint au service militaire n'a pas accompli un service entier au cours de l'une des années qui suivent celle au cours de laquelle il a effectué l'école de recrues (art. 8 al. 1 LTEO). Le service civil est, quant à lui, réputé non effectué lorsque l'homme astreint n'a pas accompli au moins vingt-six jours de service imputables au cours de l'une des années qui suivent celle au cours de laquelle la décision d'admission est entrée en force (art. 8 al. 2 LTEO). Par ailleurs, si les conditions de l'assujettissement à la taxe sont remplies au cours de l'année d'assujettissement, ce dernier subsiste pour l'année entière (art. 9 LTEO).

c. La taxe est perçue par les cantons (art. 22 al. 1 LTEO). Elle est fixée chaque année, l'année de taxation étant en règle générale, l'année civile qui suit l'année d'assujettissement (art. 25 al. 1 let. a et al. 2 LTEO). L'assujetti peut en tout temps demander que sa prétention à l'exonération soit soumise à un examen dont les conclusions ont des effets sur les taxations non encore passées en force (art. 33 al. 1 OTEO).

d. Les cas d’exemption de la taxe militaire, notamment en raison de handicap ou d’une atteinte à la santé, sont énoncés aux art. 4 et 4a LTEO et 1 à 4 OTEO. Dans ce domaine, le législateur ne voulait pas instituer une dispense générale du paiement de la taxe pour les personnes souffrant de handicap et exemptées de l’obligation de servir pour cette raison (ATF 124 II 241).

Aux termes de l’art. 4 let. a LTEO, est ainsi en particulier exonéré de la taxe quiconque, au cours de l’année d’assujettissement, dispose, en raison d’un handicap physique, mental ou psychique majeur, d’un revenu soumis à la taxe qui, après déduction supplémentaire de prestations d’assurances mentionnées et de frais d’entretien occasionnés par le handicap, n’excède pas de plus de 100 % son minimum vital au sens du droit des poursuites (let. a) ; est considéré comme inapte au service en raison d’un handicap majeur et perçoit une rente ou une allocation pour impotent de l’assurance-invalidité fédérale ou de l’assurance-accidents (let. abis) ; est considéré comme inapte au service en raison d’un handicap majeur et qui n’est pas au bénéfice d’une allocation pour impotent, mais remplit cependant une des deux exigences minimales pour l’octroi d’une telle allocation (let. ater).

Le handicap physique ou mental doit être « majeur », soit présenter une certaine gravité. Cette notion doit être interprétée restrictivement. Selon la jurisprudence, la définition de cette notion utilisée à l’art. 4 al. 1 OTEO, qui se référait à des notions liées à l’application de la législation en matière d’assurance-invalidité, est contraire à la loi. Elle doit être comprise dans un sens différent. À teneur de la jurisprudence, seule une atteinte à l’intégrité de 40 % et plus peut ainsi être qualifiée de handicap majeur au sens de l’art. 4 LTEO (ATF 126 II 275 consid. 4b ; 124 II 241 consid. 4b).

e. Selon le barème de l’atteinte à l’intégrité, soit l’annexe 3 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA - RS 832.202), constitue une telle atteinte de 40 % la perte d’une main ou d’une jambe au niveau du genou.

f. Est apte au service militaire la personne qui, du point de vue médical, satisfait physiquement, intellectuellement et psychiquement aux exigences du service militaire et qui, dans l’accomplissement de ce service, ne nuit pas à sa santé ou à celle d’autrui (art. 2 de l’ordonnance concernant l’appréciation médicale de l’aptitude au service militaire et de l’aptitude à faire du service militaire du 24 novembre 2004 - OAMAS - RS 511.12). La commission de visite sanitaire (ci-après : CVS prend une décision concernant l’aptitude au service militaire conformément aux prescriptions de l’annexe 1 (art. 9 al. 1 OAMAS).

Selon les termes de l’annexe 1 let. 4 ch. 1 de l’OAMAS « décision de la CVS spéciale », dans sa nouvelle teneur entrée en vigueur le 1er janvier 2013 (RO 2012 6493), modifiée depuis, est déclarée « apte au service militaire uniquement dans des fonctions particulières, sous réserve, inapte au tir », une personne déclarée inapte au service militaire et au service de protection civile pour des raisons médicales. Si cette personne n’est pas libérée de l’obligation de payer la taxe et qu’elle a exprimé par écrit sa volonté d’effectuer du service, elle peut être incorporée comme soldat d’exploitation dans une formation de l’instruction et du support. Par cette décision d’aptitude, les autorités militaires permettent désormais aux personnes soumises à la taxe qui le souhaitent d’accomplir du service militaire tout en suivant une carrière civile normale, en vue de mettre en œuvre la jurisprudence de la CourEDH (communiqué de presse du département fédéral de la défense, de la protection de la population et du sport du 14 novembre 2012).

g. Dans l'arrêt Glor c. Suisse du 30 avril 2009, la CourEDH a notamment jugé que, à la lumière du but et des effets de la taxe litigieuse, la différence opérée par les autorités suisses entre les personnes inaptes au service exemptées de ladite taxe et celles qui étaient néanmoins obligées de la verser était discriminatoire et violait l'art. 14 CEDH cum art. 8 CEDH. Le fait que le contribuable avait toujours affirmé être disposé à accomplir son service militaire, mais qu'il avait été déclaré inapte audit service par les autorités militaires compétentes, était essentiel. La discrimination résidait dans le fait que, contrairement à d'autres personnes qui souffraient d'un handicap plus grave, l'intéressé n'avait pas été exempté de la taxe litigieuse - son handicap n'étant pas assez important - et que, alors qu'il avait clairement exprimé sa volonté de servir, aucune possibilité alternative de service ne lui avait été proposée. La CourEDH a souligné l'absence, dans la législation suisse, de formes de service adaptées aux personnes se trouvant dans la situation du requérant (arrêt Glor, par. 96 ; résumé in arrêt du Tribunal fédéral 2C_170/2016 du 23 décembre 2016 consid. 6.1).

h. À la suite de l'arrêt Glor, le Conseil fédéral a modifié, le 14 novembre 2012 (RO 2012 6943), l’OAMAS, comme cela a été exposé plus haut (consid. 2f ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_170/2016 du 23 décembre 2016 consid. 6.2).

i. Dans le récent arrêt Ryser, la CourEDH a considéré que la similarité avec la cause Glor et l’absence de différences factuelles ne justifiaient pas de s’écarter du résultat concernant l’arrêt Glor. Elle prenait note des changements apportés à la législation à la suite de l’arrêt Glor, mais observait qu’ils étaient postérieurs aux faits pertinents de l’affaire Ryser et n’étaient, donc, pas applicables à ce dernier (arrêt Ryser précité § 61 et 62).

3) En l’espèce, il est, à titre préalable, relevé que la durée anormalement longue de la procédure de taxation 2018 et 2019 est regrettable, en particulier l’inaction de l’autorité intimée pendant près de sept mois en 2019, qui n’est pas imputable au recourant.

Cela étant, il n’est pas contesté que ce dernier a été déclaré inapte au service militaire et au service de la protection civile le 8 septembre 2010 en raison de ses problèmes de santé.

a. À la suite de sa demande d’exonération de la TEO en 2018, le service médico-militaire a évalué son taux d’atteinte à l’intégrité à moins de 40 %. Le recourant conteste que ses problèmes de santé ne porteraient pas atteinte à son intégrité, s’offusquant de ce qu’il soit considéré inapte au service militaire, mais apte à 100 % au paiement de la TEO. Or, la décision refusant l’exonération demandée ne fait pas abstraction des problèmes de santé du recourant, mais retient que ceux-ci ne sont pas constitutifs d’une atteinte à l’intégrité de 40 % au minimum. Rien ne permet de s’écarter de l’appréciation du service médico-militaire. Le recourant n’apporte pas d’éléments permettant d’en douter, d’une part. D’autre part, il exerce une activité professionnelle, dans le domaine médical, ce qui ressort de son courrier du 29 septembre 2020 au STEO, et selon le certificat médical annexé à ce courrier, le cardiologue attestait que le recourant n’était pas symptomatique de l’arythmie dont il souffrait et n’avait apporté aucune plainte sur la « feuille d’activité ». La chambre de céans n’a donc pas de raison de s’écarter de l’appréciation effectuée par le service médico-militaire, service spécialisé dans l’évaluation de la capacité à effectuer le service militaire, qui a retenu une atteinte à l’intégrité inférieure à 40 %.

Le recourant ne saurait ainsi être considéré comme inapte au service en raison d’un handicap majeur et se prévaloir d’une exonération de la taxe en application de l’art. 4 LTEO.

b. À bien le comprendre, le recourant considère par ailleurs que la décision litigieuse consacre une discrimination, incompatible avec la CEDH, dès lors qu’il ne lui avait pas été possible d’effectuer un service de remplacement comme alternative au paiement de la taxe.

Il ne saurait être suivi sur ce point. Si son cas est, certes, similaire à celui ayant fait l’objet de la jurisprudence susmentionnée, au regard du degré de l’atteinte à l’intégrité inférieur à 40 %, ce seul élément n’apparaît pas suffisant. En effet, les deux arrêts en question ont été rendus sur la base de l’ancien droit applicable aux exonérations de la TEO. Il appartient aux États contractants de mettre en œuvre la jurisprudence rendue par la CourEDH, en adaptant au besoin leur droit interne, ce que la Suisse a fait à compter du 1er janvier 2013 en permettant aux personnes déclarées inaptes mais désirant effectuer un service de remplacement comme alternative au paiement de la taxe de le faire, à condition notamment que la personne concernée exprime par écrit sa volonté en ce sens, étant précisé que cette réglementation ne peut en aucun cas avoir d’effet rétroactif, c’est-à-dire s’appliquer à des situations antérieures à son entrée en vigueur.

Le recourant n’a cependant pas sollicité, après l’entrée en vigueur le 1er janvier 2013 de la possibilité d’effectuer un service de remplacement comme alternative au paiement de la taxe, de faire l’objet d’une incorporation spéciale. Ce n’est que dans sa réclamation de janvier 2021 et son recours que l’intéressé expose qu’il avait été réformé, malgré « son insistance ». Il ne ressort pas du dossier et le recourant ne soutient pas qu’il aurait d’une quelconque manière manifesté après le 1er janvier 2013 et avant le mois de janvier 2021 son intérêt en vue d’accomplir un service de remplacement.

Dans ces circonstances, l’autorité intimée n’a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant que les conditions d’exonération de la TEO n’étaient pas remplies. Le recours sera ainsi rejeté.

Il est encore relevé qu’il ne peut être déterminé si, en exposant dans sa réclamation et son recours qu’il avait été réformé malgré sa volonté d’accomplir ses obligations militaires, le recourant souhaite pouvoir, à compter de 2021, faire l’objet d’une incorporation spéciale ou effectuer une activité dans la protection civile. Cette clarification sera nécessaire avant de procéder à sa taxation TEO 2021. Celle-ci ne relevant cependant pas de la présente procédure, il n’y a pas lieu d’approfondir davantage ce point.

4) Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 février 2021 par Monsieur D______ contre la décision du service de la taxe d’exemption de l’obligation de service du 4  février 2021 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 200.- à la charge de Monsieur D______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur D______, au service de la taxe d'exemption de l'obligation de servir ainsi qu’à l’administration fédérale des contributions.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

M. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :