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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/431/2005

ATA/702/2005 du 25.10.2005 ( JPT ) , ADMIS

Descripteurs : RESTAURANT; AUTORISATION D'EXPLOITER; CERTIFICAT DE CAPACITE; CAFE; AMENDE; EXPLOITANT A TITRE PERSONNEL; SUSPENSION
Normes : LRDBH.4; LRDBH.14 al.1; LRDBH.15 al.1
Résumé : Recours admis contre une décision de suspension de validité du certificat de capacité de cafetier-restaurateur pour une durée de six mois et le prononcé d'une amende de CHF 3'000.-. Le département n'avait pas encore statué sur la requête visant à obtenir une autorisation d'exploiter lorsqu'il a reproché au recourant de n'avoir pas exploité personnellement et effectivement son établissement. Lors des faits reprochés, le recourant n'était pas autorisé à exploiter l'établissement et ne pouvait ainsi commettre l'infraction reprochée.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/431/2005-JPT ATA/702/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 25 octobre 2005

dans la cause

 

Monsieur O __________

contre

DÉPARTEMENT DE JUSTICE, POLICE ET SÉCURITÉ


 


1. Par requête datée du 23 août 2004, Monsieur O __________ a requis du service des autorisations et patentes (ci-après : le service ou le SAP) l’autorisation d’exploiter la discothèque à l’enseigne « X __________».Le propriétaire du fonds de commerce était Monsieur T __________.

A cette requête étaient joints divers documents, notamment un contrat de travail entre M. T __________ et M. O __________, aux termes duquel ce dernier était engagé en qualité d’exploitant responsable, quatre heures par jour. Sa rémunération était de CHF 800.- par mois et il devait toucher de plus une participation au chiffre d’affaires.

2. Le 12 novembre 2004, les gendarmes sont intervenus au dancing « Y ___________ », ex-« X __________», après avoir constaté que de la lumière filtrait à travers la lucarne de la porte. Celle-ci était verrouillée et munie d’une sonnette.

Après avoir sonné, le gendarme verbalisateur s’est vu ouvrir la porte par Monsieur V __________, qui s’est présenté comme étant le nouveau patron. Une femme, Madame L __________, a indiqué être la directrice. Plusieurs dizaines de clients étaient présents.

Entendu ultérieurement, M. V __________, a indiqué que l’enseigne avait changé au début du mois de novembre 2004. Il avait passé un contrat de gérance libre avec M. T __________. Ce contrat stipulait que M. V __________ louait la patente de M. O __________, pour la somme de CHF 800.- par mois. L’établissement était ouvert les jeudi, vendredi et samedi soir, de 22h00 à 5h00 du matin. Mme L __________ allait suivre les cours visant à l’obtention de la patente de cafetier. Depuis qu’il avait repris l’établissement, il n’avait fait aucune démarche, car c’était M. T __________ qui s’occupait de tout. A sa connaissance, M. O __________ avait quitté la Suisse. Il l’avait vu trois fois.

3. Dans ses lettres du 17 décembre 2004 à MM. T __________, V __________ et O __________, le département de justice, police et sécurité (ci-après : le département) a exposé que, selon le rapport de police du 15 novembre 2004, ce dernier n’exploitait pas personnellement et effectivement l’établissement et qu’il servait de prête-nom à M. V __________. En outre, l’établissement avait changé de nom sans que cela ait été annoncé au département et le registre du personnel n’avait pas pu être présenté.

Le département a reproché à M. T __________ d’avoir confié l’exploitation de son établissement à M. V __________, alors que M. O __________ était censé en être l’exploitant, de ne pas s’être soucié de savoir par qui le dancing « Y ___________  » était réellement exploité et de ne pas avoir annoncé la fin de l’activité réelle et effective de M. O __________.

M. V __________ se voyait, quant à lui, reprocher d’avoir exploité l’établissement avec Mme L __________ sous le couvert d’un prête-nom et sans être au bénéfice d’une autorisation d’exploiter.

Quant à M. O __________, il lui était reproché de ne pas avoir annoncé le changement d’enseigne de l’établissement, de servir de prête-nom à M. V __________ et de ne pas avoir respecté son obligation concernant le registre du personnel.

Un délai était imparti à ces personnes pour qu’elles exercent leur droit d’être entendues.

4. Le 29 décembre 2004, M. O __________ a expliqué que, contrairement à ce qui avait été allégué, il n’avait jamais quitté la Suisse, mais qu’il s’était rendu au Locle au cours de la deuxième semaine du mois de novembre 2004.

Il avait déposé une requête pour obtenir une autorisation d’exploiter, mais le contrat qu’il avait signé avec M. T __________ n’avait jamais été appliqué. Celui-ci avait changé d’avis et proposé l’établissement à une autre personne, M. V __________. Ce dernier ne pouvant exploiter le commerce sans une patente, et son épouse n’ayant pas encore obtenu cette dernière, il avait donné à M. O ________ une procuration collective à deux dans l’entreprise individuelle « Y ___________ Z __________ », dès l’inscription collective au Registre du commerce, le 1er novembre 2004.

Le 3 novembre 2004, M. O __________ avait informé le service des changements survenus. Le 11 du même mois, le SAP lui avait confirmé que son dossier était complet, mais que le contrat de travail n’était pas conforme. Un nouveau contrat de travail avait été produit le 17 décembre 2004.

Le même jour, l’intéressé avait encore indiqué au service que le dancing « X __________» s’appellerait désormais « Y ___________ Z __________ ». On ne pouvait donc lui reprocher d’avoir servi de prête-nom, dans la mesure où toutes les démarches avaient été entreprises.

5. Par décision du 24 janvier 2005, le département a infligé à M. O __________ une amende de CHF 3'000.-. Il a en outre suspendu la validité de son certificat de capacité pour une durée de six mois.

6. M. O __________ a saisi le Tribunal administratif d’un recours le 23 février 2005, reprenant et développant les éléments figurant dans sa détermination du 29 décembre 2004. L’autorité n’avait pas tenu compte de ses explications. Il n’avait jamais quitté Genève, mais s’était rendu au Locle pour chercher des meubles lorsque la police était intervenue au dancing.

7. Le 29 mars 2005, le département s’est opposé au recours. Les déclarations de M. V __________, le 15 novembre 2004, étaient claires quant au rôle de M. O__________. La faible rémunération fixée dans le contrat de travail initial et le fait que l’inscription au Registre du commerce ne donne au recourant qu’une procuration collective à deux montraient qu’il ne disposait d’aucun pouvoir et que M. V __________ était bien le seul exploitant.

8. Les parties ont été entendues en comparution personnelle le 20 juin 2005.

Le département a indiqué qu’aucune autorisation n’avait été délivrée dans ce dossier, mais qu’il considérait qu’un requérant était exploitant d’un établissement dès le dépôt de la requête.

M. O __________ a maintenu qu’il avait commencé à exploiter l’établissement le 1er novembre 2004. L’autorité avait été informée du changement d’enseigne le 3 novembre 2004 par courrier recommandé. Il avait exploité l’établissement le week-end des 8 et 9 novembre. Le week-end suivant, il avait indiqué au propriétaire qu’il serait absent, car il devait aller au Locle chercher des meubles. Il n’avait jamais quitté la Suisse où il était domicilié depuis quatorze ans.

Pendant les mois de septembre et octobre, l’établissement avait été exploité par M.T __________, qui avait une patente. L’établissement était fermé au mois de décembre. Il avait été présent pendant toutes les ouvertures sauf lors de son week-end au Locle.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’article 4 alinéa 1 de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement du 17 décembre 1987 (LRDBH - I 2 21), l’exploitation de tout établissement régi par cette loi est soumise à l’obtention préalable d’une autorisation d’exploiter délivrée par le département. Lorsqu’il est saisi d’une requête, le département procède à son examen dans un délai de deux mois, à compter du jour où toutes les pièces requises lui ont été fournies (art. 14 al. 1 LRDBH). Il délivre l’autorisation si les conditions d’octroi sont réalisées (art. 15 al. 1 LRDBH).

En l’espèce, il ressort du dossier que M. O __________ a déposé une requête visant à obtenir une autorisation d’exploiter un dancing à l’enseigne « X __________» le 23 août 2004. Le département n’a jamais statué sur cette requête. Le 12 octobre 2004, le SAP a demandé à M. O __________ de produire un extrait de l’inscription au Registre du commerce, ce que l’intéressé a fait le 3 novembre 2004, précisant alors que l’enseigne de l’établissement avait été modifiée.

Lors des faits qui lui sont reprochés, le recourant n’était pas autorisé à exploiter l’établissement. Dès lors, le département ne peut lui reprocher de ne pas l’avoir fait personnellement et effectivement, de ne pas avoir respecté ses obligations concernant le registre du personnel et de ne pas avoir informé le SAP de la fin réelle et effective de son activité.

Partant, le recours sera admis et la décision litigieuse annulée.

3. Vu l’issue du recours, un émolument en CHF 1'000.- sera mis à la charge du département, qui succombe (art. 87 LPA). Aucune indemnité ne sera allouée au recourant, qui n’y conclut pas.

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 février 2005 par Monsieur O __________ contre la décision du département de justice, police et sécurité du 24 janvier 2005 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision du département de justice, police et sécurité du 24 janvier 2005 ;

met à la charge du département de justice, police et sécurité un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

communique le présent arrêt à Monsieur O __________ ainsi qu'au département de justice, police et sécurité.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la secrétaire-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :