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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1958/2008

ATA/539/2008 du 28.10.2008 ( FIN ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1958/2008-FIN ATA/539/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 28 octobre 2008

 

dans la cause

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS DE L’IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT

et

Madame et Monsieur P______

 


 


EN FAIT

1. Dans la déclaration fiscale 2003, déposée le 2 août 2004, Madame et Monsieur P______ (ci-après : les contribuables), domiciliés à Genève, ont déclaré pour seuls revenus ceux provenant de l’activité dépendante de Mme P______, à hauteur de CHF 123'400.-. Calculé sur un revenu imposable de CHF 103'700.-, l’impôt dû s’élevait à CHF 2'674.-.

2. Dans l’intervalle, M. P______ a fait l’objet d’une procédure pénale, dans le cadre de laquelle il a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon courant 2003. Sur le plan pénal, il en est ressorti que M. P______ avait perçu des revenus, notamment des commissions, qu’il n’avait pas déclarées.

3. Le 5 avril 2004, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC-GE) a ouvert à l’encontre des contribuables une procédure en rappel et en soustraction d’impôt pour les périodes fiscales 1995-1996 à 2002. Le 21 avril 2005, ces procédures ont été étendues à l’année fiscale 2003.

4. Sur la base des renseignements et des pièces complémentaires fournies par les contribuables, l’AFC-GE a notifié à ces derniers le 29 novembre 2005 trois bordereaux « rappel d’impôt » pour les années 2001, 2002 et 2003 ainsi qu’un bordereau d’amende. Pour l’année 2003, le revenu brut des contribuables était fixé à CHF 214'195.- et le supplément d’impôt s’élevait à CHF 8'289.-.

5. L’AFC-GE a partiellement admis le 21 février 2006 la réclamation déposée le 20 décembre 2005 par Mme P______ à l’encontre des bordereaux précités.

Ainsi, un nouveau bordereau amende était notifié au seul nom de M. P______. Les bordereaux « rappel d’impôt » 2001 et 2002 étaient partiellement dégrevés. Quant au bordereau « rappel d’impôt » 2003, il était maintenu dans sa totalité.

L’AFC-GE a retenu pour l’année fiscale 2003 les commissions versées par des tiers, respectivement Monsieur G______ (US$ 48'000.-, soit CHF 64'576.-), le Cheikh Z______ (US$ 15'000.-, soit CHF 20'180.-) et par la société A______ S.A. (CHF 20'000.-), sans précision quant au taux de change retenu. Concernant cette dernière commission, elle résultait de la déclaration de Monsieur H______, ancien administrateur de la société A______. S.A., faite lors de son audition du 28 avril 2004 devant le juge d’instruction.

6. Le 8 mars 2006, M. P______ a adressé un courrier à l’AFC-GE concernant la taxation ICC 2003/IFD 2003.

M. H______ ne lui avait versé aucune commission en 2003. Il demandait la correction de la taxation en conséquence. Il précisait être entré en prison en octobre 2003 et n’avoir pas fait d’affaires durant cette année.

Etait jointe une attestation établie par M. H______ le 8 mars 2006 allant dans le sens de ce qui précède.

7. L’AFC-GE a traité ce courrier comme un recours, qu’elle a transmis à la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct (ci-après : CCRIFD).

8. Dans sa réponse du 8 mars 2007, l’AFC-GE a relevé que seule était contestée la reprise de CHF 20'000.- faite au titre de commission. Or, ce montant résultait des déclarations de M. Humbert devant le juge d’instruction. Les motifs du revirement de ce dernier ne faisaient l’objet pas même d’une tentative de justification.

Elle conclut au rejet du recours.

9. Par décision du 23 avril 2008, expédiée le 5 mai 2008, la CCRIFD a rejeté le recours sur le principe de la reprise. En revanche, elle a estimé que le taux de change à retenir était le taux moyen des devises, selon une liste publiée annuellement par l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) (DCCR n° 149 du 19 juin 2006). Ainsi, en 2003 le cours était de : US$ 1.- = CHF 1,2367 et non pas CHF 1,34533 comme retenu par l’AFC-GE. La taxation devait par conséquent être corrigée en ce sens.

Pour le surplus, la CCRIFD a estimé que les contribuables concluaient implicitement à l’annulation de l’amende qu’elle a confirmée, celle-ci étant justifiée aussi bien dans son principe que dans sa quotité.

10. Le 30 mai 2008, l’AFC-GE a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée.

Seul était discuté le taux de change retenu par la CCRIFD.

Celle-ci avait appliqué le taux résultant du tableau élaboré par l’AFC-CH, en matière de taux applicable aux devises libres au 31 décembre 2003 (liste des cours - titres suisses et étrangers cotés en Suisse - 31 décembre 2003, p. 123) alors qu’elle-même avait fait application du taux résultant du tableau élaboré par l’AFC-CH concernant les « cours annuels moyens des devises en Suisse » (liste des cours - titres suisses et étrangers cotés en Suisse - 31 décembre 2003, p. 125).

Le contribuable avait reçu en 2003 plusieurs commissions en US$, versées à des dates différentes. C’était donc manifestement le cours annuel moyen de la devise qui devait s’appliquer et en aucun cas celui de la « devise libre » au 31 décembre 2003. Au surplus, la CCRIFD ne tentait même pas d’expliquer pourquoi elle estimait que le taux retenu par l’AFC-GE était incorrect.

Quant à la référence de jurisprudence citée par la CCRIFD, force était de constater qu’à cette occasion, celle-ci avait bien appliqué le tableau « cours annuel moyen des devises en Suisse ».

En l’espèce, le taux appliqué par la CCRIFD était non seulement erroné mais encore inexplicable.

11. Invitée à se déterminer sur le recours, l’AFC-CH a fait parvenir ses observations le 25 juin 2008. Elle se ralliait aux considérations et conclusions exprimées par l’AFC-GE, en estimant que c’était à tort que la CCRIFD avait appliqué le cours de la devise libre au 31 décembre 2003.

En annexe, elle a joint le « cours annuel moyen des devises en Suisse » 2003, fixant pour le US$ le taux de 1,345338, ainsi que celui des « devises et billets de banque au 31 décembre 2003 », indiquant le taux de 1,2367 pour les devises libres.

12. Les contribuables n’ont pas réagi dans le délai initialement fixé au 15 juillet 2008 par le juge délégué pour le dépôt de leurs observations. Un rappel leur a été adressé leur fixant un nouveau délai au 15 août 2008 avec la précision que passé cette date, la cause serait gardée à juger en l’état du dossier. Ils ne se sont manifestés en aucune manière.

13. Par mémo du 26 août 2008, le Tribunal administratif a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 53 al. 1er de la loi sur la procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 57 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10, applicables par renvoi de l’art. 53 al. 4 LPFisc).

2. L’objet du litige consiste à déterminer le taux de change applicable pour chiffrer en francs suisses les reprises afférentes aux commissions versées en US$ à M. P______ au cours de l’année 2003.

3. Le Tribunal administratif observe qu’il n’est pas contesté que le contribuable a touché diverses commissions courant 2003 à des dates différentes. Dès lors, les arguments de l’AFC-GE sont pertinents et il y a lieu effectivement de retenir le taux moyen 2003, soit, 1,345338 et non pas le cours des devises au 31 décembre 2003 (1,2367). La décision attaquée n’est pas dépourvue d’ambigüité sur ce point, puisque tout en admettant qu’il faut retenir le taux moyen des devises, elle applique celui des devises au 31 décembre 2003.

4. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des contribuables qui ont initié la procédure (art. 87 LPA). Aucune indemnité ne sera allouée à la recourante.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 mai 2008 par l’administration fiscale cantonale contre la décision du 23 avril 2008 de la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision du 23 avril 2008 de la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct en tant qu’elle a fixé le taux de change à US$ 1.- = CHF 1,2367 ;

la confirme pour le surplus ;

rétablit le bordereau rectificatif de rappel d’impôt 2003 du 29 novembre 2005 ;

met à la charge de Madame et Monsieur P______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, à la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct ainsi qu’à Madame et Monsieur P______.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :