Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/315/2021

ATA/475/2021 du 04.05.2021 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/315/2021-AIDSO ATA/475/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 mai 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS



EN FAIT

1) Par décision du 27 janvier 2021 adressée à Monsieur A______, le service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) a fixé à CHF 47.50 par jour les frais de placement de son fils B______.

Le détail du calcul de la participation mentionnait : CHF 38.- par jour au titre de participation, trois enfants à charge et une majoration de 25 %.

2) Par acte expédié le 29 janvier 2021, M. A______ a interjeté recours contre ladite décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). La somme réclamée était trop élevée par rapport à son salaire perçu en 2020. Il était patron de son entreprise et n'avait pas droit aux indemnités de chômage. Son épouse ne travaillait pas et le couple avait trois enfants à charge. Le SPMi s'était fondé, à tort, sur son salaire 2018 en lieu et place de 2020-2021.

Il décrivait ses charges, notamment un loyer mensuel de CHF 3'000.-, des frais de garage de CHF 200.- auxquels s'ajoutaient les primes assurance maladie obligatoire pour les cinq membres de la famille, le minimum vital, les frais de cantine, de crèche, les activités sportives ainsi que diverses dépenses mensuelles imprévues. Son salaire ne lui permettait plus de vivre. Il avait épuisé ses réserves. Il souhaitait être entendu afin de pouvoir produire ses factures mensuelles. Il était actuellement en procédure de divorce et ne percevait aucune aide financière de l'État.

Étaient jointes différentes pièces dont son certificat de salaire 2020 auprès de l'entreprise C______ à Vernier de CHF 84'159.60 bruts, soit CHF 70'681.80 nets. Il ressortait des fiches de salaire produites un salaire mensuel brut de CHF 12'000.-, soit CHF 10'405.05 nets au mois de janvier et février 2020. Par la suite, son salaire net avait fluctué à CHF 11'656.35 en mars 2020 compte tenu notamment d'un versement pro rata de treizième salaire et de « corrections pour RHT », CHF 8'975.75 en avril 2020, CHF 2'460.65 en mai 2020, CHF 3'340.85 de juin à novembre 2020 inclus et CHF 5'329.75 en décembre 2020.

3) Le SPMi a conclu au rejet du recours. Le calcul était fondé sur le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) 2021 en fonction de l'année fiscale 2019, de trois enfants à charge et d'une contribution majorée de 25 %.

Contrairement aux prestations catégorielles et de comblement, dont les bases légales imposaient une prise en compte du revenu actuel, le SPMi ne devait tenir compte, pour ses prestations tarifaires, que du RDU calculé sur la dernière taxation fiscale définitive. Le RDU ne prévoyait pas que le calcul du code tarif puisse se faire sur le RDU actualisé. Il ne pouvait en conséquence pas donner suite à la demande de réévaluation sur la base du salaire 2020-2021 et maintenait sa décision.

4) Le recourant n'a pas souhaité répliquer dans le délai qui lui avait été imparti.

5) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant ne remet pas en question le principe de sa participation aux frais de placement de son fils. Il conteste pouvoir payer le montant réclamé compte tenu de ses revenus actualisés, notamment à la suite de l'épidémie de COVID-19 et sollicite une adaptation de la base de calcul.

a. Les père et mère contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (art. 276 al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210). L'entretien est assuré par les soins, l'éducation et des prestations pécuniaires (art. 276 al. 1 CC). Cette obligation dure jusqu'à la majorité de l'enfant (art. 277 al. 1 CC). La contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère ; il est tenu compte de la fortune et des revenus de l'enfant (art. 285 al. 1 CC).

b. L'art. 310 al. 1 CC prévoit que lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement de l'enfant ne soit compromis, l'autorité de protection de l'enfant retire l'enfant aux père et mère ou aux tiers chez qui il se trouve et le place de façon appropriée. De même, l'art. 15 al. 1 de la loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 20 juin 2003 (Droit pénal des mineurs, DPMin - RS 311.1) permet à l'autorité de jugement d'ordonner le placement d'un mineur si l'éducation ou le traitement exigés par son état ne peuvent être assurés autrement.

c. Lorsque l'enfant est placé, l'office de l'enfance et de la jeunesse perçoit une contribution financière aux frais de pension et d'entretien personnel auprès des père et mère du mineur (art. 81 al. 2 de la loi d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 - LaCC - E 1 05 ; art. 36 al. 1 de la loi sur l'enfance et la jeunesse du 1er mars 2018 - LEJ - J 6 01).

d. Le type de prestations pour lesquelles une participation financière peut être demandée ainsi que le montant des contributions y relatives sont fixés par voie réglementaire (art. 36 al. 2 LEJ).

e. Le règlement fixant la participation financière des père et mère aux frais de placement, ainsi qu'aux mesures de soutien et de protection du mineur du 2 décembre 2020 (RPFFPM - J 6 26.04) prévoit que les frais de placement résidentiel, ainsi que les repas en structure d'enseignement spécialisé de jour et les autres frais mentionnés par le RPFFPM, sont à la charge de l'État, dans la mesure où ils ne sont pas couverts par la participation financière des père et mère.

Lors de placements résidentiels, la participation financière aux frais de placement et d'entretien est de CHF 38.- par jour et par mineur. D'autres frais nécessaires aux activités ordinaires peuvent être mis à la charge des père et mère jusqu'à concurrence des frais effectifs (art. 5 al. 1 et 3 RPFFPM).

La directive sur le financement de l'action socio-éducative et la participation des père et mère aux mesures de protection du mineur du 18 décembre 2020 (consultable à l'adresse https://www.ge.ch/document/directive-financement-action-socio-educative-participation-pere-mere-aux-mesures-protection-du-mineur consultée le 23 avril 2021) fixe ces frais et leur montant (art. 5 al. 3 RPFFPM).

f. Selon l'art. 8 al. 2 RPFFPM, un rabais fondé sur le revenu déterminant unifié est accordé aux père et mère, selon le barème décrit à l'art. 8 al. 2 du règlement d'exécution de la loi sur le revenu déterminant unifié (RRDU - J 4 06.01).

Lorsque le revenu déterminant unifié dépasse CHF 180'000.-, les tarifs de la participation financière sont majorés de 25% par jour, puis de 20% supplémentaires par tranche de CHF 100'000.- jusqu'à concurrence des frais effectifs (art. 8 al. 7 RPFFPM).

g. Le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) peut servir de référence pour le calcul de prestations tarifaires, d'émoluments ou l'application de tarifs destinés à rétribuer ou défrayer des prestations fournies par les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire cantonaux, leurs administrations et les commissions qui en dépendent, les établissements de droit public cantonaux, ainsi que les communes (art. 2 al. 2 let. a de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 - LRDU - J 4 06).

L'art. 12 LRDU définit ce que sont les prestations tarifaires en comparaison de deux autres types de prestations. Il distingue ainsi les prestations catégorielles, qui visent à soutenir les bénéficiaires dans un segment particulier de dépenses et consistent en un transfert monétaire en direction du bénéficiaire ou d'un tiers (let. a), les prestations de comblement, qui visent à garantir des conditions de vie digne, sont subsidiaires à toute autre forme d'aide et consistent en un transfert monétaire en direction du bénéficiaire (let. b) et les prestations tarifaires, soit des prestations en nature ou de rabais qui sont accordés sous condition de ressources, dont les tarifs dépendent du revenu déterminant unifié et qui se fondent sur une loi, un règlement ou un arrêté (let. c).

Le SPMi est admis à utiliser le RDU pour le calcul de ses prestations tarifaires (art. 2 al. 3 LRDU et art. 1 al. 1 let. d RRDU).

h. Le RDU est en principe actualisé sur la base des derniers éléments de revenus et de fortune connus de la personne, sous réserve d'exceptions non pertinentes en l'espèce (art. 10 al. 1 LRDU).

Le RDU est actualisé sur demande d'un service et/ou lorsque la condition économique de l'intéressé s'est modifiée entre la période qui a servi de base au calcul de la prestation et le moment où il présente sa demande. Ces changements sont annoncés et justifiés par l'intéressé (art. 10 al. 2 LRDU et 5 RRDU).

Le processus d'actualisation du RDU selon l'art. 10 al. 1 LRDU s'applique à l'examen ou au réexamen des seules demandes de prestations catégorielles et de comblement visées à l'art. 13 al. 1 LRDU (art. 10 al. 3 LRDU). Les exceptions à ce principe, pour les prestations tarifaires, portent sur des problématiques de logement (art. 6B RRDU).

Le calcul du RDU sert de base pour la détermination du droit à une prestation au sens des art. 8 à 10 LRDU. Selon l'art. 10, al. 1 LRDU, le RDU est en principe actualisé sur la base des derniers éléments de revenus et de fortune connus de la personne.

i. Les al. 1 et 3 de l'art. 10 al. 1 et 3 LRDU ont été modifiés le 10 mai 2017.

Il ressort des travaux préparatoires que le processus d'actualisation du RDU permet la mise à jour des informations relatives à la situation financière d'une personne dans deux situations : 1) lors du dépôt d'une nouvelle demande de prestation sociale ; dans ce cas, le RDU du demandeur de cette prestation peut être établi sur la base de sa situation fiscale la plus récente et sur la base des justificatifs de ses ressources actuelles ; 2) lorsque le bénéficiaire d'une prestation sociale voit sa situation économique se modifier entre la période qui a servi de base au calcul de la prestation et le moment où il présente sa demande, ce qui commande une mise à jour immédiate des prestations sociales ; dans ce cas, l'usager doit annoncer les éléments de ses ressources qui se sont modifiés et fournir les justificatifs y relatifs.

Il était précisé que l'actualisation des éléments composant le socle du RDU pouvait être demandée par un service ou un usager uniquement dans le cadre de l'examen ou du réexamen du droit à une prestation catégorielle ou de comblement au sens de l'art. 12 LRDU. Les raisons qui présidaient à cette limitation consistaient dans le processus d'actualisation, complexe, qui requérait une expertise dans l'analyse des pièces transmises par l'usager, leur traitement devant s'effectuer selon une procédure administrative commune et qui pouvait être coûteux, de par l'analyse des pièces justificatives y afférentes, en regard d'une variation peu significative, voire nulle, dans le calcul du droit à une prestation tarifaire. Des exceptions ciblées en matière de logement étaient prévues (https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL11966.pdf p. 15 du PL 11966 consulté le 29 avril 2021)

j. En l'espèce, le recourant ne conteste pas le calcul en tant qu'il se fonde sur ses précédents revenus, soit le tarif de base de CHF 38.-, et la prise en compte de trois enfants, ainsi que d'une majoration de 25 % compte tenu de son RDU de 2019.

Seule est litigieuse la question d'une adaptation du montant compte tenu de la diminution des revenus du père de l'enfant.

Les prestations concernées, fournies par le SPMi, sont qualifiées de tarifaires au sens de la LRDU (art. 2 al. 3 et 12 let. c LRDU, art. 1 al. 1 let. d RRDU). Conformément à l'art. 10 al. 1 et 3 LRDU, seules certaines prestations tarifaires, en lien avec le logement (art. 6B RRDU) peuvent bénéficier du processus d'actualisation du RDU. C'est en conséquence à bon droit que le SPMi s'est fondé sur le dernier RDU disponible et n'a pas donné suite à la demande de réévaluation du recourant sur la base des salaires 2020 - 2021, étant encore précisé que le socle du RDU est calculé automatiquement sur la base des derniers éléments de revenus et de fortune connus de la personne (art. 9 al. 1 LRDU).

Infondé, le recours sera rejeté.

3) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Compte tenu de l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 janvier 2021 par Monsieur A______ contre la décision du service de protection des mineurs du 27 janvier 2021 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ ainsi qu'au service de protection des mineurs.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :