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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2434/2011

ATA/35/2012 du 17.01.2012 sur DITAI/48/2011 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2434/2011-PE ATA/35/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 janvier 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur P______
représenté par Me Michel Celi Vegas, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


 

Recours contre la décision du Tribunal administratif de première instance du 25 août 2011 (DITAI/48/2011)



EN FAIT

1. Monsieur P______, né le ______ 1968, ressortissant colombien, a épousé le 26 mars 2010 Madame G______, ressortissante colombienne, titulaire d’une autorisation de séjour à Genève. Le couple a eu une fille, née avant le mariage, le 23 octobre 2003.

2. Le 30 avril 2010, M. P______ a déposé auprès de l’office cantonal de la population (ci-après : OCP) une demande d’autorisation de séjour à Genève au titre du regroupement familial.

3. Par décision du 30 juillet 2010, l’OCP a refusé de délivrer l’autorisation sollicitée. L’intéressé ne remplissait pas les conditions légales car il dépendait de l’aide sociale. Un délai au 30 septembre 2010 lui était imparti pour quitter la Suisse. Cette décision n’a pas fait l’objet d’un recours et est entrée en force.

4. Le 22 septembre 2010, M. P______ a déposé auprès de l’OCP une demande de reconsidération de la décision susmentionnée. Son épouse suivait des traitements médicaux l’empêchant de travailler normalement et impliquant le recours à l’aide sociale. Si, d’un point de vue formel, il figurait parmi les bénéficiaires de l’aide publique et, qu’en conséquence, il ne pourrait théoriquement être mis au bénéfice d’un regroupement familial, l’autorité administrative disposait d’un pouvoir discrétionnaire pour réévaluer la situation sous l’angle du cas de rigueur.

5. Par décision du 11 juillet 2011, l’OCP a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération, les conditions pour ce faire n’étant pas réunies. Il a rappelé que les demandes de reconsidération n’entrainaient ni interruption de délai ni effet suspensif. Il a imparti un nouveau délai de départ au 31 août 2011 pour M. P______.

6. Le 12 août 2011, M. P______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision susmentionnée, concluant à son annulation et au renvoi du dossier à l’OCP pour qu’il délivre l’autorisation de séjour sollicitée. Préalablement, sur mesures provisionnelles, il concluait à ce qu’il soit ordonné à l’OCP de restituer l’effet suspensif à sa décision du 11 juillet 2011 et que l’exécution du départ soit suspendue jusqu’à droit jugée au fond.

7. Le 22 août 2011, l’OCP s’est opposé tant à la restitution de l’effet suspensif qu’à l’octroi de mesures provisionnelles qui reviendraient à admettre le recours au fond.

8. Par décision du 25 août 2011 expédiée aux parties le même jour, la présidente du TAPI a rejeté la requête d’effet suspensif et de mesures provisionnelles.

Une demande de reconsidération ne pouvait entraîner ni interruption de délai, ni effet suspensif, y compris pendant la procédure de recours. S’agissant d’une décision à contenu négatif, on ne pouvait, cas échéant, restituer un effet suspensif. Quant aux mesures provisionnelles, elles ne pouvaient permettre au recourant d’obtenir par ce biais le plein de ses conclusions au fond.

9. Le 9 septembre 2011, M. P______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision susmentionnée, concluant à ce qu’il soit ordonné à l’OCP de restituer l’effet suspensif à sa décision du 10 juillet 2011 et à ce que l’exécution du départ soit suspendue jusqu’à droit jugé au fond.

M. P______ ne percevait plus de prestations de l’assistance publique et développait une activité lucrative. L’OCP n’avait pas tenu compte de cet élément, de sorte que le recours au fond devait être admis. Entre temps, le fait que l’intéressé ne soit pas au bénéfice d’une autorisation de séjour préalable ne devait pas empêcher qu’il demeure à Genève, où il pouvait aider son épouse dans son traitement médical, l’assister financièrement et s’occuper de leur fille mineure. S’il était renvoyé de Suisse, il subirait un préjudice irréparable, la procédure pouvant durer des années, sans qu’il soit certain de revenir en Suisse, ni de pouvoir exercer son droit d’être entendu.

10. Le 14 septembre 2011, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

11. Le 29 septembre 2011, l’OCP a conclu au rejet du recours, pour les motifs invoqués devant le TAPI. L’activité lucrative de l’intéressé était limitée à 10 heures par semaine et lui rapportait entre CHF 1'000.- et 1'250.- par mois.

12. Le 30 septembre 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Les décisions du TAPI peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative (art. 132 al. 1 et 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). La décision refusant l’effet suspensif étant une décision incidente, le délai de recours est de dix jours (art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue.

2. L’objet du litige est la décision de la présidente du TAPI rejetant une demande d’effet suspensif et de mesures provisionnelles dans le cadre d’un recours dirigé contre une décision de l’OCP de refus d’entrée en matière sur une demande de reconsidération d’un refus d’autorisation de séjour pour regroupement familial.

3. Selon l’art. 57 let. c LPA, sont seules susceptibles de recours les décisions incidentes qui peuvent causer un préjudice irréparable ou si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (ATA/227/2009 du 5 mai 2009).

Le préjudice irréparable suppose que la recourante a un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit immédiatement annulée ou modifiée, comme un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l’économie de la procédure (ATF 127 II 132 consid. 2a p. 126 ; 126 V 244 consid. 2c p. 247 ss ; 125 II 613 consid. 2a p. 619 ss ; ATA/136/2010 du 2 mars 2010).

a. S’il n’est pas contesté que le fait de devoir quitter la Suisse entraînerait une perte de revenus pour le recourant, et, partant constituerait un préjudice, la question du caractère irréparable de ce dernier peut demeurer ouverte vu ce qui suit.

b. L’admission du recours ne mettrait pas fin au litige, le TAPI devant trancher le fond du litige.

4. Selon l’art. 48 al. 2 LPA, les demandes de reconsidération de décisions prises par les autorités administratives n’entraînent ni interruption de délai ni effet suspensif.

En l’espèce, la décision querellée au fond, soit la décision du 11 juillet 2011 est un refus de reconsidérer une décision antérieure en force. Il s’agit donc d’une décision à contenu négatif. Un recours contre ce type de décision ne peut se voir accorder un effet suspensif, car cela reviendrait à accorder au recourant d’être mis au bénéfice d’un régime juridique dont il ne bénéficiait plus (ATA/197/2011 du 28 mars 2011 et les références citées).

5. Le titre IV de la LPA, concernant la procédure de recours en général, ne contient aucune disposition expresse en matière de mesures provisionnelles. A teneur de l’art. 21 al. 1 LPA, l’autorité peut d’office ou sur requête, ordonner des mesures provisionnelles, en exigeant au besoin des sûretés. Celles-ci sont de la compétence du président, s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2).

Les mesures provisionnelles à disposition de l’autorité administrative ont pour objet de régler transitoirement la situation en cause, jusqu’à ce que soit prise la décision finale. Selon la jurisprudence, elles ne sont cependant légitimes que si elles s’avèrent nécessaires au maintien de l’état de fait ou à la sauvegarde des intérêts compromis. En revanche, de telles mesures ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper sur le jugement définitif, ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, ni non plus aboutir à rendre d’emblée illusoire le procès au fond (ATF 109 V 506 ; ATA/326/2011 du 19 mai 2011 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 et les références citées ; I. HAENER, « Vorsorglichen Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess » in Les mesures provisoires en procédure civile, administrative et pénale, 1987, p. 26).

In casu, faire droit à la requête du recourant reviendrait à lui permettre de séjourner en Suisse en tout cas jusqu’à droit jugé sur le litige, ce qui est inclus avec les conclusions sur le fond. Sa présence à Genève n’est pas nécessaire pour maintenir l’état de fait, la procédure étant écrite, les pièces utiles figurant au dossier et un conseil le représentant devant les autorités et les juridictions compétentes. L’intérêt personnel du recourant à demeurer à Genève est certes compréhensible mais doit céder le pas à l’intérêt public à assurer le respect des décisions en force - en l’occurrence celle du 30 juillet 2010 contre laquelle il n’a pas recouru - et à battre en brèche la politique du fait accompli.

6. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et il appartiendra au TAPI de poursuivre l’instruction sur le fond.

Le recourant étant au bénéfice de l’assistance juridique, aucun émolument ne sera perçu. Il ne lui sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 12 août 2011 par Monsieur P______ contre la décision sur effet suspensif et mesures provisionnelles du Tribunal administratif de première instance du 25 aout 2011 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michel Celi Vegas, avocat du recourant, à l’office cantonal de la population, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Derpich

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :