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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/121/2011

ATA/331/2011 du 24.05.2011 ( LOGMT ) , REJETE

Descripteurs : ; LOGEMENT ; IMMEUBLE D'HABITATION ; LOYER CONTRÔLÉ ; SURVEILLANCE ÉTATIQUE
Normes : LGL.27 ; LGL.28 ; LGL.42 ; RGL.5
Résumé : Principes applicables à la détermination de l'état locatif d'un immeuble subventionné.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/121/2011-LOGMT ATA/331/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 mai 2011

 

 

dans la cause

 

Monsieur M______
représenté par la régie Zimmermann S.A., mandataire

contre

OFFICE DU LOGEMENT



EN FAIT

1. Monsieur M______ est propriétaire des immeubles sis à l’adresse chemin Y______ sur les parcelles nos ______ et ______, feuille ______, de la commune de C___________ (immeubles de catégorie HLM).

2. Par arrêté du 13 décembre 2000, le Conseil d’Etat a accordé à M. M______ une exonération fiscale dégressive, s’étendant sur vingt ans à compter du 1er janvier 1996, relative aux immeubles susvisés.

3. Le 28 août 2002, il a statué sur les aspects financiers liés au subventionnement de ces immeubles.

L’état locatif des vingt huit logements (cent vingt quatre pièces) et des quarante huit places de parking intérieures était fixé à CHF 572’304.-, soit CHF 3’900.-/an la pièce (logements) et CHF 1’848.-/an par place de parc.

Les charges annuelles d’entretien était budgétées à CHF 136’861.-. La différence entre ce budget et le coût effectif de ces charges venait alimenter une réserve pour l’exécution des travaux d’entretien et la réserve. Une réserve pour la variation des taux d’intérêts hypothécaires (ci-après : réserve sur taux) était constituée pour un budget de CHF 65’152.-/an.

L’Etat de Genève se portait caution simple vis-à-vis du créancier hypothécaire en deuxième rang pour une partie du prix de revient de l’immeuble, arrêté à CHF 10’945’000.-.

Une subvention annuelle dégressive d’une durée de vingt ans était allouée. Son montant serait déterminé, au fil des années, conformément à l’art. 51 du règlement d’exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 (RGL - I 4 05.01). La subvention pourrait être réduite, voire supprimée, dans les cas prévus à l’art. 55 RGL.

Les immeubles sortiraient du contrôle le 31 décembre 2015.

4. Le 26 octobre 2005, l’office du logement (ci-après : l’office) a modifié les conditions financières d’exploitation après avoir procédé à un examen de la situation des immeubles, en précisant que l’état locatif maximum autorisé, fixé dans l’arrêté du Conseil d’Etat du 28 août 2002 (ci-après : arrêté 2002), demeurait inchangé.

Le budget de la réserve sur taux était augmenté proportionnellement à la baisse des taux hypothécaires enregistrés entre novembre 2002 et août 2005.

La subvention était réduite dans la mesure prévue par l’arrêté 2002.

5. Suite à cette décision, des modifications dans les conditions d’exploitation des immeubles sont survenues (baisse des intérêts hypothécaires notamment), sans que l’office n’en ait été informé.

6. Le 16 juillet 2010, après avoir procédé à un examen d’office de la situation des immeubles et pris connaissance de ces modifications, l’office a fait part à M. M______ de son intention de diminuer l’état locatif maximum autorisé à CHF 492’660.- (soit une réduction de l’état locatif initial de CHF 79’644.-).

7. La régie Zimmermann s’est opposée à cette diminution par courrier du 9 août 2010.

Entre le 1er juillet 2000 et le 30 juin 2010, elle avait facturé à M. M______ des honoraires de gérance et de travaux de 3,5 %, respectivement 2 %, en lieu et place des 5,7 % et 5 % qu’elle aurait dû facturer. M. M______ avait donné son accord pour que cette différence soit facturée rétroactivement. Le nouveau budget d’exploitation devait prendre en compte cette correction.

L’office n’avait pas tenu compte de la charge fiscale 2002 dans le calcul de la réserve d’entretien.

La location des parkings s’était soldée par une perte locative de CHF 246’537,50 entre le 1er juillet 2000 et le 30 juin 2010.

La retenue forfaitaire de la charge fiscale effectuée par l’office diminuait le rendement sur fonds propre par rapport à celui fixé dans l’arrêté du Conseil d’Etat.

La prise en compte des charges exposées ci-dessus, associée à une suppression anticipée de la subvention permettrait de maintenir l’état locatif à CHF 572’384.-.

8. Par décision du 20 septembre 2010, l’office a diminué l’état locatif maximum autorisé à CHF 532’860.- dès le 1er novembre 2010 et déclaré cette décision exécutoire nonobstant réclamation.

Le budget annuel des charges d’exploitation était fixé à CHF 260’456.- dès le 1er janvier 2010 (1er palier), et à CHF 154’000.- dès le 1er novembre 2010.

Le loyer annuel était abaissé à CHF 3’717.- la pièce/an et à CHF 1’500.- la place de parc/an.

La réserve sur taux était supprimée à compter du 1er janvier 2010. Son solde de CHF 820’754.- était transféré à la réserve pour entretien à compter de cette date.

L’amortissement du prêt hypothécaire en 2ème rang ayant été plus élevé qu’initialement prévu dans le plan financier de l’arrêté 2002, le calcul des subventions versées conduisait à un trop-payé au 31 mars 2010 de CHF 51’799,70. Afin de pouvoir récupérer ce montant, aucune subvention ne serait versée d’ici la fin du contrôle.

9. Le 15 octobre 2010, M. M______ a élevé réclamation auprès de l’office contre cette décision.

Le budget de charges ne tenait pas compte du supplément d’impôts à la charge du propriétaire résultant de la dégressivité de l’exonération fiscale, attendue dès le 1er janvier 2011, ainsi que des taux maximum admis récemment pour les honoraires de gérance et pour ceux sur travaux.

La réserve d’entretien n’était plus alimentée, alors que l’âge des immeubles laissait présager des travaux importants avant la fin du contrôle. La réduction par paliers du budget des charges d’entretien n’était pas motivée à satisfaction de droit.

Il priait l’office de porter ce budget à CHF 178’932.- dès le 1er novembre 2010 et de ne diminuer, consécutivement, l’état locatif maximum autorisé que de CHF 14’512.-, ce qui portait ce dernier à CHF 557’792.-.

10. Par décision du 16 décembre 2010, l’office a rejeté cette réclamation, après avoir admis la demande de restitution d’effet suspensif.

Les honoraires de gérance d’immeubles étaient limités au tarif prévu par l’union suisse des professionnels de l’immobilier (ci-après : USPI) pour les immeubles subventionnés. Pour un état locatif compris entre CHF 500’001.- et CHF 1’000’000.-, le taux maximum admis était de 5,06 % hors TVA. Les honoraires sur travaux étaient limités à 5 % du montant des travaux effectués et acceptés par l’office, hors TVA. Le budget d’exploitation se fondait sur la moyenne des charges courantes pour les deux voire les trois derniers exercices comptables. Les honoraires pris en compte étaient ainsi ceux des années passées (2007 à 2009) et non futures. Les honoraires 2010, dont l’augmentation alléguée avait été curieusement immédiatement consécutive au réexamen des conditions d’exploitation des immeubles par l’office, ne pouvaient être pris en considération alors que les comptes 2010 n’étaient ni encore établis, ni audités par une fiduciaire reconnue.

Le supplément d’impôts résultant de la dégressivité de l’exonération fiscale fixée par l’arrêté 2002 avait été pris en compte et inscrit au budget des charges d’exploitation des immeubles. La charge fiscale théorique annuelle correspondante avait été estimée à CHF 83’274.- dès le 1er janvier 2011, soit une hausse de CHF 17’495.-.

Les immeubles considérés devant sortir du contrôle étatique le 31 décembre 2015, les réserves constituées devaient tendre vers zéro à cette date.

Il était courant de ne garder qu’une seule réserve lorsque le terme du contrôle était proche. Pour cette raison, la réserve sur taux hypothécaire, de CHF 820’754.-, avait été transférée à la réserve pour entretien au 31 décembre 2009, déficitaire à hauteur de CHF 513’780.- portant le solde de celle-ci à CHF 306’974.-. Ce montant correspondait à plus de CHF 2’000.- par pièce théorique. A cinq ans de la fin du contrôle étatique, cette réserve était trop élevée. Il convenait de l’absorber en soustrayant CHF 61’395.- par année, afin d’atteindre l’objectif d’une réserve nulle à la fin du contrôle.

Comme l’état locatif n’avait pu être ajusté rétroactivement, les montants de CHF 8’916.- et CHF 114’679.-, correspondant respectivement à l’économie d’intérêts ayant résulté de la baisse des taux hypothécaires et à l’annulation de la mise en réserve annuelle pour taux, avaient été reportés temporairement sur le budget pour charges, pour la période du 1er janvier au 1er novembre 2010.

En prenant la moyenne des charges d’exploitation des trois dernières années, le surplus d’impôts attendus dès 2011 et la résorption progressive de la réserve pour travaux d’entretien d’ici la fin du contrôle, le budget de charges des immeubles se montait à CHF 153’632.- arrondis à CHF 154’000.-, conformément au tableau suivant :

 

Moyenne des 3 dernières années

Charges fixes courantes :

158’461

(173’718 en 2007, 146’151 en 2008 et 155’515 en 2009

 

Entretien courant :

39’071

(34’171 en 2007, 46’028 en 2008 et 37’013 en 2009

 

Total

197’532

 

Alimentation réserve

0

Surplus de CHF 306’974 absorbé sur 5 ans

-61’395

Report de l’exonération fiscale de 50 % à 25 % dès le 01/01/2011

17’495

Total

153’632

 

11. M. M______ a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par acte du 17 janvier 2011, en sollicitant préalablement la restitution de l’effet suspensif. Sur le fond, il conclut à l’annulation de la décision entreprise et à ce que la chambre administrative renvoie la cause à l’office pour nouveau calcul de l’état locatif, après avoir fixé « le palier intermédiaire, après lissage, à CHF 172’000.- en lieu et place de CHF 260’456.- ». A défaut, il prie la chambre administrative de fixer l’état locatif maximum autorisé à CHF 557’792.-, après avoir porté le budget de charges d’exploitation, dès le 1er novembre 2010, à CHF 178’932.-.

a. En retenant que les CHF 306’974.- de réserves d’entretien correspondaient à plus de CHF 2’000.- par pièce théorique, l’office avait omis de prendre en compte les quarante huit places de parc qu’il convenait de compter comme une demi-pièce chacune. La prise en compte de ces places portait la réserve d’entretien par pièce théorique à CHF 2’074.- au lieu des CHF 2’476.- retenus par l’office.

b. Ce dernier avait faussé le budget des charges d’exploitation par la création d’un premier palier de CHF 260’456.- et d’un deuxième de CHF 154’000.-. Il privait M. M______ des avantages d’une diminution progressive de ce budget sur six ans correspondant à « CHF 18’000.- d’un budget de charges auquel il a le droit de louer par an, par capitalisation au taux HLM (7 %) de CHF 257’000.- ».

c. L’augmentation du budget des charges à CHF 260’456.-, aurait dû profiter à M. M______ par une hausse correspondance des loyers. Une telle hausse étant rétroactivement impossible, ce dernier était doublement lésé.

d. La baisse future des taux d’intérêts hypothécaires allait créer une nouvelle différence entre la dépense budgétisée et la dépense réelle à l’avenir. Le bénéfice viendrait alimenter la réserve d’entretien. Cette augmentation conduirait l’office à réduire les loyers par la suite, pour que cette réserve atteigne CHF 0.- à la fin du contrôle, ce qui le léserait une nouvelle fois.

e. L’exigence d’une réserve tendant vers CHF 0.- à la fin du contrôle ne résultait d’aucun texte de loi, mais de simples directives. C’était par ailleurs une notion mal définie, qui ne tenait pas compte de la valeur vénale de l’immeuble et de ses vingt et un ans d’âge à la sortie du contrôle. Pour un immeuble valant plus de CHF 10’000’000.-, un reliquat de réserve de CHF 100’000.- représentait moins de 1 % de cette valeur et pouvait être considéré comme tendant vers zéro.

f. Lesdites directives ne préconisaient pas une réserve négative à la fin du contrôle. Or, le budget de CHF 154’000.- de charges d’exploitation ne suffirait pas à absorber les importants travaux nécessités pendant les cinq dernières années du contrôle étatique, liés à l’âge des bâtiments. Il était inférieur d’environ CHF 100’000.- par an aux dépenses réelles (y compris l’augmentation de la charge fiscale 2011). En 2010, les charges s’étaient montées à CHF 477’159.- (y compris la correction d’honoraires du 1er juillet 2000 au 30 juin 2010). Ainsi, fin 2010 déjà, la réserve de CHF 306’974.- tomberait en dessous de zéro, soit à CHF -33’324.- en raison de ces charges. Il était ainsi trop tôt pour réduire l’état locatif de 8 %.

g. Le montant de la réserve d’entretien n’était pas de CHF 306’974.- mais de CHF 203’480.-, si l’on prenait un compte l’impôt foncier 2002.

h. Le budget annuel moyen des charges effectives de CHF 197’532.-, retenu par l’office dans sa décision sur réclamation, était admis. Il convenait toutefois d’ajouter à ce montant l’augmentation des honoraires qui seraient prélevés jusqu’à la fin du contrôle étatique, un supplément d’impôts, dès le 1er janvier 2011, de CHF 17’495.-, ainsi qu’une somme de CHF 60’671.- pour l’alimentation de la réserve d’entretien. Cumulées sur les cinq prochaines années, ces charges s’élevaient à CHF 213’935.- (CHF 57’639.- pour les honoraires de gérance, plus CHF 8’150.- d’honoraires sur travaux, plus CHF 87’475.- d’impôts, plus CHF 60’671.-). En déduisant ce montant des CHF 306’974.- constituant la réserve actuelle, il ne restait qu’un surplus de CHF 93’039.- de réserve à amortir pour atteindre un montant de CHF 0.-. L’amortissement de cette somme sur cinq ans correspondait à CHF 18’600.- par an. Le budget annuel moyen des charges d’exploitation devait donc être fixé à CHF 178’932.- et non à CHF 154’000.- (soit CHF 197’532.-, moins CHF 18’600.-).

L’état locatif ne pouvait en conséquence être abaissé que de CHF 14’512.-.

i. Le déficit du compte de charges l'avait empêché de procéder à des travaux nécessaires les années précédant la décision attaquée.

12. Le 7 février 2011, l’office s’en est rapporté à justice concernant la demande de restitution d’effet suspensif formé par M. M______.

13. Le 18 février 2011, l’office a répondu au recours en concluant à son rejet.

a. La sortie du contrôle étatique était fixée au 31 décembre 2015. Les directives de l’office prescrivaient la prise en compte des éléments suivants pour déterminer le budget des charges d’entretien :

- la moyenne des charges courantes pour les deux voire trois derniers exercices comptables ;

- l’alimentation de la réserve d’entretien à concurrence de 10 % de cette moyenne, cas échéant ;

- l’absorption du déficit d’exploitation sur dix ans, cas échéant ;

- l’absorption du bénéfice d’exploitation sur les années récentes d’ici la fin du contrôle étatique, cas échéant ;

- la prise en compte du surplus des charges induites par la réduction de l’exonération fiscale, au besoin.

b. La proposition du recourant de supprimer la subvention était insuffisante, puisque cette mesure n’aboutissait qu’au remboursement du trop-perçu.

c. Les honoraires facturés rétroactivement pour la période comprise entre le 1er juillet 2000 et le 31 décembre 2009 ne pouvaient être intégrés dans les charges des années antérieures. En effet, M. M______ avait consenti à leur acquittement sans obligations contractuelles. Cette libéralité n’avait pas à être supportée par les locataires.

d. Quant aux honoraires 2010, ceux-ci ne pouvaient être pris en compte par anticipation.

14. Les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle le 21 mars 2011.

a. M. M______ a confirmé avoir consenti la correction rétroactive des honoraires de la régie jusqu’en juin 2000. Il avait par ailleurs subi une perte totale d’environ CHF 250’000.- sur ses places de parc, qu’il n’avait pu louer en totalité en raison de la location par la commune de places situées juste en face de ses immeubles, pour un prix deux fois inférieur. Dix de ses parkings étaient actuellement libres aujourd’hui, mais retenus dans les calculs de l’office. A cinq ans de la fin du contrôle, les loyers de ses appartements étaient inférieurs à la moyenne genevoise (dont un cinq pièces, loué CHF 1’627.- par mois). Plusieurs travaux seraient à effectuer dans les cinq prochaines années. L’immeuble ayant désormais quinze ans, les sommes à investir pour son maintien en état augmentaient tout naturellement. Il versait à la procédure un exemplaire des comptes 2010 laissant apparaître plus de CHF 400’000.- de charges d’entretien pour cette seule année (incluant la correction d’honoraires 2000 à 2009, et 2010).

Il renonçait enfin à ses conclusions sur effet suspensif.

b. L’office a relevé que le taux de 5,5 % hors taxes constituait le taux maximum que la régie pouvait facturer pour son travail, mais non un taux obligatoire. Elle rappelait par ailleurs, qu’en cas de grands travaux, une autorisation de l’office était nécessaire.

Au terme de cette audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l’ensemble des compétences jusqu’alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative de la Cour de justice, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 LOJ ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3. a. L’Etat encourage la construction de logements d’utilité publique et s’efforce d’améliorer la qualité de l’habitat dans les limites et selon les critères fixés par la loi (art. 1 al. 1 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 - LGL - I 4 05). A cet effet, il encourage la construction de logements notamment par voie d’octroi de subventions (art. 1 al. 2 let. b LGL et 15 al. 1 LGL).

b. Il veille également à la qualité des logements et de leur environnement ainsi qu’à l’économie des coûts de production et d’exploitation (art.1 al. 2. let. d LGL et 15 al.2 LGL).

c. A ce titre, et en contrepartie de l’intervention de l’Etat, la LGL instaure un contrôle des loyers sur tous les logements ou locaux construits par ou avec l’aide de l’Etat de Genève (art. 1 al. 3 LGL), pour la durée de celle-là. Selon la volonté du législateur la mise en place d’un tel contrôle vise à atténuer les conséquences pécuniaires très importantes pour les locataires qui accompagnent le retour des immeubles aux conditions du marché libre (Mémorial du Grand Conseil 1973, p. 632 ; 1969, p. 1768), tout en ménageant le plus possible les intérêts du propriétaire (ATA R. du 11 avril 1984, consid. 6, p. 22).

4. Dans l’arrêté de base fixant le montant de l’aide étatique, le Conseil d’Etat détermine l’état locatif initial autorisé en fonction des plans financiers qui lui sont soumis (art. 27 LGL). Par la suite, celui-ci ne peut être modifié qu’en fonction de l’évolution de certains critères précis, soit la diminution légale des prestations de l’Etat, l’évolution des conditions d’exploitation des immeubles, notamment des variations du taux d’intérêts des dettes hypothécaires et du coût des travaux d’entretien et de réparation, sans préjudice des besoins d’alimentation des réserves pour l’entretien (art. 42 al. 1 LGL). Cette dernière disposition est à mettre en relation avec l’art. 5 al. 4 RGL, selon lequel les loyers tiennent compte des conditions d’exploitation de l’immeuble et des frais qui en découlent, dans la mesure où ces frais sont admis par le service compétent tant dans leur genre que dans leur quotité, à l’exception du chauffage et de l’eau chaude qui sont fournis au prix coûtant selon les pièces justificatives tenues à la disposition des locataires à la fin de chaque période annuelle de chauffage.

5. A teneur de l’art. 42 al. 5 LGL, lors de l’examen des demandes de modification de l’état locatif autorisé, l’administration « peut » mais n’a pas l’obligation d’adapter ce dernier. Elle bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation dans l’usage de cette prérogative afin que le but d’intérêt public au maintien de logements sociaux soit préservé (ATA/879/2010 du 14 décembre 2010 ; ATA R. du 11 avril 1984).

6. Le propriétaire doit prendre les mesures nécessaires pour garantir le bon état général des immeubles et de leurs équipements, ainsi que pour éviter, en particulier, toute dégradation anormale des constructions et assurer la sécurité du public (art. 28 LGL ; art. 3 al. 1 RGL). De ce fait, les frais d’entretien et de travaux courants doivent être pris en considération pour la fixation de l’état locatif autorisé. En revanche, les dépenses liées aux travaux importants, y compris celles concernant les appartements, doivent être préalablement soumises pour approbation à l’office (art. 3 al. 3 RGL).

7. La notion de réserve pour travaux d’entretien évoquée à l’art. 42 al. 1 LGL n’est pas définie dans la loi. Selon l’art. 3 al. 4 LGL, le propriétaire doit constituer des réserves pour travaux d’entretien et les déposer en banque sur un compte spécial. Il doit pouvoir en tout temps justifier l’utilisation de celles-ci, qui restent attachées à l’immeuble en cas de transfert de celui-ci. Les dépenses effectives étant inférieures aux dépenses budgétées durant les premières années, il s’agit de constituer une réserve nécessaire destinée à financer des travaux liés à l’usure et au vieillissement dans les années qui précèdent la sortie du régime de contrôle (ATA/879/2010 précité ; ATA M. du 24 juin 1981 consid. 4 ; ATA O. et C. du 19 décembre 1985, consid. 4 ; D. LACHAT, Le bail à loyer, Asloca, 2008, 3.3.1 p. 378 ; R. BARBEY, Le contrôle officiel des loyers à Genève, RDAF 1981, p. 916).

La constitution d’une provision pour travaux d’entretien et de réparation, même autorisée par l’arrêté de base du Conseil d’Etat, ne doit pas permettre au propriétaire d’obtenir par des voies détournées, à la fin du contrôle officiel, un rendement des fonds propres excédant celui autorisé. Le solde positif du compte de réserve pour travaux doit de ce fait tendre vers zéro à la fin du contrôle. (ATA/879/2010 précité ; R. BARBEY, op.cit., p. 217).

8. Dans le cadre de son activité de contrôle, l’office a adopté des directives visant à codifier sa pratique pour la détermination des éléments à prendre en compte dans l’établissement de l’état locatif autorisé des immeubles sous contrôle étatique, desquelles il résulte les éléments suivants :

a. Les budgets pour les charges d’exploitation doivent permettre de couvrir les charges courantes et de constituer des réserves pour l’entretien de l’ordre de CHF 1’000.- par pièce à mi-terme de la période légale pour les HLM. Ces budgets doivent également faire en sorte que, pour un immeuble normalement entretenu, la réserve tende vers zéro à la fin de la période de contrôle.

b. Pour déterminer le budget de fonctionnement des immeubles concernés, l’office se base, s’agissant des charges courantes, sur la moyenne des trois derniers exercices comptables.

b. L’office tient compte, pour les impôts, de la charge théorique future découlant de l’arrêté de base du Conseil d’Etat fixant le taux dégressif de l’exonération fiscale.

d. Les réserves sur taux hypothécaires inutilisées lorsque la fin du contrôle est proche, peuvent être dissoutes pour venir alimenter la réserve d’entretien,

9. La chambre de céans a déjà eu l’occasion de confirmer la conformité à la LGL de telles directives, qui constituent une base de gestion indispensable au traitement d’un grand volume de travail, l’examen au cas par cas de toutes les particularités de chaque dossier n’étant matériellement pas possible et de surcroît source d’insécurité juridique et d’inégalité de traitement (ATA/879/2010 du 14 décembre 2010 ; ATA/535/2001 du 28 août 2001).

10. En l’espèce, le recourant ne conteste pas qu’en faisant la moyenne des charges d’entretien effectives des trois années précédant la décision entreprise, le budget pour les charges d’entretien des immeubles concernés soit de CHF 197’532.-. En revanche, il considère que devraient être ajoutées à ce budget les charges futures prévisibles découlant de l’augmentation, dès 2010, respectivement 2011, des honoraires de gérance et de la charge d’impôts.

a. Il résulte de l’examen du tableau reproduit ci-dessus que la charge d’impôt supplémentaire de CHF 17’495.- a été intégrée dans le calcul du budget des charges, comme le veut le recourant.

Ce grief doit dès lors être écarté.

b. S’agissant des honoraires de régie et de travaux facturés dès 2010, l’office a considéré que ceux-ci ne constituaient pas des frais effectifs au moment où il a pris la décision entreprise et qu’il ne pouvait se baser sur de la prospective, ce d’autant que les circonstances permettaient de douter de leur réalité.

La demande de prise en compte de cette dépense future intervient dans un contexte particulier : celui de la facturation rétroactive par la régie de la différence entre les honoraires perçus pendant dix ans (entre 2000 et 2009) et les honoraires maximum qu’elle aurait pu percevoir selon les normes de l’UPI, que le recourant aurait acceptée sans qu’aucune obligation ne lui incombe à cet égard. Cette libéralité est incompréhensible dans le contexte du déficit allégué, qui aurait empêché le propriétaire de procéder à des travaux d’entretien nécessaires. Elle est intervenue, en outre et de manière fort surprenante, lors de l’examen des nouvelles conditions d’exploitation des immeubles par l’office, avec pour effet (si cette dépense avait été acceptée par celui-ci) d’alourdir de manière conséquente le budget de charges des trois années prises en considération pour la détermination du nouveau budget. Invoquée pour le futur, la demande de prise en compte de cette augmentation d’honoraire - au demeurant étayée par aucun contrat - avait le même effet, soit d’augmenter le budget d’exploitation futur et d’entraîner une hausse de l’état locatif par rapport à celui retenu dans la décision entreprise.

Dans un tel contexte, l’office pouvait refuser de prendre en compte cette dépense 2010, dans l’examen des conditions d’exploitation 2009.

Les arguments du recourant sur ce point seront donc rejetés.

11. M. M_______ se plaint de la dissolution progressive de la réserve d’entretien par l’absorption de CHF 61’395.-/an sur cinq ans (soit jusqu’à la fin du contrôle).

Ainsi qu’exposé ci-dessus, l’objectif d’une réserve nulle au terme de cette période a été jugé conforme à la loi. Le procédé retenu par l’office n’est ainsi pas critiquable.

12. Le recourant se plaint de ce qu’il ne disposerait pas des somme suffisantes pour entretenir ses immeubles pendant les dernières années du contrôle.

Le budget de charges de CHF 154’000.- se fonde sur la moyenne de toutes les dépenses d’entretien effectuées en 2007 et 2009. Celles-ci ont été nettement plus importantes que celles budgétées dans l’arrêté 2002, puisqu’elles ont entamé la réserve entraînant un solde négatif total de CHF 513’780.-. Le recourant annonce des dépenses supérieures à ce budget déjà élevé, sans donner aucune précision sur la nature de celles-ci ou sur leur montants.

L’office n’a ainsi pas excédé son pouvoir d’appréciation en se bornant à refuser de prendre en considération ces dépenses hypothétiques futures, au demeurant non étayées.

Ce grief ne sera pas retenu.

13. Le recourant se perd ensuite dans des conjectures dont il est difficile d’extraire une argumentation. Les éléments suivants méritent toutefois d’être relevés.

Les conditions d’exploitation des immeubles concernés se sont modifiées depuis le 26 octobre 2005, date de la dernière fixation de l’état locatif. En effet, l’exonération fiscale dégressive a causé une hausse d’impôts de CHF 17’495.- dès le 1er janvier 2011. Les dépenses pour charges courantes ont été supérieures à celles budgétisées, entraînant un déficit total de CHF 513’780.-. L’alimentation de la réserve pour taux s’est révélée trop importante par rapport aux besoins, atteignant CHF 820’754.- au 31 décembre 2009. De même, l’amortissement du prêt hypothécaire a été plus rapide que prévu, conduisant à un trop-perçu de la subvention (l’amortissement constituant l’un des critères entrant dans le calcul de celle-ci). L’office n’a pu procéder à un correctif du montant de la subvention plus tôt, faute d’avoir été informée de ces éléments par le propriétaire conformément à l’art. 42 al. 4 LGL.

L’office a retenu qu’une seule réserve était nécessaire, à cinq ans de l’échéance de la période de contrôle. Il a affecté dans les comptes 2009 les CHF 820’754.- de la réserve sur taux hypothécaires dans le compte de la réserve d’entretien, alors déficitaire à hauteur de CHF 513’780.-. Ceci a porté le solde de cette réserve à CHF 306’974.-. La somme de CHF 114’679.-, affectée annuellement à la réserve sur taux, n’a pu venir alimenter celle-ci en 2009 en raison de sa dissolution. Elle n’a pu non plus être absorbée par une diminution de l’état locatif, ce dernier ne pouvant être modifié rétroactivement. Ces fonds sont ainsi venus temporairement alimenter le compte de charges, dont le surplus doit être absorbé par la constitution d’un palier.

Ce procédé est conforme à la loi.

L’absorption progressive de ce surplus par cinq paliers annuels égaux demandée par le recourant n’est qu’une manœuvre comptable destinée à échapper aux conséquences de la baisse réelle des conditions d’exploitation des immeubles concernés, qui ne trouve aucun fondement dans la loi et est contraire à son but.

14. Enfin, l’office a démontré qu’il avait corrigé son erreur par rapport à la prise en compte des impôts 2001 à 2005 (de CHF 44’960.-, mais initialement budgétés à CHF 27’764.-) et qu’il avait finalement intégrés ces derniers dans ses calculs.

15. Pour les motifs qui précèdent, le recours sera rejeté.

16. Un émolument de CHF 2’000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 janvier 2011 par Monsieur M______ contre la décision du 16 décembre 2010 de l’office du logement ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2’000.- à la charge de Monsieur M______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à la régie Zimmermann S.A., mandataire du recourant, ainsi qu’à l’office du logement.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Dumartheray, juges, M. Bonard, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :