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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2117/2005

ATA/280/2006 du 23.05.2006 ( TPE ) , REJETE

Parties : DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION / COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, KRONEGG Christian, CUCCODORO Giuseppe, BACHOFNER Armand, AGU Jean-Pierre, SCHNEIDER Jean Claude et consorts, PETITPIERRE Michel, ZIELAZEK Bogdan, BEN HAMIDA Lotfi, MAURER Bernard, COMMUNE D'AVUSY
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2117/2005-TPE ATA/280/2006

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 23 mai 2006

dans la cause

 

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS

et

COMMUNE D’AVUSY

et

Messieurs Christian KRONEGG

Giuseppe CUCCODORO

Armand BACHOFNER

Jean-Pierre AGU

Jean-Claude SCHNEIDER

Michel PETITPIERRE

Bohdan ZIELAZEK

Lofti BEN HAMIDA

Bernard MAURER



Messieurs Christian Kronegg, Giuseppe Cuccodoro, Armand Bachofner, Jean-Pierre Agu, Jean-Claude Schneider, Michel Petitpierre, Bohdan Zielazek, Lofti Ben Hamida, Bernard Maurer (ci-après : les propriétaires ou les intimés), sont propriétaires des parcelles sises 9, respectivement 11, 13, 19, 21, 23, 25, 27 et 29 chemin des Fiolages à Sézegnin (commune d’Avusy).

Lesdites parcelles – situées en zone de développement 5 - bordent le chemin des Plantées, sur environ 250 m. Le chemin a une largeur moyenne de 3,2 m.

La commune d’Avusy (ci-après  : la commune) est propriétaire des parcelles DP3224 et DP3500, feuille 11, commune d’Avusy, à l’adresse du chemin des Plantées. Elles sont situées en zone agricole. La première a une surface de 637 m2 alors que la seconde compte 1'862 m2.

Par une pétition datée de mi-avril 1999, plusieurs habitants du chemin des Fiolages, dont les propriétaires, ont prié la commune de renoncer à toute amélioration du chemin des Plantées qui aurait pour effet d’encourager les automobilistes à rouler encore plus vite. Ils demandaient de redimensionner le chemin qui avait été élargi par les passages très fréquents des automobiles et des camions, d’étudier la possibilité de détourner le trafic menant aux Jardins de Cocagne – implantés en zone agricole - en aménageant le chemin existant en bordure de la pépinière débouchant sur la route du Creux-du-Loup et de n’autoriser que le trafic agricole sur ledit chemin.

Par lettre du 1er mars 2003 adressée au Maire et au Président du conseil municipal de la commune, les propriétaires ont réaffirmé leur refus d’aménagement du chemin des Plantées et sa remise en l’état d’origine.

Le Maire de la commune a répondu par courrier du 1er avril 2003.

Conscient que le dossier était ouvert depuis bien trop longtemps, il promettait de l’empoigner de façon différente. Dans tous les cas, les propriétaires et locataires des parcelles bordant le chemin des Plantées seraient consultés.

Par demande d’autorisation par voie de procédure accélérée datée du 17 novembre 2004 et enregistrée sous n° APA 24049, la commune a sollicité la délivrance d’une autorisation de construire ayant pour objets la construction d’un collecteur d’eaux pluviales sur les parcelles DP 3424 et 3500 et la pose d’un revêtement sur le tronçon du chemin des Plantées bordant les propriétés des intimés, ce qui représente une surface de plus de 800 m2.

Les coûts d’installation du collecteur étaient budgétisés à CHF 167'425.-.

En date du 13 décembre 2004, les intimés ont rencontré le Maire pour lui faire part de leur point de vue sur l'aménagement du chemin des Plantées.

Ils n'ont pas été informés du dépôt de la demande d'autorisation.

Le service de l’agriculture de l'ancien département de l’intérieur, de l’agriculture, de l’environnement et de l’énergie (ci-après : le DIAE) actuellement le département du territoire (ci-après: le DT) - a rendu un préavis favorable, le 17 décembre 2004. Les parcelles étant situées en zone agricole, le projet d’installation d’un collecteur d’eaux pluviales et d’aménagement le long d’un chemin était imposé par sa destination et était d’intérêt public. Aucun intérêt prépondérant de l’agriculture n’était lésé.

Les services de l’ancien office des transports et de la circulation du DIAE – actuellement l'office de la mobilité et de la circulation (ci-après : OMC) - ont également rendu un prévis favorable, le 25 janvier 2005.

En date du 7 février 2005, l'ancien département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (ci-après  : le DAEL) – actuellement le département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI) - a délivré une autorisation de construire, dossier APA 24049-S, ayant pour objet la pose d'un collecteur d'eaux pluviales ainsi que la pose d'un revêtement sur le chemin des Plantées, sur les parcelles DP 3424 et DP 3500, feuille 25 de la Commune d'Avusy. L'autorisation a été publiée dans la Feuille d'Avis Officielle (ci-après : FAO) du 11 février 2005. La publication ne mentionne aucune dérogation au régime de la zone agricole.

Le 16 février 2005, les propriétaires ont écrit au Maire et au Président du conseil municipal de la commune pour leur reprocher de ne pas avoir tenu compte des modifications qu’ils avaient demandées et qui leur avaient été promises lors de la séance de discussion du 13 décembre 2004.

Par acte du 16 février 2005 adressé au DCTI, que ce dernier a transmis à la commission de recours en matière de constructions (ci-après : la CCRMC), M. Schneider, agissant au nom et pour le compte de l’ensemble des intimés, a recouru contre l’autorisation précitée. Le chemin des Plantées avait été détérioré et il y avait urgence à le remettre dans son état initial, c’est-à-dire au niveau d’antan afin qu’il soit compatible avec son classement de chemin vicinal et que l’écoulement des eaux se fasse de manière naturelle. Par ailleurs, la commune devait trouver une solution moins onéreuse permettant l’accès « aux Jardins de Cocagne » et aux petits chalets de week-ends du bout du chemin.

a. Entendus en comparution personnelle par la CCRMC, les intimés ont persisté dans leur opposition à l’autorisation de construire. Ils critiquaient notamment l’opportunité des travaux en tant qu’ils feraient perdre le caractère vicinal du chemin, et permettraient un accroissement de la vitesse des véhicules. Le positionnement du collecteur d’écoulement des eaux devrait se situer au centre du chemin et non pas en limite de leurs parcelles. Enfin, ils formulaient des griefs contre la procédure accélérée qui avait été suivie car elle les avait privés de transmettre des observations au DAEL avant la délivrance de l’autorisation de construire.

b. Le DAEL a persisté dans la délivrance de l’autorisation arguant pour le surplus que la procédure accélérée était fondée.

c. La commune a considéré que l’objectif des travaux autorisés allait dans le sens des habitants. Ils garantissaient leur droit à l’accès de leurs parcelles, la récupération des eaux et évitaient ainsi que leurs propriétés soient inondées. La pose du revêtement avait pour effet de supprimer la poussière et de réduire la vitesse des véhicules à moteur grâce à un rétrécissement de la largeur des voies de circulation et à une signalisation adéquate.

Par décision du 13 mai 2005, communiquée aux parties par pli recommandé du greffier le 18 mai 2005, la CCRMC a annulé l’autorisation de construire en raison du fait que le projet déposé avait été traité à tort selon la procédure accélérée. Les constructions prévues n’étaient pas conformes à la zone agricole puisqu’elles nécessitaient l’octroi d’une dérogation prévue à l’article 27 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30). Une enquête publique aurait dû être diligentée par le DAEL.

Par recours posté le 16 juin 2005 et reçu le lendemain par le Tribunal administratif, le DAEL a recouru contre la décision précitée.

La CCRMC avait gravement violé l’article 3 alinéa 7 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et l’article 27 LaLAT. Les travaux demandés par la commune présentaient un caractère d’urgence afin d’assurer aux usagers une sécurité suffisante.

Par ailleurs, tous les préavis retenus dans le cadre de l’instruction de la requête s’étaient révélés favorables, en particulier le service de l’agriculture pour les motifs précédemment exposés (cf. ch. 8 supra).

La décision de la CCRMC du 13 mai 2005 devait donc être annulée et l’autorisation de construire APA 24049 délivrée le 7 février 2005 confirmée, le tout avec suite de dépens.

Les propriétaires ont répondu le 27 septembre 2005. Les travaux sollicités ne consistaient nullement en la modification d’un bâtiment existant. La pose d’un collecteur d’eaux pluviales n’était ni provisoire ni de peu d’importance, un crédit d’environ CHF 170'000.- étant budgété pour son accomplissement. Quant au revêtement prévu sur le chemin des Plantées, il ne présentait aucun caractère d’urgence. En effet, la commune avait attendu pas moins de 6 ans afin de prendre des mesures. En outre, l’objet de l’autorisation litigieuse ne portait que sur une petite partie du chemin des Plantées et non sur son ensemble. Les travaux n’étaient donc pas propres à assurer aux usagers une sécurité suffisante.

S’agissant de la violation de l’article 27 LaLAT, cette disposition était une dérogation aux conditions posées par l’article 20 LaLAT définissant les différentes constructions admises en zone à bâtir. Il ne s’agissait donc pas d’une dérogation à la procédure d’autorisation ordinaire telle que prévue par la LCI. La commission pour la protection des monuments et des sites ainsi que celle, consultative, sur la diversité biologique n’avaient pas été consultées.

Au fond, les travaux envisagés n’entraient pas dans le champ d’application de l’article 20 LaLAT. Une construction en zone agricole ne pouvait être autorisée que si elle était imposée par sa destination et ne lésait aucun intérêt prépondérant, public ou privé. Or, l’emplacement du collecteur n’était nullement imposé par sa destination, un écoulement au centre du chemin étant plus approprié. Situés de surcroît en zone agricole, les travaux projetés risquaient de nuire à la faune et la flore locales se trouvant à proximité. La réfection du chemin des Plantées aurait également pour effet de renforcer le passage de véhicules automobiles de toutes sortes. Les intérêts privés des riverains à jouir de leurs propriétés étaient donc lésés car ils auraient à subir des nuisances liées à l’utilisation dudit chemin. Après transformations, le chemin ne pourrait plus être qualifié de vicinal. Enfin, la solution projetée n’était pas opportune.

Un transport sur place a eu lieu le 19 janvier 2006.

Le chemin des Plantées prend naissance au chemin des Fiollages, longe les propriétés des recourants, puis les « Jardins de Cocagne » - il s’agit d’une exploitation agricole - pour se perdre après les chalets « week-end » - situés de part et d’autre du tronçon qui ne fait pas l’objet de l’APA - et devenir sans issue. La section du chemin faisant l’objet de l’APA est bordée, au sud, par des vignes qui descendent vers la Laire.

La partie du chemin faisant l’objet de l’APA présente de très nombreux nids de poule gorgés d’eau. Des traces de pneus de véhicules agricoles et/ou de camions étaient visibles.

Le chemin est bien plus défoncé du côté des vignes plantées perpendiculaires au chemin des Plantées que sur la section bordant les vignes plantées parallèlement à l’axe.

Le bord du chemin des Plantées longeant la zone viticole a été surélevé de bourrelets de terre, vraisemblablement afin d’empêcher l’eau de ruisseler dans les vignes.

Les deux extrémités du tronçon du chemin des Plantées - faisant l’objet de l’APA - sont assorties d’un panneau limitant la vitesse des véhicules à 10km/h. Ils ont été installés par la Mairie voici une année.

La seconde partie du chemin, soit celle qui n’est pas touchée par l’APA, d’une largeur de 2,20 m, présente une bande herbeuse en son milieu. Ledit tronçon n’a aucun nid de poule car moins fréquenté.

Les 8 chalets de week-ends sont situés en zone agricole tout comme les « Jardins de Cocagne » et le chemin des Plantées. Selon les parties, les parcelles des intimés sont en zone d’habitation 4B.

Les « Jardins de Cocagne » sont situés au nord-ouest par rapport au milieu du tronçon du chemin objet de l’APA.

En bordure des serres des « Jardins de Cocagne », se trouve un chemin privé (créé sur une parcelle privée) et non cadastré, perpendiculaire au chemin des Plantées qui rejoint la route du Creux-du-Loup. Sa largeur se situe entre 2,50 m et 3 m. Le chemin est également détrempé et présente de nombreux nids de poule. Sa section, 1/8ème de la longueur totale, côté chemin du Creux-du-Loup, est en forte déclinivité. Les parties s’accordent sur le fait que la commune a « entretenu » le chemin par la pose d’un revêtement (graviers recyclés). Il a été aplani. Les travaux se sont déroulés voici une année. Le Maire a indiqué que le propriétaire de ce chemin lui avait écrit pour lui demander de le fermer à la circulation. Selon un des intimés, il s’agirait du locataire.

A la hauteur de la propriété de l’un des intimés, se trouvent deux regards, le premier concerne les eaux claires, le second les eaux usées. Les eaux claires se déversent dans la Laire ; quant aux eaux usées, elles sont collectées pour être acheminées à Chancy. Le collecteur prévu dans l’APA serait raccordé à l'existant.

Comme convenu lors du transport sur place, le Maire a adressé au Juge délégué une copie d'un courrier du cultivateur de la parcelle sur laquelle un chemin d'évitement avait été créé, daté du 14 juin 2005.

Son auteur demandait à la commune de supprimer ledit chemin qui avait été aménagé sur la parcelle n° 2482 et de rendre à ladite parcelle sa vocation strictement agricole.

En date du 13 février 2006, l’un des intimés a relevé que l’auteur de la lettre précitée n'était pas le propriétaire de la parcelle sur lequel le chemin d'accès contesté avait été créé. Il s'agissait en réalité de l'exploitant des Jardins de Cocagne. Par ailleurs, celui-ci était membre du conseil municipal de la commune et politiquement proche du Maire.

En date du 6 mars 2006, le DCTI a formulé ses observations, en précisant que les parcelles des intimés étaient situées en zone de développement 5 et non pas en zone d'habitation 4B.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ; art. 149 LCI).

Selon l'article 60 b LPA, a qualité pour recourir toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

Les intimés sont tous riverains du chemin des Plantées. Ils ont donc qualité pour recourir.

3. a. Selon l'article 7 de la loi sur les routes du 28 avril 1967 (LR – L 1 10), le DCTI assume la surveillance générale de toutes les voies du canton ouvertes au public (al. 1). A ce titre, il statue sur les projets de création ou de modification de voies publiques cantonales et communales ainsi que des voies privées, y compris leurs dépendances avant leur exécution. L'autorisation de construire délivrée par le département est indépendante de la nécessité éventuelle d'obtenir une permission ou une concession pour une utilisation du domaine public en vertu de l'article 56.

La LCI, est, au surplus, applicable (al. 5).

Tout projet important de création ou de modification de voies publiques est soumis à l'enquête publique, selon la procédure définie pour l'adoption des plans localisés de quartiers, au sens de l'article 1 et suivant de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 (LExt - L 1 40). L'enquête publique n'a cependant pas lieu si le projet est compris à l'intérieur du périmètre d'un plan localisé de quartier ou d'un plan de site déjà adopté (al. 6).

Lorsque des projets soumis à l'agrément du département au sens de l'alinéa 2 sont de peu d'importance ou revêtent un caractère provisoire, ils peuvent être instruits selon les règles applicables à la procédure accélérée ou à la procédure par annonce de travaux (al. 8).

Le Grand Conseil est compétent pour autoriser, par voie législative, les projets importants de création ou de modification de routes cantonales. L'article 7 est applicable par analogie.

b. A teneur de l'article 3 alinéa 7 LCI, le DCTI peut traiter par une procédure accélérée les demandes d'autorisation relatives à des travaux, soumis à l'article 1 de la loi portant sur la modification intérieure d'un bâtiment existant ou ne modifiant pas l'aspect général de celui-ci. La procédure accélérée peut également être retenue pour des constructions nouvelles de peu d'importance ou provisoires. A titre exceptionnel, cette procédure peut enfin être adoptée pour des travaux de reconstruction présentant un caractère d'urgence. Dans ces cas, la demande n'est pas publiée dans la FAO et le département peut renoncer à solliciter le préavis communal. L'autorisation est, en revanche, publiée dans la FAO et son bénéficiaire est tenu, avant l'ouverture du chantier, d'informer, par écrit, les locataires et, le cas échéant, les co-propriétaires de l'immeuble concerné, des travaux qu'il va entreprendre. Une copie de l'autorisation est adressée à la commune intéressée.

Le recours à la procédure accélérée se conçoit pour des constructions nouvelles conformes aux normes de la zone dans laquelle elles sont projetées (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève du 8 novembre 1991, p. 4868).

Le DCTI a justifié l'instruction du projet litigieux par la procédure accélérée au seul motif qu'il présentait manifestement un caractère d'urgence afin d'assurer une sécurité suffisante aux usagers.

Or, ni l'urgence ni le fait que le projet aurait pour objectif d'assurer une sécurité suffisante aux usagers – étant relevé qu'on ignore la nature exacte du concept de sécurité ici avancé – n'ont pas été démontrés par les autorités cantonales et communales. De plus, le projet ne porte que sur une partie du chemin et non sur son ensemble. L'état actuel du chemin présente certes des nids de poule importants mais ils ne compromettent en aucun cas la sécurité ni des piétons, ni des automobilistes, ni des conducteurs de véhicules agricoles ou des camions l'empruntant. Il n'a pas non plus été allégué - et encore moins établi - que le terrain serait fortement inondé après les pluies, ce qui nécessiterait une intervention d'urgence afin de préserver ses usagers et/ou ses riverains, voire des biens matériels. Enfin, la commune discute du réaménagement de ce chemin et de l'installation d'un collecteur depuis 1999 déjà. S'il y avait une urgence, nul doute que la demande d'autorisation aurait été déposée depuis plusieurs années déjà.

Par ailleurs, ni le département ni la commune n'ont soutenu que les travaux ici envisagés étaient de peu d'importance. Soutenu, ce grief n’aurait pu être qu'écarté. En effet, les travaux projetés, qui ne sont pas provisoires, ne peuvent être qualifiés de peu d'importance vu leur ampleur et leur nature, l'enrobé bitumeux devant couvrir plus de 800 m2 du chemin.

Enfin, le recours à la procédure accélérée ne se conçoit que pour des constructions nouvelles conformes aux normes de la zone dans laquelle elles sont projetées. Or en l'espèce, les constructions faisant l'objet de l'autorisation litigieuse ne sont pas conformes à la zone agricole puisqu'elles nécessitent l'octroi d'une dérogation prévue par l'article 27 LaLAT.

Ainsi, le département n'était pas autorisé à traiter le projet litigieux par la voie de la procédure accélérée au sens de l'article 3 alinéa 7 LCI.

Le tribunal de céans a déjà eu l’occasion de relever que la publication des demandes d’autorisation (art. 3 al. 1 LCI) compte au nombre des dispositions impératives du droit public (ATA W du 4 septembre 1974 in RDAF 1965 pp. 33 et ss not. 39 consid. 5). Dans la cause précitée, le Tribunal administratif a jugé que l'omission de l’enquête publique avant l’octroi d’une dérogation entraînait la nullité de l’autorisation délivrée. Le fait que d’autres publications soient prévues par la loi ne saurait modifier la gravité des vices sans enlever aux prescriptions de droit public contenues dans la LCI leur caractère impératif. Le tribunal de céans a estimé qu’il était d’intérêt public de priver l’acte vicié de tout effet juridique en raison de l’importance qu’il y avait de ne porter aucune atteinte aux garanties offertes par le législateur à des administrés, notamment dans l’exercice ou pour la protection de l’endroit de propriétés ou de voisinage. Cette jurisprudence rigoureuse a été approuvée par la doctrine (T. TANQUEREL, La participation de la population à l’aménagement du territoire, 1988 p. 321). Dans une autre affaire, le Tribunal administratif a également considéré qu’une procédure d’APA appliquée à tort était de nature à empêcher toute opposition émanant des voisins et des tiers concernés, ce qui entraînait la nullité de l’autorisation y relative (ATA D. du 16 mai 2000).

La procédure accélérée présentement appliquée était de nature à empêcher toute opposition émanant des voisins et des tiers concernés. La demande d’autorisation n’a pas été rendue publique par une insertion dans la Feuille d’Avis Officielle (art. 3 al. 1 LCI). Même s’ils sont domiciliés sur le territoire de la commune, les recourants n’ont pas pu participer pleinement à la procédure d’opposition ; il ne ressort pas du dossier que les intimés aient pu consulter la demande d’autorisation et les plans (art. 3 al. 2 LCI). Il semble au contraire que les autorités administratives de la commune n'ont pas évoqué leur demande d'autorisation de construire par procédure accélérée lors de l’entrevue du mois de décembre 2004 avec les intimés. De plus, la souplesse de la procédure accélérée ne convient assurément pas à la construction projetée qui nécessitait une dérogation au régime d’affectation de la zone.

La décision est donc affectée d’un vice particulièrement grave, étant donné qu’elle a été prise en violation de règles essentielles de procédure.

En conséquence, le tribunal de céans constatera la nullité de l’autorisation n° APA 24049.

Tant le département que la commune qui succombent, seront condamnés conjointement et solidairement à un émolument de CHF 2'000.- (art. 87 LPA).

Bien qu’obtenant gain de cause, les recourants ne se verront pas allouer d’indemnité dans la mesure où comparant en personne, ils n’allèguent pas avoir exposé de frais pour leur défense.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 juin 2005 par le département des constructions et des technologies de l'information contre la décision de la commission cantonale de recours en matière de constructions du 13 mai 2005 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du département des constructions et des technologies de l'information et de la commune d’Avusy, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité aux intimés  ;

communique le présent arrêt au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, à la commission cantonale de recours en matière de constructions, à la commune d'Avusy et à Messieurs Christian Kronegg, Giuseppe Cuccodoro, Armand Bachofner, Jean-Pierre Agu, Jean-Claude Schneider, Michel Petitpierre, Bohdan Zielazek, Lofti Ben Hamida et à Bernard Maurer.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges, M. Bonard, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :