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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/7/2020

ACPR/693/2020 du 29.09.2020 ( PSPECI ) , REJETE

Descripteurs : MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE;TRAITEMENT FORCÉ;TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX;COMPÉTENCE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : CP.59; LS.50; LS.51; REPM.4

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/7/2020 ACPR/693/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 29 septembre 2020

 

Entre

A______, actuellement placé à la clinique B______, Unité C______, chemin ______, ______ (GE), comparant en personne,

recourant,

 

contre la décision rendue le 21 janvier 2020 par le Service de l'application des peines et mesures,

 

et

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, route des Acacias 82, Case postale 1629, 1211 Genève 26,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 30 janvier 2020, A______ recourt contre la décision du 21 janvier 2020, notifiée le 23 suivant (à sa curatrice), par laquelle le Service de l'application des peines et mesures (ci-après, SAPEM) a déclaré irrecevable, faute de compétence ratione materiae, son recours contre son passage en chambre sécurisée, le 14 janvier 2020, à la clinique B______.

Le recourant demande à la Chambre de céans "d'arrêter ce jeu malsain de la patate chaude auquel se livrent le TPAE et le SAPEM " et de déterminer laquelle de ces deux autorités est compétente pour traiter son recours contre la décision précitée.

b. Le Service de protection de l'adulte a ratifié le recours, par lettre du 16 mars 2020.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par ordonnance de non-lieu prononcée le 26 mai 2009 par la Chambre d'accusation, A______ a été déclaré irresponsable de menaces et injure. Une mesure institutionnelle en milieu fermé, au sens de l'art. 59 al. 3 CP, a été ordonnée.

b. Selon le rapport d'expertise psychiatrique rendue le 6 mars 2009 par le Centre universitaire romand de médecine légale, A______ souffre de trouble délirant persistant. Anosognosique, le précité refuse tout traitement médicamenteux. En novembre 2019, il refusera de prendre part à l'expertise psychiatrique ordonnée par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après, TPAE). L'expert déclarera, le 15 novembre 2019, ne pas pouvoir poser un diagnostic précis mais suspecter fortement, sur la base des éléments en sa possession, la présence d'éléments délirants, éventuellement de nature paranoïaque.

c. Dès octobre 2008, A______ a été placé en milieu fermé, successivement à la prison de D______ et aux établissements de E______ et à l'établissement fermé de soins F______.

d. Durant son séjour à F______, A______ a formé recours au Tribunal fédéral contre son placement à des fins d'assistance en vue de l'injection, contre son gré, d'un traitement médicamenteux. Par arrêt 5A_96/2015 du 26 février 2015, le Tribunal fédéral a admis le recours et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. À réception, la Chambre de surveillance de la Cour de justice (ci-après, la Chambre de surveillance) a transmis le recours aux autorités pénales d'exécution comme objet de leur compétence.

e. Lors d'une réunion de réseau qui s'est tenue le 15 mai 2019, les divers intervenants ont décidé le transfert de A______ en milieu hospitalier ouvert à B______, pour y être évalué durant un an au maximum. En cas de péjoration ou de maintien de son état, une levée de la mesure thérapeutique institutionnelle pour échec serait proposée au Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après, TAPEM) et le TPAE devrait alors organiser son placement dans une structure civile adaptée. En cas d'évolution positive après une année en milieu ouvert, le transfert de A______ dans une structure non hospitalière serait envisagé.

f. Par décision du 8 août 2019, le SAPEM a autorisé le passage en milieu ouvert de A______, dès qu'une place serait disponible.

g. A______ a intégré l'hôpital psychiatrique B______ (ci-après, B______) le 23 octobre 2019, au sein de l'unité C______.

h. Le 14 janvier 2020, A______ a été placé en chambre sécurisée, à la clinique. Il s'est vu remettre par le médecin le formulaire intitulé "recours contre mesure de contrainte en application de l'article 51 al. 2 de la loi sur la santé (K 1 03)" l'informant que la mesure pouvait être contestée devant le TPAE.

i. Par courriel envoyé le même jour au SAPEM, le Service des mesures institutionnelles des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après, SMI), a informé le SAPEM du passage de A______ "en chambre de soins intensifs suite à un état d'agitation avec insultes (panneau très démonstratif sur la poitrine : « lâches, tortionnaires et fils de... ») et casse d'objets (cuvette des toilettes de l'unité C______) sans élément de décompensation franc". L'état de tension était survenu dans le cadre de plusieurs vécus de frustration dans la journée et avait nécessité la présence de trois policiers et deux agents de sécurité. A______ ne s'était pas montré agressif physiquement mais s'était accroché à son lit "en étant très floride en insultes".

j. Le 15 janvier 2020, A______ a fait recours au TPAE contre la mesure, au moyen du formulaire susmentionné.

k. Le lendemain, le TPAE a transmis au SAPEM, par courriel, le recours de A______, "à toutes fins utiles et pour raison de compétence", en lui laissant le soin d'y donner "la suite qu'elle nécessite".

l. En réponse au SAPEM qui lui demandait copie du "document" ayant ordonné la mesure, le SMI a répondu, par courriel du 20 janvier 2020, que le placement en chambre sécurisée était une "prescription médicale de mesure de contrainte qui se fait directement dans DPI (dossier patient intégré) et qui est renouvelée quotidiennement".

C. Dans la décision querellée, le SAPEM a retenu que la compétence pour connaître des recours interjetés contre les mesures de contrainte consistant en une modalité de protection des patients, au sens de l'art. 51 al. 2 de la loi genevoise sur la santé (LS - K 1 03), appartenait au TPAE. Partant, lui-même n'était pas compétent pour traiter le recours de A______, étant précisé qu'il ne s'agissait nullement d'une médication sous contrainte, et encore moins d'une médication sous contrainte aux fins d'exécution de la mesure. Qui plus est, le SAPEM n'était pas une autorité de recours. Partant, le recours devait être déclaré irrecevable.

D. a. Parallèlement, par décision du 27 janvier 2020 (C/1______/2007), le TPAE a, à son tour, déclaré irrecevable le recours de A______ contre son passage en chambre sécurisée, liée selon lui à la mesure thérapeutique institutionnelle ordonnée par la justice pénale. Le TPAE a estimé que la décision relevait de l'exécution de la mesure pénale, ordonnée par un juge pénal sur la base de l'art. 59 CP, "qui ne saurait être remplacée par l'intervention d'une autorité civile fondée sur les art. 426 et ss. CC", selon l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_96/2015 susmentionné.

b. Par arrêt du 27 février 2020, la Chambre de Surveillance a rejeté le recours formé par A______ contre cette décision. Se fondant sur la doctrine et l'arrêt du Tribunal fédéral du 26 février 2015 précité, les juges ont estimé que lorsqu'une mesure thérapeutique institutionnelle était instituée, il n'y avait plus de place pour une intervention de l'autorité civile fondée sur les art. 426 ss CC. En l'espèce, dès lors que la mesure institutionnelle avait toujours cours, tous les traitements et mesures décidés par le corps médical, sous la supervision du SAPEM, l'étaient en vertu du traitement institutionnel ordonné par le juge pénal, aucune mesure civile ne pouvant être prise tant que subsistait la mesure pénale. Partant, le TPAE n'était pas compétent pour connaître de l'exécution du traitement institutionnel ordonné par le juge pénal.

E. a. Dans son recours devant la Chambre de céans contre la décision du SAPEM,A______ relève que la mesure en chambre fermée avait été ordonnée par la psychiatre de l'unité, soit une autorité civile et nullement une autorité pénale contre laquelle le TPAE ne pourrait pas se prononcer. Sur le fond, il reproche au médecin de ne pas l'avoir entendu avant d'ordonner la mesure, n'acceptant pas l'explication qui lui a ultérieurement été fournie par ce dernier, selon laquelle il n'avait pas "la capacité d'être écouté ni de comprendre [s]a situation". Il conteste avoir présenté un risque d'agression envers le personnel soignant, puisqu'en plus de onze ans de détention, il n'avait jamais agressé physiquement quiconque.

b. Le SAPEM conclut au rejet du recours. Il rappelle les différences entre la médication sous contrainte à des fins d'exécution de la mesure, selon l'art. 4 du règlement genevois sur l'exécution des peines et mesures (REPM - E 4 55.05), d'une part, et les autres cas de médication sous contrainte de personnes détenues, au sens de l'art. 50 al. 2 LS, d'autre part. Les mesures de cette deuxième catégorie pouvaient par exemple consister dans le fait, pour le personnel médical, d'attacher une personne à son lit au moyen de sangles ou de la mettre dans une chambre fermée à clef (cf. Directives médico-éthiques de l'Académie suisse des sciences médicales). Une personne exécutant une mesure institutionnelle pénale pouvait présenter un cas urgent sans lien avec le but de ladite mesure. Dans cette hypothèse, le droit civil devait prendre le pas sur le droit pénal, afin de protéger la personne de manière urgente. En l'occurrence, l'enfermement de A______ dans une chambre par le personnel médical B______ avait été prise en application de l'art. 50 al. 2 LS. Le précité avait dûment recouru à l'aide du formulaire mentionnant expressément la compétence du TPAE contre ce type de mesure de contrainte, consistant en une modalité de protection des patients.

c. Le Ministère public conclut également au rejet du recours. Il relève que, contrairement à la solution retenue par la Chambre de surveillance, les deux régimes (médication forcée fondée sur l'art. 59 CP et placement à des fins d'assistance fondé sur l'art. 426 CC) étaient appelés à cohabiter. Dans l'arrêt 5A_96/2015 susmentionné, le Tribunal fédéral s'était borné à retenir que les mesures fondées sur l'art. 59 CP ne pouvaient pas être remplacées par une intervention de l'autorité civile. En revanche, si un détenu qui refusait tout soin devait être hospitalisé en urgence pour une appendicite, il faudrait recourir à un placement civil, le soin requis ne relevant pas de la mesure pénale. Il en allait de même lorsqu'un détenu devait être hospitalisé pour une décompensation psychotique, cette dernière ne s'inscrivant pas nécessairement dans le cadre de la pathologie ayant justifié la mesure pénale. À titre d'exemple, dans le cas examiné par l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_371/2019 du 28 mars 2019, un détenu qui subissait une mesure thérapeutique institutionnelle avait - avant la décision de médication forcée litigieuse - fait l'objet d'un placement à des fins d'assistance en milieu psychiatrique en raison d'une décompensation psychotique et d'un risque de passage à l'acte (consid. 1, 4.2.2 et 4.2.3). Ainsi, le patient d'une institution psychiatrique qui devait, comme dans le cas de A______, être brièvement contraint à rester dans sa chambre, relevait d'une mesure ordonnée par un médecin au sens des art. 50 et 51 LS. Le fait que cette décision intervienne dans le cadre d'une mesure thérapeutique institutionnelle pénale ne changeait rien au fait qu'il ne s'agissait pas de médication forcée. La solution adoptée par le TPAE et la Chambre de surveillance, outre à engendrer un conflit de compétence négative, revenait à faire du SAPEM une autorité de surveillance des établissements psychiatriques, ce qu'il n'était pas.

d. Aucune des parties n'a répliqué.

e. Conformément à la procédure prévue à l'art. 118 LOJ, la Chambre de céans a procédé à un échange de vues avec la Chambre de surveillance.

EN DROIT :

1.             1.1. Conformément à l'art. 128 al. 2 let. a et al. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ ; RS E 2 05), la Chambre de céans exerce les compétences que le CPP et la loi d'application du Code pénal suisse et d'autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009 (LaCP ; RS E 4 10) lui attribuent.

1.2. En vertu de la délégation figurant à l'art. 439 CPP, le législateur genevois a attribué à la Chambre pénale de recours la compétence de statuer sur les recours dirigés contre les décisions rendues par le Département de la sécurité et de l'économie (DSE), ses offices et ses services, les art. 379 à 397 CPP s'appliquant par analogie (art. 42 al. 1 let. a LaCP).

1.3. En l'espèce, le recours a été adressé à la Chambre de céans dans les dix jours à compter de la notification de la décision querellée à la curatrice du recourant. Partant, il est déposé en la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al 1 CPP).

Il émane du condamné visé par la décision querellée, soit une décision du SAPEM par laquelle ce dernier a rejeté sa compétence ratione materiae.

Bien que la mesure prise à son encontre n'ait plus cours, le recourant dispose toujours d'un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 382 al. 1 CPP), dès lors qu'en raison du double refus de compétence, par le SAPEM et le TPAE, sa contestation n'a pu être traitée à ce jour et que la situation est susceptible de se reproduire.

Partant, le recours est recevable.

2.             Le litige porte ici sur la question de savoir si le SAPEM a décliné à bon droit sa compétence ratione materiae pour examiner la contestation élevée par le recourant contre la mesure de chambre sécurisée ordonnée par les médecins B______ le 14 janvier 2020.

2.1.       Dans l'arrêt 5A_96/2015 susmentionné, le Tribunal fédéral - dans un litige relatif au recourant - a posé que "le traitement institutionnel des troubles mentaux prévu par [l'art. 59 CP], ne se limite pas au seul internement mais comprend également le traitement médical ou les soins spéciaux, voire aussi la médication forcée, si celle-ci se révèle nécessaire et qu'elle respecte la déontologie médicale (ATF 130 IV 49 consid. 3.3; 127 IV 154 consid. 3d). [...] La nécessité d'avoir recours à une médication forcée peut toutefois n'apparaître que pendant l'exécution de la mesure. Dans cette éventualité, ce sont alors les autorités d'exécution qui sont compétentes pour ordonner une médication forcée, pour autant toutefois que celle-ci corresponde au but de la mesure et qu'elle s'inscrive dans le cadre du traitement déterminé par le jugement pénal (ATF 130 IV 49 consid. 3.3). L'art. 59 CP constitue ainsi une base légale suffisante pour ordonner le traitement de force du délinquant, les mesures qu'elle prévoit ou permet ne pouvant ainsi être remplacées par une intervention de l'autorité civile fondée sur les art. 426 ss CC (HEER, in Basler Kommentar, Strafrecht I, 3e éd. 2013, n. 84 ad art. 59 CP)" (consid. 4.1).

Dans un arrêt plus récent, le Tribunal fédéral a précisé que la médication forcée a pour but de donner à la mesure institutionnelle des chances de succès et de conduire à une amélioration du pronostic légal (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1091/2019 du 16 octobre 2019 consid. 4.4).

2.2.       Pour les auteurs du Commentaire bâlois (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-136 StGB, Jugendstrafgesetz, 4e éd., Bâle 2019, n. 84a ad art. 59 CP), une mesure institutionnelle au sens de l'art. 59 CP ne signifie pas seulement une restriction de la liberté de mouvement, mais comprend régulièrement d'autres interventions résultant de la nécessité d'un traitement ("sondern umfasst regelmässig auch weitere Eingriffe, die sich aus der Notwendigkeit der Behandlung ergeben").

2.3.       À Genève, l'art. 4 du Règlement sur l'exécution des peines et mesures (REPM - E 2 44.05) prévoit que la médication sous contrainte à des fins d'exécution de la mesure (al. 1) est ordonnée par le SAPEM (al. 2) et administrée sous la responsabilité du psychiatre traitant (al. 5).

Pour les autres cas de médication sous contrainte de personnes détenues, les art. 379, 434 et 435 CC sont applicables (al. 6).

2.4.       L'art. 50 de la loi genevoise sur la santé (LS - K 1 03)prévoit qu'en principe toute mesure de contrainte à l'égard des patients est interdite (al. 1). Sont réservés toutefois le droit pénal et civil en matière de mesures thérapeutique et d'internement, ainsi que la réglementation en matière de placement à des fins d'assistance (al. 2). À titre exceptionnel, le médecin responsable d'une institution de santé peut [aux conditions énoncées], imposer pour une durée limitée des mesures de contrainte strictement nécessaires à la prise en charge du patient : a) si d'autres mesures moins restrictives de la liberté personnelle ont échoué ou n'existent pas; b) si le comportement du patient présente un grave danger menaçant sa vie ou son intégrité corporelle ou celles d'un tiers (al. 2).

Lorsqu'une mesure de contrainte dans les situations précitées est mise en oeuvre, un protocole comprenant notamment le but et le type de mesure utilisée est inséré dans le dossier du patient (art. 51 al. 1 LS), qui peut s'adresser au TPAE pour demander l'interdiction ou la levée de la mesure. Les dispositions du CC régissant la procédure en matière de mesures limitant la liberté de mouvement s'appliquent par analogie (al. 2).

2.5.       Les Directives médico-éthiques de l'Académie suisse des sciences médicales, "Mesures de contrainte en médecine", éd. 2015, ch. 2.1 et Annexe A, distinguent :

-          la mesure de contrainte comme étant "l'application d'une mesure médicale contre la volonté autodéterminée du patient ou en dépit de son refus",

-          les mesures limitatives de liberté, soit les "limitations de la liberté physique de mouvement ainsi que d'autres droits fondamentaux",

-          le traitement sous contrainte, c'est-à-dire les "mesures médicales appliquées contre la volonté ou en dépit de l'opposition d'un patient, dans le but de préserver ou de recouvrer la santé".

2.6.       En l'espèce, le TPAE et la Chambre de surveillance estiment que la compétence pour examiner le recours contre la mesure de chambre sécurisée revient aux autorités pénales d'exécution de la mesure thérapeutique institutionnelle, laquelle ne laisserait selon elles pas de place à leur intervention.

Le SAPEM et le Ministère public considèrent, quant à eux, que la mesure litigieuse, ordonnée par le médecin B______, consiste en une modalité de protection des patients pour laquelle la procédure prévue aux art. 50 et 51 LS, avec un droit de recours devant le TPAE, s'applique même à l'égard d'un patient soumis à une mesure institutionnelle.

Il est constant que la mesure litigieuse n'est pas une médication sous contrainte, au sens de l'art. 4 al. 1 à 5 REPM, laquelle vise à atteindre le but fixé par la mesure institutionnelle et favoriser l'amélioration du pronostic légal, qui relevait de la compétence du SAPEM. Le placement litigieux en "chambre de soins intensifs" consiste, au contraire, en une mesure ponctuelle de contrainte et/ou limitative de la liberté du patient - au sens de la description donnée par les Directives médico-éthiques sus-décrites -, en raison de son état ou de son attitude à un moment donné. La mesure querellée n'avait pas de visée thérapeutique dans le cadre de l'exécution de la mesure institutionnelle, mais était destinée à contenir les débordements du patient, un peu à l'instar d'une décision disciplinaire en milieu carcéral.

Ainsi, la Chambre de céans partage l'avis du Ministère public et du SAPEM, selon lequel toute personne hospitalisée, même soumise à un traitement thérapeutique institutionnel, demeure avant tout un patient et, de ce fait, doit pouvoir contester devant le TPAE, conformément aux art. 50 et 51 LS, une mesure de contrainte - autre qu'une médication forcée au sens de l'art. 4 REPM -, prise à son encontre par le personnel médical. Cette opinion est en adéquation avec l'articulation des dispositions légales précitées et le système qui semble avoir été voulu par le législateur genevois.

Cela étant, au vu des décisions prises dans la présente procédure par le TPAE et la Chambre de surveillance, qui font manifestement une autre lecture desdites dispositions, la Chambre de céans n'a d'autre choix, pour éviter de créer un déni de justice, que d'entrer en matière et de traiter le recours au fond.

2.7. Il ressort des éléments au dossier que le recourant a été placé, le 14 janvier 2020, en chambre de soins intensifs en raison d'un état d'agitation avec insultes et casse d'objets, "sans élément de décompensation franc", ayant nécessité la présence de trois policiers et deux agents de sécurité.

Le recourant reproche au médecin de ne pas l'avoir entendu, conformément à l'art. 50 al. 2 LS, avant de prendre la mesure querellée. Cette disposition prévoit toutefois que la discussion a lieu "dans la mesure du possible". En l'espèce, l'état d'agitation du recourant ne le permettait pas. Le médecin lui a d'ailleurs parlé - et lui a expliqué les raisons de la mesure -, dès que cela a été possible.

Le recourant conteste avoir présenté un risque hétéro-agressif à l'égard du personnel médical, expliquant n'avoir jamais agressé personne. Compte tenu de son important état d'agitation - non contesté en tant que tel -, la mesure litigieuse n'apparaît ni contraire à l'art. 50 LS, ni disproportionnée.

3.             Partant, le recours sera rejeté. À l'avenir, le SAPEM n'aura plus à entrer en matière sur des recours analogues, mais les transmettra sans autre et d'office à l'autorité dont la compétence résulte de la loi elle-même, à savoir le TPAE.

4. Les frais de la procédure de recours seront, en raison de la particularité du cas, laissés à la charge de l'État nonobstant l'issue du recours.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à A______ (soit pour lui le Service de protection de l'adulte et de l'enfant), au SAPEM et au Ministère public.

Le communique, pour information, au TPAE, à la Chambre de surveillance de la Cour de justice et à A______ en personne.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).