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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/10457/2020

ACPR/706/2020 du 06.10.2020 sur OMP/11184/2020 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : CONTRAVENTION DE POLICE DE DROIT CANTONAL;JONCTION DE CAUSES;CONNEXITÉ MATÉRIELLE;AUTORITÉ ADMINISTRATIVE
Normes : CPP.17; CPP.29; LaCP.11

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10457/2020 ACPR/706/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 6 octobre 2020

Entre

A______, actuellement à la clinique de B______, comparant par Me C______, avocate,

recourante,

 

contre l'ordonnance de refus de jonction rendue le 25 août 2020 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 7 septembre 2020, A______ recourt contre l'ordonnance du 25 août 2020, notifiée le surlendemain, par laquelle le Ministère public a refusé de joindre à la procédure P/10457/2020 douze contestations de contraventions pendantes par-devant le Service des contraventions (ci-après, SdC).

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à la jonction de toutes les causes, par-devant le Ministère public.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ est poursuivie pour incendie intentionnel provoqué le 16 juin 2020 sur une poubelle au pied d'un immeuble. Une expertise psychiatrique est en cours.

b. Le 2 juillet 2020, A______, par son avocat, a formé opposition auprès du Ministère public à douze (recte : onze) ordonnances pénales rendues contre elle (pour tapages, souillures, refus d'obtempérer, resquille, non-respect de la distance sanitaire, etc., entre juin 2019 et mai 2020). S'étant aperçu que ces décisions avaient été rendues par le SdC, le Ministère public a transmis le pli à cette autorité.

c. Le 16 juillet 2020, A______ a invité le Ministère public à donner suite à la demande de jonction de causes qu'elle présentait le même jour au SdC. Le 12 août 2020, elle l'a prié de statuer avant que les travaux d'expertise ne commencent.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public estime que les faits traités par le SdC n'ont aucune connexité avec la procédure qu'il instruit; que les peines en jeu n'étaient pas de même genre; que la prévenue aurait la possibilité d'utiliser l'expertise dans les procédures contraventionnelles; et qu'il n'était "pas en mesure" de "vérifier" la validité de toutes les oppositions formées.

D. a. À l'appui de son recours, A______ invoque une violation de l'art. 29 CPP. La jonction sollicitée démontrerait clairement son style de vie, soit qu'elle était à la rue et menait une existence difficile. Un lien de connexité direct existait donc avec les faits du 16 juin 2020, où elle avait eu froid et voulait se réchauffer. Comme la question de sa responsabilité pénale se posait, il convenait que l'expertise psychiatrique englobe tous les faits reprochés. Une jonction lui éviterait aussi d'avoir à se rendre "15 fois au Tribunal" (sic). Enfin, l'impossibilité alléguée par le Ministère public d'examiner la validité de toutes les oppositions était un argument "très choquant car très faux".

b. À réception, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable, pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision de refus de jonction sujette à recours auprès de la Chambre de céans, au sens de l'art. 393 al. 1 let. a CPP (ACPR/51/2012 du 2 décembre 2012 consid. 1), et émaner de la prévenue qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2. La recourante invoque une violation de l'art. 29 CP et se prévaut du principe de l'unité de la procédure.

2.1. L'art. 29 al. 1 let. a CPP consacre le principe de l'unité de la procédure pénale, à savoir qu'il y a lieu de poursuivre et juger, en une seule et même procédure, l'ensemble des infractions reprochées à un même prévenu. En vertu de ce principe, les infractions commises en concours doivent - y compris lorsqu'elles sont de nature différente (ATF 138 IV 214 consid. 3.6 et 3.7) - être réprimées dans un même jugement, un seul magistrat devant statuer sur l'ensemble des faits imputés à un délinquant. Cette solution permet, en sus, d'éviter tant la multitude de décisions rendues à l'encontre d'une même personne que les frais liés à toute nouvelle procédure (ATF 138 IV 29 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_428/2018 du 7 novembre 2018 consid. 3.2), de prononcer une peine complémentaire ou d'ensemble (art. 49 CP; L. MOREILLON/ A. PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale - Petit commentaire, 2e édition, Bâle 2016, n. 3 ad art. 29).

L'art. 29 CPP est cependant inapplicable si le canton compétent a fait usage de la faculté ouverte par l'art. 17 al. 1 CPP (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, note de bas de page n° 6 ad art. 29; N. SCHMID / D. JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 3e éd., Zurich 2018, n. 3 ad art. 29; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, n. 4 ad art. 29; L. MOREILLON/ A. PAREIN-REYMOND, op. cit., n. 6 ad art. 29).

Selon l'art. 17 al. 1 CPP, les cantons peuvent déléguer la poursuite et le jugement de contraventions à des autorités administratives. Dans le canton de Genève, c'est le SdC qui a été désigné à cet effet. Il est compétent pour les procédures contraventionnelles (art. 11 al. 1 LaCP), à moins que la loi n'ait institué une autre autorité administrative (art. 11 al. 2 LaCP). Il lui incombe, en particulier, de traiter les oppositions aux ordonnances pénales qu'il a rendues (art. 352 ss. et 357 al. 2 CPP).

Cependant, si les contraventions ont été commises en rapport avec des crimes ou délits, elles sont poursuivies et jugées en même temps par le Ministère public (art. 17 al. 2 CPP). Cette disposition s'applique en cas de connexité factuelle ou de concours idéal avec un crime ou un délit, mais non en cas de connexité personnelle, i.e. d'infractions (d'un même auteur) sans aucun lien entre elles (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 7 ad art. 17).

2.2. En l'occurrence, les contraventions reprochées à la recourante portent sur des faits qui, contrairement à ce qu'elle affirme, n'ont aucune connexité avec l'incendie intentionnel - un crime (art. 10 al. 3 et 221 CP) - dont elle est prévenue. Le Ministère public n'instruit pas de contravention qui aurait été commise simultanément ou concomitamment à ces faits, du 16 juin 2020. Les contraventions frappées d'opposition portent sur des faits antérieurs. Que leur commission puisse éclairer, mieux que l'expertise à rendre, le style de vie de la recourante est sans pertinence en regard des dispositions claires du CPP, tout comme l'éventualité - conjecturale, au surplus - d'avoir à donner suite à de multiples convocations de justice si les oppositions étaient écartées et les ordonnances pénales, transmises au tribunal de première instance. Au demeurant, la recourante ne sera pas empêchée de produire l'expertise devant d'autres autorités pénales, si elle estime que ses conclusions servent sa défense.

3.             Le recours doit être rejeté, pour être manifestement mal fondé. Dès lors, la Chambre de céans pouvait décider d'emblée de le traiter sans échange d'écritures ni débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

4.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

5.             L'indemnité du défenseur d'office de la recourante sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante, soit pour elle son défenseur, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

 

Le greffier :

Sandro COLUNI

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/10457/2020

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

     

- délivrance de copies (let. b)

CHF

     

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

-

CHF

     

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

600.00