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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/15996/2021

ACPR/12/2023 du 05.01.2023 sur OMP/15546/2022 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.02.2023, rendu le 13.02.2023, IRRECEVABLE, 1B_72/2023
Descripteurs : DÉFENSE D'OFFICE;REMPLACEMENT;RELATION DE CONFIANCE
Normes : CPP.132; CPP.133; CPP.134.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15996/2021 ACPR/12/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 5 janvier 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant en personne,

recourante,

 

contre l'ordonnance rendue le 13 septembre 2022 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 23 septembre 2022, A______ recourt contre la décision du 13 septembre 2022, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé de relever le défenseur d'office de sa mission.

La recourante conclut à ce que Me B______ soit nommé en qualité de défenseur d'office en lieu et place de Me C______.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et son ex-compagnon, D______, s'affrontent dans le cadre de procédures civiles et pénales, notamment au sujet de la garde de leur fille née en 2011. En décembre 2018, la garde de l'enfant a été retirée à la mère et confiée au père par décision du Tribunal de première instance. La mère dispose d'un droit de visite restreint.

b. Dans le cadre d'une procédure pénale P/1______/2020 dirigée contre A______, celle-ci a, lors de l'audience du 12 octobre 2020 par-devant le Ministère public, demandé la nomination d'un défenseur d'office en la personne de Me E______ ou de Me C______.

Ce dernier a été nommé en qualité de défenseur d'office le 16 octobre 2020.

c. Dans la présente procédure, A______ est poursuivie pour diffamation, calomnie, injure, menaces et contrainte, par suite de plaintes déposées par D______ et les parents de celui-ci, ainsi que deux tiers.

La première plainte a été déposée en août 2021.

d. Par ordonnance du 8 octobre 2021, le Ministère public a ordonné la défense d'office en faveur de A______ et désigné à cet effet Me C______.

A______ ayant, par lettre du 11 octobre 2021, déclaré ne plus souhaiter que l'avocat précité la représente, le Ministère public a, par ordonnance du 18 octobre 2021, révoqué la désignation de Me C______.

e. Par ordonnance du 29 novembre 2021, le Ministère public a désigné Me F______ en qualité de défenseur d'office. Le 1er décembre 2021, A______ a déclaré s'opposer à cette nomination, expliquant qu'elle avait besoin d'un avocat à la hauteur de "la gravité" de l'affaire, qui ne pourrait être ni intimidable ni attaquable, et qui ne serait pas au début de sa carrière. Elle suggérait Me G______ ou Me H______ (sans autre précision).

Me F______ ayant demandé à être relevée de sa mission, le Ministère public a, par ordonnance du 2 décembre 2021, révoqué la désignation de l'avocate précitée.

f. Après qu'un nouveau Procureur a été chargé de la procédure, une nouvelle ordonnance de nomination d'avocat d'office a été rendue le 22 mars 2022, désignant derechef Me C______ comme défenseur d'office de la prévenue, en prévision de l'audience d'instruction à venir.

Le 28 mars 2022, A______ a informé le Procureur que la nomination de Me C______ avait été révoquée dans la présente procédure, mais pas dans la procédure parallèle P/1______/2020. Elle refusait toutefois d'être représentée par les stagiaires du précité, alors que, de son côté, D______, avocat, était assisté de bâtonniers. Elle n'avait pas encore cherché ni trouvé un avocat qui pourrait la défendre convenablement, de sorte qu'elle viendrait à l'audience sans avocat.

Par ordonnance du 29 mars 2022, le Ministère public a révoqué une nouvelle fois la désignation de Me C______.

g. Lors de l'audience du 31 mars 2022 [dans la procédure P/3727/2022 jointe à la présente par ordonnance du 6 avril 2022], A______ a comparu seule devant le Ministère public. Elle a demandé à être assistée d'un avocat, mais pas Me C______. Le Procureur lui a répondu que seul ce dernier pourrait être nommé d'office, dès lors qu'il était déjà nommé dans la procédure pendante devant le Tribunal de police [P/1______/2020]. Elle a préféré s'exprimer hors la présence d'un avocat.

h. Lors de l'audience suivante, du 11 avril 2022, A______ a derechef renoncé à être assistée d'un avocat. Après qu'elle eut déclaré qu'elle allait continuer les publications litigieuses sur les réseaux sociaux, car elles étaient selon elle le reflet de la vérité, le Procureur l'a placée en état d'arrestation, en raison d'un risque de réitération, et a demandé au Tribunal des mesures de contrainte (ci-après, TMC) sa mise en détention provisoire.

Informée de cette démarche, A______ a sollicité la désignation de Me E______ en qualité de défenseur d'office et a renoncé à ce que sa fille, ainsi que son employeur, soient informés de la demande de mise en détention provisoire.

i. Par ordonnance du même jour, le Procureur a ordonné la défense d'office en faveur de A______ et désigné Me C______. Il ressort de la décision que la prévenue avait souhaité que Me E______ prenne sa défense, mais que celui-ci avait refusé "catégoriquement". Me C______ était ainsi désigné, car il assistait déjà la prévenue dans le cadre de la procédure P/1______/2020.

j. Le 12 avril 2022, A______ a comparu devant le TMC, assistée de l'avocate-stagiaire de Me C______. Le juge de la détention a refusé la demande de mise en détention provisoire formée par le Ministère public et ordonné la libération de la prévenue au profit de mesures de substitution destinées à pallier le risque de réitération retenu.

Par suite du recours du Ministère public, A______ a été maintenue en détention provisoire, sur mesures provisionnelles ordonnées par la Chambre de céans (OCPR/18/2022 du 12 avril 2022).

La prévenue, par écritures de son avocat d'office, s'est opposée au recours.

Par arrêt ACPR/259/2022 du 20 avril 2022, le recours a été rejeté et la libération immédiate de la précitée, ordonnée par la Chambre de céans.

k. Le 27 avril 2022, agissant par son défenseur d'office, A______ a requis la récusation du Procureur, laquelle a été prononcée par arrêt ACPR/525/2022 du 5 août 2022.

Une autre Procureure a repris l'instruction de la cause.

l. Par lettre du 24 août 2022, A______ a demandé que Me C______ soit relevé de sa mission, et sa défense d'office confiée à Me I______.

Elle avait demandé la nomination de Me E______, en qui elle avait une confiance absolue, mais ce dernier n'avait pas voulu assumer la procédure pénale en sus de la procédure civile, dans laquelle il l'assistait déjà. La nomination de Me C______ était intervenue sans qu'on lui demande son avis et alors qu'elle était "abusivement emprisonnée le 11 avril 2022".

Sa défense était "extrêmement défaillante" au regard de ses droits humains et constitutionnels, et elle avait totalement perdu confiance en l'avocat. Elle était convaincue qu'avec n'importe quel autre avocat à Genève, ses droits n'auraient pas été violés, et "on" aurait averti sa famille et ses proches, son travail à tout le moins. Elle ne savait pas si sa "maltraitance judiciaire" était l'œuvre de la défense défaillante de la part de son propre avocat, qui ne s'était jamais donné la peine de lire le dossier et le connaissait "moins que la République". Elle souhaitait que sa défense soit confiée à Me I______.

m. Invité à se prononcer sur la requête susmentionnée, Me C______ a transmis copie des décisions rendues par le Tribunal de police, respectivement la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice, dans le cadre des procédures pénales parallèles P/1______/2020 et P/2______/2017, lesquelles l'avaient maintenu en qualité de défenseur d'office de A______. Il n'avait rien à ajouter.

n. Par lettre du 13 septembre 2022, à laquelle était jointe une procuration signée par A______, Me B______ a informé le Ministère public être disposé à accepter le mandat de défenseur d'office.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public a retenu que A______ se limitait à exprimer des motifs purement subjectifs, en tant qu'elle exprimait sa conviction personnelle qu'elle pourrait être mieux défendue par un autre défenseur d'office. Elle n'alléguait aucun élément objectif permettant de penser que le défenseur n'assurerait pas une défense efficace, ni de considérer que la relation de confiance serait rompue.

D. a. Sur ces entrefaites, la Procureure a, par mandat de comparution du 7 septembre 2022, cité A______ à comparaître à une audience d'instruction le mercredi 14 septembre suivant. Le mercredi étant le jour où elle exerce son droit de visite, la prévenue a demandé le report de l'audience.

Par lettre du 9 septembre 2022 adressée au défenseur de A______, la Procureure l'a informée que l'audience ne serait pas reportée, eu égard au non-respect par la prévenue des mesures de substitution ordonnées par le TMC et l'absence d'autres disponibilités à brève échéance.

b. A______ ne s'étant pas présentée à l'audience le 14 septembre 2022, celle-ci a été conduite en son absence. La prévenue était représentée par l'avocate-stagiaire de Me C______.

c. Après avoir délivré un mandat d'arrestation contre A______, la Procureure a, le 15 septembre 2022, requis la mise en détention provisoire de la prévenue pour une durée de deux mois.

A______ a comparu devant le TMC, assistée de l'avocate-stagiaire de Me C______. Elle s'est exprimée ainsi s'agissant de sa défense : "Je refuse d'être assistée par Me J______. Je n'ai rien contre elle mais j'ai dénoncé Me C______ à la Commission du Barreau. Je suis la prévenue et capable de discernement et je ne souhaite pas qu'elle soit présente. Vous m'expliquez que je me trouve dans un cas de défense obligatoire et que la loi prévoit ainsi une obligation pour moi d'être assistée par un avocat à la présente audience. Vous m'expliquez que [si] tel est mon souhait, l'avocate-stagiaire pourra ne pas intervenir. Je refuse catégoriquement d'être assistée par cette Etude. Je considère que cela viole mon droit à une défense équitable et mon droit d'être entendue."

A______ s'est ensuite exprimée sur la demande de mise en détention provisoire dont elle faisait l'objet. L'avocate-stagiaire de Me C______, qui souhaitait plaider, y a renoncé après le refus de A______.

Par ordonnance du même jour, le TMC a refusé la demande de mise en détention provisoire formée par le Ministère public et a libéré A______ au profit de mesures de substitution.

E. a. Dans son recours, A______ expose, en substance, que Me C______ savait que le Ministère public avait dysfonctionné, à l'avantage de D______ "depuis le début". L'avocat avait toutefois "permis" sa mise en détention provisoire, en avril 2022 [que la recourante désigne par "le trafic des heures" et sa "disparition temporaire"].

Par ailleurs, l'avocat avait demandé la récusation de "magistrats intègres", soit le juge K______ [dans la procédure P/2______/2017] et le Procureur L______ [ACPR/525/2022 du 5 août 2022], mais pas celle de la Procureure actuellement chargée de la procédure, qu'elle avait donc dû requérir elle-même.

Le 15 septembre 2022, Me C______ et la Procureure l'avaient "mis[e] en garde à vue" et avaient essayé encore une fois de la mettre en détention provisoire.

Son propre avocat, qui ne lisait pas le dossier depuis longtemps, ne la défendait pas. Il était venu au TMC "pour dire à sa stagiaire de dire que j'ai refusait qu'elle plaide alors que depuis [qu'il] a le dossier il refuse de communiquer avec moi" (sic).

Le Ministère public ne pouvait pas lui "forcer" un avocat qui la croyait coupable et folle. Me C______ avait "tout violé" et le maintenir en qualité de défenseur d'office violait ses droits fondamentaux.

b. Invité à se déterminer, Me C______ déclare ne pas avoir d'observations à formuler. Il se réfère au refus de le relever de sa mission, pris par la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice dans le cadre de la procédure pénale P/2______/2017.

c. A______ persiste à ne pas vouloir être défendue par Me C______ et demande que Me B______ soit désigné en lieu et place.


 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la prévenue qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. À teneur de l'art. 129 al. 1 CPP, dans toutes les procédures pénales et à n'importe quel stade de celles-ci, le prévenu a le droit de charger de sa défense un conseil juridique au sens de l'art 127 al. 5 CPP (défense privée) ou, sous réserve de l'art. 130 CPP, de se défendre soi-même.

Les éléments typiques de la défense privée sont la liberté dont jouit le prévenu de choisir son défenseur et d'en changer, ainsi que l'obligation pour lui d'assurer lui-même les frais de sa défense (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 2 ad art. 129 et les références citées).

2.2. Selon l'art. 132 al. 1 CPP, la direction de la procédure ordonne une défense d'office :

a. en cas de défense obligatoire, si le prévenu, malgré l'invitation de la direction de la procédure, ne désigne pas de défenseur privé (ch. 1) ; si le mandat est retiré au défenseur privé ou que celui-ci a décliné le mandat et que le prévenu n'a pas désigné un nouveau défenseur dans le délai imparti (ch. 2) ;

b. si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts.

2.3. Le défenseur d'office est désigné par la direction de la procédure compétente au stade considéré (art. 133 al. 1 CPP). Lorsqu'elle nomme le défenseur d'office, la direction de la procédure prend en considération les souhaits du prévenu dans la mesure du possible (al. 2).

Le choix du défenseur d'office n'est pas libre, mais la direction de la procédure essaie néanmoins de prendre en compte les souhaits du prévenu (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), op. cit., 2ème éd., Bâle 2017, n. 6 ad art. 133).

2.4. Si la relation de confiance entre le prévenu et le défenseur d'office est gravement perturbée ou si une défense efficace n'est plus assurée pour d'autres raisons, la direction de la procédure confie la défense d'office à une autre personne (art. 134 al. 2 CPP).

Le simple fait que la partie assistée n'a pas confiance dans son conseil d'office ne lui donne pas le droit d'en demander le remplacement lorsque cette perte de confiance repose sur des motifs purement subjectifs et qu'il n'apparaît pas de manière patente que l'attitude de l'avocat d'office est gravement préjudiciable aux intérêts de la partie (ATF 138 IV 161 consid. 2.4 p. 164; 114 Ia 101 consid. 3 p. 104; arrêt du Tribunal fédéral 1B_375/2012 du 15 août 2012 consid. 1.1). En effet, si la relation de confiance doit en principe être recherchée, le droit à un procès équitable garanti à l'art. 29 al. 1 Cst. ne donne pas à l'assisté le droit de refuser l'avocat désigné, parce qu'il n'aurait, pour des raisons purement subjectives, pas confiance en lui (arrêt du Tribunal fédéral 1P_364/2004 précité avec référence à l'ATF 105 Ia 296 consid. 1d p. 302).

De simples divergences d'opinion quant à la manière d'assurer la défense des intérêts du prévenu dans le cadre de la procédure ne constituent à cet égard pas un motif justifiant un changement d'avocat. Il appartient en effet à l'avocat de décider de la conduite du procès; sa mission ne consiste donc pas seulement à endosser le rôle de porte-parole sans esprit critique de l'accusé, qui se limiterait à se faire simple interprète des sentiments et des arguments de son client (ATF 116 Ia 102 : JT 1993 IV 186 consid. 4b/bb p. 105; 105 Ia 296 consid. 1 p. 304; ACPR/518/2012 du 23 novembre 2012). Sont en revanche dignes d'être pris en considération des griefs précis touchant à la personne du défenseur ou à un comportement de ce dernier qui montre à l'évidence que toute relation de confiance avec ce dernier est exclue (arrêt du Tribunal fédéral 1B_187/2013 du 4 juillet 2013 consid. 2.2 et 2.3; A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019. n. 20-22 ad art. 134).

2.5. En l'espèce, contrairement à ce que semble penser la recourante, lorsqu'un défenseur d'office est nommé et qu'il est, comme ici, rémunéré avec les deniers de l'État, le prévenu n'a pas le libre choix de l'avocat. Cette liberté de choix n'existe que lorsque l'avocat est rémunéré par le prévenu, conformément à l'art. 129 CPP. Au moment où la direction de la procédure envisage une défense d'office, le prévenu fait valoir son souhait sur la personne du défenseur, souhait qui est pris en considération dans la mesure du possible.

En l'occurrence, avant le 11 avril 2022, la recourante se trouvait dans une situation de défense d'office non obligatoire, fondée sur son indigence et les autres conditions de l'art. 132 al. 1 let. b CPP. Ainsi, lorsque le Procureur a désigné Me C______, le 8 octobre 2021, sans préalablement requérir l'avis de la recourante, et que celle-ci a immédiatement fait connaître son opposition, l'avocat a été relevé de sa mission et une autre avocate, désignée. Devant le nouveau refus de la recourante, cette avocate a, à son tour, été relevée de sa mission. Lorsque Me C______ a derechef été désigné par le nouveau Procureur et que la recourante s'y est opposée, la désignation a, une fois encore, été révoquée. La recourante, qui n'avait pas d'autre avocat à suggérer, a décidé d'assurer sa propre défense, ce qu'elle a fait aux audiences des 1er et 11 avril 2022.

Lorsque, au cours de l'audience d'instruction du 11 avril 2022, le Procureur a placé la recourante en état d'arrestation et demandé au TMC d'ordonner une détention provisoire, il y avait lieu de désigner un défenseur d'office à la recourante en vue de la procédure devant le juge de la détention. La recourante a suggéré Me E______, lequel, contacté par la direction de la procédure, a refusé. Le choix s'est alors porté sur Me C______, car il était déjà nommé d'office dans la procédure parallèle.

Il s'ensuit que la procédure de désignation du défenseur d'office a été correctement suivie, la recourante ayant dûment pu formuler son souhait, lequel n'a, en définitive, pas pu être retenu en raison du refus de l'avocat concerné.

2.6. La recourante invoque, pour justifier sa demande de remplacement du défenseur d'office, une rupture du lien de confiance avec celui-ci et l'absence de défense efficace.

Elle reproche, premièrement, à Me C______ d'avoir "permis" sa mise en détention provisoire en avril 2022. Or, on ne voit pas en quoi l'avocat serait responsable de cette situation. Bien au contraire, alors que la recourante, assistée, s'est opposée à sa mise en détention, le TMC a, le 12 avril 2022, refusé la demande de mise en détention provisoire et ordonné la libération de la recourante. C'est en raison du recours formé par le Ministère public contre la décision du TMC que la recourante a été maintenue en détention provisoire, sur ordonnance de mesures provisionnelles de la Chambre de céans, étant précisé que la régularité de la procédure suivie par le TMC lors de l'annonce du recours par le Ministère public a été examinée par la Chambre de céans, ce qui a déjà été exposé à la recourante (cf. ACPR/493/2022 du 25 juillet 2022 consid. 1.3). Sa défense n'a donc pas été inefficace.

La recourante reproche, deuxièmement, au défenseur d'office d'avoir demandé la récusation de deux magistrats, mais pas celle de l'actuelle Procureure chargée de la procédure. On relèvera que l'une des demandes concerne une autre procédure, de sorte que le grief est exorbitant au présent litige, et que l'autre a été admise par la Chambre de céans, de sorte que la recourante ne démontre pas en quoi cette démarche démontrerait l'absence de défense efficace. Les demandes de récusation formées par la recourante contre l'actuelle Procureure ayant été rejetées par la Chambre de céans (ACPR/897/2022 du 22 décembre 2022), sa défense ne paraît pas avoir pâti de l'éventuel refus du défenseur de s'en charger. Au demeurant, il est rappelé que la mission de l'avocat ne consiste pas à endosser le rôle de porte-parole, sans esprit critique, du prévenu ; la conduite du procès, respectivement de la procédure, lui revient.

La recourante reproche, troisièmement, au défenseur d'office de l'avoir, avec la Procureure, "mis[e] en garde à vue" le 15 septembre 2022 et essayé de la placer à nouveau en détention provisoire. La recourante prête ici au précité des prérogatives qu'il n'a pas, et le reproche est d'autant moins justifié que Me C______ avait écrit au Ministère public pour demander le report de l'audience du 14 septembre 2022, car elle avait lieu un mercredi, mais il s'était heurté au refus de la magistrate. Dans la mesure où la recourante relève de la défense obligatoire, la présence de son avocat à l'audience à laquelle elle n'a pas comparu est conforme à la procédure et aux devoirs du défenseur d'office.

Elle évoque, quatrièmement, que Me C______ ne lirait pas le dossier depuis longtemps et ne la défendrait pas. Ces reproches ne sont pas documentés, de sorte que la Chambre de céans n'est pas en mesure d'en déterminer le bien-fondé.

Cinquièmement, elle allègue que son défenseur d'office serait venu, en septembre 2022, au TMC pour demander à son avocate-stagiaire de dire qu'elle (la recourante) refusait que celle-ci plaide, alors que le procès-verbal démontre, au contraire, que l'avocate-stagiaire était prête à assurer sa défense et à plaider, et que c'est la recourante qui l'en a empêché.

La recourante reproche enfin à Me C______ d'avoir "tout violé", sans que l'on comprenne à quoi elle fait référence. Dans sa demande de changement d'avocat (cf. B.l. supra), elle reproche au précité de ne pas avoir averti sa famille ni son employeur lors de sa mise en détention provisoire, mais il ressort du procès-verbal d'audience devant le Ministère public qu'elle a refusé que tel soit le cas. Au surplus, il ressort des éléments à la procédure que, à compter de la nomination d'office le 11 avril 2022, l'avocat ou un membre de son Étude ont été présents à chaque acte de la procédure, sauf lorsque la recourante les a expressément empêchés d'agir.

Il s'ensuit que la recourante ne démontre pas que la relation de confiance serait, objectivement, gravement perturbée, ni qu'elle ne bénéficierait plus d'une défense efficace.

3. Le recours doit ainsi être rejeté.

4.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 400.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 400.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante (en personne), au Ministère public et à Me C______.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/15996/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

     

- délivrance de copies (let. b)

CHF

     

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

315.00

-

CHF

     

Total

CHF

400.00