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Décisions | Chambre civile

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C/1525/2011

ACJC/1155/2011 (3) du 26.08.2011 sur JTPI/7526/2011 ( SS ) , CONFIRME

Normes : CPC.98
Résumé : 1. La décision sur avance de frais au sens de l'art. 98 CPC est une ordonnance d'instruction susceptible d'un recours formé dans un délai de 10 jours. 2. En matière de fixation d'une avance à hauteur des frais judiciaires présumables, le juge jouit d'un important pouvoir d'appréciation. 3. Dans le cadre d'un tel recours, limité au droit, la Cour examine ainsi la cause avec une certaine réserve,seul un abus du pouvoir d'appréciation du juge constituant une violation de la loi. 4. Les directives internes du Tribunal relatives aux frais judiciaires - qu'elles soient publiées ou non - ne sont pas opposables aux plaideurs, compte tenu de la compétence exclusive du canton d'édicter un Tarif des frais judiciaires (art. 96 CPC).
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1525/2011 ACJC/1155/2011

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 26 AOÛT 2011

 

 

 

 

X.______, domicilié ______recourant contre la décision de taxation du jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 13 juin 2011, comparant par Me Pierre Louis Manfrini, avocat, en l’étude duquel il fait élection de domicile,

 


Attendu EN FAIT que, le 28 janvier 2011, X.______ a saisi le Tribunal de première instance d'une demande en paiement à l'encontre d'Y.______, auquel il réclame 165'256 fr. portant intérêts à 5% dès le 20 juillet 2008, avec suite de frais et dépens.

Que la cause a été déclarée non conciliée à l'audience du 4 mai 2011.

Attendu que ce montant représente les honoraires de X.______, avocat, facturés en 2008 à Y.______ pour divers conseils et prestations en matière de gérance de fortune, d'investissements et d'opérations professionnelles envisagées par le client.

Vu la décision du Président du Tribunal de première instance du 11 mai 2011, fixant l'avance de frais réclamée au demandeur à 10'000 fr.

Attendu que le 6 juin 2011 X.______ a saisi la Cour d'une contestation de cette décision, concluant à ce que l'avance de frais lui étant réclamée soit réduite à 5'000 fr.

Attendu qu'il fait en substance valoir que la cause ne présente pas de difficultés particulières, que l'avance de frais a été fixée en fonction de la seule valeur litigieuse, sur la base d'un tarif interne du Tribunal non conforme au règlement genevois fixant le tarif des frais en matière civile (RTFMC), et que le montant est trop élevé, au regard du principe de l'équivalence et du droit constitutionnel garantissant l'accès aux tribunaux (art. 29 Cst. féd.).

Vu les observations du Président du Tribunal de première instance, lequel explique que la décision querellée ne fixe que l'avance de frais au sens de l'art. 98 CPC, l'émolument perçu en définitive devant être arrêté à la fin de la procédure conformément à l'art. 104 al. 1 CPC, qu'il n'est pas certain que la procédure puisse être menée à son terme sans mesures probatoires, en fonction des arguments qui seront soulevés par la partie défenderesse, que le montant de 10'000 fr. a été arrêté en fonction de directives internes, destinées à être, à terme, portées à la connaissance du public, qu'il demeure conforme aux montants prévus à l'art. 17 RTFMC et qu'il n'est pas prohibitif.

Considérant EN DROIT que la décision querellée, fixant une avance de frais, est susceptible de recours (art. 103 et 319 let. b ch. 1 CPC); de l'avis de l'ensemble des commentateurs, une telle décision constitue une ordonnance d'instruction, le délai de recours est de 10 jours (art. 321 al. 2 CPC) et le recours n'a pas d'effet suspensif (art. 325 al. 1 CPC).

Qu'en l'espèce, le recours est recevable, pour avoir été formé dans le délai et suivant la forme prescrite.

Considérant, sur le fond, qu'à teneur de l'art. 98 CPC, le Tribunal peut exiger du demandeur une avance à concurrence de la totalité des frais judiciaires présumés, lesquels comprennent, outre l'émolument forfaitaire de décision, notamment les frais d'administration des preuves et les éventuels frais de traduction, règle qui est reprise, sur le plan cantonal, par l'art. 2 al. 1 RTFMC.

Que l'art. 17 RTFMC prévoit pour une valeur litigeuse comprise entre 100'000 fr. et 1'000'000 fr., un émolument forfaitaire de décision compris entre 5'000 fr. et 30'000 fr., étant précisé qu'au moment de la fixation dudit émolument, il doit être tenu compte notamment des intérêts en jeu, de la complexité de la cause, de l'ampleur de la procédure ou de l'importance du travail qu'elle a impliqué (art. 5 RTFMC).

Qu'en l'espèce, la décision querellée constitue une décision d'instruction fixant l'avance de frais au sens de l'art. 98 CPC et non une décision finale arrêtant ceux-ci au sens de l'art. 104 CPC.

Que l'art. 98 CPC est une "Kann-Vorschrift" et que le Tribunal jouit en la matière d'un important pouvoir d'appréciation, puisque s'il doit en principe réclamer une avance de frais correspondant à l'entier des frais judiciaires présumables, il peut également réclamer un montant inférieur, voire exceptionnellement renoncer à toute avance de frais, en considération notamment de la situation économique d'un plaideur qui serait proche de son minimum vital sans toutefois pouvoir bénéficier de l'assistance judiciaire (exemple cité dans le Message du Conseil fédéral relatif au CPC du 28 juin 2006, ad art. 96 du projet).

Qu'en conséquence, la Cour, saisie d'un recours limité au droit et ne disposant ainsi que d'une cognition restreinte, examine la cause avec une certaine réserve, seul un abus du pouvoir d'appréciation du juge constituant une violation de la loi.

Considérant en l'espèce que les directives internes du Tribunal - qu'elles soient publiées ou non - ne sont pas opposables aux plaideurs, compte tenu de la compétence exclusive du canton d'édicter un Tarif des frais judiciaires (art. 96 CPC).

Que toutefois le montant querellé de 10'000 fr. fixé demeure dans la "fourchette" prévue à l'art. 17 RTFMC pour l'émolument de décision pouvant être perçu pour une cause ayant une valeur litigieuse de 165'256 fr.

Qu'il n'est pas certain que la procédure soit aussi simple que le voudrait le recourant, compte tenu des motifs que pourrait invoquer la partie défenderesse pour s'opposer à l'action en paiement, fondée sur un mandat, dont elle fait l'objet.

Que le recourant ne fait pas état d'éléments spécifiques liés à sa situation dont il résulterait que l'avance fixée, qui couvre comme indiqué présumablement tous les frais judiciaires, présenterait un caractère prohibitif, l'empêchant d'user de son droit constitutionnel à accéder aux tribunaux.

Que le premier juge n'a ainsi pas excédé en l'espèce le large pouvoir d'appréciation dont il dispose en la matière, en fixant l'avance de frais au montant présumable de l'émolument de décision, lequel devrait en principe a priori couvrir l'ensemble des frais judiciaires.

Que le recours se révèle ainsi infondé, ce qui conduit à son rejet.

Considérant enfin que les frais de la procédure de recours sont couverts par l'avance de frais effectuée (200 fr.), laquelle est dès lors acquise à l'Etat et qu'il n'y a pas lieu à fixation d'autres dépens.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par X.______ contre l'ordonnance d'instruction JTPI/565/2011-TX rendue le 13 juin 2011 par le Tribunal de première instance dans la cause C/1525/2011-TX.

Au fond :

Le rejette.

Fixe les frais du recours à 200 fr. et dit que l'avance de frais du même montant est acquise à l'Etat.

Siégeant :

Madame Marguerite JACOT-DES-COMBES, présidente; Monsieur Pierre CURTIN, Monsieur Jean-Marc STRUBIN, juges; Madame Nathalie DESCHAMPS, greffière.

 

La présidente :

Marguerite JACOT-DES-COMBES

 

La greffière :

Nathalie DESCHAMPS

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF : 10'000 fr.