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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/24568/2020

AARP/264/2023 du 18.07.2023 sur AARP/384/2021 ( REV )

Descripteurs : RÉVISION(DÉCISION)
Normes : CPP.410
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24568/2020 AARP/264/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 18 juillet 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocate,

demandeur en révision,

 

contre l'arrêt AARP/384/2021 rendu le 6 décembre 2021 par la Chambre pénale d'appel et de révision,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me Léonard MICHELI-JEANNET, avocat, ORATIO FORTIS, rue Etienne-Dumont 22, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

défendeurs en révision.


EN FAIT :

A.           a. Par demande du 20 mars 2023 adressée à la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), A______ sollicite la révision de l'arrêt AARP/384/2021 rendu le 6 décembre 2021, par lequel il a été acquitté de lésions corporelles simples (art. 123 al. [recte : ch.] 1 du Code pénal [CP]), mais reconnu coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 CP) et condamné à une peine privative de liberté de dix mois, sous déduction de 131 jours de détention avant jugement, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), son expulsion de Suisse ayant été ordonnée pour une durée de cinq ans (art. 66a al. 1 CP), sans signalement dans le système d'information Schengen (SIS), la moitié des frais de la procédure préliminaire et de première instance mise à sa charge ainsi que le 45% de ceux d'appel. Il a en outre été condamné, conjointement et solidairement avec un comparse, à payer à C______, partie plaignante, diverses sommes en réparation de son dommage matériel, en règlement du tort moral et une indemnité pour ses frais d'avocat.

Cet arrêt est entré en force le 8 février 2022, assorti d'une injonction d'expulsion.

b. A______ explique qu'au moment de sa condamnation, il était célibataire, sans enfant et de nationalité brésilienne. Courant 2022, il avait obtenu la nationalité italienne et rencontré sa compagne actuelle et future épouse, D______, ressortissante portugaise née en Suisse et titulaire d'un permis C. Le couple attendait un enfant, qui devait naître en ______ 2023, le terme étant prévu le ______ (ndr : né le ______ 2023, sans reconnaissance de paternité, selon la base de données E______ de l'État de Genève), et s'apprêtait à célébrer son mariage, une demande préparatoire ayant été déposée à l'état civil de la Commune de F______ le ______ 2023.

Pour ces motifs, il sollicitait qu'il soit renoncé au prononcé de son expulsion.

Pour le surplus, il demandait à bénéficier de l'assistance judiciaire et qu'il soit renoncé à ce que les frais judiciaires en lien avec sa demande de révision soient mis à sa charge.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ est né le ______ 1999 au Brésil, célibataire et sans enfant au jour du prononcé de l'arrêt AARP/384/2021.

Il est au bénéfice depuis le 7 mars 2022 d'une carte d'identité italienne et n'indique pas disposer d'une autorisation de séjour en Suisse au jour du dépôt de sa demande de révision.

b. Il est arrivé en Suisse le 25 novembre 2019 pour y étudier, travailler et vivre auprès de sa famille, notamment sa mère, son frère ainsi que trois nièces, étant précisé que son père est décédé le ______ 2021 au Brésil.

c. Le 19 décembre 2020, il a été arrêté et écroué jusqu'au 8 mai 2021 pour les besoins de la procédure P/24568/2020, à la suite des faits de brigandage reprochés, étant rappelé que sa culpabilité a été établie par le Tribunal de police (TP) dans son jugement du 28 avril 2021, puis confirmée par la CPAR, tout comme la peine infligée en première instance.

A______ a eu gain de cause, à la suite de son appel, en ce qui concerne le chef de lésions corporelles simples, pour lequel il a été acquitté (ndr : la CPAR ayant retenu que ce chef était absorbé par l'infraction de brigandage), sans que sa peine ne soit revue à la baisse, ainsi que sur l'inscription de la mesure d'expulsion dans le SIS, la CPAR y ayant renoncé en raison des démarches qu'il entreprenait dans le but d'obtenir la nationalité italienne (cf. AARP/384/2021 consid. 5.2.2), sa mère disposant de la double nationalité (brésilienne et italienne).

Il ne pouvait se prévaloir de la clause de rigueur pour les motifs exposés dans l'arrêt AARP/384/2021 au considérant 5.2.1. Il avait été retenu, en bref, que son intégration était très limitée. Employé de la société de nettoyage de sa mère, il avait nécessité, tout au long de la procédure, l'assistance d'un interprète portugais, ce qui attestait d'une maîtrise partielle du français. Ses liens avaient été essentiellement tissés avec ses proches et il ne disposait pas d'une famille nucléaire en Suisse. Il ne se trouverait pas dans une situation personnelle grave en cas de renvoi au Brésil, son pays d'origine, étant rappelé que ses liens avec sa mère, son frère et ses neveux n'étaient pas protégés par le droit au respect de la vie privée et familiale au sens de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), alors que sa sœur aînée vivait au Brésil.

d. A______ fait valoir qu'en raison de son enfant à naître en Suisse et de son prochain mariage, il aura sa famille nucléaire dans le pays.

Par ailleurs, dans la mesure où D______ était sans activité lucrative, elle allait dépendre, après la naissance de leur enfant, intégralement de son aide, de sorte qu'il était primordial qu'il puisse occuper un emploi en Suisse afin de subvenir aux besoins de sa future famille.

Compte tenu "des faits nouveaux et importants qui se [s'étaient] produits postérieurement à l'entrée en force de l'arrêt du 6 décembre 2021", il demandait qu'il soit renoncé au prononcé de son expulsion.

e. Me B______, précédent conseil nommée d'office pour A______ dans la procédure en cause, fait valoir huit heures d'activité à indemniser.

EN DROIT :

1. 1.1. La CPAR est l'autorité compétente en matière de révision (art. 21 al. 1 let. b du Code de procédure pénale suisse [CPP] cum art. 130 al. 1 let. a de la Loi d'organisation judiciaire [LOJ]).

1.2. L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné.

Cette disposition reprend la double exigence posée par l'art. 385 CP, selon laquelle les faits (ou moyens de preuve) invoqués doivent être nouveaux et sérieux (cf. Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1303 ad art. 417 [actuel art. 410 CPP]). Les faits (ou moyens de preuve) sont nouveaux lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.2 ; 130 IV 72 consid. 1 p. 73).

Encore faut-il qu'il s'agisse d'unechte Nova, soit de faits que le juge ignorait alors même qu'ils existaient lorsqu'il a statué, de sorte que, s'il les avait connus, il aurait pu (et dû) en tenir compte : un fait qui survient postérieurement au jugement dont la révision est demandée ne peut plus être considéré comme inconnu au sens de l'art. 410 CPP (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale – Petit commentaire, Bâle 2016, N 16 ad art. 410 et les références citées).

1.3. La demande en révision en raison de faits ou de moyens de preuve nouveaux n'est soumise à aucun délai (art. 411 al. 2 in fine CPP).

1.4. L'art. 412 CPP prévoit que la juridiction d'appel examine préalablement la demande de révision en procédure écrite (al. 1). Elle n'entre pas en matière si la demande est manifestement irrecevable ou non motivée ou si une demande de révision invoquant les mêmes motifs a déjà été rejetée par le passé (al. 2).

La procédure de non-entrée en matière de l'art. 412 al. 2 CPP est en principe réservée à des vices de nature formelle. Il est toutefois également possible de prononcer une décision de non-entrée en matière lorsque les moyens de révision invoqués apparaissent d'emblée comme non vraisemblables ou mal fondés (arrêts du Tribunal fédéral 6B_793/2014 du 20 janvier 2015 consid. 2.1.3 et 6B_36/2014 du 6 mai 2014 consid. 2.1). Le CPP ne précise pas si, dans ce cas, il convient de consulter préalablement les parties ; une prise de position de leur part n'apparaît pas nécessaire, mais peut être souhaitable dans les cas douteux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_415/2012 du 14 décembre 2012 consid. 1.1).

2. En l'espèce, la demande en révision apparaît d'emblée mal fondée.

Le demandeur ne présente aucun fait ou moyens de preuve nouveaux qui puissent être de nature à permettre une entrée en matière.

La naissance de son enfant en ______ 2023, à le suivre, ainsi que son futur mariage avec la mère de l'enfant ne constituent en aucun cas des faits nouveaux au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, qui appelleraient un réexamen de la situation – inconnue des premiers juges –prévalant au moment où ceux-ci ont rendu leur arrêt.

Il s'agit là de faits postérieurs à l'arrêt AARP/384/2021, lesquels ne peuvent fonder une demande en révision (ATF 141 IV 349 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_836/2016 du 7 mars 2017 consid. 1.3.2).

Compte tenu de ce qui précède, il ne sera pas entré en matière.

3. La partie dont l'appel est irrecevable est considérée comme ayant succombé ; elle supportera les frais de la procédure envers l'État, y compris un émolument de jugement fixé à CHF 600.- vu la situation personnelle du demandeur, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 428 CPP).

4. 4.1.1. Selon l'art. 132 al. 2 CPP, la défense d'office aux fins de protéger les intérêts du prévenu se justifie notamment lorsque l'affaire n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter.

4.1.2. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise aux juridictions genevoises, le règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ) s'applique. L'art. 16 al. 1 RAJ prescrit que le tarif horaire est de CHF 200.- pour un avocat chef d'étude. Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues ; elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (ATF 149 IV 91 consid. 3.1.1).

4.2. En l'espèce, il paraît délicat de dénier d'emblée au demandeur le bénéfice de l'assistance judiciaire, alors qu'il en disposait dans le cadre de l'affaire dont il sollicite la révision. Il n'y a par ailleurs pas lieu de douter que les circonstances relatives à sa situation personnelle auraient changé au point où il n'en aurait plus besoin.

Il convient dès lors de nommer d'office Me B______, avec effet au 8 mars 2023, conformément à la demande formulée pour le compte de son client dans ses lignes du 20 mars 2023, étant précisé que la procuration jointe n'est pas datée et qu'aucun time-sheet n'a été produit.

Cela dit, force est de constater qu'au vu des critères présidant à l'octroi d'une telle couverture d'assistance judiciaire, en particulier l'exigence d'efficacité et l'expédience attendus d'un défenseur d'office, seule une heure peut être indemnisée, vu l'irrecevabilité manifeste de la demande de révision. Après un bref entretien avec son client, il était attendu du défenseur d'office de le lui faire savoir.

Partant, la CPAR arrêtera à une heure l'activité fournie devant elle, à laquelle la majoration forfaitaire au taux de 20% pour les courriers, chargés de pièces, téléphones, etc. sera ajoutée, TVA en sus.

En conclusion, la rémunération de la défenseure d'office sera fixée à CHF 258.50, soit une heure au tarif de cheffe d'étude (CHF 200.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 40.-) et la TVA au taux de 7.7% en CHF 18.50.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Préalablement :

Désigne Me B______ en qualité de défenseure d'office de A______, avec effet au 8 mars 2023, pour la procédure en révision.

Principalement :

Déclare irrecevable la demande en révision formée par A______ contre l'arrêt AARP/384/2021 rendu le 6 décembre 2021 par la Chambre pénale d'appel et de révision dans la procédure P/24568/2020.

Condamne A______ aux frais de la procédure par CHF 715.-, lesquels comprennent un émolument de CHF 600.-.

Arrête à CHF 258.50 (TVA comprise) le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseure d'office, pour la procédure en révision.

Notifie le présent arrêt aux parties.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

Le président :

Vincent FOURNIER

e.r. Gaëlle VAN HOVE

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

40.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

600.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

715.00