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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/281/2025

DCSO/225/2025 du 08.05.2025 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : LP.93
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/281/2025-CS DCSO/225/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 8 MAI 2025

 

Plainte 17 LP (A/281/2025-CS) formée en date du 28 janvier 2025 par A______.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

______

______ [GE].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A.           a. A______ fait l'objet de trois poursuites dont la continuation a été requise entre le 28 août 2024 et le 13 janvier 2025.

b. Dans le cadre des opérations de saisie, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a adressé à A______ un avis de saisie en vue de son audition le 23 septembre 2024.

c. A______ ne s'est pas présenté, de sorte que l'Office a adressé le 24 septembre 2024 des avis de saisie de créance aux établissements bancaires.

d. Le 29 octobre 2024, A______ a été auditionné par l'Office et déclaré qu'il réalisait un revenu net de 2'000 fr. par mois auprès d'un garage en France voisine. Il était séparé et avait deux enfants dont il n'avait pas la garde. Il était gracieusement logé à Genève par B______. Il exerçait un droit de visite de 15 jours par mois sur ses deux enfants. Il était titulaire d'un compte bancaire auprès de [la banque] C______ et n'avait pas de véhicule. Il était inscrit au registre du commerce en qualité de gérant, associé-gérant président et associé gérant, avec signature individuelle, des sociétés D______ Sàrl, E______ Sàrl et F______ Sàrl. Sa prime s'assurance-maladie était impayée et ses frais de transport se montaient à 70 fr. par mois. A l'issue de son audition, l'Office a invité A______ à fournir les décomptes bancaires des deux derniers mois et son contrat de travail.

e. Le 8 novembre 2024, A______ a communiqué à l'Office une attestation de travail de G______ SAS à H______ (France) à teneur de laquelle il travaillait en qualité de chargé des achats et avait été rémunéré, entre le 4 novembre et le 30 novembre 2024, d'un montant de 817.33 EUR.

f. Le 17 janvier 2025, l'Office a adressé à A______ un avis de saisie de gains d'indépendant, à hauteur de 6'615 fr. par mois.

g. Le même jour, l'Office a établi un procès-verbal de saisie, dans la série n° 1______. Une analyse de ses relevés bancaires pour la période allant du 24 mars au 24 septembre 2024 montrait que A______ percevait des gains réguliers de la part de la société D______ Sàrl dont il était le gérant. Ces revenus se montaient à 8'217 fr. par mois. Dans les charges, l'Office n'a pas tenu compte d'un loyer, dès lors que A______ avait indiqué être logé gracieusement, ni de la prime d'assurance-maladie qui n'était pas payée. Il a admis, en sus du montant de base de 1'200 fr., 200 fr. par enfant pour l'exercice du droit de visite, soit des charges totales mensuelles en 1'600 fr. La quotité mensuelle saisissable s'élevait à 6'617 fr. 01 par mois.

h. Le 13 février 2025, A______ s'est présenté à l'Office. Il avait changé d'adresse et travaillait pour G______ SAS pour un salaire de 1'198.60 EUR par mois. Il participait à hauteur de 900 fr. par mois au loyer de son nouveau domicile.

B. a. Par acte posté 28 janvier 2025, A______ a porté plainte contre la saisie de ses revenus à hauteur de 6'615 fr. par mois, dont il avait eu connaissance le 23 janvier 2025, à réception de l'avis de saisie de gains. Il avait été sans travail de mai à novembre 2024. Il avait perçu 8'200 fr. par mois pendant six mois après la cession de son ancienne société mais avait utilisé ces fonds pour payer des fournisseurs. Il ne percevait plus rien de son ancienne société, pour laquelle il n'avait jamais été salarié. Il n'avait plus aucune participation dans la société D______ Sàrl. A______ a joint à sa plainte les bulletins de salaire de G______ SAS de novembre et décembre 2024. Par courrier du 7 février 2025, A______ a produit une "attestation sur l'honneur" de I______, associé-gérant président de la société D______ Sàrl, selon laquelle A______ avait quitté la société le 1er août 2024.

b. Dans son rapport du 7 mars 2025, l'Office a observé que A______ était toujours inscrit au registre du commerce comme associé gérant avec signature individuelle de D______ Sàrl. Selon les relevés de son compte bancaire pour la période allant du 24 mars au 24 septembre 2024, il avait perçu 8'217 fr. par mois de cette société. L'Office avait par ailleurs obtenu les relevés bancaires pour la période allant du 17 août 2024 à février 2025 et constaté que cette somme avait continué à être versée de manière régulière. A______ n'avait fourni aucun justificatif concernant sa charge de loyer ou d'autres charges de sorte que le calcul effectué n'était pas critiquable. Le rapport de l'Office était accompagné notamment des relevés bancaires du compte de A______ auprès de C______, couvrant la période allant de mars 2024 à février 2025.

c. Le rapport de l'Office a été communiqué à A______ le 11 mars 2025, avec l'indication que l'instruction de la cause était close.

EN DROIT

1. La plainte est recevable pour avoir été déposée auprès de l'autorité compétente (art. 6 al.1 et 3 LaLP, art. 17 al. 1 LP), par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), dans le délai utile de dix jours (art. 17 al. 2 LP) et selon la forme prescrite par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LaLP, art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), à l'encontre d'une mesure de l'Office sujette à plainte.

2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital). Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non subjectives, particulières au poursuivi (ATF 134 III 323 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2018 consid. 3.1).

Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge y compris leur entretien, les soins corporels et de santé, l'entretien du logement, les assurances privées, les frais culturels et les dépenses pour l'éclairage, le courant électrique ou le gaz pour cuisiner (art. I NI-2024). D'autres charges indispensables, comme les frais de logement y compris les frais de chauffage et charges accessoires (art. II.1 et II.3 NI-2018), les dépenses indispensables à l'exercice d'une profession (art. II.4 NI-2018) ou encore les primes d'assurance-maladie obligatoire (art. II.3 NI-2018) doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement et régulièrement payées (Ochsner, in CR-LP, n. 82 et n° 83 ad art. 93 LP).

2.1.2 Par "tous les revenus du travail" au sens de l'art. 93 LP, il faut entendre toutes les formes de rétribution d'un travail personnel, régulier ou occasionnel, périodique ou permanent, principal ou accessoire, dans le cadre d'une activité d'employé ou d'indépendant (ATF 93 III 33 consid. 1; ATF 86 III 15 [16]; arrêt du Tribunal fédéral 5A_976/2018 du 27 mars 2019 consid. 4.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_589/2014 du 11 novembre 2014 consid. 3.2, publié in SJ 2015 I 61 et in BISchK 2016 p. 53). Il n'est pas nécessaire que le revenu du débiteur provienne d'un emploi, ni même qu'il lui soit juridiquement dû (ATF 91 IV 69 ; ATF 85 III 38 consid. 1). Pour qualifier de revenu la prestation acquise, il faut se placer du point de vue économique (arrêt du Tribunal fédéral 5A_976/2018 et 5A_589/2014 précités ; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Articles 89-158, 2000, n. 28 ad art. 93 LP). La nature juridique, la qualification utilisée par les personnes impliquées ou les modalités d'exécution selon le droit civil ne sont dès lors pas pertinentes (arrêt du Tribunal fédéral 5A_976/2018 du 27 mars 2019 consid. 4.1.1). Du point de vue de la nature juridique de l'objet saisi, il n'y a pas de distinction à faire entre les activités dépendantes ou indépendantes (ATF 93 précité).

2.1.3 Le revenu tiré d'une activité professionnelle indépendante comprend toutes les prestations que le débiteur reçoit en contrepartie de celles qu'il apporte dans le cadre de cette activité, que ces contreparties soient en argent ou en nature (Kren Kostkiewicz, in KUKO SchKG, 2ème éd., 2014, n. 10 ad art. 93 LP). Pour établir ce revenu brut, l'Office doit interroger le débiteur sur le genre d'activité qu'il exerce ainsi que le volume et la nature de ses affaires. Lorsque l'instruction menée par l'Office n'a révélé aucun élément certain, il faut tenir compte des indices à disposition. Si le débiteur ne tient pas de comptabilité régulière ou que les éléments comptables fournis ne sont pas fiables, le produit de son activité indépendante doit être déterminé par comparaison avec d'autres activités semblables, au besoin par appréciation. Il en va de même du débiteur dont le statut de salarié lui confère une position assimilable au statut d'un indépendant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_976/2018 du 27 mars 2019 consid. 4.1.2; 7B.212/2002 du 27 novembre 2002; Ochsner, in CR-LP, 2005, n. 25 ss et 82 ss ad art. 93 LP et les références citées).

2.1.4 Le préposé aux poursuites doit élucider d'office les circonstances de fait qui sont nécessaires pour établir le revenu professionnel saisissable. Cela ne signifie cependant pas que le débiteur est dispensé de tout devoir de coopération. Au contraire, il lui incombe de renseigner l'autorité sur tous les faits essentiels et d'indiquer les preuves qui lui sont accessibles (ATF 119 III 70 consid. 1 et les réf. cit.). En vertu de l'art. 91 al. 1 ch. 2 LP, le débiteur est du reste tenu, sous menace des peines prévues par la loi, d'indiquer jusqu'à due concurrence tous les biens qui lui appartiennent, même ceux qui ne sont pas en sa possession, ainsi que ses créances et autres droits contre des tiers.

2.2 En l'espèce, le plaignant conteste le montant des revenus pris en considération par l'Office, lesquels devraient se limiter selon lui au salaire qu'il affirme percevoir de son activité pour un garage en France voisine.

Avec l'Office, il convient de constater à la lecture des relevés du compte bancaire du plaignant auprès de C______ que celui-ci a reçu un montant de 8'217 fr. 01 en dates des 27 mars, 26 avril, 27 mai, 27 juin, 26 juillet, 29 août, 30 septembre, 30 octobre, 28 novembre 2024 et 10 janvier 2025 de la part de la société D______ Sàrl dont il est le gérant avec signature individuelle. Son affirmation selon laquelle il n'avait reçu ce montant que pendant six mois suite à la cession de cette société n'est corroborée par aucune pièce et est contredite par les relevés bancaires qui attestent de dix versements entre fin mars 2024 et janvier 2025 soit un versement par mois pendant dix mois. Selon le registre du commerce, à la date du 6 mars 2025, le plaignant était toujours gérant de D______ Sàrl avec signature individuelle et l'intéressé n'a fourni aucun document en lien avec la cession alléguée de la société ou le paiement d'arriérés de factures. Sur la base des éléments à disposition de l'Office, c'est à juste titre que le montant perçu mensuellement par le plaignant sur son compte bancaire privé, versé par une société dont il est l'organe, a été pris en considération comme revenu. L'Office n'a en revanche pas tenu compte du salaire allégué par le plaignant, en 1'198.60 EUR par mois, dont le versement n'a pas été établi. Aussi, le calcul de l'Office, qui retient que les revenus du plaignant se montent à 8'217 fr. par mois n'est pas critiquable.

En ce qui concerne les charges, le plaignant affirme qu'il s'acquitte désormais d'un loyer de 900 fr. Cette charge n'est toutefois aucunement documentée et le plaignant n'a pas justifié du paiement effectif et régulier d'un loyer. Or, seules les charges effectives et régulièrement payées sont prises en considération dans le minimum vital du droit des poursuites. C'est donc à raison que le loyer n'a pas été admis dans les charges du plaignant. A défaut d'autres charges dûment établies, l'Office a fixé le minimum vital du plaignant à 1'600 fr. par mois, soit 1'200 fr. de montant de base et 400 fr. pour l'exercice du droit de visite, que le plaignant ne critique pas. En fixant la quotité saisissable à 6'617 fr. (8'217 fr. – 1'600 fr.) l'Office n'a pas porté atteinte au minimum vital du plaignant au sens de l'art. 93 LP. Mal fondée, la plainte sera rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 lit. a OELP) et il n'est pas alloué de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 28 janvier 2025 par A______ à l'encontre du procès-verbal de saisie du 17 janvier 2025, série n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Monsieur Alexandre BÖHLER et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.