Aller au contenu principal

Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

1 resultats
A/2655/2024

DCSO/22/2025 du 06.02.2025 ( PLAINT ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2655/2024-CS DCSO/22/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 6 FEVRIER 2025

 

Plainte 17 LP (A/2655/2024-CS) formée en date du 20 août 2024 par A______ SA, représentée par Me Béatrice Stahel, avocate.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______ SA

c/o Me STAHEL Béatrice

Rue de Savièse 16

1950 Sion.

- B______

p.a. M. C______

______

______ [GE].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 21 octobre 2021, A______ SA a engagé une poursuite à l'encontre de B______ pour un montant de 118'169 fr. 40, sur la base de l'acte de défaut de biens n° 1______ du 14 mai 2021. Elle a requis la continuation de la poursuite le 8 mars 2023.

b. Le 2 août 2024, l'Office a communiqué à A______ SA un acte de défaut de biens, au sens de l'art. 115 LP, dans la poursuite n° 2______.

L'Office n'avait pas constaté la présence de biens saisissables chez la débitrice poursuivie ni pu procéder à une saisie de salaire. Il avait procédé à l'audition de la débitrice poursuivie les 20 mars et 8 avril 2024. Cette dernière percevait une rente AVS de 2'215 fr. par mois, ne disposait d'aucun avoir de prévoyance 2e ou 3e pilier, était ponctuellement aidée par ses frères pour payer ses charges courantes, ne disposait d'aucun bien immobilier en Suisse ni d'aucun véhicule. S'agissant de ses biens sis à l'étranger, elle avait hérité, avec ses quatre frères, d'un terrain en Argentine de ses parents, lequel avait été cédé en contrepartie de parts de l'immeuble locatif qui y avait été construit. La poursuivie avait déclaré n'avoir pas hérité de son frère D______, décédé en 2011. L'Office n'avait pas identifié d'actifs saisissables en Suisse en lien avec les parts de l'immeuble ou la succession du frère.

B. a. Par acte expédié le 19 août 2024 à la Chambre de surveillance, A______ SA a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre l'acte de défaut de biens n° 2______ du 2 août 2024, qu'elle a reçu le 7 août 2024.

Elle conclut à l'annulation de cet acte de défaut de biens et à ce que la cause soit renvoyée à l'Office afin qu'il procède à des investigations complémentaires et établisse un nouveau procès-verbal de saisie conforme à la réelle situation financière de la poursuivie, en procédant à toute mesure d'investigation indiquée par les circonstances, dont notamment a) la production par la poursuivie, par ses frères E______ et F______ et/ou par tout tiers des pièces relatives à la promotion immobilière à G______ [Argentine], y compris les contrats de vente, les relevés bancaires, les actes notariés et les plans de financement, permettant d'établir sa situation financière en lien avec les successions ouvertes dont elle est héritière, notamment celles de son frère D______ et de ses parents, b) la production par la poursuivie et/ou ses frères E______ et F______ de toutes pièces relatives à la succession de feu D______ ou de leurs parents, notamment les dispositions pour cause de mort, actes notariés, certificats d'héritiers, actes de partage et relevés bancaires permettant de retracer les flux de fonds complets par suite de la réalisation des parts de succession, c) la production des extraits des comptes bancaires dont la poursuivie est titulaire ou ayant droit économique sur une période de trois ans, en Suisse et à l'étranger, d) la conduite d'une enquête sur le sort de la succession des parents de la poursuivie e) l'audition de E______ et/ou F______ en vue d'obtenir des informations sur l'immeuble en Argentine, notamment les actes notariés, contrats de vente, relevés bancaires et toute autre pièce pertinente pour établir la situation financière de la poursuivie, f) des recherches en vue d'établir qui est en charge de l'exécution, de la liquidation et/ou de la tenue de la comptabilité des successions dont la poursuivie a été héritière et la production de la comptabilité complète de ces successions, g) la détermination du lieu de résidence effective de la poursuivie et de l'inspection de sa demeure, h) la production par la poursuivie et/ou E______ et F______, voire de l'administration fiscale cantonale, de leurs déclarations fiscales des dix dernières années, et afin qu'il procède à la saisie de tout revenu ou fortune de la poursuivie, notamment la somme de 8'000 fr. qu'elle touche mensuellement de son frère E______.

b. Par courrier du 30 août 2024, B______ a indiqué avoir reçu le pli du greffe de la Chambre de surveillance, ne pas l'avoir ouvert et en ignorer le contenu.

c. Dans son rapport du 11 septembre 2024, l'Office a indiqué avoir, au regard de la plainte, décidé d'annuler l'acte de défaut de biens querellé en vue de procéder à des investigations complémentaires et de rendre une nouvelle décision sujette à plainte.

Il a, par courrier du même jour, informé la plaignante de ce qui précède en l'invitant à lui retourner l'acte de défaut de bien attaqué.

d. Le 25 septembre 2024, la plaignante a informé la Chambre de surveillance qu'elle maintenait sa plainte dans l'attente que l'Office entreprenne effectivement toutes les investigations complémentaires au regard des conclusions formulées dans sa plainte, en sollicitant la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur les mesures entreprises par l'Office.

EN DROIT

1. La plainte est recevable pour avoir été déposée auprès de l'autorité compétente (art. 6 al.1 et 3 LaLP, art. 17 al. 1 LP), par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), dans le délai utile de dix jours (art. 17 al. 2 LP) et selon la forme prescrite par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LaLP, art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), à l'encontre d'une mesure de l'Office sujette à plainte.

2. 2.1.1 Le débiteur est tenu, sous menace des peines prévues par la loi, d'indiquer jusqu'à due concurrence tous les biens qui lui appartiennent, même ceux qui ne sont pas en sa possession, ainsi que ses créances et autres droits contre des tiers (art. 91 al. 1 ch. 2 LP). Les tiers qui détiennent des biens du débiteur ou contre qui le débiteur a des créances ont, sous menace des peines prévues par la loi, la même obligation de renseigner que le débiteur (art. 91 al. 1 ch. 2 et 4 LP). Les autorités ont la même obligation de renseigner que le débiteur (art. 91 al. 1 ch. 5 LP).

Le devoir de renseigner du débiteur prévu par l'art. 91 al. 1 ch. 2 LP est exhaustif et ne souffre aucune restriction. Il porte également sur les revenus réalisés à l'étranger tout comme sur l'existence de biens (meubles, immeubles, avoirs bancaires) dont le débiteur dispose à l'étranger, indépendamment du fait que de tels actifs ne sauraient être appréhendés par l'entremise d'une saisie opérée en Suisse. L’Office peut avoir besoin de ces informations pour établir la quotité saisissable au sens de l'art. 93 LP (arrêt du Tribunal fédéral 7B_229/2005 du 20 mars 2006, consid. 3.3.1; ATF 114 IV 11 consid. 1).

L'Office doit adopter un comportement actif et une position critique dans l'exécution de la saisie, de sorte qu'il ne peut s'en remettre, sans les vérifier, aux seules déclarations du débiteur quant à ses biens et revenus. Afin de pourvoir au meilleur désintéressement possible des créanciers, l'Office doit procéder avec diligence, autorité et souci de découvrir les droits patrimoniaux du poursuivi. Il est doté à cette fin de pouvoirs d'investigation et de coercition étendus. Il doit donc interroger le poursuivi sur la composition de son patrimoine, sans se contenter de vagues indications données par ce dernier, ni se borner à enregistrer ses déclarations. Il doit les vérifier en exigeant, et en obtenant, les justificatifs correspondants. Si le créancier mentionne des pistes concernant les biens saisissables du débiteur, l'Office doit les creuser (arrêt du Tribunal fédéral 7B.212/2002 du 27 novembre 2002; Gilliéron, Commentaire de la LP, n° 12 et ss ad art. 91 LP; ATF 83 III 63).

2.1.2 En cas de plainte, l'Office peut, jusqu'à l'envoi de sa réponse, procéder à un nouvel examen de la décision attaquée; s'il prend une nouvelle mesure, il la notifie sans délai aux parties et en donne connaissance à l'autorité de surveillance (art. 17 al. 4 LP). La nouvelle décision ou mesure se substitue à l'ancienne. L'autorité de surveillance doit néanmoins examiner la plainte, à moins que la décision de reconsidération n'ait rendu sans objet les conclusions de cette dernière (ATF 126 III 85 consid. 3).

2.2 En l'espèce, la plaignante a conclu à ce que la Chambre de surveillance annule l'acte de défaut de biens querellé et ordonne à l'Office de procéder à diverses investigations complémentaires en vue d'établir la situation financière de la poursuivie. Dans sa réponse à la plainte, l'Office a indiqué avoir décidé d'annuler l'acte de défaut de biens litigieux, de procéder à des investigations supplémentaires et de rendre une nouvelle décision sujette à plainte.

Dans la mesure où le dossier ne permet pas de retenir que l'acte de défaut de biens attaqué ait été effectivement annulé, il y a lieu d'en prononcer l'annulation dans le cadre de la présente décision. L'Office sera ainsi invité à procéder à des investigations complémentaires en vue de déterminer les biens dont dispose la poursuivie, notamment les biens ou droits lui revenant dans le cadre des successions de ses parents et de son frère D______, puis d'établir un procès-verbal de saisie. Il appartiendra à la plaignante de contester le procès-verbal que l'Office établira à la suite de ses investigations complémentaires si elle devait remettre en cause les mesures entreprises par l'Office d'ici là.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 lit. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 19 août 2024 par A______ SA contre l'acte de défaut de biens ° 2______ du 2 août 2024 dans la poursuite n° 2______.

Au fond :

Annule l'acte de défaut de biens n° 2______ établi par l'Office cantonal des poursuites le 2 août 2024 dans la poursuite n° 2______.

Invite l'Office cantonal des poursuites à compléter ses investigations dans le sens des considérants puis à établir un nouveau procès-verbal de saisie.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Alisa RAMELET-TELQIU et Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.

La présidente :

Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.