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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2896/2024

JTAPI/78/2025 du 23.01.2025 ( LCI ) , SANS OBJET

Normes : LPA.60.al1.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2896/2024 et A/2998/2024 LCI

JTAPI/78/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 23 janvier 2025

 

dans la cause

 

A______

et

B______ SA, représentée par Maître François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

C______ SA

D______ SA


 

EN FAIT

1.             Par décision n° DD 1______/1, le département du territoire (ci-après : le département) a autorisé D______ SA (ci-après : l'opérateur) à édifier une nouvelle installation de communication mobile sur la parcelle n° 2______ de la commune de E______, sise à l'adresse ______[GE] et propriété de C______ SA.

2.             Par acte du 2 septembre 2024, la A______ (ci-après : la commune) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant à son annulation sous suite de frais.

3.             Ce recours a été enregistré sous n° de procédure A/2896/2024.

4.             Par acte du 2 septembre 2024, B______ SA a également recouru auprès du tribunal contre la décision susmentionnée, concluant à son annulation sous suite de frais et dépens. L'acte de recours comprend 20 pages et s'appuie notamment sur une expertise privée.

5.             Ce recours a été enregistré sous n° de procédure A 3______.

6.             Par courrier du 4 novembre 2024, l'opérateur a informé le tribunal qu'il renonçait purement et simplement à l'autorisation n° DD 4______.

7.             Par courrier du 7 novembre 2024, le département a considéré que les recours avaient dès lors perdu tout objet et que la cause pouvait être rayée du rôle.

8.             Par écritures du 27 novembre 2024 dans la cause A 3______, B______ SA indiqué que dans la mesure où la renonciation annoncée par l'opérateur n'avait pas été formalisée, elle ne pouvait pas retirer son recours. En revanche, dans la mesure le tribunal rendrait une décision constatant l'abandon de l'autorisation de construire, la procédure deviendrait sans objet, ce qui réglerait la question du retrait éventuel du recours. Par ailleurs, la renonciation de l'opérateur, manifestement en raison du recours et de l'ensemble des vices que celui-ci mettait en évidence, donnait droit à une indemnité de procédure. Elle sollicitait le montant maximal prévu par le règlement applicable, soit une somme de CHF 10'000.-, laquelle ne couvrait pas les honoraires de CHF 13'403.- et les frais d'expertise de CHF 2'970.-.

9.             Par courrier du 28 novembre 2024, la commune a pris note du fait que l'opérateur renonçait à l'autorisation contestée. Elle n'entendait cependant pas retirer son recours, dès lors que cette renonciation équivalait à donner droit aux conclusions de la commune. Le recours devenait en revanche sans objet, de sorte que la procédure pouvait être rayée du rôle. Les frais de la procédure devaient être mis à la charge de la requérante.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Selon l'art. 70 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l’autorité peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

3.             En l'espèce, les recours interjetés dans les procédures A/2896/2024 et A/2898/2024 se rapportent à la même décision litigieuse, de sorte que leur jonction dans la même procédure se justifie. Ces deux causes seront réunies sous n° de procédure A/2896/2024.

4.      La recevabilité d’un recours présuppose que le destinataire de la décision ait un intérêt actuel et digne de protection à ce que celle-ci soit annulée ou modifiée (art. 60 al. 1 let. b LPA ; ATF 131 II 361 consid. 1.2).

5.      L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours. Si l'intérêt actuel disparaît en cours de procédure, le recours devient sans objet, alors qu'il est irrecevable si l'intérêt actuel faisait déjà défaut au moment du dépôt du recours (ATF 139 I 206 consid. 1.1 et la jurisprudence citée ; ATF 1C_495/2014 du 23 février 2015 consid. 1.2).

6.      S'il s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement rayé du rôle (cf. ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; 137 I 23 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 4D_1/2016 du 19 janvier 2016 ; 2C_120/2014 du 18 juillet 2014 consid. 1.2).

7.      La renonciation à un droit est possible de la part d’un administré pour tous les droits pour lesquels celui-ci a un libre pouvoir de disposition sur la prétention ou son objet, tel étant en particulier le cas lorsque le droit s’éteint faute d’intervention de son titulaire, notamment par prescription ou péremption (cf. Pierre MOOR / Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, n. 1.3.4.1 p. 109 s.), la possibilité d’assortir le constat d’une telle renonciation à des charges étant possible pour éviter des abus de droit (cf. ATA/727/2013 du 29 octobre 2013).

8.      Ainsi, notamment, tout titulaire d’une autorisation de construire, qui doit l’exercer dans le délai de prescription de deux ans de l’art. 4 al. 5 LCI, peut aussi y renoncer plus tôt (cf. ATA/727/2013 du 29 octobre 2013).

9.      En l’espèce, l'intimée, bénéficiaire de l’autorisation de construire n° DD 4______/1, a expressément déclaré, par courrier du 4 novembre 2024, qu'elle renonçait à s'en prévaloir. Par conséquent, le tribunal lui en donnera acte. Cette renonciation doit conduire au constat de la caducité de ladite autorisation, qui cessera de déployer ses effets à compter de l’entrée en force du présent jugement (cf. ATA/727/2013 du 29 octobre 2013).

10.  Dans ces circonstances, force est de constater que les recourantes ne disposent plus d’un intérêt actuel à l’annulation ou à la modification de la décision querellée.

11.  En conclusion, les recours sont devenus sans objet. La cause sera par conséquent rayée du rôle.

12.  En application de l’art. 87 al. 1 LPA, il ne sera pas perçu d’émolument auprès des recourantes, dans la mesure où elles ont, en soi, obtenu gain de cause. Leurs avances de frais respectives de CHF 900.- leur seront donc restituées.

13.  En application de l'art. 87 al. 1 LPA et des art. 1 ss du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de l'intimée, au vu du travail administratif accompli pour le traitement de la cause et du présent jugement.

14.  Par ailleurs, l’intimée et l'État de Genève, soit pour lui le département du territoire, seront condamnés, pris solidairement, à verser à B______ SA une indemnité de procédure de CHF 1’500.- (art. 87 al. 2 LPA). Il convient de rappeler à ce sujet que la disposition légale précitée ne prévoit qu'une indemnité de procédure, laquelle ne représente par définition qu'une fraction des frais engagés par la partie qui y a droit. Dans ces conditions, le montant maximal de CHF 10'000.- prévu par l'art. 6 du RFPA, auquel se réfère intimée, n'est pas destiné à être appliqué à chaque fois que les frais engagés en frais d'avocat et/ou d'expert le dépassent, sans quoi il ne correspondrait plus à une indemnité mais à un forfait. Par ailleurs, la fourchette prévue par l'art. 6 RFPA, qui reste certes modeste par rapport aux coûts usuellement engagés dans une procédure judiciaire administrative, signifie bien que les tribunaux doivent appliquer cette disposition légale avec retenue et en gardant à l'esprit que le montant maximal de CHF 10'000.- ne trouve à s'appliquer que dans les situations où la complexité et l'ampleur d'un litige entraînent des frais de procédure atteignant eux aussi une certaine ampleur. Cette fourchette oblige enfin les tribunaux, par égalité de traitement, à préserver un rapport proportionnel entre l'indemnité allouée et les frais de la procédure, en tenant compte de la très grande variabilité de ces derniers d'un litige à l'autre.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             ordonne la jonction des causes n° A/2896/2024 et A 3______sous le n° de cause A/2896/2024 ;

2.             donne acte à D______ SA de ce qu'elle renonce à faire usage des droits octroyés par l'autorisation n° DD 4______/1 délivrée par le département du territoire le ______ 2024 ;

3.             constate la caducité de l'autorisation n° DD 4______/1 ;

4.             déclare sans objet les recours interjetés le 2 septembre 2024 respectivement par B______ SA et par la A______ contre cette autorisation ;

5.             met à la charge de D______ SA un émolument de CHF 400.- ;

6.             ordonne la restitution à B______ SA de son avance de frais de CHF 900.- ;

7.             ordonne la restitution à la A______ de son avance de frais de CHF 900.- ;

8.             condamne l'État de Genève, soit pour lui le département du territoire, ainsi que D______ SA, pris solidairement, à verser à B______ SA une indemnité de procédure de CHF 1'500.- ;

9.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties

 

Genève, le

 

La greffière