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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1809/2024

JTAPI/6/2025 du 06.01.2025 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : DÉNONCIATION SPONTANÉE;COMPTE BANCAIRE;TRANSMISSION AUTOMATIQUE DE MOYENS DE PREUVE
Normes : LIFD.175.al3; LPFisc.69.al3
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1809/2024 ICCIFD

JTAPI/6/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 janvier 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Nelly IGLESIAS, avocate, avec élection de domicile

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne une procédure pour soustraction d’impôt des 2014 à 2016 ouverte à l’encontre de Monsieur A______.

2.             Le contribuable n’a pas déclaré un appartement sis à B______ (Israël) qu’il avait acquis le 30 juin 2013 à parts égales avec son frère, Monsieur C______, pour le prix total de USD 6 millions.

3.             Consécutivement à plusieurs réclamations déposées par l’intéressé, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC‑GE) lui a notifié des bordereaux rectificatifs les 1er février, ainsi que 7 et 28 avril 2021. Ces taxations sont entrées en force.

4.             Par pli du 30 juin 2022, dans le cadre d’une réponse à une demande de renseignements concernant sa taxation 2023, le contribuable a fait part à l’AFC-GE de son intention d’annoncer un élément complémentaire, à savoir son appartement sis en Israël, qu’il avait financé grâce à un emprunt hypothécaire de USD 1.5 million. Ce logement avait toujours été vide et inoccupé depuis son acquisition ; il n’avait pas fait l’objet de travaux.

Le même jour, M. C______ a envoyé une semblable annonce à l’AFC-GE.

5.             Le 2 août 2022, l’AFC-GE a ouvert à l’encontre du contribuable une procédure en rappel et en soustraction d’impôt pour les années 2014 à 2016, au motif qu’il avait omis de déclarer son immeuble sis en Israël. Elle lui a indiqué le montant des reprises envisagées et lui a accordé un délai pour faire valoir son droit d’être entendu.

6.             Par pli du 4 août 2022, le contribuable a contesté avoir commis une soustraction d’impôt, objectant que le 30 juin précédent, il avait procédé à une dénonciation spontanée.

7.             Par courriel du 5 septembre 2022, le prénommé a confirmé à l’AFC-GE qu’il était d’accord avec les montants retenus.

8.             Le 25 octobre 2022, l’AFC-GE a fait part au contribuable que de nouveaux éléments avaient été portés à sa connaissances par le biais de l’échange automatique de renseignements (ci-après : EAR), à teneur desquels il détiendrait des avoirs auprès d’établissements bancaires israéliens. Il était ainsi invité à fournir des relevés fiscaux relatifs à ces avoirs.

9.             Le contribuable a répondu le 21 avril 2023, précisant que c’était en toute bonne foi qu’il avait omis de déclarer ses comptes bancaires israéliens, ceux-ci ne servant qu’à gérer les affaires du bien immobilier sis dans cet État et ne contenant que peu de liquidités. En annexe étaient produits des relevés de compte.

10.         Le 23 mai 2023, l’AFC-GE a adressé une nouvelle demande de renseignements à l’intéressé en lien avec ses comptes bancaires israéliens, à laquelle celui-ci a donné suite les 27 juillet et 29 septembre suivant.

11.         Le 17 octobre 2023, l’AFC-GE a informé le contribuable de la clôture des procédures de rappel et de soustraction d’impôt pour les années 2014 à 2016.

Elle lui a notifié des bordereaux de rappel d’impôt et des bordereaux d’amende. Il n’avait pas déclaré l’intégralité de ses avoirs mobiliers et immobiliers. Dans la mesure où il pouvait facilement détecter l’inexactitude des déclarations établies par sa fiduciaire, il était estimé que la soustraction avait été commise intentionnellement, à tout le moins par dol éventuel. La quotité des amendes était fixée à 0.5 fois le montant des impôts soustraits afin de tenir compte de sa collaboration et des montants en jeu peu importants.

12.         Les 16 novembre et 22 décembre 2023, le contribuable a élevé réclamation a l’encontre des bordereaux du 17 octobre précédent. Il y avait lieu de renoncer à prononcer des amendes à son encontre, dès lors qu’il avait déposé une dénonciation spontanée le 30 juin 2022.

13.         Par décision du 23 avril 2024, l’AFC-GE a rejeté la réclamation. Elle a maintenu les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende du 17 octobre 2023.

La dénonciation du 30 juin 2022 ne faisait aucunement mention des comptes bancaires non déclarés. En outre, dans cette lettre, il avait déclaré que l’immeuble sis en Israël était toujours demeuré inoccupé, alors même qu’il savait que des loyers étaient encaissés. Dès lors, il se révélait manifeste que les critères de la dénonciation spontanée faisaient défaut. Enfin, ce courrier avait été envoyé sous l’empire d’une crainte fondée, puisque le précité avait eu connaissance des investigations menées auprès d’un de ses proches.

14.         Par acte du 27 mai 2024, le contribuable a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre de la décision du 23 avril précédent en concluant à l’annulation des bordereaux d’amende du 17 octobre 2023, le tout sous suite de frais et dépens.

Avant que lui-même et son frère ne se dénoncent, le 30 juin 2022, l’AFC-GE ne pouvait avoir connaissance de l’existence de l’immeuble israélien. L’autorité intimée ne disposait d’aucun autre moyen d’apprendre l’existence de ce bien, étant précisé qu’il n’existait pas d’EAR s’agissant des biens immobiliers. Il n’avait pas agi sous l’empire d’une crainte fondée, mais afin de se mettre en conformité avec les principes fiscaux suisses.

Les comptes bancaires israéliens avaient été ajoutés lorsque la procédure d’annonce spontanée était encore pendante et ainsi, d’autres éléments pouvaient être ajoutés jusqu’à la fin de celle-ci. En outre, par rapport à la valeur de l’immeuble israélien (quelque CHF 2.68 millions), le solde desdits comptes (CHF 20'000.-) était dérisoire. Il ne représentait que 1 % de son patrimoine. Les rendements immobiliers ne s’élevaient qu’à quelques centaines de francs au maximum. C’était par pure inadvertance qu’il avait omis de déclarer ces comptes, de sorte que le principe de la proportionnalité commandait de ne pas exclure de lui accorder le bénéfice des dispositions sur la dénonciation spontanée.

Étant donné que l’accord entre la Suisse et Israël relatif à l’EAR n’était entré en vigueur qu’en 2019, l’AFC-GE ne pouvait obtenir des renseignements qu’à partir de l’année 2019, mais non pour les années 2014 à 2016.

Initialement, l’AFC-GE entendait le taxer sur la valeur locative de l’immeuble, correspondant à 4.5 % de la valeur fiscale. Or, le montant de loyers était inférieur à la valeur locative. Puisque l’annonce de cette somme constituait un élément de nature à réduire sa taxation, il ne pouvait pas donner lieu à une soustraction et ne devait pas être obligatoirement être annoncé.

15.         Dans sa réponse du 5 août 2024, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours. L’annonce effectuée par le contribuable le 30 juin 2022 ne pouvait être qualifiée de dénonciation spontanée, car il n’avait annoncé qu’une partie des éléments de revenu et de fortune non déclarés, qu’elle avait découverts ultérieurement.

Le prononcé d’une amende se justifiait et sa quotité, fixée à 0.5 fois les droits soustraits, pleinement justifiée, au vu des circonstances atténuantes, à savoir la bonne collaboration de l’intéressé, ainsi que la faible importance des montants en jeu.

16.         Par réplique du 26 août 2024, le contribuable a maintenu son recours. Les impôts additionnels découlant de l’annonce spontanée ne résultaient pas de la fortune nouvellement déclarée, composée de comptes bancaires israéliens et du bien immobilier sis en Israël, puisque la fortune imposable en Suisse selon les bordereaux de rappel d’impôt était inférieure à celle découlant des taxations initiales. Pour l’année 2016, la fortune imposable en Suisse ne dépassait que de peu la fortune imposable selon les taxations initiales. Cela corroborait le fait que les suppléments d’impôt résultaient uniquement des rendements immobiliers de l’appartement en Israël.

17.         Dans sa duplique du 18 septembre 2024, l’AFC-GE a persisté dans les conclusions de sa réponse.

Elle peinait à comprendre que le recourant estimait que les loyers n’avaient pas à être déclarés, surtout dans une procédure de dénonciation spontanée. Il était par ailleurs insolite qu’un contribuable fasse le choix de s’acquitter de plus d’impôts si ce n’était afin de dissimuler d’autres éléments, en l’occurrence des comptes bancaires. En outre, l’ajout d’éléments de revenus et de fortune avait effectivement conduit à des suppléments d’impôts en ICC et en IFD. Ainsi, l’annonce du 30 juin 2022 ne remplissait pas les critères d’une dénonciation spontanée, de sorte qu’une amende avait été infligée à juste titre au recourant. Celle-ci se justifiait dans sa quotité.

18.         Le détail des pièces et des arguments des parties sera repris, ci-après, dans la mesure utile.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Le litige porte en premier lieu sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’AFC-GE a refusé de renoncer à la poursuite pénale, au motif que les conditions relatives à la dénonciation spontanée n’étaient pas remplies.

4.             Aux termes de l'art. 175 LIFD, le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (al. 1). Lorsque le contribuable dénonce spontanément et pour la première fois une soustraction d'impôt, il est renoncé à la poursuite pénale (dénonciation spontanée non punissable), à condition qu'aucune autorité fiscale n'en ait connaissance, qu'il collabore sans réserve avec l'administration pour déterminer le montant du rappel d'impôt et qu'il s'efforce d'acquitter le rappel d'impôt dû (al. 3 let. a à c).

L’art. 69 LPFisc prévoit une réglementation similaire.

5.             La notion de dénonciation suppose que le contribuable annonce de lui-même son infraction à l'autorité fiscale, alors que celle-ci n'en a encore pas eu connaissance d'une autre manière. Le caractère spontané fait défaut lorsque la déclaration intervient alors que les autorités fiscales sont déjà en train d'enquêter sur le dossier du contribuable et que celui-ci, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, doit s'attendre à ce que la soustraction sera découverte même sans dénonciation. La déclaration spontanée des art. 175 al. 3 LIFD et 69 al. 3 LPFisc n'est réalisée que lorsque l'auteur se dénonce spontanément (« de son propre mouvement »), sans pression extérieure (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_15/2021 du 27 mai 2021 consid. 6.2 et les arrêts cités). Par « autorités fiscales », il faut comprendre toute autorité fiscale fédérale, cantonale et/ou communale (Marc CHESEAUX, La dénonciation spontanée non punissable et le rappel d'impôt simplifié pour les héritiers selon la LIFD, 2016, p. 14).

6.             La dénonciation spontanée doit comporter tous les éléments de revenus et de fortune non déclarés (ATA/1850/2019 du 20 décembre 2019 consid. 3c). Lorsque l'autorité fiscale constate, après l'ouverture d'une procédure de rappel faisant suite à une dénonciation spontanée, que la soustraction fiscale dépasse les éléments déclarés dans ladite dénonciation, l'exemption de peine ne peut plus être accordée. À défaut, la dénonciation spontanée permettrait au contribuable de bénéficier de l'absence de sanction pénale également pour tous les éléments non déclarés découverts par l'autorité fiscale lors de la procédure de rappel d'impôt (arrêt du Tribunal fédéral 2C_133/2020 du 15 juillet 2020 consid. 5.4.2 ; ATA/1168/2020 du 17 novembre 2020 consid. 3c et les références citées).

Il faut toutefois toujours examiner si le contribuable a intentionnellement limité la dénonciation à une part de l’impôt soustrait ou s’il n’était simplement pas conscient qu’il avait encore commis des soustractions d’impôt par négligence, et que pour ce motif, il ne pouvait plus procéder à une dénonciation (Felix RICHNER, Walter FREI, Stefan KAUFMANN, Hans Ulrich MEUTER, Handkommentar zum DBG, 4ème édition, 2023, art. 175, n. 133, p. 11794).

7.             Dans une affaire jugée le 29 mars 2021 (JTAPI/323/2021, confirmé par ATA/201/2022 du 22 février 2022), le tribunal a eu à connaître d’un litige portant notamment sur une dénonciation spontanée concernant des comptes que le recourant en cause détenait dans plusieurs États étrangers.

Le tribunal a rappelé que l’EAR entre la Suisse et divers États a pour effet de porter à la connaissance des autorités fiscales helvétiques certaines données bancaires. Dans ce cadre, l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC‑CH) considère, selon sa prise de position du 30 août 2018, que les éléments fiscaux faisant l'objet de l'EAR sont connus du fisc au 30 septembre 2018 au plus tard, de sorte qu'une dénonciation ne peut plus être considérée comme spontanée à compter de cette échéance. Quant aux éléments fiscaux soumis à l'EAR prenant naissance après 2017 et ceux provenant d'États qui appliqueront postérieurement l'EAR, cette règle doit être appliquée par analogie à compter du 30 septembre de l'année durant laquelle l'échange des renseignements concernés aura lieu pour la première fois.

Le contribuable en question avait dénoncé, le 31 mai 2019, des comptes qu’il détenait à Dubaï (Émirats Arabes Unis, ci-après : EAU). L’EAR entre les EAU et la Suisse était entré en vigueur le 1er janvier 2019. Cette dénonciation pouvait être exemptée de peine, car lorsqu’elle était intervenue, elle était antérieure à sa prise de connaissance par l’AFC-CH, le 30 septembre 2019.

8.             L’arrêté fédéral concernant l’introduction de l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers avec Israël est entré en vigueur le 1er janvier 2019 (https://www.sif.admin.ch/fr/echange-automatique-renseignements-ear).

9.             En l’espèce, l’AFC-GE soutient que le recourant ne peut se prévaloir des dispositions relatives à la dénonciation spontanée, car dans sa lettre du 30 juin 2022, il n’a pas annoncé tous les éléments non déclarés jusqu’alors. Ce courrier ne faisait état que de l’immeuble sis en Israël, mais non des comptes bancaires détenus par le recourant auprès d’établissements israéliens.

L’intéressé ne partage pas le point de vue de l’autorité intimée. Il fait valoir que celle-ci n’aurait jamais pu apprendre l’existence du bien immobilier en cause, puisque l’EAR ne porte pas sur les immeubles et que l’accord conclu par la Suisse avec Israël ne déploie d’effet qu’à compter de 2019. Enfin, au vu des faibles montants en jeu, son omission doit être qualifiée de simple négligence, qui lui permet des bénéficier des dispositions sur la dénonciation spontanée.

10.         Le contribuable ne peut être suivi.

En effet, il ne conteste pas que son annonce du 30 juin 2022 ne fait pas état de ses comptes bancaires israéliens. Celle-ci ne peut donc être considérée comme complète. Contrairement à ce qu’il soutient, il importe peu que l’AFC-GE n’aurait pas découvert l’existence de l’immeuble sis en Israël sans qu’il lui en ait fait part dans ledit courrier. En effet, l’autorité intimée a eu connaissance d’autres éléments non déclarés, à savoir des comptes bancaires israéliens, non grâce au recourant, mais par le biais de la procédure d’EAR. C’est également vainement que le contribuable prétend que l’AFC-GE n’a pu obtenir de renseignements, par le biais de l’EAR, qu’à compter de 2019, année d’entrée en vigueur de l’accord conclu avec Israël, et non pour les périodes antérieures. En réalité, même s’il avait déjà mentionné ses comptes non déclarés dans le courrier du 30 juin 2022, cette annonce n’aurait pas pu être considérée comme une dénonciation spontanée non punissable, car à cette date, l’AFC-CH avait connaissance desdits comptes. Tel était déjà le cas au plus tard le 30 septembre 2019, soit le 30 septembre suivant l’entrée en vigueur dudit accord. L’intéressé peut difficilement soutenir que c’est par simple négligence qu’il a omis de déclarer ses comptes bancaires israéliens étant donné que dans sa lettre du 30 juin 2022, il a manifestement induit l’AFC-GE en erreur en affirmant que son appartement sis à B______ était toujours demeuré vide depuis son acquisition, alors même qu’il avait été loué et que des loyers étaient versés sur lesdits comptes.

Il résulte de ce qui précède qu’il ne peut être renoncé à la poursuite pénale. Il convient d’examiner si le prononcé d’une amende pour soustraction d’impôt se justifie.

11.         Ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, le contribuable ne conteste pas avoir omis de déclarer son appartement sis en Israël, ni ses comptes bancaires. L’existence d’une perte fiscale pour la collectivité est établie. En conséquence, il y a lieu de retenir que l’élément objectifs de l’infraction est rempli.

12.         Demeure à examiner la question de l’élément subjectif, à savoir la faute.

13.         La soustraction est punissable aussi bien intentionnellement que par négligence. La notion de négligence de l’art. 175 LIFD et de l’art. 56 LHID est identique à celle de l’art. 12 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) : commet un crime ou un délit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L’imprévoyance est coupable quand l’auteur n’a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle, par quoi l’on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle. Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l’autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3).  S'agissant de savoir si une soustraction est intentionnelle ou procède d'une négligence non punissable, l'importance des montants en cause joue aussi un rôle non négligeable, dès lors que l'absence d'un montant sur la déclaration d'impôt peut d'autant plus difficilement échapper au contribuable que la somme est élevée (ATA/1282/2018 du 27 novembre 2018 consid. 4a et la jurisprudence citée).

14.         La preuve d’un comportement intentionnel de la part du contribuable doit ainsi être considérée comme apportée lorsqu’il est établi avec une sécurité suffisante que celui-ci était conscient du caractère erroné ou incomplet des indications fournies. Si cette conscience est établie, il faut présumer qu’il a voulu tromper les autorités fiscales, afin d’obtenir une taxation plus favorable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_792/2021 du 14 mars 2022 consid. 6.4.1). Cette présomption ne se laisse pas facilement renverser, car l’on peine à imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu’il sait incorrectes ou incomplètes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1066/2018 du 21 juin 2019 consid. 4.1). Le dol éventuel suffit pour retenir l’intention (arrêt du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.2) : il suppose que l’auteur envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins, parce qu’il s’en accommode au cas où il se produirait (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 du 20 décembre 2019 consid. 17.3.1).  

15.         En l’espèce, le recourant n’a déclaré ni son appartement sis en Israël, ni ses comptes qu’il détient auprès de banques sises dans cet État.

Le fait qu’il n’ait pas déclaré ce bien immobilier, qu’il a acquis pour USD 3 millions devait difficilement lui échapper au vu de l’ampleur de cette somme, surtout si on la compare à sa fortune nette mondiale des années 2014, 2015 et 2016, qui se chiffre à quelque CHF 12.7 millions, CHF 12.1 millions et CHF 6.6 millions respectivement. Cette omission ne procède dès lors pas d’une simple négligence, mais doit être qualifiée d’intentionnelle. L’absence de mention de ses comptes ne peut davantage être considérée comme une négligence. Si tel était le cas, il aurait dû les annoncer à l’autorité intimée en même temps qu’il lui faisait part de l’existence dudit immeuble.

Partant, c’est à bon droit que l’AFC-GE a qualifié le comportement du recourant d’intentionnel. Dès lors que les éléments objectifs et subjectifs d’une soustraction, sont réunis, les amendes se justifient dans leur principe. Demeure enfin à examiner leur quotité.

16.         En règle générale, l’amende est fixée au montant de l’impôt soustrait. Si la faute est légère, l’amende peut être réduite jusqu’au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD et 69 al. 2 LPFisc).

17.         Le montant de l’impôt soustrait constitue le premier élément de fixation de la peine. Celle-ci doit ensuite être fixée selon le degré de faute de l’auteur. En présence d’une infraction intentionnelle sans circonstances particulières, l’amende équivaut en règle générale au montant de l’impôt soustrait (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1).

Conformément à l’art. 106 al. 3 CP, l’amende doit être fixée en tenant compte de la situation de l’auteur, afin que la peine corresponde à la faute commise. Les principes régissant la fixation de la peine prévus à l’art. 47 CP s’appliquent. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l’impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l’auteur. Les circonstances atténuantes de l’art. 48 CP sont aussi applicables par analogie en droit pénal fiscal (ATF 144 IV 136 consid.7.2.1. La bonne collaboration du contribuable dans la procédure en soustraction d’impôt constitue l’un des éléments permettant de réduire la peine (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013). Entrent aussi en considération le repentir actif ou encore l’écoulement d’un temps relativement long entre l’acte et sa découverte, durant lequel le contribuable s’est comporté correctement à l’égard du fisc (Pietro SANSONETTI, Danielle HOSTETTLER, in Yves NOËL, Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct, 2ème édition, 2017, art. 175, § 47, p. 1995).

18.         En l’espèce, le contribuable a commis des soustractions durant trois années fiscales, ce qui constitue une circonstance aggravante. L’AFC-GE n’en a apparemment pas tenu compte. Elle a pris en considération, à titre de circonstances atténuantes, la bonne collaboration du contribuable, ainsi que la faible importance des montants d’impôt en jeu. Le contribuable ne se prévaut d’aucune circonstance atténuante supplémentaire. Il s’ensuit que la quotité des amendes, fixée à 0.5 fois les droits soustraits, ne représente pas une sanction excessive au regard de l’ensemble des circonstances.

19.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

20.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 27 mai 2024 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 23 avril 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Giedre LIDEIKYTE HUBER et Jean-Marie HAINAUT, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière