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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3590/2023

JTAPI/786/2024 du 19.08.2024 ( ICCIFD ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : DÉLAI;DÉCISION SUR OPPOSITION;RECONSIDÉRATION
Normes : LPFisc.41.al3; LPFisc.55.al2; LIFD.133.al3; LIFD.147.al2
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3590/2023 ICCIFD

JTAPI/786/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 19 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne la taxation 2020 de Monsieur A______.

2.             Par lettre recommandée du 2 juin 2021, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a sommé le contribuable de retourner sa déclaration fiscale 2020, sous peine de taxation d’office.

3.             Dès lors que l’intéressé n’a pas donné suite à cette invite, l’AFC-GE l’a taxé d’office, par bordereaux du 18 octobre 2021, qui ont fixé son revenu imposable à CHF 130'000.-. L’ICC et l’IFD dus se chiffraient à respectivement CHF 26'853.- et à CHF 5'434.-.

4.             Étant donné que le contribuable n’a pas acquitté le montant d’impôt mis à sa charge par l’AFC-GE, celle-ci lui a envoyé des sommations de paiement et lui a fait notifier des commandements de payer.

5.             Le 27 septembre 2023, le contribuable a fait part à l’AFC-GE, par message iContact, qu’il venait de déposer sa déclaration fiscale 2020. Il convenait de modifier sa taxation, car l’impôt dû par lui ne s’élevait qu’à CHF 25.- et non à CHF 26'000.-.

6.             Selon la déclaration fiscale transmise par le contribuable par téléversement, son revenu imposable pour l’ICC et l’IFD se montait à respectivement CHF 12'622.- et à CHF 23'240.-.

7.             Par décisions du 28 septembre 2023, l’AFC-GE a déclaré la réclamation irrecevable pour cause de tardiveté au motif que le contribuable n’avait fait valoir aucun motif sérieux.

8.             Par lettre du même jour adressée à l’AFC-GE, le contribuable a reconnu que le délai de contestation était dépassé, mais sa requête devait être prise en considération. Il n’avait pas vérifié [ses bordereaux]. Or, il venait de découvrir quelque chose de très grave, à savoir qu’il était taxé sur un montant excédant CHF 26'000.-, alors qu’il ne devait payer que CHF 25.-. Cela ressemblait à un vol, ce d’autant qu’il était séparé, avec quatre enfants à charge et se trouvait au chômage depuis le mois de septembre 2021.

9.             Le 12 octobre 2023, après avoir obtenu l’accord du contribuable, l’AFC-GE a transmis ce courrier au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) pour raison de compétence.

10.         Le recourant a communiqué au tribunal plusieurs courriels échangés avec l’office des poursuites (ci-après : OP). Il ressortait d’un courriel du 21 décembre 2023, que l’AFC-GE avait demandé l’annulation de la saisie et que le dossier était clos.

11.         Dans sa réponse du 23 janvier 2024, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le contribuable avait élevé réclamation tardivement, sans fournir aucune justification à ce sujet. Au surplus, les conditions d’une révision n’étaient manifestement pas remplies.

12.         Le contribuable n’a pas produit d’écriture de réplique.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Lorsque - comme en l’espèce - les décisions sur réclamation sont des décisions d'irrecevabilité, seule la question de l'irrecevabilité peut faire l'objet du recours et non pas la taxation en tant que telle. Dans un tel cas, l'autorité de recours doit en effet d'abord examiner si les conditions formelles de la recevabilité de la réclamation (forme écrite, délai, motivation, moyen de preuve, etc.) étaient ou non remplies et, si tel n'est pas le cas, elle doit rejeter le recours déposé devant elle sans examiner elle-même le détail de la taxation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_227/2021 du 16 avril 2021 consid. 2.2).

4.             Au vu de cette jurisprudence, il convient de déterminer si c’est à bon droit que l’AFC-GE a estimé que la réclamation avait été déposée tardivement.

5.             À teneur des art. 39 al. 1 LPFisc et 132 al. 1 LIFD, le contribuable peut adresser à l'autorité de taxation une réclamation écrite contre la décision de taxation dans les 30 jours qui suivent sa notification.

Ce délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si la réclamation est remise à l'autorité de taxation, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l'étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard (art. 41 al. 1 LPFisc et art. 133 al. 1 LIFD).

Selon les art. 132 al. 3 LIFD et 39 al. 2 LPFisc, le contribuable qui a été taxé d'office peut déposer une réclamation contre cette taxation uniquement pour le motif qu'elle est manifestement inexacte. La réclamation doit être motivée et indiquer, le cas échéant, les moyens de preuve. L'obligation de motiver la réclamation contre une taxation d'office est une exigence formelle dont la violation entraîne l'irrecevabilité de la réclamation (arrêt du Tribunal 2C_435/2018 du 24 mai 2018 consid. 6.2 et l’arrêt cité).

Selon les art. 41 al. 3 LPFisc et 133 al. 3 LIFD, une réclamation tardive n’est recevable que si le contribuable établit que par suite de service militaire, de service civil, de maladie, d’absence du pays ou pour d’autres motifs sérieux, il a été empêché de présenter son acte en temps utile et qu’il l’a déposé dans les trente jours après la fin de l’empêchement.

6.             Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. La restitution du délai suppose que le contribuable n’a pas respecté le délai légal en raison d’un empêchement imprévisible, dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (arrêt du Tribunal fédéral 2C_40/2018 du 8 février 2018 consid. 5.1 et 5.2). Celui-ci peut résulter d’une impossibilité objective ou subjective. Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l’on ne peut raisonnablement attendre de la part d’un homme d’affaires avisé (ATA/633/2022 du 14 juin 2022 consid. 2a et les références citées).

7.             En l’espèce, le contribuable a élevé réclamation le 27 septembre 2023 à l’encontre des bordereaux de taxation datés du 18 octobre 2021, soit manifestement hors du délai légal de trente jours. Dans son recours, le contribuable admet avoir agi tardivement. Conformément à la jurisprudence, cette déclaration lui est opposable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_637/2007 du 4 avril 2008, consid. 2.3 et 2.4.1).

Cela étant, il soutient en substance qu’en dépit du non respect du délai de réclamation, l’AFC-GE doit entrer en matière sur celle-ci, au motif qu’elle lui réclame plus CHF 26'000.-, alors qu’il ne doit que CHF 25.-.

Le contribuable ne fournit cependant aucune explication pour justifier le fait qu’il n’a contesté les bordereaux incriminés que deux ans après les avoir reçus. Son revenu imposable (CHF 130'000.-) et l’impôt dû (CHF 26'853.- pour l’ICC et CHF 5'434.- pour l’IFD) fixés d’office ressortent pourtant clairement de ces bordereaux. Quoi qu’il en soit, selon la jurisprudence (JTAPI/616/2024 du 24 juin 2024 consid. 8), une inattention ne constitue pas un motif de restitution du délai. 

Il résulte de ce qui précède que à bon droit que l’AFC-GE a déclaré la réclamation irrecevable pour cause de tardiveté.

8.             On peut encore considérer qu'en déposant sa déclaration fiscale le 27 septembre 2023, le recourant n’a pas élevé réclamation, mais sollicité la reconsidération de ses taxations (ATA/660/2015 du 23 juin 2015).

9.             Aux termes des art. 55 al. 1 LPFisc et 147 1 LIFD, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a), lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b) ou lorsqu'un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c).

La révision est exclue lorsque le requérant invoque des motifs qu'il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire, s'il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui (art. 55 al. 2 LPFisc et art. 147 al. 2 LIFD).

10.         Une révision est exclue en cas d'erreur dans la déclaration d'impôt due à une négligence du contribuable ou de son représentant. Il appartient au contribuable de contrôler la décision de taxation lorsqu'il la reçoit et de signaler en temps utile les vices dont elle serait affectée (consid. 5.2). Il n'est pas possible de déroger aux principes régissant la révision, si le résultat de leur application est choquant et heurte le sentiment de l'équité. Un tel raisonnement revient en effet à déroger à la règle du numerus clausus des motifs légaux qui permettent de revenir sur une décision entrée en force (arrêt du Tribunal fédéral 2C_245/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.1).

11.         En l’occurrence, le contribuable n’a pas allégué, et encore moins démontré que les conditions de la révision seraient remplies. Il aurait, d’ailleurs, pu faire valoir ses griefs à l’encontre des bordereaux incriminés dans le cadre de la procédure ordinaire de réclamation, s’il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait être raisonnablement exigée de lui et invoquer, cas échéant, que sa taxation d’office se révélait manifestement inexacte. Une simple lecture des bordereaux lui permettait en effet de comprendre le montant de l’impôt qui lui était réclamé.

Le fait que le revenu fixé d’office, à savoir CHF 130'000.-, excède manifestement celui que le contribuable a déterminé en remplissant sa déclaration fiscale (à savoir CHF 12'622.- pour l’ICC et CHF 23'240.- pour l’IFD), ne justifie pas que la taxation de l’intéressé soit reconsidérée. En effet, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence exposée ci-dessus, il n’est pas permis de réviser une taxation au seul motif que celle-ci se révèle choquante.

12.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

13.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 septembre 2023 par Monsieur A______ contre les décisions sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 28 septembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Laetitia MEIER DROZ, présidente, Federico ABRAR et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière