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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4254/2023

JTAPI/398/2024 du 29.04.2024 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : IMPÔT À LA SOURCE;DÉLAI
Normes : LIFD.91; LIFD.137.al1; LISP.6.al1; LISP.15; LPFisc.38E
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4254/2023 ICCIFD

JTAPI/398/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 29 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne la période fiscale 2022.

2.             Monsieur A______ est soumis à l’impôt à la source et cet impôt a été prélevé par ses employeurs.

3.             Le 22 février 2023, M. A______ a formulé une réclamation contre le montant de l’impôt à la source prélevé, via le portail E-démarches de l’Etat de Genève, avec comme motif sélectionné « Charges d’enfant(s) en garde alternée ».

4.             Par décision du 6 juillet 2023, l'administration fiscale cantonale genevoise (ci-après : AFC-GE) a notifié à M. A______ un nouveau bordereau.

Il était par ailleurs indiqué que toute déduction fiscale qui n’était pas incluse dans les barèmes d’impôts à la source ne pouvait être désormais obtenue que par le biais d’une taxation ordinaire ultérieure à demander au plus tard le 31 mars de l’année N+1 et non plus via une rectification de l’impôt à la source.

5.             Par courrier du 14 août 2023, M. A______, par l’intermédiaire de sa fiduciaire, a formé réclamation à l’encontre de cette décision.

Il avait coché la mauvaise case lorsqu’il avait fait sa démarche sur le site de l’administration en ligne. Les années précédentes, il avait systématiquement fait l’objet d’une taxation ordinaire ultérieure. Il avait dès lors été surpris de recevoir un bordereau rectificatif et non une déclaration fiscale avec un code confidentiel pour le dépôt en ligne.

Compte tenu de ce qui précédait et du caractère exceptionnel de sa demande, il souhaitait que l’AFC-GE examinât sa demande de taxation ordinaire ultérieure avec bienveillance.

6.             Par décision du 6 novembre, l’AFC-GE a décidé de maintenir la taxation du 6 juillet 2023, au motif que la demande de reconsidération du statut de quasi-résident avait été déposée tardivement.

7.             Par acte du 21 décembre 2023, M. A______ a recouru auprès du le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre de cette décision, concluant au réexamen de sa situation fiscale 2022 en prenant en compte sa demande de quasi-résident.

Il avait reçu la décision contestée le 21 novembre 2023. Cela faisait plusieurs années qu’il effectuait une demande de quasi-résident. Il avait soumis une demande de rectification de sa déclaration d’impôt en raison d’une erreur survenue lors du processus de demande en ligne en janvier 2023. Malgré plusieurs tentatives, il n’avait pas reçu son code d’activation pour finaliser la procédure et avait donc contacté son fiscaliste pour qu’il contactât l’AFC-GE. Un retard dans sa demande avait été mentionné et on l’avait assuré que les codes nécessaires seraient bientôt disponibles ; cependant, il avait reçu une demande de paiement d’impôts sans qu’aucune rectification n’ait été effectuée.

8.             Le recourant a transmis un second acte de recours le 28 décembre 2023, concluant à l’annulation de la décision, à ce que l’administration prouve que sa demande, laquelle comportait une erreur, avait été soumise par voie électronique après le 31 mars 2023, qu’elle accepte le principe de la mise en place du statut de taxation ordinaire ultérieure et lui transmette une déclaration fiscale ordinaire.

9.             Il avait commis une erreur sur la plate-forme électronique e-démarches, en cochant involontairement la case « Demande de rectification de l’imposition à la source » au lieu de « Demande/Annonce de taxation ordinaire ultérieure ». Il avait bénéficié du statut de quasi-résident pendant plusieurs années, sa demande par E-démarches était sa première expérience et les options disponibles n’étaient pas clairement formulées pour les non-initiés.

La décision de l’administration avait été rendue sans que ses arguments aient été pris en compte.

10.         L’AFC-GE a répondu au recours le 5 février 2024, concluant à son rejet. Il a produit son dossier.

Au 31 décembre 2022, le contribuable était soumis à l’imposition à la source et disposait d’un délai jusqu’au 31 mars 2023 pour demander une taxation ordinaire ultérieure. Selon les pièces du dossier, il apparaissait néanmoins qu’il n’avait manifesté sa volonté d’effectuer une telle demande que dans son courrier de réclamation du 14 août 2023. Dans ces circonstances, il n’avait manifestement pas agi dans le strict délai légal, de sorte qu’il était forclos. Par ailleurs, l’erreur dont il se prévalait n’était pas reconnue par la jurisprudence comme étant un motif d’empêchement permettant d’obtenir une restitution de délai. C’était donc à juste titre qu’elle avait maintenu sa taxation 2022.

11.         Invité à répliquer, le recourant ne s’est pas manifesté.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens de des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Le contribuable estime que l’administration aurait dû entrer en matière sur sa demande de taxation ordinaire ultérieure, au motif qu’il avait commis une erreur dans l’utilisation de la plateforme E-Démarches.

4.             Selon l’art. 91 al. 1 LIFD, les frontaliers, les résidents à la semaine et les résidents de courte durée domiciliés à l’étranger qui exercent une activité lucrative dépendante en Suisse sont soumis à l’impôt à la source sur le revenu de leur activité en Suisse, conformément aux art. 84 et 85.

Les personnes imposées à la source en vertu de l’art. 91 LIFD peuvent demander, au plus tard le 31 mars de l’année suivant l’année fiscale concernée, une taxation ordinaire ultérieure pour chaque période fiscale dans un des cas suivants a. une part prépondérante de leurs revenus mondiaux, y compris les revenus de leur conjoint, est imposable en Suisse; b. leur situation est comparable à celle d’un contribuable domicilié en Suisse, ou c. une taxation ordinaire ultérieure est nécessaire pour faire valoir leur droit à des déductions prévues par une convention contre les doubles impositions (art. 99a LIFD).

Le contribuable peut, jusqu’au 31 mars de l’année fiscale qui suit l’échéance de la prestation, exiger que l’autorité de taxation rende une décision relative à l’existence et l’étendue de l’assujettissement (art. 137 al. 1 LIFD).

5.             Au niveau cantonal, ce sont les art. 6 al. 1 et 15 LISP, et art. 38E LPFisc, qui s’appliquent.

6.             Les délais fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont en principe pas susceptibles d'être prolongés, restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même (ATA/286/2020 du 10 mars 2020 ; ATA/1157/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2a). Ainsi, celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos (cf. ATA/286/2020 du 10 mars 2020 ; ATA/1157/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2a).

7.             Les règles relatives à ce type de délais nécessitent une stricte application, ceci pour des motifs d'égalité de traitement et d'intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit. Ainsi, l'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est en principe pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (cf. not. ATF 142 V 152 consid. 4.2 in fine ; 125 V 65 consid. 1 ; ATA/286/2020 du 10 mars 2020).

8.             Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. La restitution du délai suppose que le contribuable n’a pas respecté le délai légal en raison d’un empêchement imprévisible, dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (arrêt du Tribunal fédéral 2C_40/2018 du 8 février 2018 consid. 5.1 et 5.2). Celui-ci peut résulter d’une impossibilité objective ou subjective. Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l’on ne peut raisonnablement attendre de la part d’un homme d’affaires avisé (ATA/633/2022 du 14 juin 2022 consid. 2a et les références citées).

Un surcroît de travail ou une inattention ne constituent pas des motifs de restitution du délai (Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand, Impôt fédéral direct, 2017, n° 13, p. 1736).

Les cas de force majeure sont également réservés. Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (ATA/599/2023 du 6 juin 2023 consid. 3.3 et les références citées). Pour établir l’existence d’un cas de force majeure, le fardeau de la preuve incombe à l’assujetti (ATA/815/2022 du 17 août 2022 consid. 2).

9.             En l’espèce, le contribuable, soumis à l’imposition à la source pour l’année 2022, disposait d’un délai au 31 mars 2023 pour demander une taxation ordinaire ultérieure.

Selon les pièces du dossier, il n’a pas soumis de demande à l’administration au 31 mars 2023. Il explique avoir eu l’intention de le faire mais avoir commis une erreur en cochant involontairement la case « Demande de rectification de l’imposition à la source » au lieu de « Demande/Annonce de taxation ordinaire ultérieure ». Ce n’est ainsi que dans son courrier du 14 août 2023 que l’administration a eu connaissance de son souhait de bénéficier d’une taxation ordinaire ultérieure.

Or, force est de constater que l’erreur dont se prévaut le recourant ne constitue pas un cas d’empêchement retenu par la jurisprudence, le recourant ayant fait preuve d’inattention, ce qui ne lui permet ainsi pas d’obtenir une restitution de délai.

C’est donc à juste titre que l’AFC-GE a maintenu la taxation du contribuable 2022 dans la décision sur réclamation du 6 novembre 2023.

10.         Mal fondé, le recours est rejeté.

11.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 21 décembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 6 novembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Siégeant: Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Stéphane TANNER et Yuri KUDRYAVTSEV, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière