Décisions | Chambre de surveillance
DAS/193/2025 du 14.10.2025 sur DTAE/5420/2025 ( PAE ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
| republique et | canton de geneve | |
| POUVOIR JUDICIAIRE C/24718/2015-CS DAS/193/2025 DECISION DE LA COUR DE JUSTICE Chambre de surveillance DU MARDI 14 OCTOBRE 2025 | ||
Recours (C/24718/2015-CS) formé en date du 9 juillet 2025 par Monsieur A______, domicilié ______, représenté par Me B______, avocat.
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Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 17 octobre 2025 à :
- Monsieur A______
c/o Me B______, avocat,
______, ______.
- Madame C______
Monsieur D______
______, ______.
- Madame E______
Monsieur F______
OFFICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.
- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT.
A. a) Par ordonnance DTAE/5420/2025 du 26 mars 2025, notifiée au recourant le 30 juin 2025, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a rappelé que A______, né le ______ 1973, originaire de Genève (GE), était au bénéfice d'une curatelle de représentation et de gestion étendue à l'assistance personnelle et à la représentation thérapeutique (ch. 1 du dispositif), libéré C______ et D______ de leurs fonctions de curateurs de la personne concernée s'agissant de l'assistance personnelle (ch. 2), libéré D______ de ses fonctions de curateur de représentation dans le domaine médical (ch. 3), dit que les curateurs visés sous chiffre 2 conservaient les tâches de représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques et de gérer les revenus et biens de la personne concernée et administrer ses affaires courantes, avec la précision qu'ils pouvaient se substituer l'un à l'autre dans l'exercice de leur mandat chacun avec les pleins pouvoirs de représentation (ch. 4), dit que C______ conservait les tâches de veiller à l’état de santé de la personne concernée, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical (ch. 5), désigné E______ et F______, respectivement intervenante en protection de l’adulte et chef de secteur auprès de l'Office de protection de l'adulte (OPAd), aux fonctions de curateurs, en disant qu'ils pouvaient se substituer l’un à l’autre dans l’exercice de leur mandat, chacun avec les pleins pouvoirs de représentation (ch. 6), les a chargés de veiller au bien-être social de la personne concernée et la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre, y compris en matière de logement (ch. 7), autorisé les curateurs à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée, dans les limites de leurs mandats respectifs et avec la faculté de la faire réexpédier à l'adresse de leur choix, et, si nécessaire, à pénétrer dans le logement de la personne concernée (ch. 8) et laissé les frais judiciaires à la charge de l’État (ch. 9).
Le Tribunal de protection a constaté que depuis le début du mandat de curatelle, D______ et C______, parents et curateurs de A______, étaient confrontés à de nombreuses rechutes de leur fils dans l'alcoolisme, qui avaient notamment conduit à des hospitalisations et à des renvois des lieux de vie dans lesquels celui-ci séjournait. Au bout de leurs ressources et épuisés émotionnellement, les curateurs avaient sollicité un allégement de leurs fonctions portant sur l'assistance personnelle de leur fils, ainsi que la représentation médicale s'agissant de D______. Il convenait de donner suite à leur demande et de les libérer de leurs fonctions de curateurs en ce qui avait trait à l'assistance personnelle, ainsi que la représentation thérapeutique pour le père, et de confirmer pour le surplus leurs tâches de représentants en matière d'affaires administratives, juridiques et patrimoniales, ainsi que la représentation médicale pour la mère. Considérant la situation patrimoniale du concerné, le risque d'exclusion de la Fondation G______ au sein de laquelle il séjournait actuellement, le besoin de lui retrouver potentiellement un lieu en urgence, puis pérenne, adapté à ses troubles, et vu la nécessité de la mise en place d'un accompagnement personnel et social, les collaborateurs de l'Office de protection de l'adulte (OPAd), lesquels disposaient des compétences techniques et professionnelles indispensables pour ce type d'interventions, seraient désignés aux fonctions de curateurs.
B. a) Par acte du 10 juillet 2025, A______, par l'entremise de son curateur d'office B______, a recouru contre cette ordonnance, concluant, sous suite de frais, à son annulation et, cela fait, à ce qu'il soit dit que C______ et D______ conservaient les tâches consistant à représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, gérer ses revenus et biens et administrer ses affaires courantes, ainsi que veiller à son état de santé, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d'incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical, et à ce que B______ soit désigné aux fonctions de curateur, chargé de veiller au bien-être social de la personne concernée et la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre, y compris en matière de logement.
b) Invité à prendre position, le Tribunal de protection n'a pas souhaité reconsidérer sa décision.
c) D______ et C______ ont renoncé à répondre au recours.
d) Par avis du 16 septembre 2025 du greffe de la Chambre de surveillance, le recourant et les autres participants à la procédure ont été informés que la cause était gardée à juger.
e) D______ et C______ ont réagi à ce courrier par pli du 30 septembre 2025, expliquant être d'accord que B______ devienne le curateur privé de leur fils mais n'avoir pas compris qu'ils auraient également dû faire recours contre la décision du 26 mars 2025.
C. La décision querellée s'inscrit dans le contexte suivant :
a) A______ souffre d'une dépendance sévère à l'alcool et aux benzodiazépines depuis de nombreuses années. Il est au bénéfice d'une curatelle de représentation et de gestion étendue à tous les domaines et confiée à ses parents, C______ et D______, par décision du Tribunal de protection du 1er octobre 2021.
b) Dans son rapport de situation du 13 décembre 2024 adressé au Tribunal de protection, B______, avocat, nommé curateur d'office de l'intéressé par décision du 19 octobre 2023, a expliqué que l'intégration de A______ au sein de l'établissement médico-social (EMS) H______ avait échoué, ce dernier ayant été exclu début mars 2024 à la suite de consommations excessives d'alcool. Le concerné avait intégré en mai 2024 [l’établissement] I______, situé à J______ [BE], et était resté sobre pendant trois mois. Il se trouvait à la Clinique K______ à L______ [GE] depuis le 7 décembre 2024 pour un sevrage d'alcool, mais devait réintégrer ultérieurement l'établissement du M______ pour y consolider son sevrage. Il se sentait très isolé dans le Jura et souhaitait se rapprocher de ses parents en intégrant la Fondation G______ à N______ [VD], ces derniers ne s'y opposant pas mais craignant une rechute de leur fils puisque l'établissement se trouvait en ville de N______ et qu'il autorisait les sorties de ses résidents.
Le curateur d'office a encore indiqué que les parents de l'intéressé envisageaient à terme la relève de leurs fonctions de curateurs, au vu notamment de leur âge et de l'investissement émotionnel que la présente curatelle leur demandait, et souhaitaient qu'il soit nommé à leur place.
c) Le Tribunal de protection a tenu une audience le 10 mars 2025.
A______ a déclaré qu'il résidait à la Fondation G______ depuis le 5 février 2025, que son séjour se passait bien malgré de nombreuses consommations d'alcool et une hospitalisation mi-février 2025 en soins somatiques. Il a admis avoir besoin de se faire aider et de parler pour éviter les consommations et souhaitait ainsi bénéficier d'un suivi par un psychiatre spécialisé en addictologie à N______ [VD]. Il s'est montré favorable, dans l'intérêt de sa mère, à un allégement du mandat de curateurs de ses parents, s'agissant du volet médical.
D______ a sollicité un changement de curateur au niveau de l'assistance personnelle et de la représentation médicale de son fils au motif que son épouse et lui-même étaient arrivés au bout de leurs ressources et que cette dernière se trouvait moralement épuisée. Il a précisé que son fils percevait une rente de l'assurance-invalidité et se faisait aider par le service des prestations complémentaires (SPC).
C______ a déclaré que l'abstinence de l'intéressé était très difficile à maintenir, qu'il risquait de se faire renvoyer de la Fondation G______ s'il reprenait ses consommations et qu'une prise en charge au sein du domicile familial n'était pas envisageable. Elle a confirmé que la situation actuelle était difficile pour elle. Elle souhaitait pouvoir garder le volet de la représentation médicale de son fils et être relevée de ses fonctions quant à l'assistance personnelle.
Les père et mère de A______ ont déclaré être prêts à rémunérer un curateur privé vu l'absence de fortune de leur fils.
B______ a déclaré s'en rapporter à justice quant au choix du curateur.
A l'issue de l'audience, le Tribunal de protection a gardé la cause à délibérer.
1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet, dans les trente jours, d'un recours écrit et motivé, devant le juge compétent, à savoir la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 et al. 3 et 450b CC; art. 126 al. 3 LOJ; art. 53 al. 1 et 2 LaCC). Les parties à la procédure et les proches de la personne concernée ont qualité pour recourir (art. 450 al. 2 ch. 1 et 2 CC).
Formé par la personne concernée, dans les délai (art. 142 al. 1 et 3 CPC) et forme prescrits par la loi, le recours est recevable.
1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC).
1.3 L'art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l'exclusion du CPC (art. 450f CC cum art. 31 al. 1 let. c et let. d a contrario LaCC), ne stipulant aucune restriction en matière de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance, les faits invoqués devant la Chambre de céans sont recevables.
2. Le recourant fait grief au Tribunal de protection de n'avoir pas respecté son souhait ainsi que celui de ses parents de voir désigner, comme curateur chargé de l'assistance personnelle, son curateur d'office, B______.
2.1 L'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les aptitudes et les connaissances nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne (art. 400 al. 1 CC).
2.1.1 Lorsque la personne concernée propose une personne comme curateur, l'autorité de protection de l'adulte accède à son souhait pour autant que la personne proposée remplisse les conditions requises et accepte la curatelle (art. 401 al. 1 CC). L'autorité de protection de l'adulte prend autant que possible en considération les souhaits des membres de la famille ou d'autres proches (art. 401 al. 2 CC).
2.1.2 Peuvent être désignés aux fonctions de curateur a) des curateurs privés non professionnels, soit des proches de la personne protégée ou une personne désignée par celle-ci, qui exercent en principe leur fonction à titre gratuit (art. 2 al. 1 et art. 8 al. 1 du Règlement fixant la rémunération des curateurs, RS/GE E 1 05.15, ci-après: RRC), b) des curateurs privés professionnels, à savoir des personnes disposant des compétences requises pour exercer une mesure de protection à titre professionnel en dehors d'un service de l'administration cantonale, dont la rémunération, fixée selon un tarif se situant entre 150 fr. et 450 fr. par heure pour un avocat, est prélevée sur les biens de la personne concernée (art. 2 al. 1 et 9 al. 1 RRC), et c) des curateurs officiels, soit des collaborateurs du service de l'administration cantonale chargé des mesures de protection pour adultes, dont la rémunération échoit à l'Etat de Genève (art. 2 al. 1 et 3 al. 2 RRC). Les curateurs officiels pratiquent un tarif de 60 fr./l'heure pour la gestion courante et 125 fr./l'heure pour l'activité juridique (art. 11 al. 2 RRC).
En matière de curatelle d'adultes, le tribunal désigne les collaborateurs du service de l'administration cantonale concerné lorsque la personne protégée dispose d'une fortune globale nette inférieure ou égale à 50'000 francs et qu'aucun proche n'est susceptible de fonctionner comme curateur (art. 2 al. 2 RRC).
2.2 En l'espèce, il est acquis que la situation patrimoniale du recourant, au bénéfice de prestations sociales, ne lui permet pas de rémunérer un curateur privé. Par ailleurs, lors de l'audience du 10 mars 2025, le recourant et ses parents n'ont proposé aucun proche ou une autre personne disposée à exercer la fonction de curateur privé, chargé de l'assistance personnelle, à titre gratuit.
Postérieurement à l'audience tenue par le Tribunal de protection et dans le cadre de la présente procédure de recours, le recourant a exprimé le souhait que son curateur d'office, B______, soit désigné en qualité de curateur chargé de l'assistance personnelle. Dans son recours, il souligne que ses parents ont déclaré devant le Tribunal de protection être disposés à rémunérer un curateur privé. Cette simple déclaration n'est pas suffisante pour s'écarter du principe selon lequel un curateur officiel est désigné lorsque la fortune de la personne protégée n'est pas supérieure à 50'000 fr. En effet, on ne sait rien de la capacité de C______ et D______ à assumer financièrement les frais et honoraires d'un curateur privé, de même que l'on ignore si les intéressés ont pleinement conscience de la portée d'un tel engagement, étant souligné que la rémunération d'un avocat en qualité de curateur privé professionnel est fixée en fonction d'un tarif oscillant entre 150 fr. et 450 fr. de l'heure. Le recouvrement éventuel des factures du curateur privé auprès des parents pourrait également s'avérer délicat, dès lors que ceux-ci n'ont pas d'obligation d'entretien vis-à-vis de la personne concernée.
Partant, au regard de la situation d'espèce, c'est à juste titre que le Tribunal de protection a désigné deux collaborateurs de l'OPAd comme curateurs chargés de l'assistance personnelle.
3. Le recourant a conclu à ce que C______ et D______ conservent les tâches de veiller à son état de santé, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d'incapacité de discernement, le représenter dans le domaine médical.
Dans son acte, le recourant ne consacre toutefois aucun développement à la conclusion tendant à ce que D______ conserve le volet médical de la curatelle. Dépourvu de motivation, le recours est par conséquent irrecevable sur ce point.
L'ordonnance attaquée sera donc intégralement confirmée
4. Les frais judiciaires de recours sont arrêtés à 400 fr., mis à la charge du recourant, qui succombe, et compensés avec l'avance de frais fournie, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 95 ss, 106 al. 1 et 111 al. 1 CPC; art. 19 al. 1 LaCC; art. 67A et 67B RTFMC).
Il n'est pas alloué de dépens.
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La Chambre de surveillance :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé le 10 juillet 2025 par A______ contre l'ordonnance DTAE/5420/2025 rendue le 26 mars 2025 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/24718/2021.
Au fond :
Le rejette.
Déboute A______ de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.
Dit qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.
Siégeant :
Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Paola CAMPOMAGNANI et Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame
Jessica QUINODOZ, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.