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Décisions | Chambre de surveillance

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C/14181/2024

DAS/239/2024 du 16.10.2024 sur DJP/1160/2024 ( AJP ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14181/2024 DAS/239/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 16 OCTOBRE 2024

 

Appel (C/14181/2024) formé le 25 septembre 2024 par Madame A______ et Monsieur B______, domiciliés ______ (Genève).

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 16 octobre 2024 à :

- Madame A______
Monsieur B
______
______, ______.

- Madame C______
______, ______.

- Monsieur D______
c/o La Paroisse de E______
______, ______.

- JUSTICE DE PAIX.


EN FAIT

A.           a) F______, né le ______ 1955 à G______ (Vaud), originaire de H______ (Fribourg), célibataire, sans enfant, est décédé le ______ juin 2024 à Genève.

b) Ses héritiers légaux sont son demi-frère, I______, et son neveu, J______.

c) Par requête du 19 juillet 2024, A______ et B______ ont sollicité de la Justice de paix l’enregistrement, au titre de testament oral, d’une lettre manuscrite intitulée "Dernières volontés et testament oral du père F______", signée, datée du même jour et rédigée à K______ (Espagne).

A teneur de ce document, A______ et B______ avaient reçu les dernières volontés de feu F______ à leur domicile le 1er juin 2024. Il en ressort que le prénommé souhaitait attribuer 50% de sa fortune et de ses biens à C______, née le ______ 1963, et la somme de 50'000 fr. au père D______, né le ______ 1975.

Les époux A______/B______ informaient en outre la Justice de paix qu'ils seraient de retour en Suisse après le 27 août 2024.

d) Par courriers adressés les 29 juillet 2024, respectivement 5 août 2024 à la Justice de paix, J______, respectivement I______ ont déclaré répudier la succession de feu F______.

e) Lors de l'audience qui s'est tenue le 4 septembre 2024 devant la Justice de paix, A______, présidente de la paroisse dans laquelle officiait feu F______, a confirmé la teneur de la lettre du 19 juillet 2024. Elle a précisé que son époux et elle-même étaient partis en Espagne le 30 juin 2024, après l'enterrement de feu F______. Elle n'avait pas immédiatement retranscrit ses dernières volontés car elle ne pensait pas "qu'il y aurait une suite". Ce n'était que lorsqu'elle avait reçu l'appel téléphonique d'une personne se présentant comme un neveu de feu F______, laquelle l'avait interrogée sur l'existence de dispositions testamentaires, qu'elle avait rédigé le courrier du 19 juillet 2024 et l'avait adressé à la Justice de paix.

Egalement entendu, B______ a confirmé les propos de son épouse.

B.            Par décision DJP/1160/2024 du 16 septembre 2024, la Justice de paix a dit que le document dressé le 19 juillet 2024 par A______ et B______ dans la succession de F______, décédé le ______ juin 2024 à Genève, ne constituait pas un testament oral (ch. 1 du dispositif), rejeté, en tant que de besoin, la requête de A______ et B______ (ch. 2) et mis les frais exposés par le greffe et un émolument de 250 fr. à la charge de la succession (ch. 3).

En substance, la Justice de paix a considéré que le devoir de célérité dans la transcription et la transmission du document manuscrit dont l'enregistrement au titre de testament oral était requis n'avait pas été respecté. En effet, cet acte n'avait été rédigé que plusieurs semaines après que les dernières volontés avaient été reçues, et transmis ensuite par voie postale à l'autorité. Le testament oral n’ayant, pour ce motif déjà, pas été valablement établi, il ne pouvait être ni reçu, ni ouvert.

C.           a) Par acte du 25 septembre 2024 expédié à la Cour de justice (ci-après: la Cour), A______ et B______ ont formé appel de cette décision, qu’ils ont reçue le 21 septembre 2024. Ils ont conclu principalement à son annulation et, cela fait, à ce qu’il soit dit que le document dressé par leurs soins le 19 juillet 2024 constitue un testament oral valable dans la succession de feu F______, qui déploie tous ses effets.

A l'appui de leur appel, ils exposent préalablement n'avoir aucun intérêt matériel dans l'affaire en cause, leur démarche étant strictement motivée par leur volonté de veiller à ce que les derniers souhaits du défunt soient entendues et respectées.

Ils allèguent ensuite qu'il existait en l'espèce des circonstances particulières justifiant de déroger aux délais jurisprudentiels et doctrinaux relatifs à la transcription et à la remise de leur témoignage à l'autorité compétente, si bien que celui-ci devait être considéré comme un testament oral valable.

b) Par avis du greffe de la Cour du 8 octobre 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions finales et incidentes du juge de paix en matière successorale, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC), sont susceptibles d'un appel ou d'un recours, par une personne qui y a un intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC), à la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ), dans un délai de dix jours (art. 314 al. 1 et 321 al. 2 CPC), selon que la valeur litigieuse est ou non d'au moins 10'000 fr. (art. 306 al. 2 CPC).

En l'espèce, l'appel a été formé dans le délai de dix jours dès la notification de la décision et il est motivé, de sorte qu'il est de ce point de vue recevable. S'agissant de la valeur litigieuse, cette question peut demeurer indécise, compte tenu de la teneur des considérants qui vont suivre.

1.2.1 Conformément à l'art. 59 al. 2 let. a CPC, le justiciable qui fait valoir une prétention doit démontrer qu'il a un intérêt digne de protection à voir le juge statuer sur sa demande. L'existence d'un intérêt digne de protection est ainsi une condition de recevabilité de toute demande en justice: le demandeur doit obtenir un avantage, factuel ou juridique, du résultat de la procédure. L'absence d'un tel intérêt – qui doit être constatée d'office (art. 60 CPC) – entraîne ainsi l'irrecevabilité de la demande (ATF 140 III 159 consid. 4.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_729/2021 du 24 février 2022 consid. 3.1.2.2; 5A_282/2016 du 17 janvier 2017 consid. 3.2.1; ACJC/1158/2024 du 24 septembre 2024 consid. 4.1.1).

1.2.2 A teneur de l'art. 506 al. 1 CC, le testament oral est une forme d’acte à cause de mort extraordinaire, admissible uniquement lorsque le testateur est empêché de disposer sous une autre forme et que cet empêchement est imputable à des circonstances exceptionnelles. Le testateur déclare ses dernières volontés à deux témoins, qu’il charge d’en dresser ou faire dresser acte (al. 2). Les causes d’incapacité des témoins sont les mêmes que pour le testament public, en ce sens qu'ils ne peuvent, notamment, ni être les descendants, ascendants, frères et sœurs du testateur, leurs conjoints et le conjoint du testateur même, ni recevoir de libéralités dans le testament (art. 503 CC par renvoi de l'art. 506 al. 3 CC).

Selon l'art. 507 al. 1 CC, l’un des témoins écrit immédiatement les dernières volontés, les date en indiquant le lieu, l’année, le mois et le jour, les signe, les fait signer par l’autre témoin et tous deux remettent cet écrit sans délai entre les mains d’une autorité judiciaire, en affirmant que le testateur, qui leur a paru capable de disposer, leur a déclaré ses dernières volontés dans les circonstances particulières où ils les ont reçues.

1.3 En l'espèce, les appelants soutiennent être les témoins des dernières volontés du défunt et font grief à la Justice de paix de ne pas avoir reconnu au document qu'ils ont dressé la valeur de testament oral dans la succession de feu F______.

Or, les appelants ne peuvent déduire aucun droit propre des normes régissant la validité du testament oral (cf. art. 506 et 507 CC) et n'encourent, par définition, aucun risque de préjudice de nature économique, idéale ou matérielle résultant d'une éventuelle violation de ces normes. Ils ne peuvent ainsi obtenir aucun avantage, factuel ou juridique, du résultat de la procédure, ce qu'ils reconnaissent parfaitement puisqu'ils déclarent n'avoir aucun intérêt matériel dans cette affaire et n'être mus que par un sentiment d'injustice. Leur appréciation personnelle de la cause ne saurait toutefois constituer un intérêt digne de protection au sens de la loi.

Ainsi, faute de disposer d'un intérêt propre à la procédure, leur appel doit être déclaré irrecevable.

2. Les frais de la procédure, arrêtés à 500 fr. (art. 26 et 35 RTFMC), seront mis à la charge des appelants et compensés avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Déclare irrecevable l’appel formé le 25 septembre 2024 par A______ et B______ contre la décision
DJP/1160/2024 rendue le 16 septembre 2024 par la Justice de paix dans la cause C/14181/2024.

Arrête les frais d’appel à 500 fr., les met à la charge de A______ et B______ et les compense avec l’avance de frais de même montant effectuée, laquelle reste acquise à l’Etat de Genève.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Stéphanie MUSY, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités en application de l'art. 98 LTF.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.