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Décisions | Chambre de surveillance

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C/16084/2021

DAS/194/2024 du 09.09.2024 sur DTAE/2863/2024 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16084/2021-CS DAS/194/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 9 SEPTEMBRE 2024

 

Recours (C/16084/2021-CS) formé en date du 3 juin 2024 par Madame A______, Monsieur B______ et Madame C______, domiciliés ______, FRANCE, tous trois représentés par Me Michel Z. CABAJ, avocat.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 11 septembre 2024 à :

- Madame A______
Madame C______
Monsieur B______
c/o Me Michel Z. CABAJ, avocat.
Cours des Bastions 4, CP 445, 1211 Genève 12.

- Monsieur D______
c/o Me Romain CANONICA, avocat.
Rue Pierre-Fatio 15, CP, 1211 Genève 3.

- Madame E______
Madame F
______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Route des Jeunes 1E, case postale 75,1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A. a) L'enfant G______ est né le ______ 2021 à Genève de la relation hors mariage entretenue par A______ et D______, tous deux ressortissants français.

b) D______ a reconnu G______ le 6 juillet 2021. Les parents ont alors convenu de l'attribution de l'autorité parentale conjointe sur l'enfant.

c) En 2021, A______ a déposé deux plaintes pénales contre D______ pour des faits allégués de violence sur elle-même et sur l'enfant. Une ordonnance de classement partiel (s'agissant des infractions de violation du devoir d'assistance et de lésions corporelles simples aggravées) ainsi qu'une ordonnance pénale condamnant D______ pour lésions corporelles simples à une peine pécuniaire de 30 jours-amende avec sursis, pour avoir saisi avec force le bras de A______ et lui avoir ainsi causé un hématome, ont été rendues le 24 février 2024. D______ a fait opposition contre cette dernière.

Le premier dépôt de plainte a également conduit au prononcé de mesures d'éloignement administratives à l'encontre de D______.

d) Par acte déposé le 8 septembre 2021, G______, représenté par sa mère, a saisi le Tribunal de première instance d'une action alimentaire et en fixation des relations personnelles à l'encontre de D______, assortie d'une requête de mesures provisionnelles.

e) Par décision DTAE/7693/2021 du 28 décembre 2021, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) a réservé au père un droit de visite devant s'exercer à raison d'au moins une heure par semaine dans un lieu protégé et instauré une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles en faveur de l'enfant.

f) Par ordonnance rendue sur mesures provisionnelles le 7 mars 2022, le Tribunal de première instance a donné acte à la mère de son engagement à amener l'enfant chez H______ [centre de consultations parentales] pour que le père puisse y exercer son droit de visite et a donné acte à D______ de son engagement à verser une contribution à l'entretien de G______ de 900 fr. par mois.

g) En raison du refus catégorique de la mère de passer en modalité "accueil", le Tribunal de protection, statuant sur mesures provisionnelles le 30 mars 2022 (DTAE/2051/2022), a autorisé la poursuite du droit de visite en modalité "un pour un" pendant trois mois, puis en modalité "accueil".

h) Par ordonnance rendue sur mesures provisionnelles le 23 juin 2022, le Tribunal de première instance a maintenu l'attribution de la garde à la mère, réservé au père un droit de visite à raison d'un après-midi par semaine au Point Rencontre, en modalité "Passages", ordonné la mise en place d'une mesure "APE-AEMO Petite enfance" et donné à nouveau acte à D______ de son engagement financier tel qu'indiqué ci-avant.

Remise en cause par le mineur s'agissant des droits parentaux, cette ordonnance a été confirmée par la Cour civile de la Cour de justice par arrêt ACJC/1365/2022 du 18 octobre 2022.

i) A______ n'ayant pas présenté l'enfant selon les termes statués, le Tribunal de première instance lui a, par ordonnance rendue le 30 juin 2022, ordonné de respecter l'ordonnance du 23 juin 2022 sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP.

j) Selon un rapport d'expertise du Centre universitaire romand de médecine légale (ci-après : CURML) du 22 décembre 2022 sollicité par le Tribunal de première instance, D______ ne présente pas de diagnostic psychiatrique, alors que A______ présente un trouble de la personnalité dépendante, pour lequel un suivi psychothérapeutique individuel est préconisé, ainsi que la mise en place d'une guidance parentale afin que la mère puisse travailler sur les représentations négatives qu'elle a du père, sur la façon d'en protéger son fils et sur la gestion de son anxiété concernant les relations personnelles entre G______ et son père.

k) Par ordonnance rendue sur mesures provisionnelles le 16 juin 2023, le Tribunal de première instance a notamment maintenu l'attribution de la garde du mineur à A______, réservé un droit aux relations personnelles progressif à D______ et ordonné à A______ de se conformer à l'ordonnance en remettant le mineur au père selon les modalités fixées. Il a notamment estimé qu'il se justifiait de régler de manière urgente les relations personnelles entre le mineur et D______, ce dernier étant quasiment privé de tout contact avec son fils depuis la séparation des parties, étant relevé qu'aucun des griefs élevés par A______ à l'encontre de D______ n'avait été objectivé.

l) En date du 6 septembre 2023, D______ a déposé plainte à l'encontre de A______ pour enlèvement de mineur (art. 220 CP) et insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 CP), la précitée ne lui ayant pas remis l'enfant selon les modalités prévues dans la décision provisionnelle du 16 juin 2023.

m) Par ordonnance rendue sur mesures superprovisionnelles du 3 septembre 2023, le Tribunal de première instance a ordonné, sous la menace de l'art. 292 CP, à A______ de présenter l'enfant G______ à son père afin que celui-ci puisse exercer son droit de visite.

n) Par courrier du 29 septembre 2023, A______ a indiqué au Tribunal de première instance qu'elle avait définitivement quitté la Suisse pour s'établir en France, avec le mineur.

o) Par ordonnance rendue sur mesures superprovisionnelles le 3 octobre 2023, le Tribunal de première instance a, notamment, avec effet immédiat, retiré à la mère l'autorité parentale, la garde et le droit de déterminer le lieu de résidence de G______, attribué la garde exclusive de l'enfant au père, réservé à la mère un droit de visite devant s'exercer à raison d'une fois par semaine au Point Rencontre selon les modalités "un pour un" et supprimé la contribution mensuelle d'entretien de 900 fr. due par le père.

p) Par courrier du 24 octobre 2023, le Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi) a indiqué au Tribunal de protection que les autorités françaises avaient remis le mineur au père trois jours plus tôt, étant précisé que l'interpellation de la mère, qui avait eu lieu au domicile des grands-parents maternels à I______ [France], s'était avérée compliquée et violente.

Il était en outre relaté que la police française avait fait état d'un très haut risque de récidive d'enlèvement au vu des menaces proférées tant par la mère que par les grands-parents maternels, la grand-mère maternelle ayant contacté la grand-mère paternelle pour l'avertir qu'ils "retrouveraient" le mineur et qu'ils le "ramèneraient".

Dans ces circonstances, les intervenants du SPMi se disaient inquiets quant à la sécurité de G______ et préconisaient que des mesures d'éloignement soient ordonnées.

q)
q.a) Par décision sur mesures superprovisionnelles du 24 octobre 2023, faisant siens les motifs exposés dans le préavis du SPMi adressé le même jour, le Tribunal de protection a fait interdiction à A______ de contacter ou d'approcher le mineur, son domicile, ou encore la crèche, dans un périmètre de 300 mètres, hormis pendant l'exercice de son droit de visite au sein du Point rencontre, sous la menace de la peine de l'art. 292 CP, et fait interdiction à C______ et B______, grands-parents maternels, de contacter ou d'approcher le mineur, son domicile, ou encore sa crèche, dans un périmètre de 300 mètres.

q.b) Dans ses observations du 10 novembre 2023 sur la décision superprovisionnelle du 24 octobre 2023, D______ a adhéré aux préconisations du SPMi.

q.c) Dans ses déterminations du 14 novembre 2023, A______ s'est opposée à la décision précitée.

q.d) D______ a répliqué. Il a notamment produit le procès-verbal d'audition de A______ du 20 octobre 2023 par-devant le Commissariat de Police Central de I______ dont il ressort que celle-ci accuse D______ de divers actes de maltraitance envers G______ et évoque un "risque mortel" ainsi qu'un "risque pédophile".

r) Par arrêt du 13 décembre 2023, la Chambre civile de la Cour de justice a annulé l'ordonnance provisionnelle du Tribunal de première instance du 16 juin 2023 et, statuant à nouveau, notamment attribué la garde du mineur au père et réservé à la mère un droit aux relations personnelles avec l'enfant identique à celui prévu par l'ordonnance provisionnelle du 3 octobre 2023.

A l'appui de sa décision, la Chambre civile de la Cour de justice s'est notamment appuyée sur un rapport d'évaluation sociale sur faits nouveaux du Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP) du 2 novembre 2023, dont il ressort que la mère est dans l'incapacité de placer les besoins du mineur avant les siens, d'agir dans l'intérêt de l'enfant et de le protéger de ses angoisses.

s) Par jugement du 8 février 2024, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures provisionnelles, a notamment confirmé l'ordonnance superprovisionnelle du 3 octobre 2023. Statuant en procédure simplifiée, il a notamment condamné A______ au paiement d'une contribution d'entretien de 900 fr. par mois et l'a exhortée à entreprendre un travail thérapeutique individuel et une guidance parentale.

t) A teneur d'un rapport périodique du SPMi du 5 mars 2024 pour la période du 28 décembre 2021 au 28 décembre 2023, A______ n'a jamais pris contact avec ce service, bien que sollicitée par courrier. Elle avait résilié son adresse email et rompu tout lien, ne laissant aucun moyen de communiquer avec elle. Depuis le retour de l'enfant en Suisse, aucune rencontre mère-fils n'avait été possible en l'absence de demande de la mère.

Il ressort également de ce rapport que G______ se développe bien depuis qu'il vit avec son père, lequel s'est toujours montré investi et adéquat dans la prise en charge de son fils.

B. Par ordonnance DTAE/2863/2024 du 15 avril 2024, le Tribunal de protection, soit pour lui un juge unique, a fait interdiction à A______ de contacter ou d'approcher le mineur, son domicile, ou encore la crèche, dans un périmètre de 300 mètres, hormis pendant l'exercice de son droit de visite au sein du Point rencontre, ce sous menace de la peine de l'art. 292 CP (ch. 1 du dispositif), fait interdiction à C______ et B______ de contacter ou d'approcher le mineur, son domicile, ou encore sa crèche, dans un périmètre de 300 mètres (ch. 2) et laissé les frais à la charge de l’Etat (ch. 3).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que la réglementation des droits parentaux sur le mineur faisait l'objet d'une procédure actuellement pendante par-devant le Tribunal de première instance, de sorte que cette autorité était en principe compétente pour prendre des mesures de protection de l'enfant; néanmoins le Tribunal de protection conservait une compétence résiduelle dont il ferait présentement usage dans l'intérêt du mineur. Il relevait les inquiétudes engendrées par l'attitude de la mère, qui refusait obstinément de laisser le mineur entretenir des relations personnelles avec son père, en dépit d'une décision de justice réservant un droit de visite progressif à ce dernier. Au mois d'octobre 2023, la situation avait pris une tournure particulièrement inquiétante et susceptible de porter une atteinte irrémédiable au bien de l'enfant, et de rendre inopérante toute décision de justice attribuant par hypothèse la garde du mineur au père, lorsque la mère avait décidé, de manière unilatérale et avec l'aide de ses parents, d'emmener le mineur hors de Suisse. Selon des éléments dont le Tribunal de protection avait eu connaissance postérieurement à sa décision superprovisionnelle du 24 octobre 2023, la mère se trouvait en effet dans l'incapacité de placer les besoins du mineur avant les siens, d'agir dans l'intérêt de l'enfant et de le protéger de ses angoisses, et ses propres parents adhéraient totalement à sa perception erronée de la situation. Dans ce contexte, de manière à éviter tout nouveau déplacement du mineur en France, il convenait de maintenir les interdictions faites à la mère et aux grands-parents, ressortant de l'ordonnance superprovisionnelle du 24 octobre 2023.

C. a) Par acte du 3 juin 2024, A______, C______ et B______ ont formé recours contre l'ordonnance du 15 avril 2024, reçue le 3 mai 2024, dont ils ont sollicité l'annulation.

Préalablement, ils ont requis l'octroi d'un délai au 3 juillet 2024 pour compléter leur écriture de recours.

Ils ont produit des pièces nouvelles, soit une attestation de travail au nom de A______ du 29 mai 2024 émanant d'une société basée à Monaco, une attestation de suivi psychologique du 12 avril 2024 au sein d'un service d'aide aux victimes en faveur de la prénommée, ainsi qu'une déclaration du 29 mai 2024 signée par A______ selon laquelle elle s'engageait, en cas d'attribution de la garde en sa faveur, à respecter le droit de visite du père et, subsidiairement, à respecter son propre droit de visite.

b) Dans sa réponse du 3 juillet 2024, D______ a conclu au rejet du recours et à la confirmation de l'ordonnance entreprise.

Il a produit des pièces nouvelles, dont notamment des avis d'audience des 3 et 4 juillet 2024 par-devant le Ministère public dans la procédure d'opposition à l'ordonnance pénale du 24 février 2024, respectivement dans la procédure pénale initiée par sa plainte du 6 septembre 2023.

c) Le Tribunal de protection n’a pas souhaité faire usage des facultés prévues à l’art. 450d CC.

d) Les parties ont été informées le 6 août 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l’autorité de protection peuvent faire l’objet d’un recours devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC; art. 53 al. 1 LaCC). Ont qualité pour recourir, les personnes parties à la procédure, les proches de la personne concernée, ainsi que les personnes ayant un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 450 al. 2 ch. 1 à 3 CC). Le recours, interjeté par écrit, doit être dûment motivé (art. 450 al. 3 CC). Le délai de recours est de trente jours à compter de la notification de la décision (art. 450b al. 1 CC).

1.1.2 Interjeté par la mère et les grands-parents du mineur, lesquels font l’objet de la mesure d'éloignement contestée, dans le délai utile et selon la forme prescrite, le recours est recevable.

1.2 La Chambre de surveillance dispose d’un plein pouvoir de cognition. Elle n’est pas liée par les conclusions des parties et applique le droit d’office (art. 446 al. 3 et 4 CC).

1.3 Les pièces nouvellement déposées devant la Chambre de céans par les parties sont recevables dans la mesure où l'art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l'exclusion du CPC (art. 450 f CC cum art. 31 al. 1 let. c et let. d a contrario LaCC), ne prévoit aucune restriction en cette matière.

2. A titre préalable, les recourants sollicitent l'octroi d'un délai (au 3 juillet 2024) pour compléter leur recours.

Le délai pour recourir ne pouvant être prolongé, aucun délai supplémentaire ne saurait être accordé aux recourants pour compléter leur recours. Cette requête, à supposer qu'elle ait encore un objet, ne peut ainsi qu'être rejetée.

3. Rappelant la condition de l'urgence ressortant de l'art. 315a al. 3 ch. 2 CC, les recourants exposent ne pas comprendre pour quelle raison le Tribunal de protection a décidé d'une mesure d'éloignement alors que "la question a déjà été réglée par le juge compétent au fond", et qu'aucun fait nouveau n'est survenu dans l'intervalle.

Les recourants contestent par ailleurs la compétence d'un juge unique du Tribunal de protection pour rendre la décision attaquée, affirmant que ce tribunal aurait dû statuer dans sa composition collégiale.

3.1 En premier lieu, il s'agit d'examiner la compétence du Tribunal de protection pour rendre l'ordonnance du 15 avril 2024.

3.1.1 Depuis le 1er janvier 2017, lorsque l’entretien d’un enfant de parents non mariés est litigieux, le juge compétent pour statuer sur la demande d’aliments se prononce également (par attraction de compétence) sur l’autorité parentale et les autres points concernant le sort des enfants (art. 298b al. 3 2ème phr. et art. 298d al. 3 CC). Dans un tel cas, il paraît opportun, dans le silence de la loi (le législateur n’a pas envisagé cette problématique) d’appliquer les art. 315a et 315b CC par analogie (Meier-Stettler, Droit de la filiation, 6ème éd., n. 1780).

Le juge chargé de régler les relations des père et mère avec l’enfant selon les dispositions régissant le divorce ou la protection de l’union conjugale prend également les mesures nécessaires à la protection de ce dernier et charge l’autorité de protection de l’enfant de leur exécution (art. 315a al. 1 CC). L’autorité de protection de l’enfant demeure toutefois compétente pour poursuivre une procédure de protection de l’enfant introduite avant la procédure judiciaire et prendre les mesures immédiatement nécessaires à la protection de l’enfant lorsqu’il est probable que le juge ne pourra pas les prendre à temps (art. 315a al. 3 ch. 1 et 2 CC).

Pour des raisons d’économie de procédure, il y a lieu de déroger à la règle de l’attraction lorsque le dossier est en état d’être jugé par l’autorité de protection (Colombini, note, JdT 2017 III p. 23).

Le Tribunal fédéral a en outre retenu que l’autorité de protection est, de manière générale, et tout particulièrement en ce qui concerne les parents non mariés, compétente pour régler les questions relatives aux enfants, respectivement les mesures de protection de l’enfance, aussi longtemps qu’aucun tribunal n’a traité de ces questions, notamment dans le cadre d’une procédure de divorce ou de mesures protectrices de l’union conjugale (ATF 145 III 436 ; résumé in Foutoulakis/Macheret/Paquier, La procédure en droit de la famille – 10ème Symposium en droit de la famille 2019, 2020, p. 254).

Dans l’arrêt susmentionné, le Tribunal fédéral a précisé que la perte de compétence de l’autorité de protection au profit du juge n’était à tout le moins pas évidente, ou difficilement reconnaissable, de sorte qu’une décision rendue en violation de cette norme ne devait être déclarée nulle et non avenue qu’à titre exceptionnel. Elle pouvait toutefois en principe être contestée, mais le recourant n’ayant pris, dans le cas d’espèce, aucune conclusion en annulation et n’ayant pas motivé cette question, le Tribunal fédéral s’était abstenu d’examiner l’annulabilité de la décision. De plus, comme les parties avaient procédé sans réserve devant l’autorité de protection, une annulation n’entrait pas en considération (ATF 145 III 436, résumé in Foutoulakis/Macheret/Paquier, La procédure en droit de la famille – 10ème Symposium en droit de la famille 2019, 2020, p. 254).

3.1.2 En l'espèce, depuis 2021, le Tribunal de première instance et le Tribunal de protection ont successivement rendu plusieurs décisions traitant des questions relatives à l'enfant G______.

En particulier, lorsque la recourante a quitté la Suisse avec son fils, le Tribunal de première instance a, par mesures superprovisionnelles du 3 octobre 2023, statué sur les droits parentaux et l'entretien de l'enfant. Il a rendu un jugement sur mesures provisionnelles et sur le fond sur les mêmes questions le 8 février 2024, exhortant pour le surplus la recourante à entreprendre une guidance parentale et un travail thérapeutique individuel.

De son côté, au retour de l'enfant en Suisse, le Tribunal de protection, saisi d'un préavis du SPMi, a ordonné, à titre superprovisionnel, des mesures d'éloignement à l'encontre des recourants le 24 octobre 2023, afin de prévenir un nouvel enlèvement.

Compte tenu de l'urgence, le Tribunal de protection était compétent pour prononcer les mesures de protection nécessaires, sans avoir entendu au préalable les parties. Conformément à l’art. 445 al. 2 CC, il appartenait ensuite au Tribunal de protection de leur donner la possibilité de prendre position et de rendre une nouvelle décision, ce qu’il a fait le 15 avril 2024. Dans cette mesure, le Tribunal de protection était compétent pour poursuivre la procédure de protection initiée le 24 octobre 2024 et ainsi rendre l'ordonnance du 15 avril 2024.

Au demeurant, il ressort du dossier de la présente procédure que les parties ont procédé sans réserve devant le Tribunal de protection, de sorte qu’une annulation de la décision n’est pas envisageable. La décision ayant été rendue par une juridiction qui a plénitude de compétence dans le domaine de la protection, elle ne peut, de même, être déclarée nulle pour ce motif, au vu de la jurisprudence du Tribunal fédéral susmentionnée.

3.2 En second lieu, il convient de déterminer si la décision attaquée pouvait être rendue par un juge unique.

3.2.1 L'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger l'enfant si son développement est menacé et que les père et mère n'y remédient pas d'eux-mêmes ou sont hors d'état de le faire (art. 307 al. 1 CC). Selon l’art. 307 al. 3 CC, l’autorité de protection peut rappeler les père et mère à leurs devoirs, donner des indications ou instructions relatives aux soins, à l’éducation et à la formation de l’enfant (…). A ce double titre, la formulation de la loi est ouverte et les mesures sont citées de façon non exhaustive (Meier,
CR-CC I, n. 9 ad art. 307 CC).  

Les instructions, au sens de cette disposition, peuvent également être adressées à des tiers, le cas échéant sous la menace des peines de l’art. 292 CP, par exemple pour qu’ils cessent tout contact avec l’enfant lorsque ces contacts ou le milieu dans lequel ils évoluent sont gravement perturbateurs pour l’enfant (Meier, op.cit., n. 16 ad art. 307 CC).

L’art. 28b CC ne s’applique normalement pas lorsqu’il s’agit de protéger l’enfant par une interdiction de contact avec un parent ou un tiers : les art. 307 ss CC l’emportent sur cette réglementation (Meier, op.cit., Intro aux art. 307 à 315 b CC, n. 11)

3.2.2. Selon l'art. 440 CC, l'autorité de protection de l'adulte est une autorité interdisciplinaire (al. 1, 1re phrase), désignée par les cantons (al. 1, 2e phrase). Elle prend ses décisions en siégeant à trois membres au moins (al. 2, 1re phrase), les cantons pouvant toutefois prévoir des exceptions pour des affaires déterminées (al. 2, 2e phrase). En vertu de l'art. 440 al. 3 CC, l'autorité de protection de l'adulte fait également office d'autorité de protection de l'enfant. Dans la mesure où il ne définit pas, ni même ne circonscrit, la notion d'" affaires déterminées ", l'art. 440 al. 2 CC, pris au sens littéral, laisse la liberté aux cantons de définir quelles peuvent être les affaires échappant à l'obligation de composition collégiale de l'autorité décisionnelle (ATF 148 I 251 consid. 3.6.1).

A teneur de l'art. 7 al. 1 du Règlement du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, le Tribunal de protection siège collégialement à huis clos, sauf dans les cas prévus à l'art. 5 al. 1 à 3 LaCC et d'autres lois fédérales en matière civiles.

Dans les situations pouvant concerner des adultes ou des enfants, le juge du Tribunal de protection est compétent pour prononcer des mesures provisionnelles ou superprovisionnelles (art. 5 al. 1 let. m LaCC).

L'art. 5 al. 3 LaCC mentionne encore plusieurs cas concernant les enfants, dans lesquels le juge du Tribunal de protection, par opposition au Tribunal de protection dans sa composition collégiale, est compétent pour statuer seul (cf. DAS/9/2020 du 23 janvier 2020 consid. 1.1.2). En particulier, à teneur de l'art. 5 al. 3 let. j LaCC, le juge est compétent pour "rappeler les père et mère, les parents nourriciers ou l’enfant à leurs devoirs et leur donner des instructions, désigner une personne ou un office qualifié qui aura un droit de regard et d’information (art. 307, al. 3, CC)."

3.2.3 En l'absence de toute mention de mesures provisionnelles dans le dispositif et dès lors qu'elle indique un délai de recours de 30 jours conformément à l'art. 450b al. 1 CC, la décision attaquée, qui prévoit le maintien des interdictions émises à titre superprovisionnel, a été rendue sur le fond.

En l'espèce, l'instruction qui est faite à la mère et aux grands-parents de ne pas contacter l'enfant ni de l'approcher et de respecter un périmètre de 300 mètres autour de son domicile et sa crèche, est fondée sur l'art. 307 al. 1 et 3 CC, comme cela ressort du reste de la décision entreprise. Quoi qu'en disent les recourants, cette mesure n'est pas comparable à un retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et au placement de celui-ci. Attendu que l'art. 5 al. 3 let. j LaCC prévoit la compétence du juge, par opposition au Tribunal de protection statuant en autorité collégiale, pour, notamment, donner des instructions au sens de l'art. 307 al. 3 CC, la décision entreprise pouvait être valablement rendue par un juge unique, étant encore rappelé que la liste des mesures énoncées à l'art 307 al. 3 CC n'est qu'exemplative.

Le grief d'incompétence soulevé par les recourants sera par conséquent rejeté.

4. 4.1 Les recourants soutiennent que l'interdiction de contacter et de s'approcher du mineur, de sa crèche ou de son domicile à moins de 300 mètres, sous menace de la peine prévue à l'art. 292 CP en ce qui concerne la mère, viole le principe de proportionnalité. Ils exposent, d'une part, que la décision attaquée ne se fonde sur aucun élément additionnel, par rapport à l'état de fait retenu dans le jugement du Tribunal de première instance du 8 février 2024, permettant de justifier la mesure d'éloignement prononcée. Ils soutiennent, d'autre part, qu'il s'agit d'une mesure extrêmement incisive, tant pour la mère et les grands-parents que pour l'enfant lui-même, lequel est ainsi contraint de grandir loin de l'amour indispensable de sa mère. De surcroît, la mesure ordonnée ne présente aucune utilité, dès lors que le mineur est en permanence sous la responsabilité d'adultes et qu'un déplacement illicite en France organisé par la mère est à ce jour totalement exclu. D'ailleurs, "compte tenu du comportement notoirement violent de Monsieur D______", les recourants craignent pour leur sécurité s'ils se rendent à Genève.

4.2 Pour qu'une mesure au sens de l'art. 307 CC soit ordonnée, il faut que le développement de l’enfant soit menacé, que les parents n’y remédient pas d’eux-mêmes ou soient hors d’état de le faire et que cette menace ne puisse être écartée par des mesures plus limitées (arrêt du Tribunal fédéral 5A_65/2017 du 24 mai 2017 consid. 3.2). La mesure ordonnée doit en outre respecter le principe de proportionnalité. Ce principe est en effet la pierre angulaire du système de protection civile de l’enfant, la mesure ordonnée devant notamment être apte à atteindre le but de protection visé et nécessaire à cette fin (principe de proportionnalité au sens étroit; arrêt du Tribunal fédéral 5A_840/2010 du 31 mai 2011 consid. 3.1.2 et la doctrine citée). L’autorité qui ordonne une mesure de protection de l’enfant dispose à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation (art. 4 CC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_656/2020 du 13 janvier 2011 consid. 3).

4.3 En l'espèce, il sied tout d'abord de relever que la mesure d'éloignement entreprise est sans incidence sur les droits parentaux et ne fait nullement obstacle aux relations personnelles entre la recourante et son fils telles que fixées par le Tribunal de première instance, puisque le Tribunal de protection a prévu une exception afin de permettre l'exercice du droit de visite de la recourante au sein du Point rencontre. Or, depuis la remise de l'enfant à son père par la police française le 21 octobre dernier, la recourante n'a jamais exercé son droit de visite, le rapport du SPMi précisant qu'elle n'a pas répondu à ses sollicitations et rompu tout lien avec le service. Dans ce contexte, elle est malvenue de prétendre que la mesure d'éloignement entreprise aurait pour conséquence de la priver de tout contact avec son enfant alors que c'est elle qui renonce à exercer son droit aux relations personnelles, sans fournir la moindre explication à ce sujet.

Par ailleurs, en se limitant à alléguer que le risque d'enlèvement est à ce jour exclu, les recourants méconnaissent que la police française a fait état, en octobre 2023, d'un très haut risque de récidive d'enlèvement au vu des menaces proférées par les intéressés, et que la mère a démontré, à plusieurs reprises, le peu de respect qu'elle accordait aux décisions judiciaires relatives à G______. Le fait que le mineur soit âgé de 3 ans et, de ce fait, constamment sous la surveillance d'un adulte, ne rend pas non plus un enlèvement absolument impossible.

Enfin, il importe peu qu'aucun "fait nouveau" ne soit survenu depuis le jugement du Tribunal de première instance du 8 février 2024, dès lors que, comme on l'a vu (cf. consid. 3.1.2 supra), cette autorité a essentiellement statué sur les droits parentaux et l'entretien de l'enfant, tandis que le Tribunal de protection a poursuivi la procédure de protection mise en œuvre lors du retour de l'enfant en Suisse en octobre 2023 en maintenant les mesures d'éloignement.

La question se pose néanmoins de savoir si les mesures d'éloignement sont encore nécessaires à ce jour, en ce sens qu'une mise en danger du bien de l'enfant demeure d'actualité. A cet égard, on observe tout d'abord que la recourante s'est établie dans le Sud de la France, où elle a trouvé un emploi, de sorte qu'elle ne semble pas envisager de revenir vivre en Suisse. De plus, la situation hautement conflictuelle entre les parents ne s'est absolument pas améliorée, les procédures pénales opposant les parties étant du reste toujours pendantes devant l'autorité pénale. Dans la présente procédure, les recourants affirment encore craindre les violences du père, démontrant ainsi leur incapacité à évoluer quant à leur représentation de celui-ci, en particulier dans la relation, jugée tout à fait adéquate, qu'il entretient avec son fils. Par ailleurs, il sied de garder à l'esprit le contenu du rapport du SEASP du 2 novembre 2023 à teneur duquel la mère apparait dans l'incapacité de placer les besoins du mineur avant les siens, d'agir dans l'intérêt de l'enfant et de le protéger de ses angoisses. Enfin, si elle s'oppose à la mesure d'éloignement prononcée à son encontre, la recourante renonce cependant à exercer le droit de visite surveillé qui lui a été accordé par le Tribunal de première instance et refuse toute collaboration avec le SPMi. Dans ces circonstances, ses intentions vis-à-vis de son enfant sont difficiles à anticiper et la situation, peu claire, n'est pas rassurante. Partant, les interdictions prononcées par le Tribunal de protection conservent leur portée, également dans la mesure où elles permettent d'éviter que le bon développement de l'enfant ne soit compromis par une visite inopinée de sa mère ou de ses grands-parents, hors d'un cadre adapté et sécurisant.

Enfin, le fait que ces mesures ne soient pas limitées dans le temps ne doit pas empêcher l'autorité compétente de les lever dès qu'elles n'apparaissent plus nécessaires, de sorte que le principe de proportionnalité n'est pas davantage violé sous cet angle.

Le recours sera donc rejeté et le dispositif de l'ordonnance sera confirmé.

5. La décision prononcée s'inscrivant dans une procédure de protection de l'enfant, le recours est gratuit (art. 81 al. 1 LaCC). Il n'y a pas lieu à allocation de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 3 juin 2024 par A______, B______ et C______ contre l’ordonnance DTAE/2863/2024 rendue le 15 avril 2024 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/16084/2021.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais:

Dit que la procédure est gratuite.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE et Stéphanie MUSY, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.