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Décisions | Chambre de surveillance

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C/19206/2022

DAS/126/2024 du 30.05.2024 sur DTAE/1501/2024 ( PAE ) , REJETE

Normes : CC.390
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19206/2022-CS DAS/126/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 30 MAI 2024

 

Recours (C/19206/2022-CS) formé en date du 28 mars 2024 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève).

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 5 juin 2024 à :

- Monsieur A______
______, ______.

- Madame B______
Madame C
______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. a) A______, né le ______ 1991, célibataire et sans enfants, vit seul à son domicile à Genève.

b) Selon un rapport d'expertise psychiatrique dressé le 20 octobre 2023, A______ souffre d'une schizophrénie, en état de décompensation en cours de rémission sous traitement au moment de l'expertise, l'expertisé étant alors hospitalisé.

c) Il a fait l'objet de quatre hospitalisations en milieu psychiatrique depuis 2021, à la suite, notamment, de décisions de placement à des fins d'assistance rendues les 1er octobre 2022, 13 octobre 2023 et 20 décembre 2024.

B. a) Par requête du 8 novembre 2023 adressée au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection), A______ a sollicité la mise en place d'une mesure de curatelle en sa faveur, expliquant avoir des difficultés à être régulier dans ses démarches administratives et manquer les rendez-vous fixés, ce qui l'empêchait de recevoir ses prestations financières de l'Hospice Général. Son père l'aidait beaucoup sur le plan administratif et financier mais se sentait épuisé par la situation.

b) Par certificat médical du 8 novembre 2023, le Dr D______, médecin chef de clinique, a appuyé la demande de curatelle de A______. Il a exposé que le prénommé était hospitalisé à la Clinique [psychiatrique] de E______ depuis le 13 octobre 2023 en raison d'une décompensation sévère de sa schizophrénie paranoïde. Au vu de son atteinte psychique, il n'était pas capable de sauvegarder ses intérêts et de gérer ses affaires administratives de manière autonome.

c) La personne concernée a fait l'objet de quatre actes de défaut de biens à hauteur de 10'356 fr. selon un extrait du registre des poursuites du 2 janvier 2024 et a été taxée d'office pour l'année 2022.

Par ailleurs, A______ a soumis, le 14 novembre 2023, une demande auprès de l'assurance-invalidité (AI), laquelle est en cours d'instruction.

d) Par pli du 26 janvier 2024, l'Hospice général a exposé que la collaboration avec A______ était compliquée dans la mesure où celui-ci ne se présentait généralement pas aux rendez-vous périodiques. Le père de A______ informait l'Hospice général lorsque son fils était hospitalisé et transmettait les factures à traiter, dont celles relatives au loyer, afin que la situation ne se péjore pas. L'Hospice général a exprimé son inquiétude au regard des informations fournies par le père, car A______ ne fermait pas la porte de chez lui et ne semblait pas pouvoir gérer son argent. L'Hospice général a encore indiqué faire preuve de souplesse pour délivrer néanmoins les prestations sociales, en attendant une décision de curatelle éventuelle.

e) Dans un certificat médical du 8 février 2024, le Dr D______ a exposé que A______, qui souffrait de schizophrénie paranoïde ainsi que d'une dépendance au cannabis, avait fait l'objet de plusieurs hospitalisations en milieu psychiatrique suivies de ruptures du suivi ambulatoire. Son père avait signalé l'état insalubre de son appartement et son hygiène personnelle était partiellement conservée. Les troubles constatés étant chroniques, l'évolution de son état psychique dépendrait de son engagement dans le suivi psychiatrique et psychothérapeutique ambulatoire et de l'observance du traitement médicamenteux (antipsychotique et anxiolytique).

C. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 8 janvier 2024.

A______ a déclaré qu'il avait formé sa demande de curatelle alors qu'il se trouvait à la Clinique de E______ et n'était "pas très conscient". Depuis sa sortie de l'hôpital, il se sentait parfaitement apte à assumer ses obligations, de sorte qu'une mesure de curatelle n'était pas nécessaire. Il payait ses factures et son appartement était rangé, précisant toutefois qu'il entendait diminuer progressivement son traitement en vue de son arrêt, car il n'en avait pas besoin.

Le Dr D______ a confirmé que si l'état de son patient s'était stabilisé, il existait un risque de rechute au vu de la maladie dont il souffrait et que son autonomie était très compromise. Un accompagnement avait été mis en place auprès du CAPPI F______ et son père était présent à ses côtés. Durant l'hospitalisation, il prenait son traitement de manière régulière mais lorsqu'il était décompensé, il n'avait pas la capacité de discernement et n'était pas en mesure de prendre des décisions conformes à ses intérêts. Il n'était actuellement pas preneur d'un traitement dépôt mais avait donné son accord à une telle mesure s'il devait être réhospitalisé.

Au terme de l’audience, la cause a été mise à délibérer.

D. Par ordonnance DTAE/1501/2024 du 8 février 2024, le Tribunal de protection a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______ (ch. 1 du dispositif), désigné B______ et C______, respectivement intervenante en protection de l’adulte et cheffe de secteur auprès du Service de protection de l'adulte (SPAd), aux fonctions de curatrices (ch. 2), leur a confié les tâches suivantes: représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques, gérer les revenus et biens de la personne concernée et administrer ses affaires courantes, veiller au bien-être social de la personne concernée et la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre, veiller à l’état de santé de la personne concernée, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical (ch. 3), autorisé les curatrices à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée, dans les limites du mandat et avec la faculté de la faire réexpédier à l'adresse de leur choix, et, si nécessaire, à pénétrer dans le logement de la personne concernée (ch. 4) et laissé les frais judiciaires à la charge de l'Etat.

Le Tribunal de protection a retenu que A______ souffrait d'une schizophrénie paranoïde ainsi que d'une dépendance au cannabis, troubles qui avaient entraîné plusieurs hospitalisations en milieu psychiatrique et empêchaient A______ de sauvegarder ses intérêts dans tous les domaines comme en attestait son absence de collaboration, entraînant la suspension de ses revenus ainsi que différentes poursuites, son hospitalisation sous contrainte et l'état d'insalubrité de son logement. Si la personne concernée avait pu sortir de l'hôpital et regagner son domicile moyennant un accompagnement médical et la présence de son père à ses côtés, le Tribunal de protection relevait qu'au vu de la fragilité de son état, ayant nécessité des hospitalisations successives, il existait un risque de rechute manifeste, à l'instar de sa situation à la fin de l'année 2023. Par conséquent, afin de stabiliser la situation, tant médicale qu'administrative, du concerné, une demande de prestations de l'assurance-invalidité étant en cours, il se justifiait d'instaurer une curatelle de représentation et de gestion étendue à l'assistance personnelle ainsi qu'à la représentation thérapeutique.

E. a) Le 28 mars 2024, A______ a formé recours contre cette ordonnance, reçue le 8 mars 2024, concluant à son annulation.

A______ a indiqué que lorsqu'il avait requis l'instauration d'une curatelle, il se trouvait à la Clinique de E______ et traversait une mauvaise période. Depuis, il prenait les médicaments prescrits avec une dose plus légère, il se sentait beaucoup mieux et apte à prendre des décisions par lui-même. Il avait également renoncé à "envoyer les papiers de l'AI" car il se sentait capable de reprendre une activité professionnelle. Il s'était d'ailleurs inscrit dans une agence de placement afin de trouver du travail. Il avait également accepté un traitement dépôt en cas de nouvelle hospitalisation. Il avait ainsi compris ses erreurs et souhaitait se prouver à lui-même qu'il était capable de mener une vie saine et stable pour ne plus avoir à retourner à la Clinique de E______ et s'occuper lui-même de son administration et de la gestion de ses finances.

b) Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de l’ordonnance attaquée.

c) Par avis du 23 mai 2024, le greffe de la Chambre de surveillance a informé le recourant de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours (art. 450 al. 1 CC) dans les trente jours à compter de leur notification (art. 450b al. 1 CC), auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 53 al. 1 LaCC).

Formé par la personne concernée par la décision attaquée, dans le délai utile et selon la forme prescrite, le recours est recevable.

1.2 La Chambre de céans établit les faits d'office, applique le droit d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

2.             2.1 Les mesures prises par l'autorité de protection de l'adulte garantissent l'assistance et la protection de la personne qui a besoin d'aide (art. 388 al. 1 CC). Elles préservent et favorisent autant que possible leur autonomie (art. 388 al. 2 CC).

L'autorité de protection de l'adulte ordonne une mesure lorsque l'appui fourni à la personne ayant besoin d'aide par les membres de sa famille, par d'autres proches ou par les services privés ou publics ne suffit pas ou semble a priori insuffisant (art. 389 al. 1 ch. 1 CC).

Une mesure de protection de l'adulte n'est ordonnée par l'autorité que si elle est nécessaire et appropriée (art. 389 al. 2 CC).

Selon l'art. 390 CC, l'autorité de protection de l'adulte institue une curatelle, notamment lorsqu'une personne majeure est partiellement ou totalement empêchée d'assurer elle-même la sauvegarde de ses intérêts en raison d'une déficience mentale, de troubles psychiques ou d'un autre état de faiblesse qui affecte sa condition personnelle (ch. 1).

2.2 En l’espèce, il ressort des indications fournies par le médecin du recourant que celui-ci souffre de troubles psychiques chroniques entravant son autonomie. De plus, selon les explications de l'Hospice général, qui ne sont pas contredites, le défaut de collaboration du recourant met en péril le versement des prestations de l'Hospice général, cette institution ayant déclaré devoir faire preuve de souplesse dans l'attente d'une curatelle éventuelle. Par ailleurs, le recourant a renoncé à répondre aux sollicitations de l'AI l'exhortant à fournir les documents permettant de statuer sur sa demande d'invalidité. Il affirme avoir l'intention de trouver du travail, sans toutefois faire valoir des perspectives concrètes à cet égard. Dans cette mesure, il apparait que le recourant n'est pas capable de veiller à la préservation de ses intérêts. Pour le reste, lorsque le recourant a requis l'instauration de la curatelle, il a indiqué que son père, qui l'aidait beaucoup, était épuisé par la situation. Il ne revient pas sur cette allégation et ne soutient pas, en particulier, que ce dernier peut lui fournir toute l'assistance dont il a besoin.

Les hospitalisations du recourant se sont succédées depuis 2021, notamment en raison de ruptures de traitement. Son acceptation d'un traitement dépôt en cas de nouvelle hospitalisation ne permet pas d'éviter une rechute, mais uniquement de mieux gérer une situation de crise. Selon les déclarations du médecin qui ne sont contredites par aucun élément objectif, l'évolution de son état psychique dépend de son engagement dans le suivi psychiatrique et psychothérapeutique ambulatoire et de l'observance du traitement médicamenteux. Or, le recourant a déclaré devant le Tribunal de protection qu'il entendait réduire progressivement le traitement médicamenteux jusqu'à son arrêt complet, estimant qu'il n'en a pas besoin. Dans son recours, il annonce avoir d'ores et déjà réduit la dose prescrite. Il déclare se sentir beaucoup mieux, mais ne fournit aucun élément utile démontrant qu'il gérerait désormais correctement ses affaires. Partant, l'appréciation du Tribunal de protection, qui a considéré qu'il existait un risque de rechute manifeste au regard de la fragilité de son état, ne peut être que partagée.

Par conséquent, au regard des faits établis, les seules déclarations d'intention du recourant, qui ne reposent sur aucun élément concret, ne permettent pas de retenir l’absence de nécessité d’une mesure de protection.

Dès lors, la mesure de curatelle prononcée doit être confirmée.

3.             Les frais de la procédure, arrêtés à 400 fr., seront mis à la charge du recourant, qui succombe. Ils seront compensés avec l’avance de frais en 400 fr., qui reste acquise à l’Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 28 mars 2024 par A______ contre l'ordonnance DTAE/1501/2024 du 8 février 2024 rendue par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/19206/2022.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais de la procédure de recours à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l’avance de frais versée, qui reste acquise à l’Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Stéphanie MUSY, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.