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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/1967/2023

ACJC/897/2025 du 01.07.2025 sur JTPH/117/2024 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1967/2023 ACJC/897/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MARDI 1ER JUILLET 2025

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [VD], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 6 mai 2024 (JTPH/117/2024), représentée par Me Zoé SEILER, avocate, Renold & Associé.e.s, boulevard des Philosophes 15, 1205 Genève,

et

B______, sise c/o C______, ______ [GE], intimée, représentée par Me Frédéric SERRA, avocat, HOUSE ATTORNEYS SA, route de Frontenex 41A, case postale 6111, 1211 Genève 6, et

Madame D______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par Me Frédéric SERRA, avocat, HOUSE ATTORNEYS SA, route de Frontenex 41A, case postale 6111, 1211 Genève 6.


EN FAIT

A. a. B______ est une association inscrite au registre du commerce du canton de Genève depuis le ______ 2019 et ayant son siège c/o C______, chemin 1______ no. ______, [code postal] AM_____ [GE]. Son but est d'explorer les régions nomades entre image et représentation. L'association ne dispose pas de locaux propres.

C______ en est le président, avec signature individuelle. Du ______ avril 2019 au 19 octobre 2022, E______ en était la vice-présidente et D______ la directrice, toutes deux disposant d'une signature individuelle. Les pouvoirs de E______ ont été radiés le 19 octobre 2021 et D______ est devenue membre du comité et vice-présidente, en conservant sa signature individuelle jusqu'au 24 octobre 2023, date à laquelle ses pouvoirs ont été radiés et où elle n'a plus été membre du comité.

D______ est metteure en scène. Elle est la fondatrice de B______.

b. A______ participe depuis plusieurs années à des productions théâtrales en tant que comédienne, accessoiriste, maquilleuse et constructrice de décors.

c. Le spectacle "______" (ci-après : le projet) est une adaptation multimédia d'une série réalisée par F______ en 1972.

D______ est intervenue en qualité de directrice artistique pour la réalisation de ce projet.

A______ a été active sur le projet en tant que comédienne, maquilleuse, costumière et couturière. Elle a contribué à rechercher et fournir les costumes, accessoires et le mobilier. Elle a concouru à la construction des décors, à peindre les fresques et les locaux, à la recherche des sponsors et à la fourniture de la nourriture pendant les répétitions et les représentations.

Elle a notamment transmis des coordonnées de sponsors potentiels à D______, qui était, depuis peu, revenue en Suisse après avoir vécu aux Etats-Unis.

d. B______, représentée par A______, a effectué diverses démarches en vue d'obtenir des subventions pour la réalisation de ce projet.

e. Une première demande de subvention a été effectuée par B______, représentée par D______, le 13 mars 2020 auprès de la Fondation G______/H______.

f. Le 17 mars 2020, la G______/H______ a requis, afin de compléter le dossier de subvention, une copie des contrats signés avec les différents participants au projet.

g. Par courriel du 19 mars 2020, D______ a informé les participants de ce qu'elle leur enverrait un contrat qui devait lui être retourné signé, ceci pour les demandes de fonds qui avaient été effectuées, la H______ lui demandant une copie de ces contrats dans les prochaines semaines.

h. Le 24 mars 2020, A______ et B______, représentée par D______ en tant que directrice artistique, ont signé un "contrat d'engagement". Il y était précisé que A______ était engagée en qualité de comédienne afin de collaborer au spectacle multimédia "______". Le contrat était conclu pour la période allant du
1er juillet 2020 au 31 octobre 2020, comprenant les répétitions et les représentations. Il prévoyait un salaire brut de 6'000 fr. ainsi qu'une indemnité de vacances à hauteur de 8.33%, soit 500 fr., pour un total de 6'500 fr. brut. Une fois les charges sociales déduites (AVS, AI, LAA, LPP, ainsi que l'assurance maternité), le salaire net s'élevait à 5'604 fr. Le contrat comportait la signature de D______, adossée aux côtés de la mention de l'association B______, ainsi que celle de A______. Le contrat précisait qu'aucun salaire ne serait versé en cas d'annulation, et qu'il était conclu sous réserve de l'obtention des fonds nécessaires.

i. Divers courriels ont été échangés entre les participants au projet à la suite du courriel que leur avait adressé D______ le 19 mars 2020.

Le 20 mars 2020, un participant prénommé I______ a envoyé le courriel suivant à l'ensemble des participants :

"Je ne suis pas juriste et je ne sais pas dans quelles mesures ces contrats pourraient être libellés et/ou rétro-datés étant donné que toutes et tous ont déjà effectués (dans une importante ou moindre mesure) des tâches pour [n]otre commun projet. Certes, nous étions toutes et tous d'accord sur le fait que nous ne serions pas rémunérés, mais l'auréole symboliquement offerte pourrait se transformer en [c]ouronne scintillante de diamants fédéraux […]

Toujours est-il qu'il y a sans doute certaines opportunités (aides) pour les artistes et/ou technicien/nes

Pourrions-nous avoir une discussion (online) commune "chapeautée" éventuellement par un/e conseiller/e juridique ? […]".

En réponse à ce courriel, D______ a envoyé ce qui suit : "[…] Je vous écris à propos du message étrange et très dérangeant que I______ […] s'est permis d'envoyer tout à l'heure. Je ne sais même pas vraiment comment adresser ces mots qui n'ont rien à voir avec le don, la foi, et la générosité lumineuse qui sont le fondement même de ce projet. Je suis tellement reconnaissante de la confiance que tous vous m'avez faite et je voulais vous dire que j'ai toujours travaillé dans la conscience de l'autre et de ce que vous, en tant qu'autres pouvez apporter de beauté et d'invention. Cela ne se mesure ni en contrats, ni en présence de juristes et d'avocats, mais c'est quelque chose qui est ailleurs, hors de prix, hors de toute limite, hors de toute règle. Là commence toute création, toute folie. Tout rêve et toute révolte. C'est dans cet esprit que j'ai toujours créé et avancé sur la route qui est la mienne et je pense aussi celle sur laquelle tous nous avançons dans notre désir de partage, de découverte, d'exploration des mondes nouveaux […]".

Par courriel du même jour, A______ a demandé à ce que D______ transmette à l'ensemble des participants un message qu'elle avait envoyé à "I______".

D______ a envoyé, en faisant usage de son adresse électronique, mais au nom de A______, le message suivant : "Salut I______, je ne comprends pas très bien ton intervention au nom de notre metteur en scène et au nom du fric que tu pourrais empocher en plus ! La manne dont tu parles n'existe pas et il n'est pas besoin d'être juriste que pour obtenir de l'argent il faut des contrats nominatifs et si on arrive à obtenir de l'argent l'argent sera distribué à part égale après avoir payé les bases pour que le spectacle commence (se face) le travail que j'ai effectué depuis une année pour mois n'était que plaisir et même si je ne gagne rien ceci peut importe le fait d'avoir eu la chance de faire un projet qui n'a jamais été fait cela est aussi important que travailler avec J______ ou Autre personne hyper talentueuse avec qui j'ai travaillé ! Je suis en confiance et avec D______ et avec les personnes qui sont engagées avec amour dans ce projet ! Je trouve que l'on a pas besoin d'un juriste et trouve ton attitude désolante et peu prolifiques ! […]".

A______ a déclaré en audience que D______ corrigeait ses courriels, de sorte que le texte qui était envoyé ne correspondait pas nécessairement à celui qu'elle avait écrit, ce qui est contesté par D______, qui soutient avoir simplement envoyé des textes à la demande de A______.

j. Par courrier du 11 juin 2020, la G______/H______ a refusé la première demande de subvention formulée le 13 mars 2020.

k. Le 12 octobre 2020, B______, représentée par D______, a effectué une nouvelle demande de subvention auprès de la G______/H______, sollicitant l'octroi d'une subvention à hauteur de 80'000 fr. Le coût total du projet était estimé à 203'500 fr.

A l'appui de sa demande de subvention, B______ a précisé avoir reçu des soutiens de la part de la fondation K______, de la commune et du syndic de la commune de L______ ainsi que de l'association M______. Elle a toutefois précisé qu'il lui était nécessaire de trouver d'autres fonds afin que le projet puisse avoir lieu et pour permettre aux artistes de subsister.

Par courrier du 19 octobre 2020, la G______/H______ a refusé d'entrer en matière sur la demande de subvention du 12 octobre 2020, dans la mesure où il lui était impossible d'examiner deux fois durant la même année une demande de subvention relative au même projet.

l. Entretemps, par courriel du 8 octobre 2020, N______ a averti qu'il ne serait pas disponible le "31" dans la mesure où il avait, à cette date, un "job payé".

m. Le 18 janvier 2021, B______, représentée par D______, a effectué une nouvelle demande de subvention auprès du Fonds genevois O______/H______.

Par courrier du 15 février 2021, le O______/H______ a refusé la demande précitée, au motif qu'il lui était impossible d'octroyer des subventions pour des projets se déroulant en dehors du canton de Genève.

n. Le 13 avril 2021, B______, représentée par D______, a formulé une nouvelle demande de subventions, pour un montant de 100'000 fr. (pour un coût total du projet à 297'547 fr.), auprès de la G______/H______.

Sa demande de subvention faisait état d'une équipe de 30 personnes travaillant pour la réalisation du projet, dont 19 comédiens et un musicien lors des représentations. Elle a précisé avoir obtenu, en plus de la commune et du syndic de la commune de L______, de l'association M______ et des affaires culturelles du canton de Vaud, des fonds de la part des fondations K______, P______, Q______ et R______. Elle a toutefois précisé qu'il lui était nécessaire de trouver d'autres fonds afin que le projet puisse avoir lieu et avant tout de permettre aux artistes de subsister et d'être payés.

o. Un second contrat, daté du 1er mai 2021, a été signé entre B______, représentée par D______, et A______. Il comportait la signature de cette dernière ainsi que de D______ en tant que directrice artistique. Le logo de B______ figurait en bas de la dernière page du contrat. Il y était précisé que A______ était engagée en tant que comédienne et assistante à la scénographie et aux costumes pour le spectacle multimédia "______". Le contrat était conclu pour la période allant du 1er juin 2021 au 30 juin 2021, pour un salaire brut de 4'875 fr. 85, vacances comprises, soit 4'157 fr. 52 nets une fois les cotisations sociales déduites. Il précisait que A______ serait assurée contre les accidents professionnels et non professionnels ainsi qu'auprès d'une caisse de pension. Le contrat prévoyait qu'aucun salaire ne serait versé en cas d'annulation, et qu'il était conclu sous réserve de l'obtention des fonds nécessaires.

B______ et D______ allèguent que A______ avait refusé de signer le contrat précité au moment de sa transmission. Elle aurait invoqué percevoir une rente invalidité qui l'empêchait de le signer, et ceci quand bien même le contrat avait été rédigé uniquement pour formaliser un dossier de subvention auprès de la H______. Elle ne l'aurait signé qu'ultérieurement, afin de faire valoir des prétentions à l'encontre de B______ et D______. A cet égard, les précitées ont produit un tableau Excel, non daté, duquel il ressort la mention "demain" au côté du nom "A______".

En audience, A______ a expliqué être autorisée à travailler et percevoir une rente invalidité à hauteur de 10%. Elle a affirmé avoir signé les deux contrats litigieux dès leur réception.

p. Par courriel du 4 mai 2021, S______, comédien et assistant metteur en scène, a informé les participants de ce qu'il leur transmettrait de nouveaux contrats, qu'il avait mis à jour et détaillés, et qui comportaient à présent le logo officiel de B______. Il a demandé aux participants de vérifier l'exactitude des informations les concernant et de lui retourner les contrats signés, afin de pouvoir finaliser les demandes de subvention. Il a précisé que ces contrats remplaçaient les précédents contrats signés par le passé et que le montant exact des cotisations sociales était susceptible de varier en fonction des changements intervenus l'année 2021, ce dont il tiendrait les participants informés.

Le même jour, T______, comédien, a sollicité l'octroi d'un délai afin de renvoyer le contrat signé; à défaut de l'octroi d'un tel délai, il a confirmé l'exactitude des informations contenues dans le contrat et donné son accord afin qu'une "signature bateau" y soit apposée en lieu et place de la sienne.

q. Par courrier du 10 juin 2021, la G______/H______ a refusé la demande de subvention du 13 avril 2021, informant qu'elle ne soutiendrait pas cette nouvelle version du projet, pour lequel une demande de subvention avait déjà été refusée en 2020.

r. Selon un budget prévisionnel, non daté et contenu dans un dossier de présentation du projet, le total de la rémunération de ses participants s'élevait à un montant total brut de 135'972 fr. Un montant total de 53'072 fr. avait déjà été obtenu, comprenant des subventions perçues de la commune de L______ (VD) (4'000 fr.), du syndic de L______ (10'000 fr.), des Affaires culturelles du canton de Vaud (5'000 fr.), de l'association M______ (10'000 fr.), de soutien familiaux (3'072 fr.) ainsi que des fondations P______ (10'000 fr.), K______ (8'000 fr.) et Q______ (3'000 fr.). Des fonds avaient été demandés auprès de la H______, de la U______, des fondations V______, W______, X______, Y______, R______ ainsi que de Z______. Une récolte auprès d'une plateforme de financement participatif à hauteur de 2'500 fr. était en cours. La subvention la plus élevée était celle sollicitée auprès de la H______, à savoir 100'000 fr.

A______ allègue que ce budget prévisionnel constituait la preuve que B______ et D______ avaient prévu de rémunérer les différents participants.

B______ et D______ allèguent que ce budget prévisionnel avait été réalisé uniquement afin d'appuyer des demandes de subvention et reflétait les conditions financières idéales et souhaitées par l'association, mais ne garantissait aucunement que ces montants seraient obtenus et que les participants seraient indemnisés.

Devant le Tribunal, AA_____, assistant de metteur en scène et de production dans le cadre du projet, a déclaré que le budget prévisionnel représentait plutôt les conditions idéales que les besoins réels du projet, ce qui constituait une pratique courante dans ce genre de situation.

s. A______ et D______ ont enfin échangé divers SMS, non datés, dont il ressort ce qui suit :

"[A______] Ne parle pas de AB_____ demain au rendez-vous et si jamais AB_____ te demande de l'argent ? becs

[D______] Non je lui ai dit d'emblée qu'il n'y en avait pas / Mais je pense que ce sera difficile pour AB_____ de faire le spectacle vu les dates incompatibles avec son emploi du temps

[A______] Ok ! Mais je pense que sans argent elle ne le fera pas !!!"

et

"A______] : Pardon /900.-

[D______] ok et maintenant je n'ai plus d'argent… donc voilà… […]

[A______] Ma fois [sic] il reste encore la H______

[D______] et la ville je demande un entretien au responsable […]"

t. Les représentations du projet ont eu lieu au sein d'une ancienne usine désaffectée située dans la commune de L______ et se sont déroulées du 3 au
27 juin 2021, à raison de quatre représentations par semaine. Des cadreurs filmaient en direct les comédiens et les scènes étaient ensuite projetées sur un écran de cinéma créé sur les lieux. Le spectacle était joué en intégralité chaque dimanche, à savoir pendant une durée d'environ huit heures, et de manière séquencée, par épisode, du jeudi au samedi.

Une fois les représentations terminées, A______ a participé au démontage de la scène et aux rangements.

u. Le spectacle a fait l'objet d'une couverture par plusieurs médias suisses romands.

u.a Dans un entretien donné au journal "AC_____" du 7 juin 2021, AD_____, comédien, a indiqué que "les professionnels n'ont pas voulu participer au projet ! […] Beaucoup ont refusé parce qu'il n'y avait pas d'argent à se faire […]".

Le journal a précisé dans ses colonnes que "[l]es directrices artistiques D______ et A______ […] redonnent vie à une série allemande des années 1970 avec une interprétation et des technologies résolument modernes".

u.b D______ a déclaré, dans le journal "AC_____" du 18 juin 2021, que "[t]out est parti d'une rencontre hallucinante sur le parking de AE_____. J'ai acheté une lampe à cette extraordinaire plasticienne artiste de AN______ [VD] A______ […]. Je lui ai dit : j'ai un projet dans une usine vide, je ne connais personne et je n'ai pas d'argent. Et elle m'a répondu : je suis avec toi ! Sans elle, cela n'aurait pas été possible".

Dans un article concernant A______, le journal précise qu'"[à] l'ancienne usine ______, A______ n'est pas seulement la codirectrice artistique, c'est aussi la maman de la trentaine de comédiens qui participent au projet ______".

v. Par courriel du 22 juillet 2021, D______ a informé les participants que la G______/H______ avait refusé d'accorder une subvention pour le projet, ceci malgré la subvention octroyée par le canton de Vaud. Elle a précisé ce qui suit : "[…] Je ne suis donc pas en mesure de payer les salaires, car les fonds demandés à la H______ constituaient l'entièreté des montants que je voulais vous donner. C'est avec une immense tristesse que je vous écris ces mots, mais sachez que je suis en train de demander de l'aide à la Ville de Genève… des fonds ont été octroyés pour les compagnies impactées par la pandémie et je vais essayer. J'essaye également d'obtenir un rendez-vous avec AF_____ en charge du département ______, le projet s'inscrivant complètement dans son mandat. Je ne vais pas m'arrêter là, ni m'avouer vaincue, ni me décourager. Et surtout pour chacun de vous et tout ce que vous avez donné, toute cette vie lumineuse que vous avez partagée avec moi en croyant au projet, en me faisant confiance […]".

Dans la suite de son courriel, elle a fait état des diverses dettes dont elle devait encore s'acquitter, la billetterie n'ayant pas suffisamment rapporté d'argent pour qu'elle puisse les rembourser et a mentionné l'existence d'un litige concernant une problématique de droits d'auteur.

w. En novembre 2021, plusieurs participants ont échangé sur un groupe Whatsapp, exprimant leur déception de ne pas avoir été payés et, pour certains, leur volonté d'entreprendre des démarches pour l'être.

Un des participants a notamment écrit : "[…] Tu [D______] as reçu le soutien financier de 9 sponsors exploitant nos noms légaux pour les contrats signés pour la production de (______). Cet argent a été déposé auprès de B______ avec l'intention de payer les acteurs. Début 2021 tu es arrivée en répétition et tu as annoncé que tu as reçu les fonds pour payer les acteurs! Sois honnête, montre-nous les états financiers de ces comptes bancaires (mars à juillet 2021). Sois transparente, c'est tout ce que je te demande […]".

L'une des participants a informé qu'elle entamerait des poursuites à l'encontre de B______.

x. Par courrier du 7 avril 2022, A______ a mis en demeure D______ de s'acquitter, d'ici au 15 avril 2022, de la somme brute de 11'374 fr. 85 avec intérêts à 5%, correspondant au montant des salaires prévus dans ses contrats du 24 mars 2020 et du 1er mai 2021.

Par courrier du 21 avril 2022, B______ a intégralement contesté les prétentions précitées et a soutenu que A______ était intervenue à titre bénévole.

y. Dans une attestation écrite datée du 16 janvier 2023, AG_____ a indiqué avoir conseillé D______ dans ses démarches administratives, notamment concernant la rédaction des contrats. Elle a affirmé que D______ lui avait garanti que "tous serait [sic] bien sûr payé", à la fin du spectacle, voire en plusieurs tranches suivant leurs fonctions. Une fois la sélection des participants au spectacle terminée, D______ enverrait un contrat à signer à chacun d'entre eux.

Devant le Tribunal, A______ a déclaré avoir présenté AG_____ à D______ en raison de son expérience dans l'élaboration de dossiers aux fins d'obtenir des subventions.

z. Dans une attestation écrite du 15 mars 2023, AH_____, qui a participé au projet en tant que cameramen, a écrit que D______ l'avait informée, dès le départ, ne pas avoir encore de fonds pour payer les participants et qu'elle espérait les obtenir.

B. a. Par demande simplifiée motivée du 2 mai 2023, déclarée non conciliée lors de l'audience du 16 mars 2023, A______ a conclu, avec suite de frais et dépens, à ce que D______ et B______ soient conjointement et solidairement condamnées à lui verser la somme brute de 6'500 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er novembre 2020, de 4'874 fr. 85, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2021 ainsi que la somme nette de 1'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2021.

b. Dans sa réponse du 5 juillet 2023, B______ et D______ ont conclu, avec suite de frais et dépens, à l'irrecevabilité de la demande et au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

c. Le Tribunal a procédé à l'audition des parties et des témoins lors des audiences tenues les 23 janvier et 25 mars 2024.

c.a S'agissant des circonstances entourant leur engagement et la conclusion des contrats litigieux, l'audition des parties et des témoins fait ressortir ce qui suit :

A______ a déclaré qu'elle ignorait que le deuxième contrat du
1er mai 2021 remplaçait le premier du 24 mars 2020. Elle a contesté que ces contrats aient été établis dans l'unique but de satisfaire aux demandes de subventions adressées à la H______. Elle a précisé être intervenue personnellement auprès de cet organisme pour obtenir des subventions.

D______ a indiqué que les contrats précités avaient été rédigés uniquement et spécifiquement afin d'appuyer les demandes de subventions soumises à la H______.

AI_____, chanteuse et comédienne, a déclaré qu'il lui avait été précisé que le contrat qu'elle avait signé était destiné à être envoyé à la H______, à l'appui des demandes de subventions.

AA_____, assistant metteur en scène et de production, a confirmé que des contrats de travail avaient été établis dans le cadre des demandes de subventions adressées à la H______, qui les exigeait. Selon lui, A______ savait la raison pour laquelle ces contrats avaient été établis.

c.b Concernant la question de la rémunération des participants ainsi que des fonds à disposition de B______ et de D______, les parties et les témoins ont déclaré ce qui suit :

A______ a déclaré qu'au moment du démarrage du projet, elle travaillait comme costumière et habilleuse au Théâtre de AE_____ sur appel. Parallèlement, elle avait fait une formation d'animatrice socio-culturelle et elle travaillait à temps partiel au sein d'un établissement pour personnes autistes. Elle a déclaré que D______ lui avait affirmé que son père lui avait mis le montant de 30'000 fr. à disposition et que si la H______ n'accordait aucune subvention pour le projet, il payerait lui-même les comédiens. Elle aurait assisté à une discussion sur ce point entre le père de D______, cette dernière et AJ_____. Si elle persistait à réclamer une rémunération pour l'activité qu'elle avait accomplie dans le cadre du spectacle, c'est parce qu'elle était une comédienne professionnelle et qu'elle avait toujours été payée pour son activité. S'il était vrai qu'elle avait apporté son aide à D______, cela ne signifiait pas encore qu'elle allait le faire gratuitement. A la question de savoir ce qui avait été convenu au sujet de sa rémunération, elle a répondu que lors de sa rencontre avec D______, elle avait du temps libre et qu'elle pouvait travailler. Si elle avait continué à s'investir dans le projet, bien que les demandes de subventions n'aboutissaient pas, c'est parce que les participants et elle-même ne l'avaient appris qu'au dernier moment. Elle a déclaré avoir travaillé pour le compte du spectacle entre novembre 2020 et mai 2021, bien qu'il n'y ait aucun contrat de travail pour cette période. A sa connaissance, AI_____ avait tenté de se faire payer la totalité du montant prévu dans le contrat, sans succès, mais avait perçu une partie de son salaire et avait été pour le surplus défrayée pour ses frais, tout comme AD_____. Une autre participante avait aussi demandé à être payée, sans succès. Pour sa part, elle avait déjà demandé à être payée avant la fin du spectacle.

D______ a admis avoir reçu de l'aide de la part de son père, mais que celle-ci ne consistait ni dans un versement de 30'000 fr., ni dans le paiement des comédiens. Elle a contesté que A______ ait assisté à une conversation entre elle-même, son père et AJ_____. A la question de savoir si un arrangement amiable pouvait être envisagé, D______ a déclaré être au bénéfice de l'aide sociale. Si elle avait de l'argent, elle ne payerait pas uniquement A______, mais tous ceux qui ont participé au projet, ce qui avait par ailleurs été convenu dès le départ avec l'ensemble de ceux-ci. Elle n'avait fait que réaliser un rêve aux côtés de ceux qui avaient accepté de la suivre, et ce sans pouvoir garantir le moindre paiement, ce que tout le monde savait depuis le début. Elle ne contestait pas que la fille de AK_____ n'avait pas été payée. Elle a contesté que A______ ait demandé à être rémunérée en amont de la fin du spectacle. Elle a précisé que B______ était toujours active mais déficitaire, dans la mesure où elle devait encore s'acquitter de la somme de 10'000 fr. auprès de l'opérateur téléphonique Z______.

AI_____ a déclaré qu'au moment de son engagement, D______ ne lui avait pas parlé de rémunération. En revanche, lorsqu'elle avait signé le contrat, elle avait pensé qu'elle serait payée dans la mesure où il s'agissait d'un contrat et que le montant indiqué représentait plutôt un défraiement. Lors de sa signature, elle avait précisé qu'elle se trouvait déjà à la retraite et qu'elle percevait l'AVS, ce qui devait modifier le montant des retenues de ses cotisations sociales. Dans la mesure où il lui avait été mentionné que cette modification serait effectuée, il s'agissait pour elle d'un indice supplémentaire sur le fait qu'elle percevrait une rémunération. Elle avait questionné à trois reprises D______ sur la question d'une rémunération, cette dernière ayant répondu positivement à chaque reprise, sans mentionner l'octroi de subventions. A une reprise, pendant les répétitions, D______ lui avait confirmé qu'elle serait payée pour le travail effectué. Elle a précisé n'avoir jamais travaillé sans être payée, à moins de l'avoir choisi dès le départ. Il pouvait arriver que les subventions ne soient accordées qu'au dernier moment. En cas de réponses négatives, les projets ne s'effectuaient en règle générale pas. Elle ne s'était jamais trouvée dans une situation dans laquelle aucune rémunération n'était versée, ni dans un cas où aucune subvention n'était perçue. De par son expérience, elle ne pouvait s'imaginer qu'il n'y aurait aucune rémunération à l'issue du spectacle. Elle avait appris à la fin des représentations, avec les autres participants, de l'absence de subventions et du fait qu'elle ne serait pas rémunérée. Dès ce moment, elle avait entamé plusieurs démarches non judiciaires auprès de D______, qui avaient finalement abouti à un paiement de 1'000 fr. Bien que le solde figurant sur son contrat n'avait jamais été acquitté dans son intégralité, elle avait toutefois décidé de ne pas effectuer d'autres démarches en vue de son recouvrement. Chaque participant au projet avait eu des arrangements différents, certains ayant décidé d'intervenir bénévolement, d’autres pensant être payés sur la base des contrats qui avaient été signés, précisant que l'un de ses collègues bénévoles avait choisi de ne pas avoir ses déplacements payés, contrairement aux siens, qui l'étaient. Selon elle, la situation était "un peu floue" sur la question de savoir ce qu'il adviendrait des contrats des participants si aucune subvention n'était versée. Elle a déclaré ne jamais avoir parlé de la question de la rémunération avec A______ et ignoré si cette dernière sollicitait une rémunération, bien qu'elle puisse l'imaginer, au regard de l'importance du travail effectué par cette dernière.

Selon AA_____, il était évident pour lui ainsi que pour l'ensemble des participants qu'il serait difficile de trouver des fonds pour financer le projet, d'abord pour des besoins techniques, puis pour d'éventuelles rémunérations à verser aux comédiens professionnels. L'une de ses tâches consistait en la recherche de subventions. Les participants étaient tenus informés en cas de réponses négatives. Au moins l'un des participants avait décidé de quitter le projet lorsque des réponses négatives de subventions avaient commencé à être reçues. A la question de savoir si certaines personnes avaient accepté de travailler bénévolement, il a déclaré que tout le monde avait connaissance de ce qu'il n'y aurait au mieux qu'un petit défraiement. A______ était informée de la situation plus que les autres participants, dans la mesure où elle faisait partie "d'un noyau" qui s'occupait de la production. Il a confirmé que deux participants avaient été défrayés. Selon lui, il s'agissait d'argent qui avait été versé à titre "presque amical". A sa connaissance, personne n'avait demandé à être payé juste après la fin des représentations, les demandes à ce sujet étant intervenues plus tardivement. Il avait signé les contrats de travail produits à l'appui des demandes de subventions, mais n'avait pas été payé et avait même perdu de l'argent, considérant le temps consacré et les trajets effectués. A l'issue de l'audience, AA_____ a informé avoir rencontré D______ en amont de l'audience, mais précisé que leur discussion n'avait pas porté sur les questions qui allaient lui être posées.

c.c A______ a allégué qu'il existerait une identité de personnes entre D______ et B______. D______ serait, dans les faits, la seule et unique représentante de l'association et le seul organe à agir et à prendre des décisions au sein de l'association. Certains participants au projet n'avaient eu aucun contact avec B______, ne connaissant parfois même pas son existence. A l'appui de ses allégations, A______ a produit deux factures ainsi qu'un courrier octroyant une subvention à hauteur de 2'000 fr. de la part de la R______. Les trois documents précités avaient été établis à l'attention de D______, celui de la R______ ayant été envoyé à son adresse personnelle.

En audience, les témoins AI_____, AA_____, AJ_____ et AD_____ ont déclaré que lors de leur engagement par D______, ils ne connaissaient pas l'existence de B______. S______ et AL_____ avaient également été engagés par D______, et avaient appris l'existence de B______ par le biais de D______.

c.d Les témoins S______, comédien et assistant metteur en scène, AJ_____, comédien, AD_____, comédien, et AL_____, assistant socio-éducatif et comédien, ont été entendus dans le cadre de la procédure C/2______/2021-5, opposant T______, comédien pour le projet, à B______ et D______, dont les procès-verbaux relatifs à l'audition de ces témoins ont été produits et versés à la présente procédure.

S______ a déclaré que les contrats étaient destinés à la H______ afin de prouver la réalité du projet et d'appuyer la demande de subvention. Il s'agissait d'une obligation de la H______ que de fournir des contrats de travail. Il avait été en charge de faire signer aux participants les contrats et de leur expliquer que ces contrats étaient destinés à la H______ dans le but d'appuyer la demande de subvention. Une rémunération de 4'000 fr. avait été évoquée lors de son engagement. Il lui avait été très clairement indiqué, tout comme à son frère qui venait du Mexique pour participer au projet, qu'ils seraient payés. Il ne lui avait jamais été dit que le paiement d'une rémunération dépendait de l'octroi d'une subvention mais il avait conscience des problèmes financiers de la production et il se doutait que son salaire devrait être renégocié. De nombreux comédiens se posaient des questions quant au paiement d'une rémunération. Il ne savait pas s'il y avait des intervenants bénévoles. Il se souvenait d'une séance générale durant laquelle D______ avait mentionné que la réponse de la H______ était attendue. Il pensait qu'il avait été dit que cet argent allait servir à payer l'ensemble des participants. En règle générale, les subventions permettaient de financer les spectacles, et non leur recette; dès lors, s'il n'y avait pas de subventions, il n'y avait pas de spectacle. Il ignorait si d'autres comédiens avaient demandé à D______ à être payés, mais savait que certains avaient l'intention de le faire et qu'une comédienne l'avait fait. Une personne avait en tout cas été payée. Il savait que certaines personnes, au tout début du projet, avaient renoncé à participer au projet en raison de l'incertitude concernant la rémunération. Selon lui, la situation concernant le paiement était devenue claire au moment de la réception d'un courriel envoyé par D______.

AD_____ a confirmé avoir signé un contrat de travail, précisant toutefois que les contrats avaient été "faits pour être déchirés". Il avait participé à de nombreux projets du même type, dans lesquels les participants n'avaient pas été payés en raison de l'absence d'aboutissement des demandes de subventions. Il était clair pour l'ensemble des participants qu'il n'y avait pas de certitude d'obtenir une rémunération, qui dépendait de l'obtention ou non de subventions. Les participants avaient connaissance que plusieurs demandes de subventions étaient en suspens, dans la mesure où il s'agissait d'un sujet très régulièrement abordé. Certains participants avaient renoncé au projet lorsqu'ils avaient appris qu'ils ne seraient pas rémunérés. A sa connaissance, personne n'avait formulé de demande de rémunération expresse, dans la mesure où des demandes de subventions étaient toujours en suspens. Pour sa part, il n'avait pas reçu de salaire, mais ses frais d'essence avaient parfois été remboursés dès lors qu'il vivait à Paris. Il savait que certaines dépenses (essences ou courses) avaient été remboursées pour certains participants, mais il ignorait pour qui. Il n'avait pas été surpris de l'annonce de l'absence de subventions, précisant que le métier de comédien était, selon lui, un "métier à risque".

AL_____ a confirmé avoir signé un contrat, précisant qu'il était clair que ce dernier avait été établi dans le but de constituer un dossier de subvention pour la H______, et que si la subvention de la H______ n'était pas obtenue, "le contrat ne serait pas accepté". Selon lui, cet aspect était clair pour tout le monde, tout comme le manque de moyen de la production. Les participants avaient conscience qu'il n'y aurait pas forcément de rémunération. Pour lui, la situation était claire : en cas de bénéfice, il y aurait une rémunération ; à défaut, il n'y en aurait pas. Il savait que certains participants s'interrogeaient sur la question de la perception d'une rémunération mais n'avait pas connaissance de personnes ayant demandé à être rémunérées. Si des participants lui posaient la question, il répondait qu'il y avait peu de chances de percevoir de rémunération, dans la mesure où les recettes du spectacle ne couvriraient probablement pas les charges. Il ne savait pas si certains participants avaient quitté le projet en raison de l'incertitude liée à la rémunération mais avait connaissance d'un comédien qui avait renoncé au projet parce qu'il avait eu l'opportunité de jouer dans un spectacle rémunéré. D______ informait les participants de l'avancement des demandes de subventions.

AJ_____ a déclaré avoir eu un accident de la route avant le spectacle et qu'il n'avait pas participé aux représentations. Au moment de leur rencontre, D______ lui avait spontanément mentionné qu'elle n'avait pas d'argent pour payer les répétitions, mais que dès le moment où les représentations auraient lieu, elle trouverait un moyen pour payer les participants. Il a précisé qu'il n'était pas commun pour un comédien professionnel de répéter sans être rémunéré, sans savoir ce qu'il en était pour un comédien amateur. A ce propos, le projet était clairement présenté comme un spectacle professionnel; dès lors, tout le monde était considéré comme agissant à titre professionnel. Il se souvenait d'une séance au cours de laquelle D______ avait annoncé qu'elle avait reçu de l'argent, peut-être de la H______, et qu'elle pouvait garantir un mois de salaire à tous les participants. Il a précisé que le salaire minimum syndical d'un comédien professionnel était de 4'500 fr. par mois. Les participants avaient connaissance de ce que D______ effectuait des démarches pour trouver des subventions, les informant qu'elle attendait des réponses. Son comportement laissait penser qu'une partie des répétitions allaient être payées, en plus du mois de salaire garanti. Il avait connaissance qu'un comédien avait quitté le projet car il avait eu l'opportunité de jouer dans un autre spectacle. Il ne savait pas si d'autres comédiens avaient renoncé au projet vu l'incertitude de la rémunération, mais a précisé que cela était possible. Il ignorait s'il y avait eu des participants bénévoles jusqu'à la fin du projet, mais a soutenu qu'ils l'étaient tous au niveau des répétitions. Concernant le courriel – non produit dans le cadre de la présente procédure mais dont on peut présumer qu'il s'agit du courriel du 22 juillet 2021 de D______ –, il a indiqué que celui-ci avait provoqué d'importantes réactions sur le groupe Whatsapp des participants. Il avait été pour sa part très surpris de la réaction de D______, qui s'était posée en victime. Il avait dès lors eu l'impression que l'ensemble des participants s'étaient "fait avoir". A l'issue de l'audience, AJ_____ a déclaré avoir parlé de son audition avec T______

d. Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience tenue le
25 mars 2024.

C. Par jugement JTPH/117/2024 du 6 mai 2024, reçu le 7 mai 2024 par A______ et le 8 mai 2024 par B______ et D______, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par la voie de la procédure simplifiée, a débouté A______ de sa demande déposée le 2 mai 2023 à l'encontre de B______ et D______ (ch. 4 du dispositif), dit qu'il ne sera pas perçu de frais, ni alloué de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 6).

Le Tribunal a retenu que les deux contrats dont se prévalait A______ avaient été signés par B______, représentée par D______ en sa qualité de directrice. Il en était de même pour l'ensemble des demandes de subventions qui avaient toutes été déposées au nom de l'association. A______ n'avait pour sa part pas soutenu ne pas avoir eu connaissance de l'existence de B______ au moment de la signature de ses contrats. La raison sociale de l'association n'incluait pas le nom de D______, ni ne contenait une référence ou un acronyme qui permettrait de faire le rapprochement avec elle, le siège social de l'association étant en outre différent de son domicile. B______ disposait d'un site internet et d'organes, dument inscrits au registre du commerce, à savoir C______ en tant que président et E______ en tant que vice-présidente. Il n'existait ainsi pas d'apparence d'unité créée par des signes extérieurs. Partant, A______ avait échoué à lever le voile social permettant de passer outre la distinction juridique entre l'association et D______, les éléments du dossier ne permettant pas de considérer que cette dernière avait abusé de la dualité entre l'association et elle-même. Aucune des dispositions légales dont l'application pourrait être envisagée ne permettait de fonder la légitimation passive de D______.

Les parties avaient convenu de subordonner les contrats du 24 mars 2020 et du
1er mai 2021 à l'obtention de subventions nécessaires à la réalisation du projet. B______ n'avait pas ménagé ses efforts, en sollicitant a réitérées reprises le soutien financier de la H______, sans succès. Les fonds nécessaires à la réalisation du projet n'avaient pas été obtenus, de sorte que la condition suspensive des contrats litigieux ne s'était jamais réalisée et que ces derniers n'avaient jamais produit d'effets. Dans la mesure où le projet avait tout de même été mené à son terme, il convenait de déterminer si les parties avaient tacitement convenu d'un salaire, voire s'il se justifiait de faire application des contrats précités malgré l'absence de subventions. Le Tribunal a considéré que si les différents témoins s'accordaient à dire que B______ rencontrait des difficultés financières, il existait manifestement un désaccord au sujet du caractère bénévole, ou non, de leur participation. Le témoignage de AI_____ permettait toutefois de retenir que certains participants avaient accepté le caractère bénévole de leur prestation. Le Tribunal, en s'appuyant sur les témoignages de S______, AL_____, AA_____ et AI_____ et les pièces produites, a retenu que les contrats précités avaient été conclus dans l'unique but de répondre aux exigences de la H______, ce que A______ savait. Cette dernière n'était pas parvenue à démontrer que son courriel du 20 mars 2020 avait été effectivement corrigé par D______, ni n'avait expliqué la raison pour laquelle elle se serait laissé imposer un texte ne correspondant pas à ce qu'elle voulait écrire. L'absence de rémunération était corroborée par le fait qu'à tout le moins un des participants avait quitté le projet pour en rejoindre un autre qui était rémunéré. Ceci était confirmé par les propos de A______, qui avait affirmé avoir travaillé pour la période du
1er novembre 2020 au 31 mai 2021 à titre bénévole, dans la mesure où elle ne réclamait aucune rémunération pour cette période, qui n'était couverte par aucun des deux contrats. Rien n'avait été convenu au sujet de la rémunération de A______, dans la mesure où elle avait répondu au Tribunal, de manière vague et ambiguë, qu'elle avait du temps libre et qu'elle pouvait travailler lorsqu'elle avait fait la connaissance de D______. Ajouté au caractère insolite et hors du temps du projet, monté en pleine pandémie de COVID-19, et au courriel du 20 mars 2020 de A______, dans lequel elle manifestait son enthousiasme à participer – sans rien gagner – à un projet qui n'avait jamais été fait auparavant, le Tribunal a retenu qu'elle s'était engagée par intérêt pour le projet et que sa participation, à l'instar de celle des autres participants, était purement volontaire et bénévole, ce dont elle avait connaissance et qu'elle avait accepté. Elle n'était ainsi pas au bénéfice d'un contrat de travail et devait en conséquence être déboutée de ses prétentions en versement d'un salaire.

D. a. Par acte déposé au greffe le 4 juin 2024, A______ a formé appel de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation des chiffres 4 et 6 de son dispositif. Elle a conclu à ce qu'il soit dit que B______ et D______ disposent de la légitimation passive et à ce que les précitées soient conjointement et solidairement condamnées à lui verser la somme brute de 6'500 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er novembre 2020 et de 4'874 fr. 85 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2021.

b. Dans leur réponse, B______ et D______ ont conclu au rejet de l'appel formé par A______ et à la confirmation du jugement querellé.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par pli du greffe du 18 octobre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 Le jugement attaqué constitue une décision finale rendue dans une cause patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

1.2 Interjeté dans le délai et la forme prévus par la loi (art. 130, 131, 142, 143 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.3 Le litige, dont la valeur litigieuse est inférieure à 30'000 fr., est soumis à la procédure simplifiée (art. 243 al. 1 CPC) aux maximes inquisitoire (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

2. 2.1 L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir considéré que D______ ne disposait pas de la légitimation passive.

2.1.1 La qualité pour agir (légitimation active) et la qualité pour défendre (légitimation passive) appartiennent aux conditions matérielles de la prétention litigieuse. Elles se déterminent ainsi selon le droit au fond et leur défaut conduit au rejet de l'action, qui intervient indépendamment de la réalisation des éléments objectifs de la prétention litigieuse (ATF 136 III 365 consid. 2.1; 125 III 82 consid. 1a et les références citées). Cette question doit en particulier être examinée d'office et librement (ATF 136 III 365 consid. 2.1; 114 II 345 consid. 3d; ATF 108 II 216 consid. 1 et les références).

2.1.2 Selon le principe de la transparence ("Durchgriff"), on ne peut pas s'en tenir sans réserve à l'existence formelle de deux personnes juridiquement distinctes lorsque tout l'actif ou la quasi-totalité de l'actif d'une personne morale appartient soit directement, soit par personnes interposées, à une même personne, physique ou morale; malgré la dualité de personnes à la forme, il n'existe pas deux entités indépendantes, la personne morale étant un simple instrument dans la main de son auteur, qui, économiquement, ne fait qu'un avec elle. On doit admettre que, conformément à la réalité économique, il y a identité de personnes et que les rapports de droit liant l'une lient également l'autre. Ce sera le cas chaque fois que le fait d'invoquer la diversité des sujets constitue un abus de droit ou a pour effet une atteinte manifeste à des intérêts légitimes, notamment en détournant la loi, en violant un contrat ou en portant une atteinte illicite aux intérêts d'un tiers (art. 2 al. 2 CC; sur le principe de la transparence en général : ATF 144 III 541 consid. 8.3.1 et les références citées).

L'application du principe de la transparence suppose donc, tout d'abord, qu'il y ait identité des personnes, conformément à la réalité économique, ou, en tout cas, la domination économique d'un sujet de droit sur l'autre. Il faut ensuite que la dualité soit invoquée de manière abusive, c'est-à-dire pour en tirer un avantage injustifié ; tel est le cas si la dualité des sujets n'est invoquée qu'aux fins de se soustraire abusivement à l'exécution forcée (ATF 144 III 541 consid. 8.3.2 ; 132 III 489 consid. 3.2).

L'incapacité pour une personne morale de payer ses dettes ne suffit pas à elle seule pour appliquer le principe de la transparence, même à l'égard d'un actionnaire et administrateur unique (ATF 144 III 541 consid. 8.3.2 ; 108 II 213 consid. 6a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2011 du 30 novembre 2011 consid. 2.3, résumé in JdT 2012 II p. 121).

2.2 En l'espèce, le Tribunal a, à juste titre, considéré qu'il n'y avait pas lieu de passer outre la distinction juridique entre B______ et D______. B______ est en effet une association disposant d'une personnalité juridique propre et les éléments dont se prévaut l'appelante ne permettent pas de retenir qu'il y a une identité de personnes entre l'association et sa directrice. Ainsi, le fait que D______ représente l'association dans des procédures judiciaires, qu'elle soit, de fait, l'organe qui agisse et prenne des décisions pour l'association ou qu'elle soit l'interlocutrice à l'égard de tiers s'agissant de factures ou de la correspondance en lien avec les demandes de subvention, que l'association ne dispose pas de ses propres locaux ou enfin que certains autres participants au projet n'avaient pas connaissance de l'existence de l'association ne suffisent pas pour retenir que l'association et sa directrice forment une identité de personnes. Aucun élément au dossier ne permet par ailleurs de considérer que D______ abuse de son droit d'invoquer la dualité des personnalités juridiques.

Aucun élément ne permet en effet de retenir que cette dernière essayerait de se soustraire à ses obligations légales par le biais de son association, le fait qu'elle ait déclaré que l'association ne disposait pas des fonds suffisants pour permettre de payer les comédiens n'étant en particulier pas suffisant à cet égard.

C'est en conséquence à raison que le Tribunal a considéré que D______ n'avait pas abusé de la dualité juridique entre elle-même et l'association, et donc qu'elle ne possédait pas la légitimation passive.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

3. L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas avoir retenu l'existence d'un contrat de travail et d'avoir en conséquence rejeté ses prétentions en versement du salaire.

3.1.1 A teneur de l'art. 319 al. 1 CO, par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage à travailler au service de l'employeur et celui-ci s'engage à payer un salaire.

Les quatre éléments constitutifs du contrat de travail sont les suivants : a) une prestation personnelle de travail, b) la mise à disposition par le travailleur de son temps pour une durée déterminée ou indéterminée, c) un rapport de subordination, et d) un salaire (cf. Wyler/Heinzer, Droit du travail, 5ème éd. 2024, p. 17 ss; Meier, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd., 2021, n. 8 ss ad art. 319 CO).

L'obligation de payer un salaire est un élément essentiel du contrat de travail, en ce sens que si une personne promet ou accepte de fournir une activité non rémunérée, elle ne conclut pas un contrat de travail. Selon l'art. 320 al. 2 CO, un pareil contrat est certes présumé lorsque l'employeur accepte pour un temps donné l'exécution d'un travail qui, d'après les circonstances, ne doit être fourni que contre un salaire; néanmoins, les parties peuvent valablement convenir, de manière expresse ou tacite (art. 1er al. 2 CO), que l'activité est ou sera fournie gratuitement, avec cette conséquence que leur relation n'est pas soumise aux règles du contrat de travail (arrêts du Tribunal fédéral 4A_641/2012 du 6 mars 2013 consid. 2 et les références citées; 4P.194/2004 du 24 novembre 2004 consid. 2.3).

La preuve de l'existence d'un contrat de travail incombe à la partie qui s'en prévaut pour en déduire un droit (art. 8 CC; ATF 125 III 78 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_504/2015 du 28 janvier 2016 consid. 2.1.2).

3.1.2 On est en présence d'un acte simulé au sens de l'art. 18 CO lorsque les deux parties sont d'accord que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leur déclaration ne doivent pas se produire et qu'elles n'ont voulu créer que l'apparence d'un acte juridique à l'égard des tiers (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; 112 II 337 consid. 4a; 97 II 201 consid. 5 et les arrêts cités). La volonté de simuler un acte juridique est nécessairement liée à une intention de tromper (Täuschungsabsicht; arrêt du Tribunal fédéral 4A_90/2016 du 25 août 2016 consid. 3.3.2).

La volonté véritable des parties tendra soit à ne produire aucun effet juridique, soit à produire un autre effet que celui de l'acte apparent; dans ce dernier cas, les parties entendent en réalité conclure un second acte dissimulé (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; 112 II 337 consid. 4a). Juridiquement inefficace d'après la volonté réelle et commune des parties, le contrat simulé est nul (ATF 123 IV 61
consid. 5c/cc; 97 II 201 consid. 5 et les arrêts cités), tandis que le contrat dissimulé – que, le cas échéant, les parties ont réellement conclu – est valable si les dispositions légales auxquelles il est soumis quant à sa forme et à son contenu ont été observées (ATF 117 II 382 consid. 2a.; 96 II 383 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_362/2012 déjà cité, consid. 4.1 et les références).

Le point de savoir si les parties avaient la volonté (réelle) de feindre une convention revient à constater leur volonté interne au moment de la conclusion du contrat, ce qui constitue une question de fait. Des comportements postérieurs peuvent constituer des indices de la volonté réelle des parties au moment de conclure le contrat (ATF 131 III 49 consid. 4.1.1; 112 II 337 consid. 4a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_484/2018 du 10 décembre 2019 consid. 4.1; 4A_665/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1; 4A_90/2016 du 25 août 2016 consid. 3.3.2).

Il incombe à celui qui se prévaut de la simulation d'en apporter la preuve (art. 8 CC), étant précisé qu'on ne saurait admettre trop facilement que les déclarations ou attitudes des parties ne correspondent pas à leur volonté réelle; le juge doit se montrer exigeant en matière de preuve d'une simulation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_90/2016 du 25 août 2016 consid. 3.3.2).

3.1.3 Aux termes de l'art. 151 al. 1 CO, le contrat est conditionnel, lorsque l'existence de l'obligation qui en forme l'objet est subordonnée à l'arrivée d'un événement incertain. La condition est un événement futur incertain dont les parties font dépendre un effet juridique (Pichonnaz, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd. 2021, n. 11 ad art. 151 CO). La condition est dite suspensive lorsque l'existence de l'effet juridique est subordonnée à la réalisation de la condition (cf. art. 151 al. 2 CO). On parle de condition résolutoire, au sens de l'art. 154 al. 1 CO, si l’acte juridique affecté d’une condition produit tous ses effets jusqu’à l’avènement de la condition qui met fin à son efficacité (Pichonnaz, op. cit., n. 31 ad art. 151 CO).

Selon l'art. 151 al. 2 CO, le contrat soumis à une condition suspensive ne produit d'effets qu'à compter du moment où la condition s'accomplit, si les parties n'ont pas manifesté une intention contraire. La naissance d'un effet juridique est subordonnée à la réalisation de la condition. L'effet contractuel, à savoir le fait de lier les parties à leur accord, ne naît qu'au moment où s'accomplit la condition. En revanche, l'effet formateur existe dès l'accord des manifestations de volonté puisque les parties ne peuvent plus se délier durant la période de suspension de la condition, à tout le moins pour la période fixée ou raisonnable selon les circonstances. L'acte passé sous condition est en suspens ; il est imparfait (Tercier/Pichonnaz, Le droit des obligations, 6ème éd. 2019, n. 976 à 979).

La condition n'est soumise à aucune forme. Elle peut donc être expresse (p. ex. "à la condition que", "sous réserve de") ou tacite (résultant de l'interprétation du contrat, des circonstances ou du contexte). Elle peut même être conclue subséquemment à la conclusion du contrat principal (Pichonnaz, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd. 2021, n. 2 ad art. 151 CO).

Il appartient à la partie défenderesse d'établir le caractère conditionnel d'une obligation, puisque la condition fait obstacle à la naissance de la créance déduite en justice par la partie demanderesse ou entraîne son extinction (arrêt du Tribunal fédéral 4C.212/2004 du 25 octobre 2004 consid. 3.1).

3.2.1 En l'espèce, le Tribunal a retenu que l'appelante avait participé au projet de manière volontaire et bénévole et que les parties n'avaient ainsi pas conclu un contrat de travail au sens des art. 319 ss. Les parties avaient convenu de subordonner les contrats des 24 mars 2020 et 1er mai 2021 à l'obtention de subventions nécessaires à la réalisation du projet. B______ avait sollicité à réitérées reprises le soutien financier de la H______, sans succès. Les fonds nécessaires à la réalisation du projet n'avaient pas été obtenus, de sorte que la condition suspensive des contrats litigieux ne s'était jamais réalisée et que ces derniers n'avaient donc jamais produit d'effets. Dans la mesure où le projet avait tout de même été mené à son terme, il convenait de déterminer si les parties avaient tacitement convenu d'un salaire, voire s'il se justifiait de faire application des contrats précités malgré l'absence de subventions. Si les différents témoins s'accordaient à dire que B______ rencontrait des difficultés financières, il existait manifestement un désaccord au sujet du caractère bénévole, ou non, de leur participation. Se fondant sur les témoignages de S______, AL_____, AA_____ et AI_____ et sur les pièces produites, le Tribunal a retenu que les contrats précités avaient été conclus dans l'unique but de répondre aux exigences de la H______, ce que A______ savait. Cette dernière n'était pas parvenue à démontrer que son courriel du 20 mars 2020 avait été effectivement corrigé par D______, ni n'avait expliqué la raison pour laquelle elle se serait laissé imposer un texte ne correspondant pas à ce qu'elle voulait écrire. L'absence de rémunération était corroborée par le fait qu'à tout le moins un des participants avait quitté le projet pour en rejoindre un autre qui était rémunéré. Ceci était confirmé par les propos de A______, qui avait affirmé avoir travaillé pour la période du 1er novembre 2020 au 31 mai 2021 à titre bénévole, dans la mesure où elle ne réclamait aucune rémunération pour cette période, qui n'était couverte par aucun des deux contrats. Rien n'avait été convenu au sujet de la rémunération de A______, dans la mesure où elle avait répondu au Tribunal, de manière vague et ambiguë, qu'elle avait du temps libre et qu'elle pouvait travailler lorsqu'elle avait fait la connaissance de D______. Ajouté au caractère insolite et hors du temps du projet, monté en pleine pandémie de COVID-19, et au courriel du 20 mars 2020 de A______, dans lequel elle manifestait son enthousiasme à participer – sans rien gagner – à un projet qui n'avait jamais été fait auparavant, le Tribunal a retenu qu'elle s'était engagée par intérêt pour le projet et que sa participation, à l'instar de celle des autres participants, était purement volontaire et bénévole, ce dont elle avait connaissance et qu'elle avait accepté. Elle n'était ainsi pas au bénéfice d'un contrat de travail et devait en conséquence être déboutée de ses prétentions en versement d'un salaire.

3.2.2 La motivation des premiers juges est exempte de critiques et la Chambre de céans la fera sienne.

3.2.2.1 Contrairement à ce que soutient l'appelante, le Tribunal n'a pas omis de tenir compte des deux contrats écrits datés des 24 mars 2020 et 1er mai 2021, puisqu'il a, à raison, relevé que ces accords avaient été passés à la condition suspensive de l'obtention des subventions sollicitées auprès de la H______ et qu'ils n'avaient jamais déployé d'effets puisque ce soutien financier avait été refusé.

3.2.2.2 L'appelante ne saurait ensuite être suivie lorsqu'elle fait grief au Tribunal de n'avoir pas tenu compte de ce qu'elle avait exécuté sa prestation de travail en participant aux répétitions, en contribuant à la réalisation des costumes, des décors et du maquillage et en participant aux représentations du spectacle. En effet, après avoir retenu que les contrats écrits des 24 mars 2020 et 1er mai 2021 n'étaient pas entrés en vigueur, faute d'obtention des subventions, le Tribunal a, à juste titre, relevé que les parties avaient néanmoins mené le projet à terme jusqu'à la présentation du spectacle. Il a en conséquence examiné si les parties étaient tacitement convenues d'une rémunération, ce qu'il a nié en retenant, sur la base des témoignages recueillis et des messages échangés entre les différents participants au projet, que l'appelante s'était engagée par intérêt pour le projet.

3.2.2.3 L'appelante s'en prend ensuite à l'appréciation des faits effectuée par le Tribunal pour retenir qu'elle avait participé au projet en acceptant de ne pas être rémunérée pour l'activité fournie.

Il est vrai que S______, qui a précisé avoir fait venir son frère du Mexique pour participer à ce projet, et AJ_____ ont déclaré qu'il avait été convenu qu'une rémunération leur serait versée et qu'ils ne s'étaient pas engagés à titre bénévole. AG_____ a déclaré que D______ lui avait garanti que tous les participants seraient payés à la fin du spectacle, voire en plusieurs tranches, et AI_____ a indiqué n'avoir jamais travaillé sans être payée et avoir obtenu la confirmation par D______ qu'elle serait rétribuée. Ces éléments ne permettent toutefois pas de retenir que le Tribunal a erré en retenant qu'il y avait des opinions divergentes au sein des participants, puisque les enquêtes ont également fait ressortir que les témoins AD_____ et AL_____ ont déclaré qu'il était clair qu'aucune rémunération ne serait versée et que tous les participants savaient qu'ils n'avaient aucune assurance d'être rétribués, et que selon le témoin AA_____, tous les participants savaient qu'ils ne toucheraient, au mieux, qu'un défraiement. A raison, les premiers juges ont considéré que cette absence d'engagement de verser une rémunération était corroborée par le fait qu'à tout le moins un participant avait décidé de quitter ce projet pour en rejoindre un autre qui proposait une rémunération, ou encore que dans un message adressé à tous les participants, un prénommé I______ a indiqué qu'ils avaient initialement tous été d'accord qu'ils ne seraient pas rémunérés.

C'est également à raison que le Tribunal a retenu, s'agissant spécifiquement de l'appelante, que cette dernière avait accepté de participer au projet sans avoir l'assurance d'être rémunérée, puisqu'il résulte des messages qu'elle a adressés à tous les participants qu'elle considérait que le travail qu'elle avait fourni dans le cadre de ce projet n'était que plaisir, qu'il importait peu qu'elle soit rémunérée vu la chance de participer à un projet unique et de travailler avec J______. Les explications fournies par l'appelante, selon lesquelles son message ne correspondait pas à sa volonté parce qu'il avait été relu et modifié par D______, ne sont pas convaincantes et ne sont ainsi pas de nature à enlever la force probante de cette pièce.

L'appelante ne saurait par ailleurs être suivie lorsqu'elle soutient que les différentes demandes de fonds sollicitées par les intimées reflétaient leur volonté de rémunérer les participants et que ces derniers pouvaient objectivement en déduire leur volonté de payer un salaire, puisqu'il résulte des contrats signés avec les participants que le principe d'une rémunération dépendait précisément de l'obtention de ces subventions.

En définitive, au regard de l'ensemble de ces éléments, le Tribunal a correctement apprécié les faits résultant de l'instruction menée pour en déduire que l'appelante s'était engagée dans le projet par intérêt et en acceptant de participer aux répétitions, de contribuer à la réalisation des costumes, des décors et du maquillage et de participer aux représentations du spectacle sans avoir la garantie de toucher une rémunération.

3.2.2.4 L'argumentation de l'appelante fondée sur la violation par le Tribunal du principe "in dubio contra stipulatorem" n'est pas fondée, puisque le litige porte sur l'interprétation des manifestations tacites de volonté des parties en vue de qualifier la nature de leur accord, non sur l'interprétation d'une clause peu claire du contrat rédigé par l'association intimée.

3.2.2.5 L'appelante se prévaut par ailleurs de ce que B______ a informé les participants très tardivement, le 22 juillet 2021, de ce qu'ils ne percevraient pas de rémunération, alors que la dernière demande de subventions avait été refusée le 10 juin 2021, soit pendant les représentations du spectacle qui ont eu lieu du 3 au 27 juin 2021.

Le fait que l'association intimée ait attendu la fin des représentations pour avertir les participants du refus des subventions sollicitées donne en effet à penser, comme le soutient l'appelante, qu'elle a retenu cette information afin d'éviter que des participants quittent le projet et de garantir ainsi la réalisation du projet jusqu'à la fin des représentations.

Cette attitude, dont la bonne foi peut certes être mise en doute, ne saurait toutefois être considérée comme une preuve de l'engagement de verser un salaire comme le plaide l'appelante. Cette dernière ne prétend en tout état pas qu'elle aurait subi un préjudice en lien avec le retard pris par l'association intimée pour lui transmettre cette information, puisqu'elle n'expose pas qu'elle aurait manqué une occasion de percevoir une rétribution si elle en avait été informée directement.

3.2.2.6 En définitive, les griefs soulevés par l'appelante ne sont pas fondés. Le jugement querellé sera en conséquence confirmé.

4. La valeur litigieuse étant inférieure à 50'000 fr., il ne sera pas prélevé de frais judiciaires, ni alloué de dépens (art. 71 RTFMC et 22 al. 2 LaCC).

 

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PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 4 juin 2024 contre le jugement JTPH/117/2024 par A______ rendu le 6 mai 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/1967/2023.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit qu’il n’est pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens d’appel.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Monsieur Roger EMMENEGGER, Madame Fiona MAC PHAIL, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119
al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.